Décodage.La grossesse de Scarlett Johansson jette un froid dans son fan-club d’admirateurs mâles. Réussira-t-elle comme Angelina Jolie, Sophia Loren ou Marlène Dietrich à ce que la mère n’efface pas la bombe hollywoodienne?
Caramba, la fille la plus sexy du monde est enceinte! Scarlett Johansson, 29 ans, cette blonde aux courbes affriolantes, aux seins enjôleurs et aux fesses dignes des calendriers Pirelli des meilleures années, cette habituée du haut de tous les classements des lecteurs de FHM et des sites people du monde entier, attend un enfant pour le mois d’août. Son petit bidon se fait encore discret, mais c’est un fait: lors de la conférence de presse de promotion de Captain America, dans lequel elle joue Black Widow version agent secret russe, sexy et coriace, le réalisateur Chris Evans a dévoilé la nouvelle qui tenait le monde en haleine depuis la cérémonie des césars le 28 février dernier: la Parisienne d’adoption, la révélation de Sofia Coppola, la muse de Woody Allen, la chérie du publicitaire français Romain Dauriac, attend un heureux événement avant même d’être passée par la case mariage.
La nouvelle fait l’effet d’un coup de tonnerre dans la population mâle de son immense fan-club universel. Notre pin-up adorée, notre star glamour, notre sexe-symbole préféré, le chouchou de nos fantasmes diurnes et nocturnes en train de changer des langes? Les seins de Scarlett en tire-lait pour nourrisson? Scarlett au parc avec le papa le dimanche matin? De pin-up à MILF en neuf mois? Difficile à avaler. Clairement, de quoi casser l’image glamour et mystérieuse qu’elle a mis des années à construire. Car on a beau dire, et toutes les leçons de morale féministe n’y pourront rien changer: il y a un monde qui sépare l’imagerie de la femme libre, disponible, sexy, apprêtée, faite pour l’amour et le plaisir des yeux, et plus si entente, de celle de la mère de famille clairement indisponible, maternante et non plus offerte, rappelant que la sexualité mène à la maternité et pas seulement au plaisir.
On a beau dire, les discours actuels sur les femmes mères-et-pourtant-sexy ne sont que le reflet du politiquement correct en cours dans le monde occidental. Ne croyez pas les hommes qui disent qu’ils trouvent sexy les femmes enceintes. Imaginez-vous seulement Dita von Teese ou Marilyn en cloque? Les auriez-vous mises en poster dans votre chambre d’adolescent avec leur ventre proéminent? Les mettriez-vous en fond d’écran sur votre ordinateur? Que nenni. Hypocrite lecteur – mon semblable –, mon frère, ne prétends pas que ce contre-emploi grossier te plairait sincèrement.
L’aura glamour
La déchéance a commencé au moment où les stars, pour se faire aimer du public friand de familiarités, se sont mises à poser avec leur progéniture. Fini la star inaccessible, bonjour les actrices dans leur cuisine ou en pleine séance de yoga. Bye le mystère de la beauté fatale. Le comble a été atteint lorsque les actrices (et autres people du look) se sont mises à poser enceintes et nues. Il faudrait intenter un procès à Demi Moore qui, en août 1991, à la une de Vanity Fair, a lancé une mode que toutes les semi-stars enceintes ont cru bon de suivre, effrayant durablement les hommes à la libido normalement constituée. Que Britney Spears (Harper’s Bazaar, août 2006) ou Estelle Lefébure (ELLE France, novembre 2010) s’y prêtent, normal: elles ont toujours joué sur l’aspect girl next door de leur personnalité. Mais Monica Bellucci (Vanity Fair Italy, mai 2010)? Où Doutzen Kroes, mannequin star de Victoria’s Secret, la lingerie la plus allumeuse qui soit, qui vient de nous dévoiler sa deuxième grossesse sur Instagram?
Des sexes-symboles enceintes, il y en a eu. Peu ont réussi le pari de redevenir des stars à l’aura glamour intacte. Marlène Dietrich a donné naissance en 1924 à sa fille unique, Maria Riva. Des photos de Marlène, même dans les années 20 ou 30, il y en a des milliers. Des photos de Marlène et de sa fille, il y en a quelques dizaines, des photos de Marlène enceinte, ça n’existe pas. Idem pour Brigitte Bardot, qui a fait fantasmer des millions de mâles. Outre Marlène Dietrich, il existe deux exemples de stars qui, post-bébé, ont gardé absolument leur statut de machine à fantasmes glamour: je veux parler de Sophia Loren et, évidemment, d’Angelina Jolie. Angelina «Lara Croft» Jolie, à la tête d’une véritable tribu à la Joséphine Baker, mère de trois enfants biologiques. Une recette: garder la ligne, ne pas sourire devant les photographes et, surtout, interpréter au cinéma des superhéroïnes flirtant avec le pouvoir, l’indépendance, la révolte – Maléfique, Salt 2 ou Cleopatra pour ne prendre que trois des films annoncés pour Angelina.
Au panthéon
«Malgré» deux fils, Carlo né en 1968, et Eduardo, né en 1973, l’Italienne Sophia Loren n’a jamais quitté le panthéon des femmes les plus désirables du monde, restant même une septuagénaire absolument compétitive. En juillet 2006, elle pose même pour la 33e édition du calendrier Pirelli et devient ainsi, à 71 ans, le modèle le plus âgé ayant posé pour le label italien. Une recette? Ne jamais poser pour les photographes sans un décolleté plongeant, affolant pour n’importe quel regard masculin. Bref, en faire des tonnes pour que le message passe bien: une paire de seins, lorsqu’on est actrice, c’est avant tout fait pour le bon plaisir des yeux des spectateurs. Si parfois un bébé s’y est accroché, c’est purement accidentel.
Pour Scarlett, hélas, il semble qu’elle ait trop lu Balzac. La femme de 30 ans qu’elle se prépare à devenir souhaite qu’on la regarde différemment désormais. Dans une interview au Wall Street Journal, miss Johansson explique qu’elle ne veut plus être un sexe-symbole, mais qu’au contraire, elle réfléchit désormais à «l’organisation de sa vie de future maman». J’en connais déjà trois qui ont enlevé Scarlett de leur fond d’écran. Que le premier qui n’a pas imaginé faire pareil leur jette la pierre.