Eclairage. Des applications aident les membres de clubs de gym à surmonter leur principal défi: ne pas abandonner.
Si l’industrie du fitness n’a pas encore changé de modèle d’affaires, toujours basé sur le principe de l’abonnement d’un an payable à l’avance, elle subit l’influence toujours plus forte du monde numérique.
«Le mode de consommation a changé, explique Jean-Pierre Sacco, patron et fondateur de la chaîne Let’s Go Fitness. Les gens viennent avec leurs propres programmes d’entraînement. Le client type établit son programme sur l’internet et suit ses progrès en direct sur une, voire plusieurs applications en même temps.» Bienvenue dans le monde du quantified self, où chaque calorie dépensée est répertoriée.
Certains de ces outils numériques visent à relever le principal défi auquel font face tous les membres de clubs de fitness: éviter d’abandonner. Ces applications se basent sur les travaux de l’économiste américain T. C. Schelling. Ses recherches sur le contrôle des armes l’avaient conduit à formuler la théorie du «préengagement», dans laquelle une partie à un conflit promet de respecter certaines conditions si les négociations avec son adversaire échouent. Aussi curieux que cela puisse paraître, ce principe s’applique parfaitement à la pratique du fitness.
L’application GymPact, par exemple, verse des primes aux utilisateurs qui respectent leurs engagements, comme pratiquer un sport ou manger des légumes. Ces montants sont versés par les utilisateurs qui échouent, et qui se sont engagés à payer une pénalité fixée d’avance.
GymPact dispose d’une base de données des centres de fitness dans le monde entier et localise le téléphone de l’utilisateur pour vérifier que celui-ci a bien respecté son «pacte». Ceux qui promettent de manger des légumes une fois par jour doivent prendre leur assiette en photo. Le système semble fonctionner: rien qu’en Suisse, les utilisateurs de l’application ont enregistré plus de 4000 pactes, et le taux de succès serait de 92%, selon le site.
Dans un autre registre, stickk.com vise à «fournir les outils nécessaires pour contrer la nature humaine». Son fonctionnement se base sur des «contrats d’engagement réciproques» et s’applique à tous les objectifs imaginables, qu’il s’agisse d’arrêter de fumer, de respecter un délai ou de se rendre régulièrement au fitness.
Cette promesse consiste par exemple à déposer une somme qui sera restituée à l’utilisateur s’il atteint son but. Dans le cas contraire, l’argent sera versé à une organisation caritative. Le site permet de désigner un ami qui sera chargé de confirmer que l’engagement a été respecté.
Stickk.com a été fondé par Dean Karlan, professeur d’économie comportementale à l’université Yale, qui s’est lui-même inspiré des travaux de T. C. Schelling. Selon Dean Karlan, le recours à la stratégie du préengagement triplerait les chances de succès, quel que soit le type d’objectif.