Partage. Loin de se limiter aux médias, Mix & Remix mettait son trait au service des institutions ou associations, des collectivités ou de l’éducation, en phase avec ses convictions.
La dimension d’un créateur se mesure aussi à son engagement dans la société. Or Mix & Remix jouait le jeu collectif, éducatif, associatif, institutionnel ou agraire. C’était le signe de sa générosité, de son engagement pour les causes auxquelles il adhérait.
Mais aussi d’une compréhension de sa responsabilité d’illustrateur, ici et maintenant, ou plutôt, hélas, ici et hier. Si bien que ses petits personnages débordaient fissa le cercle des médias pour gagner les rues, les devantures, les espaces d’affichage, les manuels et les guides, les sites web et les cafés, les salles de concert et les caves.
Caves? C’est un exemple parmi d’autres. Il y a une quinzaine d’années, par amitié, Mix avait peint avec ses complices Pajak et Noyau les grandes cuves du vigneron Gilles Wannaz à Chenaux, au-dessus de Cully. C’était joyeux, bien sûr peu respectueux de l’iconographie traditionnelle des vendanges.
A Lausanne, le dessin véloce du dessinateur servait le magasin «antigaspi» La Bonne Combine, comme une enseigne orthopédique de l’avenue de Beaulieu. Qu’auraient été les affiches ou flyers du club de la Dolce Vita, il y a trente ans, sans son talent, alors en pleine éclosion? Il allégeait la pesanteur réfrigérante d’un guide pour les déclarations d’impôts, donnait un coup de peps à des formations d’apprentissage.
Il contribuait aux Editions Loisirs et Pédagogie, spécialisées dans les ouvrages de droit, d’histoire, d’économie, d’institutions politiques. Mix était presque l’illustrateur officiel de la vie vaudoise, un titre qui l’aurait bien fait rire.
Il était aussi actif à Genève, conseillant aux noctambules d’être plus discrets devant les cafés, pour ne pas provoquer des coups de sang dans le voisinage. Il rappelait gentiment aux usagers des TPG qu’il est plutôt conseillé de payer son billet. Une année, les coureurs de l’Escalade ont eu droit à ses bonshommes sardoniques: c’était un bonheur de les découvrir au terme essoufflé de la course, sur le plat offert aux concurrents.
A Avenches, le Musée romain a eu droit à une affiche, la Fête du livre à Saint-Pierre-de-Clages aussi, Mix n’était pas un sectaire, ni un borné de la géographie romande.
Si bien que le dessinateur s’inscrivait avec humour dans nos quotidiens de citoyens lambda, présence familière qui nous accompagnait au boulot comme hors boulot, remontant d’un bon trait l’échelle graduée de nos humeurs.