Photographie. Voici l’histoire des premières images du chef-d’œuvre de Stanley Kubrick, «2001, l’odyssée de l’espace». Des photos prises dans le désert du Kalahari par un reporter de «Life».
Ce sont des photographies qui n’ont jamais été publiées comme telles. Leur histoire est étonnante. Au milieu des années 60, le photographe du magazine Life Pierre Boulat reçoit un message: «Vous avez quinze jours pour les recherches dans le Kalahari. Les films seront envoyés à Londres dans des boîtes congelées pour les tests, le format 21 x 29,7 cm.
Je vous enverrai des télex tous les jours.» Signé: Stanley Kubrick. Le réalisateur a trouvé un lieu idéal pour incarner la séquence d’ouverture de son grand œuvre à venir: 2001, l’odyssée de l’espace. Le Kalahari, en Namibie, le plus ancien désert au monde.
«Par rapport à tout ce que j’ai vu, la géologie de cet endroit est complètement différente. Elle n’est ni biblique ni grand Ouest américain. Elle est unique», explique Kubrick à ses collaborateurs.
Son idée est de tirer parti de photographies de ce paysage primordial pour ensuite les projeter en transparence sur un écran géant, dans un décor désertique reconstitué en studio.
Pierre Boulat part aussitôt à Windhoek, la capitale namibienne, puis se rend dans le désert du Kalahari avec trois assistants. Il prend pendant plusieurs semaines des centaines d’ektachromes grand format, malgré le vent de sable et une visibilité parfois difficile.
Des levers de soleil, des étendues sableuses, des roches rougeoyantes. Lors d’un trajet vers Windhoek, le photographe français a un accident de voiture. Il est blessé et ne peut achever son travail. Son contrat est rompu. Son nom ne figurera pas au générique du film.
Mais quelques-unes de ses images somptueuses seront au rendez-vous de «L’aube de l’humanité», la partie inaugurale du film, puissante évocation de la lutte des premiers humanoïdes pour leur survie. Un matin du monde bientôt ponctué par un mystérieux monolithe noir.
Ce paysage archaïque, à nul autre pareil, comme l’avait constaté Stanley Kubrick, reste l’une des attractions majeures du voyage en Namibie, fascinant pays du Sud-Ouest africain.
Il est toujours mis à contribution par les cinéastes, y compris pour incarner non le commencement de l’humanité, mais son futur postapocalyptique, dans lequel les hommes se battent de nouveau comme des bêtes pour survivre: George Miller vient d’y tourner Fury Road, nouvel opus de sa saga Mad Max.