Servan Peca
Les chances d’enregistrer des gains sont aussi minces que possible. Mais au moins est-on (presque) sûr de ne rien perdre.
En numéraire ou en scriptural? Dix billets de 1000 dans un coffre? Ou 10 000 francs déposés sur un compte épargne? La question n’est ici pas vraiment de savoir ce qui rapporte le plus, mais ce qui coûte le moins.
Les conditions diffèrent auprès de chaque établissement, bien sûr. Mais prenons l’exemple des banques cantonales vaudoise ou fribourgeoise, où un compte épargne classique «rapporte» 0,01% d’intérêts. Soit 1 franc par année…
Un taux proche de zéro, qui se situe cependant dans le bas de la fourchette nationale, selon les observations de Comparis.ch. Le site signale que des banques rémunèrent l’épargne jusqu’à hauteur de 0,75% par an. Lot de consolation: les deux établissements précités «offrent le forfait». Autrement dit, «le compte, ainsi que les prestations et services qui l’accompagnent – carte, envoi des relevés de bouclement annuel – ne sont pas facturés», détaille la BCV.
Là aussi, ces deux exemples seraient plutôt des exceptions. Par comparaison, la baisse des frais de gestion n’est pas une tendance. «Nous n’avons constaté que quelques cas isolés», indique son expert bancaire, Marc Parmentier.
Néanmoins, dans le contexte actuel, les comptes épargne «restent une manière efficace, et surtout sécurisante, de placer son argent. Dans une majorité de cas, ils rapportent encore quelque chose, même s’il faut être attentif aux frais», poursuit-il. A niveau de risque égal, Marc Parmentier signale encore que les comptes de troisième pilier sont plus avantageux, grâce aux réductions d’impôts qu’ils permettent d’obtenir. Précisons aussi qu’ils sont bloqués jusqu’à la retraite de leur détenteur (lire Troisième pilier: échapper au piège des taux négatifs).
La solution de rechange, c’est le «safe». A Neuchâtel, la Banque cantonale débite automatiquement de votre compte – il faut donc en ouvrir un au préalable – 80 francs par an pour la location d’un coffre de 6 cm de hauteur, 21 cm de largeur et 35 cm de profondeur. Soit 4410 cm3, le plus petit volume proposé. Mais c’est largement suffisant pour y déposer 10 billets de 1000 francs (18 x 7 cm). A Lausanne, la BCV pratique les mêmes conditions, en ajoutant qu’il faut être domicilié en Suisse. Ses tarifs vont de 110 à 150 francs, «pour les catégories les plus demandées».
Bonne nouvelle, les prix à la consommation baissent. Cette déflation de -1,1% en 2015 et de -0,5% en 2016 donne mécaniquement plus de valeur à l’argent. C’est évidemment une moyenne imparfaite mais, théoriquement, une voiture qui coûtait 10 000 francs le 1er janvier n’en coûtera plus que 9950 le 31 décembre prochain.
Le rendement des 10 000 francs sur un compte épargne se monte donc à 51 francs par an, soit 0,51%. Cela sans compter les frais de tenue du compte. Dans un coffre, les mêmes 10 000 francs ne rapportent rien. Au contraire, ils coûtent: la location du coffre ainsi que le manque à gagner en intérêts. Reconnaissons cependant que cet argent a plus de chances de ne pas être déclaré, donc non imposé.
Il existe par ailleurs une multitude de comptes épargne «plus» ou «bonus», pour lesquels, par exemple, le taux d’intérêt augmente en fonction du montant déposé. Mais ces avantages ne vont pas sans certaines restrictions, notamment sur les retraits. Aucune de ces formules ne rapportera plus dans un futur proche, ajoute Marc Parmentier: «Un retour des taux de référence de la BNS à 0% n’aura aucune influence. Il faudrait une hausse bien plus forte pour que les banques revoient leurs conditions à la hausse.»
Au cours des dernières années, l’épargne n’a en tout cas pas cessé de progresser dans les banques. La BCN a par exemple enregistré une hausse de plus de 6% en 2015. Au niveau suisse, l’augmentation «de l’épargne et des placements» atteint 40%, entre 2010 et 2014, date à laquelle ils ont atteint 639 milliards de francs, selon les chiffres de la BNS.
Côté coffres, le tableau est plus contrasté. La BCN ne note pas d’engouement particulier. La BCV, elle, constate une croissance des demandes d’environ 10% par an depuis 2009. La banque estime que c’est «le besoin de sécuriser ses valeurs» qui en est à l’origine. Mais elle ne précise pas s’il s’agit de les sécuriser contre le vol ou contre les taux négatifs.
Pour qui?
- Petits épargnants
- Épargnants n’entendant strictement rien aux questions d’argent
- Paranoïaques