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La renaissance numérique de Bolex

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Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:57

Légende. La mythique caméra vaudoise, utilisée par les plus grands cinéastes, a disparu dans les années 70. Elle est relancée grâce à des passionnés californiens.

Elle était la caméra la plus célèbre du monde, un outil parfait utilisé autant par les amateurs que par les professionnels. Enfant, Steven Spielberg était fasciné par la Bolex H16 de son père, avant de s’en emparer à l’âge de 12 ans, amorçant la pellicule d’un sacré destin. Les cinéastes de la Nouvelle Vague, dans les années 60, avaient la même dévotion pour la caméra 16 mm, ainsi que des artistes comme Andy Warhol.

Son fabricant de l’époque, Paillard-Bolex, envoyait plusieurs milliers de caméras par année dans le monde entier. La société, qui proposait aussi des machines à écrire, radios ou tourne-disques, était la plus grande entreprise romande. Elle employait 8000 personnes. Dont 4500 entre Sainte-Croix, Yverdon et Orbe.

L’arrivée du super-8 de Kodak et de l’électronique nippone ont porté un rude coup à Bolex. La fabrication des caméras 16 mm a cessé dans les années 70. Elle se poursuit toutefois à Yverdon, chez Bolex International SA, à raison d’une quinzaine d’unités par année, tirant parti du stock de pièces restantes.

Une jeune génération de cinéastes, en particulier pour les documentaires, savent que cette caméra mécanique à film est irremplaçable dans les plus dures conditions climatiques. Ou lorsqu’il n’y pas de prise électrique pour recharger des batteries, comme en plein désert. La texture granuleuse, les teintes chaudes et le rendu des détails de la pellicule 16 mm sont eux aussi sans équivalents.

Du marché de niche à la production en série. Il s’agit cependant d’un marché de niche, presque résiduel, qui n’a rien à voir avec une production en série. Celle-ci pourrait bien être assurée par une joint-venture entre Bolex International et Cinemeridian, jeune société de Los Angeles menée par Joe Rubinstein, un cinéaste également spécialisé dans le lancement de start-up. Dans les faits, après avoir examiné en détail le dossier proposé par Rubinstein, la société d’Yverdon a accordé une licence à Cinemeridian pour la fabrication de Bolex numériques, baptisées D16. Cinemeridian a proposé en 2012 le projet sur Kickstarter, la plateforme de financement participatif. La start-up américaine espérait 100 000 dollars pour concevoir et réaliser la caméra. Elle en a reçu trois fois plus, tant l’idée a séduit des passionnés, mais aussi des investisseurs californiens.

En décembre dernier, après plusieurs retards, la vente du modèle a commencé sur le site digitalbolex.com. Un premier lot de 100 pièces préréservées est parti rapidement. Cinemeridian s’active aujourd’hui pour répondre à la demande suscitée par le buzz qui, surtout aux Etats-Unis, entoure la réincarnation numérique de la Bolex.

En magnésium et plastique dur, la D16 reprend habilement le design des caméras 16 et 8 mm des années 60, celles de Bolex comme les appareils de la concurrence. Sa poignée est l’imitation exacte de l’accessoire proposé à l’époque par la société vaudoise. Si le rétrodesign se porte au mieux, encore fallait-il penser à adapter la Rolls, ou plutôt le Range Rover des caméras analogiques d’il y a un demi-siècle.

Image organique. La D16, vendue 3300 dollars dans sa version 256 GB, s’adresse non seulement à des débutants, passionnés de vintage techno ou étudiants en cinéma, mais aussi à des connaisseurs et professionnels à la recherche d’un rendu qui imite l’image organique du 16 mm. Grâce à un grand capteur identique au format super-16 et à des optiques maison, les concepteurs de la caméra ont réussi à harmoniser le design rétro avec un résultat lui aussi délicieusement passéiste.

La manivelle de la D16 ne sert plus à remonter la bobine mais, de manière astucieuse, à accélérer ou ralentir le rythme de l’image numérique. Pourvue d’une monture C comme les anciennes Bolex, la caméra accueille des objectifs interchangeables, dont ceux proposés par Cinemeridian. Elle enregistre en 2K et en format RAW non compressé, susceptible d’être travaillé à la postproduction. La D16 dispose d’un écran de contrôle orientable, ainsi que de multiples prises et supports pour le son stéréo, un viseur ou le HDMI.

La Bolex numérique s’adresse pour l’heure en priorité au marché nord-américain. La maison mère d’Yverdon espère pouvoir la distribuer en Europe d’ici à quelques mois.

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