Quantcast
Channel: L'Hebdo - Cadrages
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Le plan Blocher prend le Conseil fédéral de vitesse

$
0
0
Jeudi, 3 Décembre, 2015 - 05:55

Eclairage. Avant que le gouvernement ne présente ses propositions, l’UDC pactise avec l’économie pour bloquer toute redynamisation de la voie bilatérale.

Michel Guillaume

Le vieux lion rugit toujours. A peine l’UDC a-t-elle gagné les élections fédérales que son stratège en chef, Christoph Blocher, avance ses pions sur deux dossiers. Au Conseil fédéral, il se bat pour faire élire l’un de ses poulains, le Zougois Thomas Aeschi. Et dans le dossier européen, il tente de conclure un accord avec les milieux économiques afin de «résoudre» la question européenne à sa manière: en bloquant tout rapprochement de la Suisse avec l’UE.

«Il n’y a rien à déclarer pour l’instant. Nous attendons les propositions du Conseil fédéral pour prendre position», assure le président de l’UDC, Toni Brunner. «Je ne suis au courant de rien», ajoute pour sa part le vice-président, Luzi Stamm. Selon la presse alémanique pourtant, les grandes manœuvres ont bel et bien commencé. A la barre, l’inusable patriarche de Herrliberg (ZH), qui s’est assigné la mission de «sauver la Suisse» des griffes de l’UE.

Christoph Blocher n’a donc pas attendu le 4 décembre – date à laquelle le Conseil fédéral reparlera d’Europe – pour amadouer les leaders de l’économie. Notamment Hans Hess, président de Swissmem et vice-président d’Economiesuisse. Or, tous deux semblent s’être mis d’accord sur un plan de route, ce que dément vigoureusement cette dernière.

Syndicats court-circuités

Il n’y a pas de fumée sans feu. On peut aisément imaginer que pour l’UDC et certains patrons, la seule priorité consiste à régler la question la plus urgente, à savoir la mise en application de l’initiative «Contre l’immigration de masse» approuvée par le peuple le 9 février 2014. Comme cette initiative réclame notamment l’introduction de contingents contraires au droit européen, elle menace la voie bilatérale à laquelle tiennent pourtant les milieux économiques. L’accord entre les deux hommes semble être le suivant: d’une part, l’UDC renonce à des contingents à condition que le Conseil fédéral soit déterminé à limiter l’immigration. D’autre part, l’économie admet elle aussi ce besoin et n’insiste plus dans la recherche d’un accord-cadre avec l’UE pour régler la question institutionnelle. En résumé, on tombe d’accord pour sauver les accords existants et on enterre l’espoir d’en signer de nouveaux. En passant, les deux parties court-circuitent la gauche et les syndicats, qui exigent un renforcement des mesures d’accompagnement pour mieux convaincre le peuple de garder sa confiance dans l’accord sur la libre circulation des personnes (LCP).
Christoph Blocher prendrait ainsi de vitesse le Conseil fédéral, qui a longtemps laissé se poursuivre le dialogue des deux sherpas – le secrétaire d’Etat à la migration, Mario Gattiker, pour la Suisse et Richard Szostak pour l’UE – pour trouver un compromis sur la LCP. Pour l’instant, ce dialogue n’a pas débouché sur grand-chose de concret, si ce n’est l’assurance du président de la Commission, Jean-Claude Juncker, de poursuivre l’étude de la piste d’une clause de sauvegarde.

C’est en effet par cet instrument que le Conseil fédéral compte juguler l’immigration. Il aimerait que l’UE donne son aval à une loi suisse permettant à la Suisse de prendre des mesures en cas de «difficultés sérieuses d’ordre économique ou social», selon les termes de l’accord sur la LCP. De plus en plus, il apparaît qu’il faudra appliquer le plan B, soit activer cette clause de manière autonome en espérant ne pas trop fâcher Bruxelles, qui a des problèmes bien plus urgents à résoudre.

Avec son plan, Christoph Blocher prend le risque de ternir le climat entre partenaires sociaux, dont les rapports se sont tendus ces derniers mois, par exemple dans l’hôtellerie et la gastronomie où le patronat envisage de dénoncer la CCT. «Si cette alliance entre l’UDC et l’économie devait se confirmer, alors ce serait une très mauvaise nouvelle pour le partenariat social», s’alarme le vice-président d’Unia, Aldo Ferrari. Le président du PS, Christian Levrat, est lui aussi pessimiste. «En fin de compte, il n’y aura ni contingents ni mesures d’accompagnement renforcées, et notre problème avec l’UE restera entier.»

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Salvatore Di Nolfi / Keystone
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 
Contenu récent: 
En home: 
no

Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Trending Articles