Quantcast
Channel: L'Hebdo - Cadrages
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Sergii Leshchenko, le «Monsieur Propre» ukrainien

$
0
0
Jeudi, 7 Avril, 2016 - 05:51

Rencontre. Ce célèbre journaliste et député au Parlement demande une enquête spéciale sur toutes les personnalités ukrainiennes nommées dans les «Panama Papers».

C’est un des politiciens les plus remuants d’Ukraine qui découvrait récemment le Palais fédéral à Berne: Sergii Leshchenko est l’un des plus féroces pourfendeurs des oligarques. Bien qu’élu à la Rada en 2014 sur la liste du Bloc Porochenko, il a demandé que toutes les personnalités nommées dans les «Panama Papers» fassent l’objet d’une enquête parlementaire spéciale. Y compris le président Petro Porochenko, dont il estime que la «crédibilité s’érode encore» à la suite de cette affaire.

En Ukraine, Sergii Leshchenko est sans cesse sous les feux de l’actualité. Le 26 novembre dernier au Parlement ukrainien, habillé d’une simple chemise blanche, il se lève et remet un document au premier ministre, Arseni Iatseniouk, semblant soudain très à l’étroit dans son complet-cravate. Il s’agit d’une lettre du Ministère public de la Confédération (MPC) qui prouve que le tsar de l’atome ukrainien Mykola Martynenko est sous enquête en Suisse. Effectivement, le MPC a bloqué 30 millions de francs sur ses divers comptes helvétiques en 2013 déjà. On peut comprendre le malaise du chef de gouvernement. Mykola Martynenko appartient à la même formation politique que lui, le Front populaire. Quelques semaines plus tard, il sera contraint à la démission.

Sergii Leshchenko fait partie de la génération Maïdan, du nom de cette place d’où partira la révolution aboutissant, en février 2014, à la fuite du président d’alors, Victor Ianoukovitch. Agé de 36 ans, ce journaliste d’investigation, vice-rédacteur en chef du média en ligne Ukrayinska Pravda, incarne le soulèvement de la société civile face à un pouvoir largement corrompu. Peu après, il est candidat à la Rada sur une liste du président Petro Porochenko et est élu. L’heure est venue pour lui de «changer le pouvoir de l’intérieur».

Une mission qui prendra une décennie, sinon plus. Depuis que l’Ukraine a gagné son indépendance, elle est aux mains des oligarques, les Akhmetov, Pintchouk et autres Kolomoïsky. Dans la rue d’où il vient, la foule est en colère. Deux ans après la révolution, le PIB a chuté de près de 20%, l’inflation a grimpé en flèche et le gouvernement doit investir dans une guerre stérile avec les séparatistes prorusses dans le Donbass. Mais Sergii Leshchenko refuse de dramatiser la situation. «Le processus de réformes est long et difficile, mais le verre est à moitié plein», rassure-t-il.

Vraiment? «Nous exigeons une tolérance zéro par rapport à la corruption», souligne-t-il. Le Parlement a approuvé une loi pour la combattre, débouchant sur un bureau indépendant disposant de son propre budget. Pas plus tard que le 16 mars dernier, cette même Rada a aussi entériné une loi sur la transparence obligeant les élus et fonctionnaires à déclarer leurs biens et revenus, avec des sanctions à la clé en cas de violation. C’était une condition posée par l’UE pour que celle-ci délivre des visas Schengen aux citoyens ukrainiens.

Un avenir européen

En Suisse, Sergii Leshchenko n’a pas cherché le contact avec le Ministère public de la Confédération, bien qu’il soit par son travail de journaliste d’investigation à l’origine de l’affaire Martynenko. Il ne s’est pas non plus entretenu avec des parlementaires genevois pour prendre des nouvelles d’une personne sur laquelle il a beaucoup enquêté, l’oligarque Igor Kolomoïsky, résident genevois au bénéfice d’un forfait fiscal. «C’est aux autorités suisses de savoir s’il mérite un tel forfait et s’il n’abuse pas des valeurs de ce pays comme le secret bancaire. Si elles ferment les yeux sur de telles pratiques, elles créent un fâcheux précédent, dit-il. Une chose est sûre, ajoute-t-il, en Ukraine Igor Kolomoïsky a perdu beaucoup de son pouvoir.»

L’avenir de l’Ukraine, Sergii Lesh­chenko le voit en Europe. «L’Ukraine n’est pas candidate à l’UE, mais la société veut clairement en faire partie.» Le visiteur ukrainien observe une pause, puis se fait songeur: «Et dire que vous, les Suisses, pourriez adhérer à l’UE dans l’heure qui suit si vous le vouliez!»

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
DR
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination masquée
Gratuit: 
Contenu récent: 
En home: 
no

Viewing all articles
Browse latest Browse all 2205

Trending Articles