Orgasme.Toutes les femmes ou presque ont déjà simulé. Pourquoi? Une psychologue américaine a découvert des motifs étonnants pour la tricherie sous la couette.
Frank Thadeusz
Les hommes passent pour égoïstes, en particulier au lit. Même par amour pour leur compagne, la plupart ne se voient pas faire semblant d’avoir envie par des manœu-vres compliquées. Les femmes, en revanche, le font dans toute une série de situations: pendant l’amour, elles halètent et gémissent comme si elles éprouvaient un plaisir extatique, alors qu’elles ne ressentent rien.
Jusqu’ici, la sexologie décrivait platement ce comportement comme un orgasme simulé. Le phénomène est bien connu. Voilà bien un siècle que les psychologues ont découvert que les femmes feignaient parfois le plaisir. Mais la raison restait obscure.
Or, voici que la tricherie sous la couette pourrait vivre une revalorisation scientifique. La psychologue américaine Erin Cooper, de la Temple University à Philadelphie, a entrepris d’expliquer avec une pertinence jamais vue à ce jour la «tricherie désintéressée». Il était temps: car rares sont les comportements qui engendrent entre les sexes autant d’incompréhension que l’orgasme simulé. Selon des données statistiques, presque chaque femme s’y est livrée plusieurs fois, tandis que les hommes partent de l’idée que jamais leur partenaire ne leur a joué l’orgasme.
Erin Cooper a mis sur pied une Faking Orgasm Scale, un barème de l’orgasme simulé qui est le premier du genre. A le lire, on constate que l’orgasme feint sert aussi d’astuce aux femmes qui ne souhaitent rien tant que dormir.
L’enquête portant sur 481 participantes, âgées de 18 à 32 ans, a mis au jour des comportements inédits: il semble que pas mal de femmes se mettent elles-mêmes dans l’ambiance par une respiration haletante. «Cette stratégie est l’une des nombreuses astuces auxquelles recourent les femmes pour améliorer leur ressenti sexuel», commente Erin Cooper.
Manipulation. Il y a peu, des chercheurs britanniques ont découvert comment, par des clameurs tonitruantes pendant l’amour, les femmes manipulaient le comportement masculin. Il semble que les sonorités qu’elles produisent stimulent le plaisir masculin et, par conséquent, la vraisemblance d’une conception. Le fait qu’elles soient capables de maîtriser avec précision leurs gémissements, même quand elles sont vraiment excitées, a stupéfié les chercheurs. Car jusqu’alors on partait de l’idée que le vacarme du désir était une manifestation instinctive du sentiment.
Les recherches d’Erin Cooper établissent une exception jusqu’alors peu remarquée en matière de sexe oral. Il semble que beaucoup de femmes se crispent à l’idée que, dans un tel cas, le regard de l’homme est entièrement fixé sur leurs organes génitaux. Manifestement, les intéressées se tirent de cette gêne par une vivacité érotique simulée. Il est possible que les femmes soient ici les victimes d’une évolution au fond avantageuse, avance la psychologue. Naguère, la maîtrise de la stimulation clitoridienne passait pour la voie royale vers la satisfaction du désir féminin. Désormais, une attention concentrée sur le clitoris a entraîné une réaction de stress.
Et les hommes? L’orgasme simulé n’a jamais eu bonne réputation. Le fait que, comme le montrent les recherches les plus récentes, les femmes mentent sur leur satisfaction sexuelle dans leur intérêt personnel pourrait continuer de discréditer un tel comportement. A titre préventif, Erin Cooper exhorte à « un regard moins négatif sur cette pratique». Les hommes, dit-elle, ne devraient pas trop se plaindre du comportement féminin. D’autant qu’elle annonce vouloir examiner de plus près les trucs masculins. Aujourd’hui déjà, assure-t-elle, les hommes sont à peine moins tricheurs que leurs compagnes: un quart d’entre eux simuleraient l’orgasme.
Des recherches ultérieures établiront sans doute comment ils s’y prennent en l’absence d’éjaculation.
© Der Spiegel
Traduction et adaptation
Gian Pozzy