Dossier. Avec la chute des cours des actions, de l’immobilier et des matières premières, le moment semble idéal pour investir. D’autant plus que les comptes d’épargne et les assurances vie ne rapportent plus rien. Vraiment? Voici quelques idées pour faire fructifier son bas de laine.
Quelle chance, vous venez de toucher une assurance vie arrivée à échéance. Ou d’hériter. Ou encore de vendre une résidence secondaire. Bref, vous venez d’encaisser quelques dizaines de milliers de francs. Bien sûr, la tentation est grande de s’offrir la voiture de ses rêves, de rénover la cuisine, d’éponger de vieilles dettes, de passer une bonne soirée dans un excellent restaurant. Des envies qui ne font pas fructifier un patrimoine.
Ne pas céder à la facilité
Une certitude, il ne faudra pas laisser cette petite fortune dormir sur un compte en banque. Elle ne rapportera, au mieux, que quelques francs d’intérêts par année, lesquels seront en grande partie dévorés par les frais bancaires. Dommage pour le confort et la facilité que procure cette forme de placement, la plus simple d’accès et de gestion: une fois le compte ouvert, il n’y a pratiquement plus rien à faire.
Que penser des différentes options? Les solutions les plus évidentes – la conclusion d’assurances vie, de comptes de 3e pilier et d’achats de parts de fonds – ne sont pas forcément les meilleures. La faute à des rendements misérables induits par les taux d’intérêt au plancher. La faute, aussi, à la baisse généralisée des cours des actifs, qu’il s’agisse de l’immobilier (en Suisse romande avant tout), des actions et de la majorité des matières premières.
Dans ce contexte, pas de miracle: les fonds de placement, qui reproduisent les performances des actifs qui les constituent (actions, etc.), ne peuvent pas réaliser des performances supérieures à celles de leurs composants! A moins qu’ils ne se basent sur des stratégies différentes visant à transformer des baisses en hausses, stratégies considérablement plus risquées que celles des fonds de placement classiques.
C’est particulièrement le cas des produits structurés, vendus par de nombreuses banques. Ils intègrent systématiquement un instrument dérivé dans leur composition, dont l’effet est d’accroître les tendances (à la hausse ou à la baisse) des mouvements de marché. Si l’on place son argent dans de tels produits, mieux vaut garder un œil attentif et régulier sur ses placements. Les surprises, bonnes et mauvaises, peuvent survenir à tout moment.
Des rendements misérables
Si le choix d’un bon investissement n’a jamais été chose aisée, l’exercice s’est grandement compliqué ces dernières années avec le plongeon des rendements des placements obligataires au lendemain de la crise financière, puis avec la chute de la valeur de la grande majorité des actifs, à commencer par les actions, l’immobilier et les matières premières.
Les obligations – titres de dette plus sûrs que les actions – sont victimes de la ruée des investisseurs à la recherche de sécurité. Elles subissent l’effet des politiques monétaires des pays développés qui, cherchant à faire redémarrer l’activité économique et à recréer de l’inflation, ont amené leurs taux d’intérêt directeurs proches de zéro quand ce n’est pas nettement en dessous, comme l’a pratiqué la Banque nationale suisse.
Cette solution d’épargne est ainsi devenue extrêmement chère (car très recherchée en raison de sa sécurité supposée) et très peu rémunératrice. Avec une exception, les dettes émises par des entreprises de taille moyenne ou celles dont la santé financière suscite des questions, et qui sont contraintes d’offrir des rendements attractifs pour attirer les investisseurs. Ces placements peuvent naturellement être assez risqués.
Baisses de prix des matières premières
Les autres investissements obéissent, pour l’essentiel, à des logiques radicalement différentes. Par conséquent, les attentes de performances, de rendements et les risques le sont aussi. La plupart d’entre eux – à l’exception notoire de l’or – sont en baisse ou, au mieux, ont vu leurs cours se stabiliser durant les dernières semaines.
C’est l’or qui a ouvert la marche. Au printemps 2013, il perd son statut de valeur refuge ultime qu’il avait gagné durant la crise financière, puis celle de l’euro. D’un pic de plus de 1870 dollars l’once (28,3 grammes) à l’été 2011, il a plongé à quelque 1065 dollars l’été dernier, entraînant dans sa chute d’autres métaux précieux comme l’argent (-51%) et le cuivre (-55%).
Avec un décalage de quelques mois, les métaux industriels, le fer notamment, et les produits agricoles (blé, maïs, etc.) ont suivi la même tendance. Quelques mois encore, et les prix de l’énergie se sont affaissés à leur tour. Le pétrole a coulé de près de 75% entre le printemps 2014 et le début de cette année! Le gaz naturel a subi une évolution encore plus marquée.
Pessimisme sur les actions et l’immobilier
La déroute des prix a par la suite atteint les marchés des actions. La chute a certes été modérée aux Etats-Unis, où le Dow Jones a limité sa baisse à 12% environ depuis le printemps de l’année dernière. Elle est plus vive en Europe, où les indices se sont inclinés en moyenne de 27%. Elle est franchement préoccupante en Chine, où la déconfiture boursière a fait perdre près de 35% de valeur aux indices.
L’immobilier, enfin, est sur la pente descendante, notamment en Suisse romande, depuis 2013. Les prix des logements se sont ainsi érodés de 7,5% à Genève, de 3% en moyenne sur l’Arc lémanique et dans une ampleur moindre dans les autres régions, selon une récente étude de Credit Suisse. Toutefois, la moyenne nationale affiche encore une progression voisine de 3%. Elle est la plus faible depuis 2003, au sortir de la dernière crise, note la grande banque. Les bureaux et surfaces commerciales ont davantage baissé.
Déséquilibres extrêmes
Une légère reprise des cours des métaux, en particulier de l’or, du pétrole et des actions, est observée depuis le début de 2016. Mais les marchés restent très fortement conditionnés par les déséquilibres extrêmes dans lesquels le monde se débat depuis la crise financière. Les torrents de liquidités déversés par les banques centrales noient le système financier et faussent les indicateurs. Jusqu’à l’an dernier, ils étaient jugés comme les premiers responsables de la croissance continue des cours des actions et des valeurs immobilières dans de nombreux pays. Au point que les économistes, qui s’étonnaient de ne pas assister à une augmentation des prix à la consommation, ont qualifié ce phénomène de hausse des prix des titres et des maisons d’«inflation des actifs».
Mais la conjoncture peine toujours à se redresser. Les espoirs mis dans la reprise américaine se voient désormais contredits par le ralentissement chinois, qui multiplie les incertitudes, alimente la défiance des investisseurs et contribue à faire baisser les prix à la consommation. Et, pendant que l’économie avance au ralenti, les banques centrales, BCE au premier chef, continuent d’écouler de l’argent frais dans l’espoir de faire redémarrer la machine et de recréer de l’inflation.
Généralement, ces fortunes se retrouvent bloquées dans les banques commerciales faute de perspectives d’investissements. Ce qui incite les banques centrales à abaisser encore leurs taux d’intérêt, parfois en dessous de zéro (ils sont à -0,75 % en Suisse), dans l’espoir de les rediriger vers l’économie réelle.
Le bras de fer est engagé entre les instituts d’émission et les marchés financiers. Comme les gros investisseurs, les petits épargnants sont pris dans cette épreuve de force. S’ils ont tout à gagner d’une reprise soutenue de l’activité économique, ce n’est pas à eux d’en assumer les plus gros risques. Les pages qui suivent cartographient les placements les plus courants, mentionnant aussi bien les pires que les meilleurs. Tout en se rappelant ce vieux conseil de grand-mère: ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier!