Sébastien Dubas
S’acquitter tout de suite de ses obligations n’a que des avantages: se voir payer un intérêt par l’Etat et réduire la fortune imposable pour l’année suivante.
Depuis l’instauration de taux négatifs par la Banque nationale suisse fin 2014, les entreprises basées en Suisse seraient toujours plus nombreuses à payer leurs impôts à l’avance. Une façon pour elles d’éviter que leurs avoirs restés sur un compte en banque ne leur coûtent de l’argent.
Les particuliers, de leur côté, subissent moins les effets des taux négatifs, mis à part peut-être quelques millionnaires disposant d’un compte bien garni qui ne souhaitent pas prendre trop de risques en Bourse. Il n’en demeure pas moins que les contribuables lambda seraient également toujours plus nombreux à anticiper leurs obligations fiscales.
Dans le canton de Vaud, ils étaient 66 600 à avoir payé immédiatement, et d’un seul coup, le montant de leurs impôts 2015. Soit 611 millions de francs, un record. Pour leur faciliter la tâche, l’administration cantonale des finances glisse dans l’enveloppe qu’elle adresse chaque année à ses contribuables un bulletin de versement supplémentaire où figure le montant total des acomptes provisionnels.
Le phénomène tend aussi à prendre de l’ampleur dans le canton de Genève. Ils étaient ainsi 30 262 contribuables – personnes physiques et morales – à s’acquitter de l’impôt 2016 avant le 11 février 2015 pour un montant total de 1060 millions de francs, souligne l’administration fiscale. Contre 28 797 et un total de 633 millions de francs un an plus tôt.
Quels sont les avantages pour un contribuable à régler ses impôts avant la date obligatoire? «Premièrement, il vaut mieux les payer à l’avance qu’en retard, souligne Stéphane Fiora, avocat fiscaliste au sein de l’étude Python & Peter à Genève. Vous vous éviterez ainsi de payer des intérêts passifs à l’administration fiscale. Ensuite, tout ce que vous versez aux impôts est soustrait de votre fortune et ne sera donc pas imposé comme tel. J’ai vu des contribuables payer 1 million d’impôts à l’avance, voire davantage encore, pour cette seule raison.»
Pour un investisseur lambda, qui n’a pas forcément des millions à disposition, l’avantage d’anticiper le paiement de ses impôts est tout autre: celui de bénéficier d’un rabais, ou taux d’escompte dans le jargon, sur le montant total de ses impôts. «C’est une situation gagnante-gagnante, explique un porte-parole du Département des finances à Genève. Pour le contribuable, qui fait des économies, et pour l’Etat, qui ne doit pas courir après des arriérés d’impôts.»
Taux de 0,5%
Dans le canton de Genève, il faut ainsi s’acquitter de la somme totale de l’impôt avant le 11 février de l’année en cours pour pouvoir bénéficier d’un taux d’escompte de 0,5%. Un taux qui était encore de 1,25% en 2012. Ce taux dit «rémunératoire», par opposition au taux moratoire qui s’applique aux contribuables ayant du retard dans leurs impôts, est également d’un demi-pour cent dans le canton de Vaud. «Même à 0,5% cela reste plus intéressant que les intérêts qu’offrent aujourd’hui les comptes d’épargne en banque», signale Stéphane Fiora.
Un avantage qui pourrait toutefois s’estomper à l’avenir. Pour faire face aux taux d’intérêt négatifs de la Confédération, auxquels il s’attend à être soumis tôt ou tard, le canton de Zoug a récemment décidé de faire passer cet intérêt rémunératoire à 0%. Il craignait en effet que l’impôt reçu en avance de ses contribuables, et qu’il lui faudrait placer à son tour, ne lui coûte au final de l’argent. Un comble qui pourrait s’étendre à d’autres cantons. Et annuler en fin de compte tout intérêt financier à s’acquitter à l’avance de ses impôts.
Pour qui?
- Contribuables aisés
- Épargnants disposant d’un bon matelas d’économies
