FRIBOURG. C’est l’un des cantons aux coûts hospitaliers les plus chers en Suisse. Les grandes manœuvres ont commencé.
Est-il possible de réussir une réforme hospitalière en terre fribourgeoise? Au début des années 90, c’est le conseiller d’Etat Denis Clerc qui avait perdu son poste pour s’être montré trop visionnaire. Vingt ans plus tard, la socialiste Anne-Claude Demierre risque le même sort.
Le monde hospitalier du canton est en état de choc. Face à des coûts de 20 à 30% plus élevés qu’ailleurs, les responsables de l’Hôpital fribourgeois, soutenus par Anne-Claude Demierre, ont proposé un plan de mesures draconiennes. Leur stratégie consiste à concentrer les soins aigus – d’ici à 2022 – sur le site de Fribourg, qui sera agrandi grâce à des investissements de 500 millions de francs. Elle supprime les blocs opératoires de Tavel et de Riaz. Elle prévoit enfin de fermer la maternité gruérienne, probablement en 2014 déjà. Ces restructurations sont menacées par une initiative de l’UDC, qui tient à maintenir des hôpitaux de proximité et à politiser le dossier en confiant le pouvoir de décision au Grand Conseil. «Je suis choqué par la manière très peu démocratique dont la réforme hospitalière se fait», déclare le président de l’UDC Roland Mesot.
Puissants districts. Si Fribourg a pris un retard considérable avant d’enclencher des réformes, c’est que ce canton s’articule sur des districts très puissants, dont chacun disposait de son propre hôpital. Impossible désormais de raisonner dans cette logique.
En 2012, l’Hôpital fribourgeois a totalisé un excédent de charges d’environ 60 millions de francs. Continuer comme cela, ce serait «foncer dans le mur», pour reprendre les termes d’Anne-Claude Demierre. La directrice de la Santé déclare comprendre les réactions de certains Fribourgeois outrés par la «brutalité» du plan d’action de l’hôpital. «Mais nous devons dépasser l’émotionnel, car l’enjeu essentiel, ce n’est ni plus ni moins que la survie et l’autonomie d’un hôpital de soins aigus performant dans un horizon de dix ans dans le canton de Fribourg. La stratégie consiste dès lors à renforcer ce centre et à l’entourer d’une couronne d’hôpitaux de proximité travaillant surtout dans la réadaptation», souligne-t-elle.
L’exercice de transparence qu’impose le nouveau financement hospitalier met à nu la cherté de l’Hôpital fribourgeois. Dans ces conditions, peut-on se permettre le luxe de disposer de quatre maternités (deux à Fribourg, une à Riaz et une à Payerne à l’Hôpital intercantonal de la Broye) dans un rayon de 25 km? A Riaz, mieux vaudrait jouer la carte de la chirurgie ambulatoire. «Nous sommes en surcapacité sur le plan des infrastructures, mais aussi en sous-capacité en termes de personnel pour assurer une présence 24 heures sur 24 dans les petits établissements à faible activité la nuit et le week-end», résume le directeur médical de l’HFR, Bernard Vermeulen.
Pour lui comme pour Anne-Claude Demierre, un immense travail de persuasion ne fait que commencer. L’essentiel, c’est d’asseoir Fribourg dans le paysage suisse des soins aigus. Et de fidéliser les patients: en 2013, les hospitalisations extérieures coûteront près de 50 millions au contribuable!
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