Maternité.Les célébrations autour de la naissance de Jésus, fils de la Vierge Marie, approchent. Au fait, cette dernière compte beaucoup d’émules. Enquête un brin iconoclaste.
Marie la sainte, celle qui, «aussi vrai que vit le Seigneur Dieu, est pure devant sa face et ne connaît pas d’homme», sera de nouveau à l’honneur à la fin du mois. Evidemment, le premier rôle sera tenu par le petit Jésus. N’empêche: depuis plus de 2000 ans, Marie jouit d’un statut aussi édifiant qu’intrigant: elle est vierge et mère. D’innombrables textes ont été écrits sur elle, expliquant le caractère symbolique de ce qui paraît être une contradiction aux yeux des humains. Contradiction, vraiment? Pas sûr, justement. Car des vierges enceintes, il en existe beaucoup sur terre. Toutes visitées par le Saint-Esprit, alors? Eh bien… non, justement.
Les gynécologues sont bien placés pour le savoir. A l’instar du Français Sylvain Mimoun, également auteur de nombreux ouvrages sur la sexualité. «Tous les gynécologues, une fois dans leur vie, ont rencontré une vierge enceinte. Il suffit que la femme soit en période d’ovulation et plutôt jeune. Si la glaire arrive jusqu’à la vulve et que l’homme a éjaculé à cet endroit, pour les spermatozoïdes, c’est comme les Champs-Elysées: une voie royale.» Sa consœur lausannoise, Dorothea Wunder, médecin-chef au département de gynécologie, obstétrique et génétique médicale du CHUV, confirme: «Oui, j’ai rencontré des vierges qui étaient enceintes. Mais leur nombre est difficile à estimer. Je me suis occupée de grossesses non désirées survenues juste avec du petting (caresses préliminaires).» De là à penser que le Saint-Esprit y a mis un peu du sien…
L’hymen, c’est quoi? Mais au fait, docteur, comment les spermatozoïdes peuvent-ils traverser tout seuls la barrière de l’hymen? La gynécologue ne s’étonne pas d’une telle question. «Ce qui me surprend encore, c’est le manque de connaissances que les femmes ont de leur anatomie. Beaucoup pensent que l’hymen, cette fine membrane extensible située à l’entrée du vagin, est complètement fermé. Ce n’est pas le cas: son ouverture est plus ou moins grande suivant la personne. Si l’hymen est complètement fermé, c’est un cas pathologique car, par exemple, il ne laisserait même pas passer le sang des règles.»
L’hymen, le mot est lâché. Que d’enjeux autour de ce petit bout de peau. Lorenza Bettoli, sage-femme et conseillère en santé sexuelle au planning familial de Genève, explique: «Lors du premier rapport sexuel, l’hymen peut se déchirer et entraîner parfois de légers saignements pour 50% des femmes.» Elle aussi a déjà rencontré des vierges enceintes. «Certaines, qui souffrent de vaginisme – soit une impossibilité d’être pénétrée à cause de la contraction des muscles vaginaux – peuvent se retrouver enceintes à la suite d’une éjaculation sur la vulve.»
L’évangile et le toucher vaginal. Alors, Marie souffrait-elle également de vaginisme, elle qui n’a pas connu d’homme? Ou aurait-elle pratiqué le petting? Evidemment, comme l’explique le père Jean-Blaise Fellay, historien de l’Eglise et des religions, sa virginité est symbolique. «Elle signifie qu’aucun homme ne peut engendrer un Dieu. Elle dit également l’origine divine de Jésus-Christ. Dans les évangiles apocryphes, il est question de la virginité de Marie avant, pendant et après la naissance de Jésus. Il y aurait à discuter sur le terme de virginité, mais nous entrerions dans un débat physiologico-médical qui n’intéresse pas l’Eglise. C’est le secret du monde des femmes.»
Et gare à celle qui tenterait de jouer les indiscrètes, à l’instar de Salomé, citée dans l’Evangile apocryphe de Jacques. La malheureuse a voulu contrôler le fait après l’accouchement. «Lorsqu’elle s’est approchée pour faire un toucher vaginal, ses doigts se sont détachés immédiatement de sa main. Le message: on ne s’approche pas du secret divin avec un moyen humain.»