Jacqueline Pirszel
Reportage. Qu’elle soit douce ou salée, liquide ou gelée, l’eau est au centre du quotidien des habitants de la capitale suédoise.
Edifiée sur quatorze îles du vaste lac Mälar et sur l’archipel de la mer Baltique, la ville de Stockholm entretient une relation particulière avec l’eau. «Je ne connais personne qui ne se baigne pas! Tous les Suédois savent nager, c’est dans leurs gènes», se réjouit Rebecka. Rencontrée au Båthuset, une joyeuse cantine nautique, la charmante étudiante en droit de 21 ans savoure sa chance: elle n’a que trois minutes à marcher jusque chez elle, puisqu’elle vit dans un appartement les pieds dans l’eau à Pampas, quartier résidentiel situé à quelques minutes seulement du centre de la capitale suédoise.
Pour comprendre comment vivent les habitants de ce biotope atypique, j’ai rencontré Annika et Anders, les parents de Rebecka, dans leur maison édifiée sur les rives du lac, dotée d’une vue à couper le souffle, bien évidemment… Sitôt rentré, le père propose de se détendre sur le balcon familial. L’occasion d’échanger quelques propos sur leur quotidien les pieds dans l’eau.
Annika raconte: «Quand nos cinq enfants ont quitté la maison familiale, on s’est retrouvés seuls avec mon mari, à regarder la télé tous les soirs. On s’est dit que c’était ennuyeux. Nous avons alors vendu la maison pour nous installer dans cet appartement au bord de l’eau.» Pendant de nombreuses années, les rives du lac servaient aux activités industrielles. «C’est dans notre immeuble que se trouvait la blanchisserie de l’hôpital. Les autorités de la ville ont tout transformé en nettoyant et en rendant cette région très verte et agréable. Regardez tous ces gens qui, aujourd’hui, se baladent, bronzent ou font du sport. Auparavant, il n’y avait que des camions qui passaient par ici!»
Planning pour kayak
Durant l’heure passée sur le balcon, nous avons aperçu des nageurs et des pêcheurs, des kayaks et des bateaux, des dormeurs et des hyperactifs. En effet, les rives sont le cadre d’innombrables activités comme la course à pied et le vélo, des pratiques facilitées par la séparation très claire entre les pistes piétonnes et cyclables. Les parties rocheuses de la rive offrent des terrasses naturelles en pierre pour bronzer, tandis que les zones vertes se prêtent particulièrement bien à la sieste…
En toute saison, les habitués fréquentent le lac. «L’été pour se baigner, l’hiver pour faire du patin à glace… et se baigner aussi, en fait, se vante Anders. Durant la saison froide, je fais mon jogging et il m’arrive de plonger dans l’eau glacée juste après. C’est une pratique commune ici. C’est comme courir dans la neige après le sauna.»
Rebecka et son père se sont même livrés à un petit concours: «Quand j’étais plus jeune, nous voulions savoir qui de nous deux se baignerait le plus tôt et le plus tard dans l’année. Eh bien, il se trouve que nous ne nageons que de mars à novembre.» Avant de conclure malicieusement: «La moyenne de résistance au froid se situe apparemment autour des 18 °C pour les Suédois.»
Epatée par tant de courage, quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai découvert que toute la famille pouvait se déplacer en quelques minutes seulement entre son appartement du bord du lac et sa maison de vacances, située dans l’archipel de la Baltique, non loin de la capitale. «Avez-vous un bateau?» Tout en posant la question, j’aperçois un calendrier bien étrange, dans le genre des plannings hebdomadaires d’utilisation des machines à laver le linge dans nos locatifs. Celui-ci concerne l’usage des kayaks collectifs. «Il y en a deux à disposition des habitants de l’immeuble. Nous nous consultons régulièrement entre voisins pour que chacun puisse en profiter», explique Anders.
En hiver, l’eau peut se transformer en piège. «Parfois, à la radio, on nous rappelle qu’il est trop tôt pour aller patiner. Combien de gens se sont déjà fait avoir par une glace superfine!» s’effraie Annika, qui surveille le lac durant la saison froide. «Un jour, notre chien est tombé dans le lac. Heureusement sans mal», se rappelle Rebecka.
Plénitude nordique
Douce ou salée, l’eau est omniprésente à Stockholm. Alors qu’Anders aime le lac en toute saison, Annika préfère les poissons de la mer. «Il y a quelque chose d’unique avec la Baltique, même si elle est plus fraîche. Ça doit correspondre à mon caractère plus «salé», rigole-t-elle. De toute façon, ça n’est pas la chaleur que nous recherchons. C’est la sensation de plénitude que nous procure la baignade en fin de journée. C’est ça qui nous rend heureux.»
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