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Les héros de votre canton: Charles Albert Gobat, un Prix Nobel de la paix longtemps oublié

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Jeudi, 30 Juin, 2016 - 05:44

Serge Jubin

Politicien (1843-1914). C’est en 1902 que cet enfant de Tramelan reçoit le Nobel pour son engagement en faveur du pacifisme et de la paix. Il a fallu attendre le centenaire de l’événement pour que son village d’origine lui rende hommage.

Avec Henri Dunant (en 1901), le Jurassien bernois Albert Gobat et son complice genevois Elie Ducommun sont les seuls Suisses lauréats du prix Nobel de la paix. C’était en 1902. Beaucoup moins médiatisé qu’aujourd’hui, le prix récompensait l’engagement du duo à la tête du Bureau international de la paix, installé à Berne. En 2002, un siècle plus tard, le conseiller fédéral Joseph Deiss saluait «l’engagement de ces Suisses au service de la promotion de la paix, pionniers de la politique des bons offices, en faveur d’un ordre international fondé sur des règles juridiques».

Malgré l’envergure du personnage et son engagement mondialement reconnu (il a notamment été reçu à la Maison Blanche par Theodore Roosevelt en 1904 et à l’Elysée en 1887 par le président français Sadi Carnot), Albert Gobat a été oublié, en particulier dans sa région d’origine, le Jura bernois, qui ne connaît pas le culte du héros!

Une carrière politique fulgurante

Né en 1843, fils du pasteur autoritaire et sévère de Tramelan, Albert Gobat déménage avec sa famille dans la campagne bâloise en 1849, après l’incendie de la cure de Tramelan. Il obtient sa maturité en allemand à Bâle en 1862, refuse d’étudier la théologie que son père, avec qui il s’entendait mal, lui recommandait. Il opte pour le droit. Et les universités de Bâle, de Heidelberg puis de Paris. En 1868, candidat à un poste de professeur à l’Université de Berne qu’il n’obtient pas, il reprend à Delémont l’étude d’avocat de celui qui fut nommé à sa place!

Quatorze ans plus tard, après avoir pris position contre les catholiques intolérants lors du Kulturkampf, Albert Gobat fait une entrée fulgurante en politique, dans les rangs du Parti radical: député au Grand Conseil bernois, puis la même année conseiller d’Etat bernois pour trente ans, dont vingt-quatre à la tête de l’Instruction publique. Parlementaire fédéral de 1884 à 1914, six ans au Conseil des Etats et vingt-quatre au National.

C’est un instituteur de Tramelan, féru d’histoire locale et lui-même furtif parlementaire fédéral, Roland Stähli, qui s’était intéressé au parcours d’Albert Gobat, tombé dans l’anonymat après sa mort brutale le matin du 16 mars 1914, avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Ce jour-là, il «exposait ses idées concernant la IIIe Conférence de La Haye», écrit Roland Stähli, quand il fut foudroyé par une fatale attaque d’apoplexie. Il siégeait alors au comité du Bureau international de la paix à Berne, dont il avait repris avec sa fille Marguerite la gestion après le décès d’Elie Ducommun en 1906.

Le même Roland Stähli fait d’Albert Gobat le portrait suivant: «Cœur généreux et sensible, attaché au Jura bernois où il venait se ressourcer, qui cachait parfois un caractère autoritaire et le comportement d’un ours, selon l’appréciation d’un collègue conseiller national.»

Membre de la Ligue de la paix et de la liberté, Gobat plaidait pour le désarmement et la création d’une instance d’arbitrage des conflits. La réconciliation entre la France et l’Empire allemand lui tenait à cœur. Il a couru l’Europe et le monde pour y prêcher son idéal de paix. Sans grand succès. Considéré comme un libre penseur, Albert Gobat peinait à concilier les esprits. Certains font remarquer qu’il avait même la fâcheuse tendance à renforcer les polarisations.


En savoir plus

➤ Tramelan a baptisé une rue au nom d’Albert Gobat. Elle jouxte la rue de la Paix. En 2015, la commune a apposé une plaque commémorative en face de la cure protestante où il est né et installé six stèles de la paix.

➤ La revue «Intervalles» No 64 est consacrée aux pacifismes. Avec un double portrait des Nobel de la paix de 1902, Albert Gobat et Elie Ducommun.

➤ La fondation Mémoires d’ici, à Saint-Imier, dispose d’une partie des archives privées d’Albert Gobat, transmises par son petit-fils. Elles sont très peu consultées.

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Mémoires d’ici / Fonds Albert et Marguerite Gobat
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