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Christiane Langenberger, radicale chic et lumineuse

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Mercredi, 19 Août, 2015 - 14:00

Hommage. L’ancienne conseillère aux Etats vaudoise et présidente du parti suisse, décédée ce dimanche 16 août, appartient à la génération des pionnières en politique.

Ce 19 juin 1995, la conseillère fédérale Ruth Dreifuss avait la mine réjouie et les bras grands ouverts pour l’accueillir dans les travées du Conseil national qui ne comptait alors que 36 élues. C’était il y a vingt ans, Christiane Langenberger, décédée ce dimanche 16 août, était la première radicale de son canton à faire son entrée dans l’hémicycle, après la pionnière Gertrude Montet Girard, et la septième Vaudoise seulement.

Mais en coulisses un autre Sage, comme on appelait encore les conseillers fédéraux, se réjouissait: Jean-Pascal Delamuraz avait exercé une ferme pression pour qu’un parlementaire en fin de carrière lui cède sa place. Vigneron, André Perey refusa farouchement, ce fut Olivier Chevallaz qui céda son fauteuil à la députée.

Manière de favoriser sa mise sur orbite définitive aux fédérales d’octobre suivant.

Au sujet de celle qui fut aussi municipale de son village de Romanel-sur-Morges, on souligne depuis lundi à quel point elle était élégante. C’est vrai qu’elle avait de l’allure mais, sous sa joyeuse gentillesse, elle savait être piquante, mordante.

A de jeunes femmes du PLR qui découvraient à la faveur de la non-élection de Christine Beerli au Conseil fédéral comme il était dur de percer en politique, elle lança: «Nom d’une pipe, vous avez l’air de découvrir la lune!»

La droite vaudoise mit du temps à comprendre que cette féministe, tombée dans le militantisme à Paris dans les années 70, n’était pas que cela, et surtout que son engagement pour l’égalité n’en faisait pas une affreuse gauchiste.

Christiane Langenberger, née en 1941, appartient à une génération de pionnières en politique pour lesquelles rien n’aura été facile, et qui a dû conquérir millimètre par millimètre les strates du pouvoir. Songez qu’au moment où elle arrive enfin à Berne, le Conseil d’Etat ne compte aucune femme. Le grand vieux Parti radical peinait à donner une chance à ses militantes prometteuses.

D’où le détour de pas mal d’entre elles par le terrain associatif, notamment pour Christiane Langenberger l’Association pour les droits de la femme (qu’elle présida), mais aussi Pacte, l’association des Paroles aux actes, fondée en 1987 avec la socialiste Yvette Jaggi, afin d’encourager les entreprises à incorporer des talents féminins.

Elégante toujours, mais pas du genre à laisser tomber. Elle n’avait peur de rien. C’est ainsi qu’au printemps 1998 elle se porta candidate au Conseil fédéral contre Pascal Couchepin, archifavori.

Elle le fit pour le canton de Vaud et au nom des femmes. Une manière de prendre date et de tracer le chemin pour les suivantes. Sa façon à elle d’être «chic», un adjectif qu’elle utilisait souvent pour remercier, rendre hommage.

Face aux obstacles ou aux contrariétés, elle avait coutume de redresser gentiment le menton avec un petit mouvement de tête vers le haut qui plissait son regard franc pour indiquer qu’il fallait continuer à aller de l’avant, faire un effort, ne pas se décourager.

Sur la ligne Delamuraz

Politiquement, celle qui avait été élue au Conseil des Etats royalement en 1999 au premier tour était une authentique radicale, sur la ligne Delamuraz, soucieuse de concilier développement économique et protection sociale. Une adepte des réformes, une pro-européenne aussi.

Ce profil centriste ne l’empêcha pas de devenir présidente du parti suisse de janvier 2003 à avril 2004 pour affronter la bourrasque électorale calamiteuse qui s’annonçait. C’est fou comme les partis ont le don de choisir des femmes pour les diriger quand tout va mal. Elle n’était pas dupe de cet honneur, «cadeau empoisonné».

Cette radicale lumineuse cultivait une belle indépendance d’esprit dans une époque où les consignes des groupes parlementaires n’avaient pas encore anéanti la liberté de penser par soi-même. Mais elle jouait volontiers collectif, défendant en campagne les objets de votation en utilisant un «nous» non pas de majesté mais de responsabilité. Une grande dame chic au sens enthousiasmant du terme. 

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Edi Engeler KEYSTONE
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