Quantcast
Channel: L'Hebdo - Cadrages
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Bilatérales: les libéraux-radicaux tirent sur le Conseil fédéral

$
0
0
Jeudi, 28 Mai, 2015 - 05:59

Décodage. Pour sauver la voie bilatérale avec l’UE, le parti de Philipp Müller tente un périlleux grand écart entre solution eurocompatible et limitation de l’immigration.

Le Parti libéral-radical (PLR), que l’on accusait de rester muet sur le dossier européen pour des raisons électoralistes, fait mentir ses détracteurs: il a accouché d’un papier de position pour esquisser une solution avec l’Union européenne.

Balayant les propositions du Conseil fédéral, il imagine une stratégie en deux phases. Dans un premier temps, la Suisse brandit le bâton envers l’UE et la menace de résilier l’accord sur la libre circulation des personnes (LCP), ce dont pourraient souffrir les 300 000 frontaliers des pays voisins.

Si cette tactique ne fonctionne pas, elle se fait plus mielleuse: le PLR suggère une application tout en souplesse de l’initiative UDC «Contre l’immigration de masse», enterrant les contingents pour les compenser par un net durcissement de la politique d’immigration.

Il faut reconnaître au PLR une certaine dose de courage en sortant de sa tanière cinq mois avant les élections fédérales. Si son plan A ne tient pas la route une seconde, son plan B a le mérite de mettre un terme à l’illusion de tous ceux qui croyaient que l’UE serait contrainte de renégocier l’accord sur la LCP avec la Suisse.

Le président du parti Philipp Müller a, semble-t-il, compris que jamais Bruxelles ne fera de concession sur ce principe identitaire de son fonctionnement. Raison pour laquelle il préfère oublier les contingents, pourtant la première revendication de l’initiative adoptée par le peuple en février 2014.

Ce côté positif de la démarche ne cache cependant pas le profond désarroi d’un parti privé de la moindre vision à moyen ou à long terme dans le dossier européen. Dans l’urgence, le PLR tente un exercice de pompier pour sauver la voie bilatérale.

Pour convaincre le citoyen qu’il prend ses inquiétudes au sérieux, il avance un catalogue de mesures visant surtout les travailleurs des pays tiers en limitant sensiblement leur droit au regroupement familial. Il complète cela notamment par des restrictions de l’accès à l’aide sociale.

Vraies questions éludées

Les vraies questions, le PLR les élude toutes. Quelle est la nature de la relation que la Suisse envisage avec l’UE? Veut-on se rapprocher politiquement aussi de notre plus grand partenaire économique ou se limiter à sauvegarder l’acquis avec ce colosse dont on préfère se méfier?

Quelle est la solution que le PLR préconise pour régler la question institutionnelle, une condition posée par Bruxelles pour maintenir la voie bilatérale?

Alors que le Conseil fédéral tente laborieusement de sortir de l’impasse actuelle sur tous ces plans, le PLR affaiblit sa position de négociation. «Il tire une balle dans le pied du gouvernement, surtout de ses deux membres PLR, Didier Burkhalter et Johann Schneider-Ammann», constate René Schwok, professeur associé au Global Studies Institute de l’Université de Genève.

«Pourquoi l’UE ferait-elle des concessions à la Suisse – en tolérant une clause de sauvegarde permettant de facto des quotas – si elle sait à l’avance que l’un des principaux partis est prêt à renoncer à ces contingents? J’ai de la peine à comprendre la tactique du PLR», ajoute-t-il.

Vide juridique

La prise de position du PLR n’est qu’un épisode de plus dans le feuilleton du sauvetage de la voie bilatérale. Mais elle est importante dans la mesure où ce parti joue un rôle charnière pour cimenter une majorité face à l’UDC eurosceptique.

Plus le temps avance, plus il faut se rendre à l’évidence. La Suisse risque le vertige d’un grand vide juridique en février 2017, soit la date à laquelle elle doit mettre en œuvre l’initiative de l’UDC.

Dans le camp d’en face, les propositions partent dans tous les sens. Le PS réclame des mesures d’accompagnement supplémentaires; le PDC s’est rallié à une clause de sauvegarde qui n’a quasiment aucune chance d’être avalisée par l’UE.

Quant au PLR, il tente un périlleux grand écart entre une solution eurocompatible et le durcissement de la politique d’immigration. Alors que les chiffres de l’im-migration continuent à croître, l’opposition à l’UDC risque là toute sa crédibilité face au citoyen. 

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Gabriele Putzu keystone
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 
Contenu récent: 
En home: 
no

Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Trending Articles