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Détox: comment ça marche

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Jeudi, 16 Octobre, 2014 - 06:00

Décryptage. Chasser les toxines à coup de smoothies de légumes ou de jours de jeûne est à la mode. Enquête autour d’un phénomène qui prend de l’ampleur.

Détox. C’est le nouveau mot à la mode. Les librairies regorgent d’ouvrages sur le sujet. Sur leurs couvertures, des smoothies verts et des armées des légumes au garde-à-vous, prêts à mener la guerre aux vilaines toxines. Et, comme le marché est prometteur, des entreprises de livraison de jus détoxifiants se sont lancées aussi bien en Suisse romande qu’en Suisse alémanique. Nouveau concept de restauration consacré au bien-être, l’entreprise Takinoa, qui a ouvert un restaurant à Lausanne et s’apprête à en ouvrir deux autres en Suisse romande, prévoit elle aussi une gamme de repas détox. Basée à Morges, Amy Webster, une conseillère en nutrition d’origine américaine, a, elle, lancé un programme de détox online.
Alors, efficace la détox? Qu’en disent ceux qui ont essayé? Comment ça marche et comment la pratiquer? Faut-il jeûner? Ne boire que des jus et des smoothies de légumes durant une semaine entière? L’Hebdo a mené l’enquête.

Oui, Ça marche!

Lorsque l’on écoute les Romands qui se sont lancés dans une cure de détox parler de ses bienfaits, on se demande s’ils ne sont pas tous membres de la Confrérie des légumes pressés. De l’avis unanime, les effets bénéfiques sont nombreux, à commencer par un regain d’énergie, une peau embellie, une meilleure qualité de sommeil et une sérénité retrouvée. Et cela, sans éprouver de sensation de faim.

La Vaudoise Caroline, végétarienne convaincue depuis des décennies, souffrait d’insomnies depuis de nombreuses années. «Grâce à la détox que j’ai suivie au printemps dernier, je dors sans me réveiller la nuit. Je ne m’attendais pas à ça. Et je suis persuadée que ce n’est pas psychologique. En fait, je voulais juste me recentrer sur ma nutrition. Mon mari, qui m’a suivie dans ma démarche, est devenu, lui, plus résistant et tombe moins malade.»

La Neuchâteloise Stéphanie Dellandrea, mère de trois enfants et active professionnellement, parle des effets surprenants apportés par les jus et les smoothies de légumes. «Le sommeil devient plus réparateur, la peau plus douce et j’ai atteint mon poids idéal. Durant la cure, je me sentais zen et pleine d’énergie. Depuis, je continue les jus le matin et à midi.»

Mère de famille et psychologue, Svea Nielsen, elle, évoque d’autres résultats positifs. «Durant la cure, les idées deviennent plus claires, plus fluides, comme s’il n’y avait plus d’interférences. Et la fatigue a disparu. De plus, les smoothies et les jus sont plus vite faits qu’un repas normal.»

Phénomène commercial

Pour ceux qui n’ont pas le temps de préparer leurs jus, il existe des solutions toutes prêtes, livrées en paquets express à domicile. Le marché est en plein boom et permet de mesurer le phénomène détox. A Lausanne, Wendy Vanhonacker a créé Fit‘n’Tasty au début de l’année. Trois personnes y travaillent à plein temps. S’inspirant de ce qui se fait aux Etats-Unis, la jeune femme propose des repas sains, équilibrés et diététiques, mais également des cures de détox d’un à cinq jours, soit des jus de fruits et légumes biologiques et de la région pressés artisanalement juste avant leur livraison. «Dans la région, nous comptons déjà une centaine de clients par mois pour les jus. Ce sont surtout des femmes entre 25 et 35 ans. Je suis sûre que nous ne sommes qu’au début d’un phénomène. A New York et en Californie, on trouve de vastes magasins consacrés à la détox.» Le prix pour cinq jours détox à cinq jus par jour? Trois cent dix-neuf francs. Le prix comprend des recettes pour un repas léger à midi.

Autre entreprise qui surfe sur la vague des boissons purifiantes, Detox Delight. Basée à Zurich, elle s’est lancée voici dix-huit mois et emploie quatre personnes. Si les légumes ne sont pas bios, ils sont mûrs lors de la cueillette et proviennent de la région. Responsable de projet, Véronique Frémond explique: «Actuellement, nous en sommes à 30 commandes de jus détox par semaine. Et ça augmente régulièrement. Nous livrons dans toute la Suisse.» Comme sa consœur lausannoise, elle confirme que le phénomène est promis à de belles années. «Nous avons des feed-back positifs, les gens se sentent bien après de telles cures.»

Détox collective sur Facebook

Comment expliquer ce bien-être? Les smoothies verts ont-ils un effet dopant? Amy Webster, qui a fondé le site Simplement cru, propose des détox online deux fois par année. Elle a commencé ce printemps et la deuxième détox qu’elle organise a démarré le 20 septembre. Simple, contemporain et efficace, le concept séduit. Pas moins de 80 personnes de toute la Suisse romande et même de l’étranger la suivent. Une détox collective en quelque sorte. Elle précise qu’elle s’adresse aux bien portants qui désirent rester en bonne santé.

Page Facebook sur laquelle les participants peuvent partager leurs expériences et leurs doutes, e-mails quotidiens d’encouragement, propositions de recettes et d’activités physiques (en douceur), réponse aux nombreuses questions: cette ex-conseillère en communication ne chôme pas.

Trois formules au choix

Alors, miraculeuse la détox? Assise dans sa vaste et lumineuse cuisine où des graines germées poussent dans de grands bacs, Amy Webster explique le phénomène. Tout d’abord, elle rappelle que, dans notre société occidentale, nous consommons une nourriture trop riche, trop sucrée, trop grasse, trop salée et en trop grande quantité. «Notre organisme est surchargé. Quand on boit des jus ou des smoothies, ils passent rapidement dans le système digestif. L’énergie qui était utilisée à la digestion d’aliments est donc disponible pour d’autres tâches, pour nettoyer notre corps de toutes les toxines accumulées par exemple.» Lors d’une cure, ces dernières sont éliminées par les urines, les selles, la peau, les muqueuses, etc. C’est un vrai nettoyage.

Mais pourquoi faire un nettoyage à la sortie de l’été? «Cela permet de mettre les pendules à l’heure après les grillades et le relâchement des habitudes alimentaires des vacances. Et c’est l’occasion de se préparer pour l’hiver.» Loin d’être une djihadiste du smoothie, Amy Webster propose trois formules: tout jus, tout cru (fruits, légumes et crudités mais sans corps gras) et la version la moins contraignante nommée Easy pour le cru/cuit: jus, fruits, légumes, crudités et céréales cuites sans gluten. Toutes durent trois semaines. La première est une semaine d’organisation et d’approche, durant laquelle il s’agit de faire les courses, de se procurer le matériel nécessaire et d’éliminer une mauvaise habitude par jour, par exemple le café. La deuxième semaine est celle de la cure. Quant à la troisième semaine, elle sert à réintroduire les aliments éliminés au fil des jours.

Le regard du médecin

Au fait, quelle est la définition exacte de la détoxification? Et que se passe-t-il dans le corps d’une personne qui entreprend une cure? Médecin consultant à l’unité de nutrition des Hôpitaux universitaires de Genève, Dimitrios Samaras est spécialiste en médecine interne et en nutrition clinique. Sa définition de la détoxification est précise: «C’est l’augmentation de l’activité des enzymes de phase 2 du foie. Ces enzymes de phase 2 vont rendre solubles toutes les substances qui vont circuler dans notre corps et qui pourraient s’y accumuler sans en être excrétées. Ces toxines, rendues solubles, seront alors éliminées par les selles, l’urine, la sueur.»

Les toxines, qu’est-ce exactement? Ce sont certains additifs, des pesticides, des antibiotiques et des métaux lourds présents dans les aliments. Les légumes les plus détoxifiants sont le brocoli, le chou, le céleri, les oignons.

Selon lui, deux choses restent obscures aujourd’hui: la question de savoir ce qui est considéré comme une toxine ainsi que l’effet de la présence de toxines dans le corps et l’effet attendu si on en diminue la quantité. «Scientifiquement, le niveau d’évidence n’est pas bon.» Pas facile en effet de mesurer le bien-être des gens. C’est une notion très subjective, elle n’est ni carrée, ni mathématique.

Outre les jus, il existe une autre façon de pratiquer la détox: le jeûne. Dans ce domaine également, les ouvrages foisonnent et des cliniques proposent des séjours zéro calorie, ou presque. Ce qu’en pense Dimitrios Samaras? «Le jeûne, c’est une autre histoire. Les quatre ou cinq premiers jours, la personne va puiser de l’énergie dans ses muscles puis de plus en plus dans ses graisses.» Ces graisses produisent des corps cétoniques, donc des toxines. Les corps cétoniques ont des effets euphorisants, comme l’alcool, par exemple. Cela explique le bien-être ressenti lors d’un jeûne. Son conseil? «S’alimenter de façon saine et équilibrée tous les jours et non pas pendant trois semaines par année, avec un programme détox.»

Détox, smoothies et jus verts, cette mode fait sourire les professionnels de la santé du Centre Kousmine, à Vevey. Conseillère en nutrition, Nathalie Sauthier rappelle que la doctoresse Catherine Kousmine – qui a œuvré pour montrer la dépendance étroite entre la santé et l’alimentation – prescrivait à ses malades des détox voici cinquante ans déjà. «Le but est de soulager le foie qui est le maître de la détoxification. Elle parlait de régime «hypotoxique». Une détox, ce n’est pas anodin. Il vaut mieux faire un bilan préalable chez un professionnel de la santé avant de se lancer.»

Médecin ayant collaboré avec la doctoresse Kousmine, Luc Moudon, lui, met en garde ceux pour qui la détox ne serait qu’une parenthèse avant de se relancer dans la malbouffe. «La flore intestinale s’entretient tout au long de l’année. Ce que l’on mange influence notre santé, notre énergie et notre sommeil.»

Il tient cependant à préciser qu’un peu de toxines n’a jamais tué personne. Au contraire. «Les toxines agissent comme un vaccin le jour où le corps y est confronté. Les gens qui mangent tout bio n’ont pas ce système de défense. J’ai vu, chez ces personnes, des cas de cancer que l’on ne voit pas autrement.» On peut donc avaler un cheeseburger en toute bonne conscience? «Certaines personnes sont très polluées et se portent bien. Tout est une question d’équilibre et de constitution.» Chic alors… Un steak-frites, s’il vous plaît!


Restez simple! Les conseils de Dimitrios Samaras, médecin consultant à l'unité de nutrition des HUG, Genève

«Mettez tous ces aliments-là dans votre assiette toute l’année. Pourquoi attendre que toutes les toxines s’accumulent? Pourquoi faire des à-coups et ne pas adopter une vitesse de croisière?»

Crus ou cuits, les légumes? «L’important est de les consommer. Si une personne ne veut pas manger un chou-fleur cru, il ne faut pas la braquer en lui disant que s’il est cuit, il est moins intéressant. En général, cru est mieux que cuit et cuit croquant est mieux que trop cuit.»

Comment apprêter les légumes de la liste? Il n’y a pas de spécificité. Son conseil: keep it simple (restez simple). Les légumes secs quant à eux n’ont pas les mêmes propriétés. Moins un aliment est frais, plus son contenu vitaminique diminue.

Le professionnel de la santé souligne encore l’importance de consommer des aliments biologiques. «Les légumes qui ne sont pas bios ont une charge de pesticides augmentée. Comme certains poulets qui sont pleins d’antibiotiques et d’hormones.»


Corinne Jeanmonod Brandt
«Avec la détox, je me sens hyper bien et de bonne humeur»

A 45 ans, Corinne Jeanmonod Brandt est mère de quatre enfants et travaille dans l’accompagnement. Des problèmes de santé, elle n’en connaît pas vraiment. Alors pourquoi faire une détox d’une semaine avec des jus verts? «J’avais découvert le cru avec les recettes d’Amy Webster qui donne des cours à Morges, mais je ne les mettais pas beaucoup en pratique.»

Lorsqu’elle apprend que la conseillère en alimentation organise des détox avec un soutien et des conseils en ligne, elle s’inscrit. «C’était une bonne occasion de remettre le pied à l’étrier et d’introduire un maximum d’aliments frais et non transformés dans toute l’alimentation familiale.» Elle qui se dit gourmande, amatrice de bonne chère et de chocolat, raconte que cette semaine de détox ne lui a pas coûté de grands efforts. «Je n’ai jamais eu faim. Et quand on boit beaucoup de smoothies, on oublie de grignoter.»

Résultat? Une énergie décuplée, une «encore plus grande envie» de se lever le matin, une sensation de légèreté et, pour son mari qui l’a accompagnée dans la détox, une nette diminution des démangeaisons cutanées dues à son psoriasis. «Dans mon entourage, les gens me disaient: «Tu as l’air de bien aller!» Histoire de ne pas perdre les bonnes habitudes, la famille continue de boire des jus frais le matin et tout le long de la journée.

«Désormais, je mets beaucoup de vert dans l’alimentation que je prépare. J’ai remarqué que cela diminue l’envie de grignoter chez tout le monde.»


Patrick Delarive
«Jeûner était une expérience extraordinaire»

Mince, le teint frais et l’œil pétillant, Patrick Delarive, entrepreneur vaudois de 52 ans, raconte l’expérience qui, en juin, a transformé sa vie: dix jours, au sud de l’Espagne, dans une clinique, pour jeûner. «Le bien-être que j’ai ressenti était si puissant que j’en reste encore imprégné aujourd’hui.» Une vie socioprofessionnelle bien remplie, des repas pris au restaurant, le Vaudois qui aime le vin et la bonne chère était, comme il dit, «rouge et joufflu» à 45 ans déjà. Voici sept ou huit ans, il décide de se prendre en main et planifie une thalassothérapie tous les deux ans. «Mais je reprenais du poids. Et la fatigue s’accumulait.»

Son épouse entend parler des cliniques Büchinger. Il s’inscrit et part sans téléphone portable ni ordinateur. Sur place, le programme commence par une visite médicale. Suivent trois repas légers, et c’est le jeûne, avec tout de même 2 décilitres de bouillon léger midi et soir et une cuillère de miel dans une tisane à 16 h. «J’étais un peu angoissé. Je me demandais comment j’allais vivre sans manger.»

Résultat: zéro sensation de faim. Sur place, Patrick Delarive marche quelque 20 kilomètres par jour et fait une heure de sport en salle. Au bout de trois jours, il se rappelle être entré dans «une autre dimension. J’étais dans un tel état de bien-être. J’avais zéro souci et angoisses. La notion de temps avait disparu. Pour la première fois, je ne pensais à rien». De retour à Lausanne, délesté de 5 kilos et de 3500 euros, le prix du séjour, le Vaudois change ses habitudes. Aujourd’hui, il mange plus sainement, soit moins de viande mais plus de légumes. D’autres bonnes résolutions? «J’ai envie de refaire cette expérience. L’an prochain, j’aimerais rester deux semaines.»

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