Portrait. Triple champion suisse de stand up paddle, le Vaudois a participé à l’essor de cette discipline. Lorsqu’il ne glisse pas sur les eaux, il fabrique des planches, dessine et édite des livres d’artistes.
Séverine Géroudet
Casquette de capitaine, crâne rasé, barbe drue, tatouages, et un équilibre à toute épreuve. Steeve Fleury ne marche pas, il glisse. Sur roulettes ou sur l’eau, mais toujours sur des planches. D’où lui vient cette passion? «Avec un père véliplanchiste, j’ai été confronté au monde de la glisse depuis tout petit. Et j’ai très vite eu pour rêve de devenir surfeur.» Mais quand, à 11 ans, il révèle son projet d’avenir à l’école («fabriquer des planches»), son professeur lui rétorque qu’il ne s’agit pas d’un vrai métier et le traite de paresseux. Un coup dur pour le jeune garçon qui se tourne alors vers une formation de microtechnicien. «La glisse est restée un hobby. Je faisais du skate, du snowboard et du surf en vacances.»
C’est en 2007, enthousiasmé par un reportage sur le stand up paddle (SUP), qu’il s’essaie pour la première fois à cette discipline. Il est l’un des premiers en Suisse à tester ce sport dérivé du surf, aujourd’hui en plein essor, qui se pratique à l’aide d’une pagaie sur une planche de 2 m 50 à 4 m 10 de long. Le Vaudois de 34 ans se souvient: «Je revenais de trois mois en Australie, durant lesquels j’avais fait du surf tous les jours. A mon retour, je voulais pouvoir pratiquer en Suisse un sport nautique qui me procure les mêmes sensations.»
Triple champion suisse
Steeve Fleury voit dans le SUP le moyen de surfer en eau douce. Il se rend alors dans un magasin spécialisé dans les sports de glisse pour s’acheter une planche, mais personne ne connaît encore cette discipline. Il parvient finalement à se procurer un modèle par commande sur catalogue et commence à pratiquer le sport en autodidacte. «Les cours n’existaient pas à l’époque et il n’y avait que trois modèles de planche proposés à la vente en Suisse. L’année suivante, le même catalogue en proposait plus de vingt!»
C’est dire l’engouement qu’a connu le stand up paddle à travers le pays ces dernières années. Et Steeve Fleury n’y est pas étranger. Résolu à promouvoir le SUP, il participe en 2011 à la fondation de l’Association suisse de stand up paddle qui, la même année, organise les premiers Championnats suisses. Dès la première édition, il remporte les deux épreuves du programme: la course longue distance, qui s’effectue sur un parcours de 12 km, et la Technical Race, qui forme une boucle de 3 à 5 km et comporte un passage sur terre ferme. Aujourd’hui triple champion suisse dans ces deux catégories, Steeve Fleury remettra son titre en jeu le 5 juillet prochain à Crans (VD). L’an dernier, une cinquantaine de paddleurs venus de toute la Suisse se tenaient sur la ligne de départ.
Steeve Fleury a participé à plusieurs autres compétitions internationales, notamment aux Championnats du monde, qui se sont tenus au Pérou en 2012. Il s’est classé quinzième à la Technical Race. «Je ne suis pourtant pas un compétiteur dans l’âme, mais j’ai l’avantage de pratiquer le SUP presque 365 jours par an, ce qui entretient ma forme et me fait progresser.» En effet, même en hiver, ce passionné, qui a besoin de rester en contact avec l’eau, arpente le lac Léman sur sa planche. «C’est en dehors de la saison estivale que le lac est le plus beau, car il est presque désert, lisse et calme.»
Sa passion pour le SUP fait renaître sa vocation professionnelle première, celle de devenir shaper, un artisan qui fabrique des planches de surf. Sponsorisé dès ses débuts par Nidecker, il décide avec la marque de développer des prototypes dans un atelier dédié au SUP, à Rolle. «Dessiner et fabriquer des planches représente pour moi le job idéal.»
Créatif, le jeune homme a également développé au fil des ans son intérêt pour le dessin. Il a fondé avec deux acolytes la maison d’édition Ripopée. La petite structure édite de manière artisanale des livres d’artistes contemporains – écrivains et dessinateurs principalement – en édition limitée. Ripopée a reçu le Prix artistique de la ville de Nyon en 2013.