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«Mon mari et moi avons beaucoup en commun: il m’aime, je m’aime»

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Jeudi, 19 Juin, 2014 - 05:51

Rencontre. Jet-setteuse alémanique, Irina Beller a publié un ouvrage de conseils pour épouser un millionnaire. Portrait d’une drôle de dame.

Ce lundi après-midi de juin, Irina Beller, 41 ans, nous a donné rendez-vous au Dolder Grand, imposant cinq-étoiles qui domine Zurich. Elle est cliente du centre de wellness et a prévu de s’occuper d’elle-même. Auteure de Hello Mr. Rich, comment j’ai épousé mon millionnaire, elle court et enchaîne les rendez-vous pour parler de son livre publié fin mai. Elle n’y dévoile pas son histoire personnelle, mais donne une foule de conseils pour séduire un Crésus: de la tenue à adopter lors du premier rendez-vous au contrat de mariage, en passant par des astuces pour assister à un cocktail chic sans y être invité. Son ouvrage donne de l’urticaire aux féministes. Il a le mérite de sentir le vécu.

Son Mr. Rich est un promoteur immobilier multimillionnaire, Walter Beller, 65 ans. Silhouette élancée dans son pantalon Saint Laurent, elle arrive avec six minutes d’avance. Les bijoux – boucles d’oreilles en pierre aquamarine et collier en diamant – sont remarquables. La belle Irina, blonde ce jour-là, choisit la terrasse et une coupe de champagne. Les glaçons sont servis à part, dans une coupelle. Elle y plonge une pince et tente, désespérément, d’en capturer un. Mise en scène ou sens de l’à-propos, elle commente: «Attraper un glaçon est plus difficile que mettre la main sur un millionnaire!» L’interview peut commencer.

Coqueluche des médias

La jet-setteuse se prête volontiers aux questions. Elle a l’art de la petite phrase piquante et celui de mettre son inter­locutrice à l’aise, au point de lui faire oublier ses boucles d’oreilles en plastique. Pas étonnant que les médias alémaniques s’intéressent tellement à elle. Irina Beller ne s’en cache pas: elle sait ce qui leur plaît. «Je leur donne assez de matériel pour qu’ils n’aient pas à puiser dans leur imagination, je suis flexible et ne les embête pas avec la relecture de citations. De toute façon, la presse m’a mise dans un tiroir. Il faut bien nourrir les lecteurs. Tout le monde veut lire: «Elle avait bu.» Ou: «Elle ne portait pas de culotte sous sa robe.» Les gens aiment se dire qu’il y a pire qu’eux: Irina Beller. Alors quand on m’invite sur un plateau TV, je fais mon show, les téléspectateurs doivent s’amuser, ça fait monter l’audience. J’ai toujours voulu être célèbre. A Moscou, une femme sur deux est comme moi.»

Née en Ukraine, l’Alémanique d’adoption a grandi à Moscou. Son père travaillait pour le KGB, sa mère était professeur de français. «Nous avons vécu cinq ans en Allemagne de l’Est. Mon père prétendait être dans le commerce de films. Il m’emmenait dans les festivals. J’ai vu beaucoup de films lorsque j’étais enfant et rencontré des critiques de cinéma. Plus tard, j’ai étudié la cinématographie à l’Université de Moscou. J’aime les films compliqués qui me font réfléchir.» Ses réalisateurs favoris sont Kieslowski et Sokourov.

Son rêve de petite fille n’avait pourtant pas grand-chose à voir avec le grand écran. «Un jour, alors que mon père me montrait les universités de la capitale en me disant: «Ici tu peux devenir professeur, ici scientifique, ici avocat», je lui ai demandé: «Comment on devient mariée?» A 18 ans, la Moscovite épouse un Letton. «Il faisait partie des 230 personnes les plus riches de son pays.» Le mariage tourne court. «Nous étions trop jeunes…» Elle fait ensuite la connaissance d’un Suisse en visite à Moscou. C’est le coup de foudre. «Nous avons passé trois jours ensemble. Il était beau, sexy et avait neuf ans de plus que moi. Je suis venue en Suisse. Mon mariage avec ce vendeur de meubles de bureau est la plus grande erreur de ma vie.» Pas assez riche? Irina Beller se rembrunit. Elle raconte la naissance de sa fille, leur séparation. «A 2 mois, il a placé notre bébé chez sa mère. J’ai lutté trois ans pour en avoir la garde. Mais j’étais seule, sans travail, sans argent et sans famille.» Plus le temps passe, plus ses chances de la récupérer diminuent, car la justice ne veut pas bouleverser son quotidien. Les premières années, elle ne peut voir son enfant qu’une fois par mois. Aujourd’hui, elle n’a plus de contact avec sa fille âgée de 18 ans, car celle-ci est «dans des milieux de gauche qui méprisent l’argent».

Irina Beller raconte avoir beaucoup souffert et beaucoup appris aussi. «J’avais la haine contre la Suisse. A partir de là, j’ai décidé de prendre mon destin en main et d’avancer.» Elle s’inquiète soudain. «Vous n’allez tout de même pas écrire des choses aussi tristes? Je suis aussi une femme légère et superficielle qui aime s’amuser et être dans la presse à scandale.» La jet-setteuse explique avoir écrit Hello Mr. Rich pour gagner la reconnaissance du public. «Je voulais également faire quelque chose de ma popularité. Je reçois beaucoup de lettres de femmes qui me demandent comment épouser un riche. Elles me confient qu’elles en ont marre que beaucoup d’hommes profitent d’elles. J’ai écrit ce livre pour répondre à leurs questions.»

Amant et billets de 1000 francs

Irina a 24 ans lorsqu’elle décide de partir en chasse pour assurer sa survie. Elle qui affirme n’avoir jamais travaillé un seul jour de sa vie applique un de ses conseils: déjeuner dans un endroit bien fréquenté. A la mi-journée, Mr. Rich est rarement en compagnie féminine. Lors d’une partie de chasse avec deux copines à la Kronenhalle, endroit de prédilection du Tout-Zurich, elle repère un homme, seul et d’âge mûr, qui n’arrête pas de les regarder. «Après avoir payé notre addition, il nous a invitées à boire du champagne. Il flirtait avec nous trois, mais c’est moi qu’il a choisie. J’étais la plus jeune et la plus insouciante. Et lui voulait s’amuser.» L’homme d’affaires, un Italien très riche mais marié, a trente ans de plus qu’elle. «A mes yeux, c’était un grand-père. Il avait également deux têtes de moins. J’étais gênée de marcher dans la rue avec lui. Lorsqu’il me donnait la main, je regardais autour de moi.»

Elle raconte sa première invitation à Monaco, alors qu’ils n’avaient pas encore passé aux choses sérieuses. «Je lui ai demandé où j’allais dormir. Il m’a parlé d’une suite à mon usage. J’ai ensuite évoqué ma garde-robe, trop modeste. Je lui ai aussi expliqué que je devais laisser tomber toutes mes activités pour l’accompagner. Il m’a alors demandé: «Combien?» C’est là qu’il ne faut pas se tromper en estimant son Mr. Rich.»

Concrètement, comment se faisait-elle entretenir? Exigeait-elle des sommes précises? «On ne demande pas. Tout homme sait qu’une femme veut de l’argent. Mon riche Italien glissait des billets de 1000 francs partout, dans mes souliers, dans mon verre à dents. Un jour, je lui ai dit que j’avais besoin de 20 000 francs, il me les a donnés. Il a également remboursé toutes mes dettes, m’a offert des habits, des bijoux, et a ouvert un compte en banque à mon nom.» En y mettant quelle somme? Regard énigmatique de la jolie blonde. On lance un chiffre au hasard: 100 000 francs? Elle sourit. «100 000 francs, c’est juste un collier.»

Son «idylle» avec son multimillionnaire durera plus d’une demi-année, dans la plus belle suite du Dolder Grand. «Il m’y rejoignait deux ou trois jours par semaine. Au bout de quelques mois, j’ai commencé à l’aimer. Il a tant fait pour moi. Mais j’ai vite compris qu’un Italien ne divorcerait jamais.» En bonne chasseuse, elle a donc continué d’ouvrir l’œil. Et un jour, alors qu’elle soupait en compagnie de son riche amant, qui s’était absenté quelques minutes, un homme s’est approché d’elle. Dans la version officielle, c’est lui qui lui a tendu sa carte. Elle a attendu trois mois avant de le contacter, en faisant appeler une amie. «Il fallait que la voix paraisse la plus détachée possible.» Son plan a marché: cela fait dix-sept ans que le couple est ensemble, et quinze ans qu’il est marié. Pour le meilleur. Et pour le pire.

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Geri Born für Schweizer Illustrierte
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