Eclairage. Le Ministère public genevois s’intéresse au fils du président de Guinée équatoriale, dont l’agence vesper.media a dévoilé les allées et venues ces six derniers mois grâce à un Twitter Bot.
Le ciel s’assombrit pour Teodorin Obiang. Le fils du président de Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, un des dirigeants les plus corrompus d’Afrique, a mené grand train aux Etats-Unis et en France. Bien que sous enquête pour blanchiment depuis de longues années dans ces deux pays, il se rendait jusqu’ici très régulièrement à Genève à bord de son jet privé. Cette impunité est peut-être terminée. Le Ministère public genevois vient d’ouvrir une enquête préliminaire à son encontre, comme l’a révélé le 18 octobre la Tribune de Genève.
GVA Dictator Alert
L’ouverture de cette procédure − la première lancée en Suisse contre le clan Obiang − est intervenue durant l’été, comme le confirme un porte-parole du parquet genevois. Cette enquête survient à la suite du lancement, en avril dernier, d’un logiciel capable de retracer sur Twitter les allées et venues d’avions de dictateurs à Genève.
Le projet a été lancé en avril dernier par l’agence de journalisme d’investigation vesper. media, créée par les journalistes Mehdi Atmani, Marie Maurisse et François Pilet. L’agence avait publié une première enquête sur la présence très régulière des avions du clan Obiang à Genève dans L’Hebdo en mars dernier.
Le robot Twitter GVA Dictator Alert a été conçu dans la foulée pour suivre en temps réel ces séjours, avant d’être étendu à d’autres régimes dictatoriaux. Le système utilise les données captées par un réseau d’antennes maintenues par des amateurs aux alentours de l’aéroport de Cointrin. Celles-ci enregistrent les signaux radio émis par les avions civils qui indiquent leur immatriculation et leur position.
Ces données sont analysées chaque heure par un logiciel qui détecte la présence d’appareils appartenant à des régimes dictatoriaux sur la base d’une liste établie par l’agence vesper. media. Cela à partir de registres aéronautiques. Si un avion est détecté, un message est aussitôt publié sur Twitter. La liste des pays considérés comme dictatoriaux se fonde, quant à elle, sur le Democracy Index mis à jour tous les deux ans par le magazine The Economist.
Depuis son lancement, le détecteur de dictateurs a recensé plusieurs passages d’avions appartenant au Qatar et au Kazakhstan. Mais le gagnant toutes catégories reste le clan Obiang. Les appareils utilisés par le président et ses proches y ont effectué plus de 25 séjours en six mois, bien plus que ce que ne peut justifier l’activité diplomatique de ce minuscule pays de 740 000 habitants, riche de sa rente pétrolière mais où 65% de la population vit sous le seuil de pauvreté.