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Le Brexit met à rude épreuve les résistances d’un système financier très malade

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Jeudi, 30 Juin, 2016 - 05:55

Analyse. La longue phase d’incert  itude qui s’ouvre ne provoque pas que la chute des marchés boursiers et de la livre sterling. El  le ravive les blessures ouvertes par les crises qui se succèdent depuis 2008, et que les banques ce  ntrales peinent à refermer.

C’est une précision étrange qui a attiré l’attention des spécialistes des affaires financières et monétaires alors que les marchés financiers partaient en vrille sitôt connu le résultat britannique sur le vote du Brexit. Le fait que la Banque d’Angleterre a chiffré, vendredi 24 juin, le montant qu’elle était prête à mettre à disposition des banques, «plus de 250 milliards de livres sterling», soit approximativement 354 milliards de francs au cours du 24 juin. Une annonce qui n’a pas empêché la monnaie britannique de plonger de quelque 8% face au franc suisse et aux autres monnaies principales, mais qui a calmé quelque peu les alarmes sur la solidité des banques britanniques.

Escalade verbale

Livrer le montant des interventions d’une banque centrale, c’est hautement inhabituel. «C’est une invitation faite aux acteurs des marchés financiers de tester ce chiffre», observe Sergio Rossi, professeur d’économie à l’Université de Fribourg. Cela peut donc aggraver le problème plutôt qu’aider à le résoudre.

Autre bizarrerie, également ce vendredi de toutes les tourmentes: la Banque nationale suisse (BNS) a fait savoir qu’elle intervenait sur les marchés des changes alors que l’opération était en cours. En soi, cette intervention était attendue. Mais jusqu’alors ce n’est qu’après la fin de ses interventions que l’institution est passée aux aveux.

Les banques centrales semblent avoir franchi un pas supplémentaire dans leur escalade verbale pour tenter d’éviter un effondrement des marchés financiers. «En se montrant plus précises, elles cherchent à accroître leur efficacité», interprète Michel Girardin, professeur de macrofinance à l’Université de Genève. Mais cette escalade verbale met aussi en lumière la tension croissante des hauts responsables monétaires internationaux. «Il est clair qu’ils fonctionnent en mode alerte rouge», poursuit Michel Girardin.

«Le système est malsain»

La profonde incertitude ouverte par le vote britannique n’a pas seulement pris de court les acteurs de l’économie, dont les marchés financiers se font les interprètes en faisant plonger les Bourses (-12% entre vendredi et lundi) et relever les rendements obligataires des pays périphériques de la zone euro. Elle fragilise aussi l’édifice mis en place par les banques centrales pour éviter un nouveau plongeon dans la crise.

«Le système est malsain, mais pour le moment il tient. Cependant, il suffirait d’un autre choc, comme l’annonce d’un référendum similaire dans un autre pays important de l’Union européenne, pour que la situation échappe potentiellement à tout contrôle», note Didier Cossin, professeur de finance et de gouvernance à l’IMD, à Lausanne.

Le caractère malsain de l’économie, c’est en premier lieu la persistance des graves problèmes d’endettement issus de la crise. Or, cette dette, publique et privée, «ne cesse d’augmenter», rappelle la Banque des règlements internationaux (BRI), la «banque centrale des banques centrales», dans son rapport annuel publié dimanche dernier. La dette figure en tête de liste des risques identifiés par cette institution basée à Bâle.

Londres, en tant que premier centre financier mondial, est particulièrement sensible à ce risque: si la valeur boursière des banques plonge, c’est leur base de fonds propres qui disparaît, amenuisant leur résistance face aux risques qu’elles courent en accordant des crédits. Or, la valeur boursière des grands établissements de la City a chuté jusqu’à 30%, provoquant l’intervention, vendredi, de la Banque d’Angleterre.

Pour le moment, un effondrement financier global semble donc évité. «Les banques centrales ont réussi à contenir les risques», se réjouit Cédric Tille, professeur d’économie internationale à la HEIG.

Mais hors de l’Europe, de grands pays prennent leurs dispositions face à la crise qui s’ouvre: la Chine a annoncé lundi 27 juin la plus forte dévaluation du yuan depuis sa crise de l’été dernier. Et la Fed américaine a décidé de renoncer à relever encore ses taux d’intérêt cette année, contrairement à ce qu’elle prévoyait. Officiellement, les deux décisions doivent parer à des problèmes intérieurs. Mais il n’est pas interdit de penser que tant la Chine que les Etats-Unis avancent leurs pions en cas de crise majeure à venir. 

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