Le fossé est marqué, parfois même béant, entre les jeunes leaders et l’ensemble des jeunes. Là où les premiers décèlent des possibilités d’abord, les seconds distinguent plutôt des risques. Ouverture au monde, adhésion à l’UE, libre circulation des personnes, notion de la souveraineté: autant de thèmes sur lesquels les opinions divergent largement. «C’est souvent une question de parcours de vie, explique Johan Rochel, vice-président du think-tank Foraus. Au cours de leur formation ou de leur activité professionnelle, les leaders ont fait des expériences à l’étranger, ce qui explique certainement leur plus grande sensibilité à l’ouverture.» Le débat sur la libre circulation des personnes est frappant à cet égard: 48% des jeunes en craignent les inconvénients (immigration incontrôlée, hausse des loyers et trains bondés), alors que 65% des leaders y voient surtout des avantages. «Mieux informés, les leaders savent distinguer le vrai du faux dans le discours politique», constate Caroline Iberg, secrétaire générale adjointe du Nouveau mouvement européen suisse (NOMES). «Les jeunes ressentent peut-être une plus grande pression sur le marché du travail mais, globalement, les salaires ont augmenté et le chômage a baissé dans les faits», ajoute Johan Rochel.
Le même fossé se constate dans l’attitude par rapport à l’Union européenne: 82% des jeunes (contre 42% chez les leaders) ne veulent pas entendre parler d’une adhésion de la Suisse, qu’ils soient de gauche ou de droite d’ailleurs. Cela ne surprend pas outre mesure Caroline Iberg. «En cette année électorale, l’UDC monopolise ce thème, tandis que tous les autres partis se taisent.» Mais, selon elle, le problème est plus profond. «A l’école obligatoire, l’histoire s’arrête à la guerre froide. L’enseignement passe dès lors sous silence la construction européenne et le grand mérite qu’elle a eu de stabiliser le continent.» Cet euroscepticisme a cependant ses limites: leaders et jeunes tombent d’accord pour reconnaître l’efficacité de la Cour européenne des droits de l’homme, des fameux «juges étrangers» honnis par l’UDC.
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