Quantcast
Channel: L'Hebdo - Cadrages
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Genève: le duo de droite qui pourrait mettre fin au tandem de gauche

$
0
0
Jeudi, 24 Septembre, 2015 - 05:50

Portrait. L’Entente bourgeoise a misé sur Benoît Genecand et Raymond Loretan pour mettre fin à l’hégémonie de la gauche au Conseil des Etats. Même sans soutien officiel de l’UDC et du MCG, le duo peut espérer récupérer l’un des deux sièges sénatoriaux.

Olivier Francey

Jacques Séguéla dirait d’eux qu’ils n’ont pas raté leur vie. Quinquagénaires séduisants au parcours professionnel que l’on regarde dans le rétroviseur, les Genevois Benoît Genecand et Raymond Loretan ont choisi la cour intérieure du Musée d’art moderne et contemporain pour prendre la pose. Non pas parce qu’ils affectionnent ce lieu prisé par les hipsters, banquiers et autres avocats habitués des soirées du cru, mais parce que l’endroit est proche du cabinet de conseil stratégique et de communication de l’un des deux prétendants de l’Entente au Conseil des Etats. Celui qu’on identifie facilement à ce col impeccable et étroit sur la photo, et à ce rire plus discret.

Raymond Loretan a sans doute conservé quelques stigmates de ses anciennes fonctions. Celles qu’il a occupées dans l’ombre du conseiller fédéral Arnold Koller, à la tête du consulat général de Suisse à New York ou à la présidence du conseil d’administration de la SSR. Du lourd. Pourtant, aux côtés de son co­listier, ancien directeur à l’UBS, il laisse apparaître un humour acéré. Le duo fonctionne. L’un calcule, l’autre négocie. L’un commence les phrases, l’autre les conclut. Raymond Loretan sonnera d’ailleurs la fin de la séance photo.

Missiles choisis par l’Entente genevoise pour déloger la gauche de deux fauteuils qu’elle truste confortablement depuis huit ans à la Chambre haute, le libéral-radical Benoît Genecand et le démocrate-chrétien Raymond Loretan peuvent ambitionner de revêtir l’habit de sénateur. Non pas parce que le costume deux-pièces est pour eux une seconde peau, mais parce que la nouvelle mécanique électorale leur est favorable. Ou tout du moins pourrait leur ouvrir une fenêtre d’opportunité. «On fait de la politique, pas des mathématiques», tranche Raymond Loretan. La politique? Il en a une petite idée, lui qui a occupé le poste de secrétaire général du PDC suisse entre 1993 et 1997.

C’est pourtant bien la mathématique électorale qui devrait permettre à l’un des deux notables de passer l’épaule. Face à la coalition «PS-Verts-Ensemble à Gauche», le duo sait qu’il lui faudra compter sur les voix de la «Nouvelle Force» rassemblant l’UDC et le Mouvement citoyens genevois. Si le MCG a d’ores et déjà annoncé qu’il ne soutiendra pas l’Entente au second tour, l’UDC, elle, reste évasive. Et sur le papier, rien n’est gagné. Sa présidente, Céline Amaudruz, ne «donnera rien» si elle ne «reçoit rien».

«Qu’importe, rétorque Benoît Genecand. Aucun de ces deux partis n’a une chance de placer l’un des siens. Dès lors, la seule question est la suivante: leur électorat compte-t-il gaspiller ses voix ou saisir l’opportunité de faire gagner son camp politique?» L’argument est solide si l’on se penche attentivement sur le scrutin de 2011. Le candidat démocrate-chrétien (aujourd’hui conseiller d’Etat) Luc Barthassat avait échoué aux portes des Etats avec seulement 1747 voix d’écart derrière Robert Cramer. Alors même qu’il concurrençait le très médiatique Christian Lüscher et le modéré MCG Mauro Poggia. «Et ce candidat MCG était l’adversaire le plus redoutable que l’on pouvait nous opposer, commente Sébastien Desfayes, président du PDC. Aujourd’hui, leur candidat Eric Stauffer demeure beaucoup moins menaçant.»

Une liste, deux croix

D’autres éléments concourent également à leur pronostiquer une victoire. C’est désormais par deux simples croix sur une seule liste, et non plusieurs, que les Genevois éliront leurs représentants. Un mode d’élection qui pourrait malmener la fidélité de l’électeur à son parti fétiche. Autre nouveauté qui redistribuera les cartes: l’instauration d’un quorum à 50% au premier tour (contre 33% auparavant). En 2011, ni l’écologiste Robert Cramer ni la socialiste Liliane Maury Pasquier n’avaient obtenu la moitié des suffrages. C’est donc bel et bien lors du second tour, le 8 novembre, que se jouera la partie.

L’affaissement constant des Verts et de l’extrême gauche depuis plusieurs années ainsi que la faible progression des socialistes devraient également déplacer le curseur vers la droite. La longévité des deux sénateurs de gauche pourrait aussi susciter une certaine lassitude auprès des électeurs. Figure historique des Verts genevois, membre du gouvernement genevois pendant douze ans, le conseiller aux Etats Robert Cramer veut entamer sa troisième législature à la Chambre haute. Quant à Liliane Maury Pasquier, elle accumule vingt années sous la Coupole, dont douze au Conseil national.

Une gauche unie

La suprématie de la gauche à la Chambre haute dure depuis deux législatures, soit autant d’interminables années pour la droite. Une situation que rencontre aussi le canton de Vaud, où ses deux sénateurs Luc Recordon (Verts) et Géraldine Savary (PS) règnent en maîtres. Une configuration qui s’explique par une droite systématiquement divisée et des sénateurs de gauche assez intelligents pour rester proches de leur parti respectif tout en se gardant de contrarier l’autre moitié politique du canton. Mais l’absence de représentativité de la domination rose-vert face à la montée en puissance des forces de droite à Genève demeure le meilleur argument du duo Genecand-Loretan.

Une dernière question se pose: qui du banquier, ex-président de la Chambre genevoise immobilière, ou de l’ancien ambassadeur a les meilleures chances? Libéral décomplexé, Benoît Genecand maîtrise mieux les dossiers genevois que son colistier. Mais son positionnement plus à droite devrait l’empêcher de grappiller les voix précieuses de gauche. Quant à compter sur son «réseau immobilier», cela ne devrait pas suffire. Son fils, Adrien Genecand, qui avait tenté d’accéder à l’exécutif de la Ville de Genève, n’avait obtenu que 366 voix d’avance sur sa colistière Natacha Buffet-Desfayes, alors inconnue du grand public. Du côté du démocrate-chrétien, quelques adversaires politiques ont tenté de déstabiliser sa candidature en invoquant le caractère «peu genevois» de son parcours: il est d’origine valaisanne et établi à Genève depuis 2007. Cette critique n’a finalement pas trouvé d’écho. Enfin, la double candidature aux deux Chambres de Benoît Genecand pourrait aussi coûter des voix au libéral-radical dans sa course à la Chambre haute, certains électeurs estimant superflu d’inscrire deux fois son nom. Ne briguant que les Etats, solide sur sa connaissance de la Berne fédérale, presque quadrilingue, le centriste Raymond Loretan part résolument avec une longueur d’avance.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Anna Pizzolante / Rezo.ch
Rubrique Une: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 
Contenu récent: 
En home: 
no

Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Trending Articles