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Société: l’e-cannabis pour fumer un joint en toute discrétion

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Jeudi, 18 Juin, 2015 - 05:55

Clément Bürge New York

Zoom. Une nouvelle génération de vaporisateurs permet d’inhaler de la marijuana. Ce qui a donné naissance à une vague de fumeurs qui s’adonnent à leur vice partout.

Pete* n’a pas le profil du fumeur de joints classique. Pas de look hippie ou rasta pour lui. Il a 36 ans, s’habille chic, travaille dans la pub à New York depuis quinze ans et habite dans le sophistiqué quartier de West Village. Il aime occasionnellement tirer sur un joint pour se détendre.

Sauf que, problème, il n’apprécie pas l’univers tabou qui entoure le cannabis. «Mes amis froncent les sourcils quand ils me voient fumer, dit le grand brun à la carrure athlétique. Du coup, cela me met mal à l’aise.»

Depuis quelques mois, Pete a trouvé une solution: il fume désormais un bâtonnet noir nommé JuJu Joint. Il s’agit d’une cigarette électronique qui contient du cannabis liquide plutôt que de la nicotine. Il n’a qu’à tirer sur le vaporisateur pour inhaler du THC.

Trois bouffées suffisent pour générer un léger effet. Cinq produisent une sensation plus forte. L’appareil dégage une très légère odeur de marijuana, quasi indécelable.

Le JuJu Joint contient 150 bouffées, soit 100 mg de THC – l’équivalent de deux joints traditionnels. On trouve différentes saveurs aux noms déjantés comme le Girl Scout Cookie, le Pitbull ou le Maui Wowie. «J’adore ce produit, raconte Pete. Je me suis débarrassé de tout mon attirail. Je peux fumer sans avoir mauvaise conscience.»

Aux Etats-Unis, l’e-joint est en plein boom. Depuis son lancement, en avril 2014, le JuJu Joint s’est déjà vendu à 75 000 exemplaires. Une augmentation rendue possible par le développement de l’e-cigarette, ainsi que par la légalisation du cannabis dans les Etats du Colorado, de Washington, de l’Oregon, de l’Alaska, ainsi que dans le district de Columbia.

Le JuJu Joint n’a cependant pas le monopole sur le vapotage du cannabis. On distingue généralement trois types de vaporisateurs. Le premier est le Volcano, une sorte de grand cône qui doit être posé sur une table.

Il vaporise dans un sac en plastique la fumée produite à partir de feuilles de cannabis chauffées. «On inhale ensuite la fumée contenue dans la poche, explique Jane Karilov, manager de Smoke Culture, un magasin de vaporisateurs de Manhattan. C’est très fort, cela vous assomme.»

Le deuxième type fonctionne sur le même principe, mais la fumée est générée par une petite boîte qui sert également d’inhalateur. Le plus populaire est le PAX, décrit comme «l’iPhone du cannabis».

Le troisième est constitué de bâtonnets de style JuJu Joint, qui ont pour particularité d’utiliser de l’huile de cannabis plutôt que des feuilles.

Nouvelle classe de fumeurs

Dan*, un petit blond de 32 ans qui termine un MBA à l’Université de New York, se sert principalement de son vaporisateur pour éviter les effets néfastes de la fumée. «J’ai de l’asthme et la fumée m’irrite la gorge. Les vaporisateurs sont plus sains, car ils chauffent l’herbe sans provoquer de combustion.»

Pete et Dan sont le prototype de ce nouveau genre de fumeurs. «Les utilisateurs de vaporisateurs sont plus âgés que les consommateurs de joints, précise Jane Karilov. Il s’agit principalement d’anciens fumeurs qui décident, quand ils ont environ 30 ans, de se limiter et de fumer de manière plus saine, parfois en famille.»

Le coût des vaporisateurs repousse aussi les plus jeunes: un Volcano peut coûter jusqu’à 750 dollars, un PAX 250 dollars.

La discrétion de ces produits sans odeur séduit aussi car ils permettent de prendre une bouffée dans la rue, au restaurant ou au cinéma sans attirer l’attention. A New York, plusieurs bars ont alors interdit tout ce qui ressemble de près ou de loin à un vaporisateur, par crainte d’avoir des clients qui fument de la marijuana.

Cette normalisation du cannabis inquiète Petros Levounis, expert responsable du département psychiatrique de la Rutgers Medical School. «Ces e-joints font passer la marijuana pour un produit totalement inoffensif. On en oublie qu’il s’agit d’une drogue, certes douce, mais d’une drogue quand même. Les gens ne peuvent pas en consommer n’importe comment.»

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2014 Lindsay+Milgate Photography
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