Zoom. Même Chanel y succombe. Déjà it-bag à la montagne et à l’école, il poursuit son ascension de la ville aux podiums. Le sac à dos revient de loin et s’accroche au plus près.
Jessica richard
Aventurier, le sac à dos envoûte et déroute,à l’instar du modèle graffiti à breloques Chanel, dévoilé lors de la Fashion Week printemps-été 2014, à Paris. Avec son style grunge proche des tourments de l’adolescence gribouillés au Tipp-Ex, il déchaîne la fureur des modeuses. Uniquement disponible en édition limitée, l’objet du désir est épuisé. Reste le désir. Et le pari réussi de Lagerfeld. «C’est le retour de l’esprit nomade baroudeur, indique Vincent Grégoire directeur art de vivre pour l’agence NellyRodi, à Paris. On met sa maison sur le dos et on part bouffer le monde.» Avec ses deux mains libérées, il est désormais possible de tenir deux coupes de champagne, de s’éclater à saute-mouton ou de tendre les bras.
Jouant des bretelles avec ses cousins à main et en bandoulière, le Chanel figure au classement des «30 sacs stars du printemps-été 2014» sur le site Vogue.fr. Cara Delevingne, la nouvelle Kate Moss, sortira en septembre une gamme de sacs en collaboration avec la marque anglaise Mulberry. Ils pourront se porter sur le dos. Pratique et élégant, comme l’homme idéal, le backpack s’impose et tous les créateurs s’y mettent: Alexander Wang, Stella McCartney, Phillip Lim, Pierre Hardy pour ne citer qu’eux. Des modèles souvent en «rupture de stock». Récupéré des années 90, véritable trou noir du chic, le sac à dos est passé de has been à must have.
En Suisse aussi
Dévoilé en avril, le nouveau venu de la gamme de luxe de Freitag est un Rucksack. Le R521 Coolidge, en hommage à l’alpiniste éponyme, premier à gravir la Jungfrau en hiver – vient compléter la collection Reference. Pour la marque zurichoise, la transition du héros de la montagne au héros du quotidien fait sens. Paré de son Coolidge, le jeune architecte sillonne la Bahnhofstrasse sans crainte, ses planches et son MacBook à l’abri dans un écrin de bâche, aussi hydrofuge que smart. Une tendance sur laquelle surfe également Qwstion, autre marque zurichoise, dont les sacs à dos minimalistes étaient sélectionnés pour le dernier Prix Design Suisse. Dans le même style, le canadien Herschel et le suédois Sandqvist redessinent les versos: des hispters de Brooklyn aux universitaires lausannois. Identifiable de loin avec ses quatre sangles en cuir, le Little America Backpack d’Herschel est partout. «C’est nettement mieux pour le dos, s’enthousiasme Ulla Glatz, physiothérapeute à Lausanne. Beaucoup de gens viennent me voir avec des problèmes de dos causés par des sacs à bandoulière trop lourds. Porter un sac à dos, c’est répartir le poids sur les deux épaules. Cela fait une grosse différence.»
Reconversion réussie
«A New York, beaucoup d’hommes d’affaires en portent. On repart en camping mais en costume, plaisante Vincent Grégoire. C’est le retour du pèlerin, du voyageur: les gens ont soif d’évasion au quotidien.» Fruit de la «newstalgie» – faire du neuf avec du vieux – le sac à dos s’érige en emblème d’une quête de liberté nouvelle. Chevaucher son vélo, attraper le métro, choper le bus, sauter dans le train, la transhumance quotidienne du citadin exige un sac à sa vitesse. Un sac pour l’Indiana Jones en chacun de nous. «Le néomigrant d’aujourd’hui a besoin d’avoir les mains libres», résume le spécialiste.
Une tendance confirmée par le World Handbag Report, un rapport de la société genevoise Digital Luxury Group, spécialisée dans l’intelligence économique pour les marques de luxe. «Au niveau mondial, l’intérêt pour le sac à dos a augmenté de 23% entre 2012 et 2013.» Qui sait? Les nouveaux Birkin ou Kelly, sacs à main iconiques d’Hermès, seront peut-être à bretelles.