Reportage. Sept apprentis cuisiniers ont eu la chance de suivre un cours donné par Benoît Violier à l’Hôtel de Ville de Crissier, avant de déguster un somptueux repas. Une expérience hors norme à laquelle «L’Hebdo» a pu assister.
Il est à peine 9 h 15 ce matin que l’Hôtel de Ville, à Crissier, bourdonne déjà d’activité. En cuisine, marmitons, commis et chefs de partie pèlent, coupent, cisèlent, préparant les ingrédients qui serviront à composer les mets du service de midi. En salle, on repasse les nappes, on polit les couverts, on s’assure que tout sera impeccablement prêt pour accueillir les convives.
A l’étage, au-dessus de cette agitation, sept apprentis cuisiniers de troisième année dégustent un café et des viennoiseries. Ils sont accompagnés par le doyen restauration-service-boucherie-charcuterie de l’Ecole professionnelle de Montreux, où les quelque 480 apprentis cuistots du canton de Vaud suivent leurs cours. Daniel Chatagny est manifestement heureux d’accompagner ses élèves. Il connaît bien la maison pour y avoir œuvré aux fourneaux à l’époque de Fredy Girardet, au début des années 80.
Si les sept apprentis sont ici ce matin, c’est qu’ils ont été désignés par leurs professeurs comme particulièrement motivés et désireux de parfaire leurs connaissances. Ils vont ainsi avoir la chance de suivre un cours sur les poissons, coquillages et crustacés donné par le patron des lieux, Benoît Violier, meilleur ouvrier de France, trois étoiles Michelin, 19 sur 20 au GaultMillau.
Ils sont là grâce aussi à David Lizzola, CEO du groupe Léguriviera, qui non seulement fourni l’Hôtel de Ville, mais participe également à la formation des apprentis cuisiniers du canton, en coorganisant et cofinançant des événements comme celui-ci.
Boungnong Soumphonma travaille aux cuisines d’un centre commercial, Jordane Marie Basset dans celles d’une clinique privée, Marcos Watanabe dans un hôpital, José Chaves dans un EMS, Samuel Menoud dans un restaurant lausannois, Fabien Gehri dans un restaurant du Nord vaudois, Alexandre Mikaelian dans une institution.
Les voici maintenant en veste blanche, assis dans la cuisine, face à Benoît Violier qui leur explique les différentes sortes de poissons, coquillages et crustacés. Une vraie encyclopédie. La connaissance que le chef a de ces produits est impressionnante. Il est capable d’énumérer toutes les variétés, connaît les différentes façons de les pêcher et, bien évidemment, la manière de les apprêter somptueusement: «Il faut surtout être attentif à la fraîcheur et très peu cuire ce genre de chair.»
Tout le monde se retrouve ensuite au sous-sol, où Benoît Carcenat, sous-chef de cuisine, présente aux apprentis l’arrivage du jour. Huîtres, vongoles, vernis, tourteaux, langoustines, couteaux, crabes, turbots… Un étalage magistral et gourmand examiné dans les moindres détails.
Gros dormeur au muscadet
Franck Giovannini, le chef de cuisine de l’Hôtel de Ville, emmène le groupe aux fourneaux. Tandis que tout autour la brigade du restaurant s’active, les apprentis vont suivre pas à pas l’exécution de trois recettes: l’effilochée de gros dormeur (tourteau) au muscadet, le dos de turbot cuit au four et la langoustine croustillante agrémentée d’une grecque de légumes. Tour de main, assaisonnement, temps et méthode de cuisson… Les apprentis sont fascinés par la technicité du chef, ne perdent pas un mot de ses explications claires et précises, photographient chaque détail avec leur smartphone. L’ambiance est amicale, on est entre professionnels, entre passionnés surtout.
A humer tant de fumets envoûtants et raffinés, tout le monde salive. Après s’être changés, les apprentis rejoignent un salon particulier au premier étage du prestigieux établissement, où ils vont être servis comme des rois.
A la fin du repas, moment attendu entre tous, Benoît Violier vient les saluer, redisant à quel point il est heureux de faire ce métier et toute l’importance qu’a à ses yeux la formation des apprentis.
S’il a 19 points sur 20 au GaultMillau, les apprentis cuisiniers, eux, en sortant de l’Hôtel de Ville, lui donnaient tous 20 sur 20 pour son accueil et son savoir. Et les étoiles que ces jeunes avaient dans les yeux étaient bien plus nombreuses que les trois que le chef affiche au Michelin.