Zoom. Il a été le phénomène de cet été. Lancé par l’ex-banquier genevois Xavier Grousson, le concept de tatouages éphémères Tattyoo concurrence celui de la designer appenzelloise exilée à New York Tina Roth Eisenberg.
Céline Bilardo
A la plage, en soirée ou sur les podiums des plus grands défilés, le tatouage éphémère est devenu l’accessoire de rigueur. «Il se porte aujourd’hui comme un vrai bijou, remarque Mélanie Blanc, journaliste et responsable de la rubrique «lifestyle» de L’illustré. Il s’adresse aux jeunes femmes, avec un choix infini et des formes parfois très graphiques.» Le phénomène, observé d’abord sur l’internet, a pris de l’ampleur en Suisse romande cette année. Il a débarqué dans les grandes surfaces telles que Globus ou Manor dès le mois de juin.
Ce regain d’intérêt pour la décalcomanie, Xavier Grousson, directeur de la marque neuchâteloise Tattyoo, ne l’avait pas du tout anticipé quand il a démarré sa petite entreprise en juillet 2012. Ancien cadre chez Lombard Odier, le Genevois a tout quitté en 2008 pour se lancer dans des projets culturels et artistiques. «Tattyoo est né d’une plaisanterie avec une collègue, explique l’entrepreneur. Je travaillais à ce moment-là pour une boîte de design et j’avais vu passer des autocollants sur mon bureau. Un soir, en rigolant, nous élaborions un business plan sur une serviette en papier… et finalement, nous nous sommes dit: «Pourquoi pas?» Tattyoo.com est lancé quelques mois plus tard en e-commerce. Les commandes affluent en quelques jours.
Plus beaux et moins toxiques
D’abord limité aux enfants avec six modèles, le phénomène s’étend rapidement aux jeunes adultes. Xavier Grousson propose désormais plus d’une centaine de motifs, créés en collaboration avec 80 illustrateurs. Vendues 6 euros la paire, les impressions s’appliquent sur la peau à l’aide d’une éponge et tiennent entre trois et cinq jours. On est loin du simple décalque Malabar des préaux d’école: «Il s’agit de proposer des modèles plus beaux et moins toxiques pour la peau que ces tatouages pour enfants qui étaient inclus dans les emballages de chewing-gum.» Du motif arc-en-ciel au dessin de pirate, Tattyoo s’est ainsi diversifié avec des créations dorées ou argentées destinées notamment aux jeunes femmes. «Notre succès tient certainement à nos premiers partenariats. Nous avons par exemple travaillé avec l’illustratrice de livres pour enfants suédoise Ingela P. Arrhenius et avec le blog de mariage Un beau jour qui nous a permis de nous positionner sur le marché français.»
Dans les boutiques de luxe
Le Genevois de 40 ans, établi à Neuchâtel, tire ses revenus de la distribution en magasin et dans les foires spécialisées, la vente en ligne et les tatouages sur mesure réalisés pour des soirées d’entreprise ou des événements tels que le Montreux Jazz Festival. Cet amateur d’art privilégie les talents en devenir. «Le tatouage éphémère est un support original pour créer. Il offre de nouvelles opportunités aux graphistes qui se lancent.»
En trois ans, la marque Tattyoo a développé son réseau dans plus de 600 magasins et 40 pays. Elle s’arrache aujourd’hui jusqu’en Asie. Xavier Grousson, qui travaille seul avec plusieurs free-lances, remarque toutefois l’arrivée de centaines de concurrents sur le marché des tatouages éphémères. «Le nombre de sites spécialisés est incroyable. En 2012, à ma connaissance, il n’y avait que Bernard Forever en France et Tattly aux Etats-Unis.»
C’est d’ailleurs une Suissesse qui est à l’origine de la marque américaine Tattly. Installée à Brooklyn depuis 1999, Tina Roth Eisenberg s’est d’abord fait connaître à travers son blog, Swiss Miss. La jeune graphiste appenzelloise (Rhodes-Extérieures) a alors lancé sa société de tatouages éphémères en juillet 2011, qui a vite pris le pas sur son activité de designer. «Je suis aujourd’hui à la tête d’une équipe de 16 employés», dit-elle. Et la réussite de son entreprise sur le continent américain ne fait que confirmer l’engouement pour cette nouvelle mode. Tattly collabore avec plus de 100 illustrateurs et ses créations se retrouvent notamment à la boutique de luxe Colette à Paris ou à celle du MoMa de New York. «Une consécration», selon Tina Roth Eisenberg.
Pour Mélanie Blanc, de L’illustré, les deux Suisses ont flairé la bonne idée. «Ces nouveau bijoux de peau permettent aux consommateurs de tester un style sans trop prendre de risques et en plus à moindre coût.»