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Vive la rose éternelle

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Jeudi, 1 Septembre, 2016 - 05:51

Zoom. Offrir une fleur qui dure toujours? C’est possible grâce à l’industrie des fleurs stabilisées. La révolution technologique frappe à la porte des fleuristes.

«Et rose elle a vécu ce que vivent les roses, l’espace d’un matin.» Comme des générations de poètes plus ou moins inspirés, François de Malherbe a pleuré devant la beauté éphémère de la fleur, dont la flétrissure préfigure la fin triste et inéluctable de toute chose, et surtout des plus belles. Le XXIe siècle et son nouveau dieu, la technologie, permettent enfin de revisiter ce thème largement épuisé. Et si, par miracle, les roses vivaient dix ans? Que se passerait-il? Nos amours en feraient-elles autant?

Dans l’art du marketing floral, aucune ficelle n’est trop grosse. Le 14 février dernier, le groupe colombien Guirnaldas-Verdissimo s’est lancé à l’assaut du marché américain avec un nouveau modèle, V-Rose Selection Privé, version grand luxe de sa gamme de roses stabilisées InfiniteRose. La fleur, vendue en magasin et sur l’internet, promet une durée de conservation éternelle grâce à une technologie entièrement naturelle et bien entendu patentée. Sous le couvercle de la belle boîte en carton se dévoile un slogan tout trouvé: «Certaines fleurs durent toujours…»

Si la technique n’est pas nouvelle – ajouter un peu de glycérine dans l’eau des fleurs pour prolonger leur durée de vie est une technique connue de beaucoup de grand-mères –, l’industrie des végétaux stabilisés est aujourd’hui en pleine expansion. La rose en est la star incontestée. Une poignée d’entreprises productrices se partagent ce marché naissant et exportent dans le monde entier, principalement depuis l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Amérique latine. Le groupe Guirnaldas-Verdissimo, premier producteur mondial, emploie 500 personnes et dispose de pépinières en Colombie, en Equateur et en Espagne.

Le premier pays de destination des fleurs stabilisées est le Japon, qui représente 60% de la consommation mondiale. La Chine arrive juste derrière, bien avant l’Europe, où le produit commence seulement à se faire une place sur les étals des fleuristes. Le nouveau modèle de la gamme InfiniteRose est une des premières tentatives d’accéder au marché nord-américain, où la rose stabilisée est encore quasiment inconnue.

Les techniques de stabilisation tournent toutes autour du même principe. Il consiste à placer la fleur dans un bain pour remplacer la sève par un mélange à base de glycérine végétale, de nutriments et de colorants alimentaires. Ainsi embaumée, la fleur garde son aspect naturel pendant des années. Seule limitation: l’exposition directe à la lumière du soleil est à éviter. Et, au fil du temps, les pétales tendent à se briser et à accumuler la poussière. Mais le procédé a aussi ses avantages. Contrairement aux fleurs fraîches, qui sont coupées bien avant l’éclosion pour parvenir au client avant maturation, les fleurs stabilisées sont récoltées au moment même de leur épanouissement.

«Le stabilisé est beaucoup plus écologique dans son usage, martèle Mikael Nicola, responsable marketing du site français de vente en ligne Secondflor.com. Sur 100 roses fraîches qui partent d’Equateur, 60 arrivent à Rungis et seulement 20 parviennent chez les fleuristes. Les fleurs sont gorgées de produits chimiques. Le transport par avion et la ligne du frais génèrent des quantités folles de CO2, sans parvenir à réduire le gaspillage. Avec le stabilisé, tout cela n’existe plus. Le transport peut se faire par bateau, ce qui présente un meilleur bilan écologique. Pour assurer une bonne stabilisation, la production doit être entièrement bio. Chaque tête de rose a une vraie valeur.»

Les fleurs stabilisées coûtent généralement deux fois plus cher que les fraîches, voire bien plus pour certaines variétés.

«Une vraie option»

«Le marché des fleurs stabilisées est en pleine expansion, même si, curieusement, ces produits restent encore peu connus du grand public», observe Léa Sélime, employée du magasin Grandeur Nature, à Vevey, spécialisé dans les plantes stabilisées et l’architecture végétale. Le principal débouché reste la clientèle professionnelle, pour qui la durée de conservation représente un avantage économique important. Grandeur Nature livre principalement ses décorations florales stabilisées à des hôtels, des cliniques, des EMS et des études d’avocats.

Pour Mikael Nicola, la fleur stabilisée ne tardera pas à se faire une place bien plus importante chez les fleuristes, qui se limitent bien souvent à proposer quelques modèles de roses. «Partout en Europe, les fleuristes ferment. C’est un métier qui périclite. Ils n’ont pas su opérer leur mutation. Les grands acteurs du marché n’ont pas investi dans le stabilisé parce qu’ils considéraient qu’il n’y avait pas de récurrence d’achat. Ils se sont trompés. Ils comprendront que le stabilisé est une vraie option.» 

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Secondflor.com / Création Pascal Silvestri
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