Médecin (XIVe siècle). Ce natif de Loèche s’est rebellé contre le pouvoir de l’évêque et contre la maison de Savoie aux côtés des communes valaisannes.
Il n’a pas de page Wikipédia, ne figure pas dans le «Dictionnaire historique de la Suisse». Et pourtant, Guillaume Perronet, médecin et notable valaisan du XIVe siècle, a pris fait et cause pour des communes du Valais dans leur révolte contre le pouvoir de l’évêque Guichard Tavel. Un engagement qui lui vaut d’être emprisonné dans les geôles du château de Tourbillon.
Des personnalités parmi les plus influentes de l’Occident médiéval prennent alors sa défense. L’évêque de Sion recevra ainsi trois lettres le priant de sortir Guillaume Perronet de prison: du comte Amédée de Savoie, mais aussi de Charles IV, roi de Bohême, futur empereur romain germanique.
Et enfin du pape Urbain V. Sa missive, rédigée au printemps 1365 à Avignon, est sans équivoque: «Vénérable frère Guichard, évêque de Sion, nous te saluons. Selon le récit, digne de foi, qui nous est parvenu, tu maintiens en captivité notre bien-aimé fils, Guillaume de Louèche. En vertu de la sainte obéissance, et sous peine d’excommunication, nous te demandons de remettre, sans délai et sans y faire obstacle, ledit Guillaume à notre bien- aimé fils, Etienne Galopin, chanoine de Lausanne, afin qu’il le transfère à notre curie sous bonne garde.»
Comment un simple médecin officiant à Valère a-t-il bénéficié d’une telle protection? Quel rôle politique pouvait-il jouer? Etait-il un ami intime du futur empereur Charles IV?
Entre imaginaire et réalité
Guillaume Perronet apparaît de façon accessoire dans une pièce de théâtre de Maurice Zermatten, La colombe et les vautours ou le destin de Guichard Tavel. Mais aucun historien ne s’est encore intéressé à lui en détail. C’est un enseignant valaisan, Philippe Favre, qui a remonté sa piste. Convaincu d’avoir redécouvert un héros oublié, il laisse son imagination combler les vides. En 2014, il publie le roman historique 1352, un médecin contre la tyrannie et fait connaître Perronet au public valaisan.
Le médecin y vit une histoire d’amour avec une rebelle, survit aux conflits et aux maladies de l’époque, peste noire et lèpre… Il fait preuve de sagesse pour obtenir la guérison de ses patients et empêcher la propagation des maladies. Surtout, il aide les Valaisans grevés d’impôts et de taxes à se rebeller contre le pouvoir de l’évêque et du comte Amédée de Savoie.
Péripéties rocambolesques mises à part, que sait-on avec certitude? De nombreuses zones d’ombre demeurent. Ainsi, on ne connaît pas la date de naissance de Perronet. On ne sait pas non plus s’il a étudié la médecine à Montpellier ou à Bologne. «Natif de Loèche, il a été médecin dans la petite cité capitulaire de Valère, et même nommé chanoine, explique Philippe Favre. Il a bel et bien joué le rôle de médiateur dans des négociations politiques, notamment entre l’évêque et les bourgeois de Sion, qui connaissaient alors un grave conflit.»
Sa participation à la révolte des communes valaisannes contre la maison de Savoie lui vaut l’exil. «Il s’est levé pour la liberté. Par exemple contre le monopole des chanoines de Valère, qui étaient les seuls à pouvoir avaliser les actes notariés, moyennant finance. La commune de Martigny voulait avoir ses propres notaires.» L’Eglise avait réagi de manière forte, en excommuniant le médecin…
Pour Philippe Favre, Perronet était du côté des faibles. «Ce n’était pas un noble, mais il a fait des études. Il est resté fidèle à son milieu d’origine, même lorsqu’il est devenu notable. C’est un héros de l’importance d’un William Wallace (mis en scène par Mel Gibson dans son film Braveheart) ou d’un Guillaume Tell.»
En savoir plus
➤ Le roman historique de Philippe Favre, «1352, un médecin contre la tyrannie», Editions Favre, 452 pages.
➤ Pour se plonger dans le Valais médiéval de Guillaume Perronet, il faut se rendre dans les lieux qu’il a connus, évoqués dans le roman de Philippe Favre. Notamment le château de Tourbillon et les chapelles Saint-Georges et Saint-Grat. Puis, entre Valère et Tourbillon, dans la chapelle de Tousles-Saints datant du XIVe siècle.
