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HJ Lim, une pianiste intégrale

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Jeudi, 14 Juillet, 2016 - 05:50

Cèline Bilardo

Rencontre. A 12 ans, elle quittait ses parents pour étudier seule à Paris. Installée aujourd’hui à Neuchâtel, la prodige coréenne publie son autobiographie.

Neuchâtel, par un matin frais d’été. Hyun-Jung Lim entre dans le lumineux café de l’hôtel Alpes et Lac. Sac au dos et baskets roses aux pieds: une tenue bien éloignée de celle, sobre et sombre, qu’elle arbore lors de ses concerts diffusés sur YouTube. Des clips qui l’ont révélée, il y a six ans, au monde entier.

Les mains nues délicatement posées sur la table, elle pianote tout en racontant son parcours. Elle évoque sa décision de quitter ses parents, à 12 ans, pour aller étudier la musique en France, le pays qui a vu grandir Saint-Saëns, Debussy ou encore Ravel. Une aventure qu’elle détaille dans son ouvrage Le son du silence. «Je suis partie avec une naïveté inconsciente, raconte-t-elle. J’avais davantage peur pour mes parents que pour moi-même. Pour moi, la musique était synonyme de liberté. Je devais m’en aller.»

L’enfant qui déborde d’énergie et de volonté se sentait à l’étroit dans son village natal d’Anyang, près de Séoul, et dans sa pratique du piano. C’est sa mère qui convainc son père de la laisser partir. Mais arrivée à Compiègne, au nord de Paris, HJ Lim ne parle pas un mot de français. Elle loge chez une famille d’accueil étouffante et se fait railler par ses camarades de classe. Les moqueries cessent lorsque la jeune fille leur montre ses talents au piano.

«Tout a commencé au Conservatoire de Compiègne.» HJ Lim gagne la confiance de son premier professeur de piano, qui la prend sous son aile. Elle obtient le diplôme de l’institution en cinq mois seulement et s’en va préparer le concours d’entrée au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Un concours que des centaines de pianistes exceptionnels, venus du monde entier, rêvent de gagner. Après une année à pratiquer seule et à se battre contre les gardiens du conservatoire pour qu’ils la laissent répéter jusque dans la nuit, elle y est acceptée dès sa première tentative. Elle n’a que 16 ans.

Découverte sur YouTube

HJ Lim ne se distingue pas seulement par sa technique, son talent, mais aussi et surtout par son audace. «Mes professeurs de piano m’ont toujours appris à ne me satisfaire de rien, à ne jamais chercher la facilité.» Elle s’attaque très vite aux œuvres des plus grands compositeurs: Liszt, Chopin, Rachmaninov. Elle décrochera son premier contrat international grâce à un récital joué en 2009 au Stadtcasino de Bâle, qu’elle décide de diffuser sur l’internet pour ses parents.

«J’avais clairement sous-estimé le pouvoir de YouTube, sourit la pianiste. Je voulais montrer mon travail à mes proches, et puis j’ai reçu des lettres d’admirateurs. En quelque temps, plusieurs milliers de personnes avaient écouté mon concert et on me proposait un contrat d’exclusivité avec EMI Classics.»

Son obsession pour Beethoven l’a conduite à interpréter l’intégralité de ses sonates pour son premier enregistrement. «J’ai étudié la musique, mais aussi l’homme qu’était Beethoven. Je voulais comprendre ce qu’il avait voulu exprimer dans ses compositions. J’ai lu toutes sa correspondance, toutes ses biographies, et analysé toutes ses sonates.» Elle enregistrera les 30 sonates pour piano dans la salle Faller du Conservatoire de La Chaux-de-Fonds, parfois jusqu’à 3 heures du matin.

HJ Lim sourit beaucoup, parle avec fougue. Les yeux pétillants, elle dit se sentir très bien à Neuchâtel, où elle a posé ses valises il y a six ans. «J’aime le paysage suisse, ses lacs, et la ville de Neuchâtel m’inspire. Je vis au centre, je peux donc jouer dix heures de musique par jour sans déranger personne!» Elle y a trouvé des amis, comme Sylvain Jaccard, directeur du Conservatoire de musique neuchâtelois, pour qui HJ Lim «est une artiste humble, encourageante, très indépendante d’esprit et exceptionnelle par sa créativité.»

Comment cette virtuose fait-elle pour souffler entre deux tournées à l’étranger? A bientôt 30 ans, elle se plaît à suivre un petit rituel: elle se lève entre 4 et 5 heures du matin, pratique le yoga au bord du lac ou va se ressourcer à la collégiale de Neuchâtel, un temple protestant. Elle aime aussi se rapprocher de sa culture natale en traduisant des textes sacrés du coréen en français. Et enfin elle commence sa journée musicale.

«Le son du silence». HJ Lim. Ed. Albin Michel, 2016.


Profil

1986 Naissance à Anyang, en Corée du Sud.

1999 Départ pour la France.

2003 Entre au Conservatoire national de musique de Paris.

2010 S’installe à Neuchâtel.

2012 Premier enregistrement, sous le label EMI Classics.

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