Poésie. A 30 ans, le plus célèbre des écrivains allemands a dormi à Mont-sur-Rolle, au Brassus, et fait l’ascension de la Dent-de-Vaulion. Grâce à ses lettres, on le suit à la trace.
Le 24 octobre 1779, Goethe se réveille sur La Côte, à l’actuel chemin du Stand 15, à Mont-sur-Rolle, «une chaîne d’habitations champêtres et de maisons vigneronnes». Il loue un cheval et gagne en trois heures le col du Marchairuz. En chemin, il a vue sur le Léman, de Lausanne à Genève. «C’était un si grand spectacle que l’œil de l’homme n’y suffit pas.»
Aujourd’hui, pour gagner ce col, on sort du train à Allaman, attend le car postal devant une multinationale suédoise de meubles en kit, et atteint le col en quarante-trois minutes, en compagnie de retraités germanophones. Au col, des motards, en cuir et en groupe; des randonneurs, en souliers Salomon et en veste Mammut; des automobilistes, en couple et en habits du dimanche; des cyclistes, en cuissards et en chaussures casse-gueule. Une serveuse frontalière court de table en table.
Goethe gagne ensuite la vallée de Joux. «On sent l’application, le travail et le bien-être. Il faut louer surtout les belles routes, dont l’Etat de Berne prend soin.» Le pays de Vaud est alors – et pendant dix-neuf ans encore – en territoire suisse allemand.
L’écrivain passe la nuit au Brassus, dans une maison «qui n’avait pas pour habitude d’héberger les étrangers». Son récit parle d’un feu allumé à même le sol, sur des dalles de pierre, et d’une vaste cheminée. Parmi les maisons du XVIIIe siècle, seul le No 11 de la rue de la Gare correspond à sa description.
On y rencontre le voisin, Daniel Aubert, mémoire vivante de la Vallée. Il connaît l’emplacement du «petit coin carrelé vers la fenêtre, autour de l’évier», dont parle une lettre de Goethe. Il possède aussi un cliché de la maison pris vers 1860 par le photographe combier Auguste Reymond; il avait son atelier sous les toits du No 7 de la rue de la Gare.
Chemin didactique
Le lendemain matin, Goethe traverse la Vallée et s’étonne de la simplicité des noms donnés aux villages: Le Sentier, L’Abbaye – «qui est maintenant un village, mais qui était jadis un couvent de religieux auxquels toute la vallée appartenait» – Le Lieu, Le Pont.
Au Pont justement, la Société de développement projette de créer bientôt une Promenade de Goethe, un chemin didactique sur les pas de son hôte prestigieux.
C’est dans ce village qu’il engage un guide, un capitaine forestier, et monte au sommet de la Dent-de-Vaulion. Le Plateau est couvert de brume. «De cette mer s’élevait à l’orient, nettement dessinée, toute la chaîne des montagnes blanches et des glaciers, sans distinction du nom des peuples et des princes qui croient les posséder.» Il s’émerveille des Alpes valaisannes, bernoises et du Mont-Blanc. «Nous partîmes à regret. Quelques heures d’attente – le nuage se dissipant d’habitude vers ce temps-là – nous auraient permis de découvrir le bas pays et le lac. Mais, pour que la jouissance fût parfaite, il nous fallait bien avoir encore quelque chose à désirer…»
Aujourd’hui, nul besoin de guide, il suffit de suivre les losanges jaunes. Le panorama au sommet n’a pas changé depuis le siècle de Goethe. Eblouissant. On partira aussi «à regret».
À voir
Le Sentier
Espace horloger
L’unique musée horloger vaudois a fait peau neuve en 2012. Un espace métier, un espace musée et une zone cinéma 3D mêlent tradition et modernité pour présenter l’horlogerie de manière ludique et interactive.
Grand-Rue 2
www.espacehorloger.ch
Le Lieu
L’Impasse du loup
Au bord du lac de Joux, dormir dans la paille pour 15 francs la nuit, traire les vaches et participer aux activités agricoles. Possibilité de prendre le repas du soir et le petit-déjeuner.
Les Terreux 16
www.impasseduloup.ch
Vallorbe
Fort de Pré-Giroud
Ce fort d’artillerie utilisé pendant la Seconde Guerre vaut le détour. Creusé dans la roche, un réseau de galeries relie des magasins de munitions, une salle des machines et une caserne. Ouvert du mercredi au dimanche.
Chemin Le Rosay
www.pre-giroud.ch
Johann Wolfgang von Goethe
Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832) est souvent cité comme l’un des Illuminés de Bavière. Il a aussi bien écrit Les souffrances du jeune Werther (1774), proposé une théorie de la lumière, que fait la découverte, en anatomie, d’un os de la mâchoire.