Geneviève Ruiz
Dossier. De plus en plus de parents ont besoin d’une prise en charge continue de leur enfant durant la journée. Au vu du coût du parascolaire public dans certaines communes, il peut valoir la peine d’opter pour un établissement privé.
«J’ai inscrit mon fils à l’école privée parce que ça m’arrange, et je l’assume.» Les propos de ce genre sont familiers à Pierre-Antoine Hildbrand, secrétaire général de l’Association vaudoise des écoles privées.
Il observe une évolution des motifs qui poussent les parents à inscrire leurs enfants à l’école privée: «Nous sommes loin de l’époque où nos établissements attiraient uniquement les nantis, les expatriés et les enfants à problèmes scolaires.
Une partie de la population n’a plus la même allégeance envers l’école publique et n’accepte plus qu’on lui impose une norme. Ces gens-là souhaitent décider de l’organisation de leur temps, choisir un certain modèle pédagogique pour leur enfant, ou l’endroit où il passera ses journées.»
Les raisons pour lesquelles les parents inscrivent leurs enfants dans une école privée sont de plus en plus diversifiées: une famille optera pour tel établissement parce qu’il est plus proche de son domicile que l’école publique, une autre parce que la pédagogie Montessori lui plaît. Mais un aspect met de plus en plus de monde d’accord: l’offre de prise en charge para-scolaire des écoles privées.
Frais de garde élevés
Cette prise en charge appelée journée continue, de 8 à 18 heures environ, représente un enjeu crucial pour les nombreux couples dont les deux conjoints travaillent. Et l’offre publique suisse dans ce domaine est à la traîne, même si des efforts ont été entrepris ces dernières années pour l’étoffer.
«Les études montrent que c’est surtout dans les grandes villes et leur agglomération que la prise en charge parascolaire a été mise en place, explique Simone Hebeisen, coresponsable du secrétariat scien-tifique de la Commission fédérale de coordination pour les questions familiales.
Comme ces prestations sont du ressort des communes, il existe de grandes disparités des offres et des prix, qui sont généralement fixés en fonction du revenu des parents.»
Aucune statistique n’existe à l’échelle nationale pour recenser le parascolaire, mais on constate que certaines communes ne proposent rien, tandis que d’autres garantissent une place à tous les parents qui le souhaitent. Quant aux prix, ils se situent dans une fourchette allant de 5000 à 40 000 francs par année environ pour le placement d’un enfant à plein temps.
«Les frais de garde pèsent lourd dans le budget des familles de la classe moyenne», analyse Simone Hebeisen. A Lausanne, par exemple, le seuil de revenu pour bénéficier de subventions se situe à 14 000 francs mensuels.
«L’an dernier, la commune a augmenté le tarif de la prise en charge des enfants à midi de 21 à 35 francs, raconte Florence Bettschart, conseillère communale PLR à Lausanne. C’est plutôt onéreux pour un repas et deux heures de garde collective.
De nombreux parents ont grincé des dents, d’autant que ces prix sont fixés de manière totalement obscure et peu démocratique.» Pour certains parents, il vaut alors la peine d’inscrire ses enfants dans une école privée, dont les tarifs sont compris en 15 000 et 40 000 francs annuels, frais de parascolaire compris.
«Nous observons que certaines écoles privées qui se situent dans cette zone de prix et qui suivent le plan d’études HarmoS connaissent une hausse des inscriptions pour les classes enfantines et primaires, là où les enfants ont besoin d’être accueillis après les cours, raconte Pierre-Antoine Hildbrand.
Les gens se disent que, s’ils doivent débloquer un budget de 30 000 francs annuels, autant avoir le choix de l’établissement. Et ils paient même parfois moins cher que dans un établissement public!»
De plus en plus de parents sont également sensibles à la qualité de la prise en charge en dehors des heures de cours. Une qualité qui n’est pas toujours au rendez-vous dans l’offre publique. Contrairement aux crèches, il n’existe pas de réglementation fédérale concernant le parascolaire.
«Nos recherches montrent de grandes disparités dans ce domaine, relève Simone Hebeisen, de la Commission fédérale de coordination pour les questions familiales. Certaines communes mettent en place des structures avec un projet pédagogique solide et emploient majoritairement du personnel formé, tandis que d’autres peinent à trouver des locaux adéquats.»
On rapporte des cas d’élèves parqués dans une cave pour manger, ou des mélanges d’âges trop importants sans supervision adéquate. Il arrive que les enfants soient transportés en bus jusqu’à une cantine située dans un autre village pour revenir ensuite dans leur salle de cours: un va-et-vient que les parents considèrent absurde et exténuant.
Une offre compétitive
Face à ce panorama contrasté, l’offre de certains établissements privés paraît séduisante. «A l’Institut Florimont, nous savons que, pour des raisons logistiques, de nombreux parents veulent un accueil continu de leur enfant, confie Sean Power, directeur de cet établissement genevois et président de l’Association genevoise des écoles privées.
Mais les activités extrascolaires ne signifient pas remplir le temps des élèves. Nous proposons des cours de sport, de langues, de théâtre ou encore de musique. Certains parents attachent désormais énormément d’importance à la qualité de cette prise en charge, c’est pourquoi nous l’enrichissons constamment.»
Même son de cloche du côté de Champittet, à Pully, où le nouveau directeur, Philippe de Korodi, raconte que cela fait des années que l’offre parascolaire représente un atout majeur de l’établissement: «Les activités sportives sur notre campus font partie de nos traditions.
Par exemple, après le repas de midi, les petits jusqu’à la cinquième ont le choix entre quatre activités: la gym, le judo, le dessin ou le bricolage.» Le directeur de Champittet estime pratiquer des tarifs d’écolage en relation avec la qualité de l’enseignement (environ 17 000 francs annuels pour le primaire), ainsi que des packages d’activités extrascolaires très compétitifs, qui débutent à moins de 5000 francs annuels pour le primaire, repas et activités parascolaires inclus.
Contactés par téléphone, les Départements de l’instruction publique de Genève et de Vaud affirment que les dernières statistiques indiquent un tassement de l’augmentation des effectifs du privé, toutes provenances confondues.
Ils ne s’expriment pas sur les activités parascolaires, parce que ces dernières ne sont pas de leur ressort, mais de celui des communes. Cette dispersion des responsabilités semble poser problème. Comme le soulignent plusieurs études, dans des pays comme la France ou la Suède, la garde des enfants en dehors des heures scolaires se fait sous l’égide de l’instruction publique.
Ces activités sont intégrées dans un programme pédagogique national complet, ce qui doit garantir leur qualité, de même que leur gratuité.
Sommaire :
Ecoles: le privé parfois moins cher que le public
Quelle école privée pour mon enfant?