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Nick Beglinger: «Rendre les entreprises plus compétitives»

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Mercredi, 7 Septembre, 2016 - 05:56

Interview. La Suisse se tire-t-elle une balle dans le pied en cherchant à faire mieux que les autres? Au contraire, elle stimule ses entreprises, plaide Nick Beglinger.

L’économie suisse peut-elle vraiment réduire son empreinte écologique de deux tiers en trente-quatre ans?

Il n’y a aucune preuve scientifique qu’un durcissement des conditions-cadres de l’économie pour des motifs environnementaux pourrait précipiter l’économie dans de nouvelles difficultés.

Au contraire, plusieurs études internationales, notamment celles menées par le professeur Michael Porter, de la Harvard Business School (père de l’hypothèse de Porter, qui stipule qu’une réglementation environnementale stricte apporte plus de bénéfices aux entreprises qu’elle ne leur occasionne de coûts, ndlr), le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale, montrent qu’un tel renforcement des conditions-cadres aide l’économie à se repositionner, à créer de la valeur en Suisse et à renforcer sa position au niveau international, même si les autres pays ne font rien. Il ne faut pas choisir entre la compétitivité et la protection de l’environnement. Les deux sont conciliables. Et ce n’est pas moi qui le dis, mais les patrons de Swiss Re et d’Unilever.

Le petit garage, la boulangerie de quartier, la menuiserie rurale ont-ils les moyens de s’adapter dans le délai imparti?

Ces entreprises ne seront pas abandonnées à leur sort. Elles seront toutes, collectivement, soumises aux mêmes nécessités de s’adapter. Elles ne perdront pas leur compétitivité par rapport à leurs concurrentes, mais accroîtront leur efficacité. Toutefois, celles qui, par exemple, emploient massivement des énergies fossiles, doivent admettre qu’une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de leur tête et qu’elles doivent s’adapter! Il ne s’agit pas de renoncer au confort. On n’oblige pas les gens de moins chauffer leur maison ou leur entreprise, mais de veiller à ce que la source de chaleur soit renouvelable. Une banque acceptera toujours d’accorder des crédits aux entreprises bien gérées qui veulent investir pour diminuer leurs coûts d’exploitation.

L’économie suisse fait déjà des efforts. N’est-ce pas suffisant?

Non. Les émissions de CO2, notre plus grand problème, progressent plus vite que ce qui a été convenu à la COP21 à Paris l’an dernier. Les opposants à l’initiative affirment que nous figurons déjà parmi les meilleurs du monde. Comme si l’on pouvait s’en contenter! Chacun doit réfléchir à la manière d’employer les ressources de la façon la plus intelligente possible. Nous consommons aujourd’hui l’équivalent de trois planètes. Mais qui dit que, dans trente-quatre ans, nous disposerons ne serait-ce que de deux? Si nous ne faisons rien, en une seule génération nous n’aurons plus autant de ressources par habitant qu’aujourd’hui. Notre qualité de vie en souffrira.

Les entreprises subissent déjà le franc fort, la crise européenne, la baisse de croissance ailleurs. Peut-on ajouter une contrainte supplémentaire?

Il n’y a aucune preuve d’un lien entre le fait d’appliquer des mesures environnementales et la destruction d’emplois. De plus, les coûts induits par l’initiative sur l’économie verte sont bien inférieurs à ceux induits par les incertitudes générées par l’initiative sur l’immigration de masse! Certes, l’économie suisse n’est pas sans faiblesses. Mais elle a tout à gagner à parier sur son excellente réputation de propreté et d’innovation. Le plus tôt elle s’y consacre, le plus vite elle en recueillera les bénéfices, et donc les emplois.

Puisqu’il est dans l’intérêt des entreprises d’investir rapidement dans l’économie verte, pourquoi l’Etat doit-il les y contraindre?

Parce que l’écrasante majorité des entreprises, notamment les PME, ne sont pas sensibilisées à ce virage. Elles n’ont pas le savoir-faire environnemental. Elles doivent donc être orientées, en premier lieu par le biais des coûts. Les grandes entreprises qui assurent un rôle pionnier sont les premières à demander à l’Etat la fixation de règles simples et claires afin d’orienter les acteurs de l’économie dans leur ensemble et de garantir le fonctionnement du marché, non seulement aujourd’hui, mais aussi pour la prochaine génération. 


Nick Beglinger

Directeur de la Foundation for Global Sustainability et ex-président de Swisscleantech, l’entrepreneur zurichois, formé chez McKinsey, est l’un des piliers de l’initiative en faveur de l’économie verte.

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Peter Schönenberger
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