Reportage. La maison Gübelin propose un séminaire de deux jours sur les pierres précieuses de couleur. Après Hong Kong, les cours se déroulent en Suisse.
Ce vendredi matin de novembre, le temps sur Genève est gris. Pas grave, la journée promet d’être chatoyante. Le joaillier Gübelin organise un séminaire sur les pierres précieuses, à l’intention de la presse, dans un cinq-étoiles de la place. L’année dernière, la maison familiale, dirigée par la 6e génération, a lancé une formation de deux jours pour les amateurs de pierres précieuses de couleur. Le séminaire a déjà eu lieu à Hong Kong. Fin novembre, il sera organisé pour la première fois en Suisse, à Zurich. Il est ouvert à tous et surtout à toutes, à condition de comprendre l’anglais. Tout savoir sur un compagnon de rêve peut fournir des arguments convaincants. A son galant ou à soi-même évidemment.
Rares, belles et durables
Le programme paraît attrayant: «Les participants apprennent à déterminer la valeur d’une pierre selon sa qualité, son origine, sa rareté et sa couleur. Ils découvrent ainsi, notamment, comment distinguer une pierre précieuse de couleur traitée chimiquement d’une autre exempte de tout traitement.»
Aux commandes, Helen Molesworth, directrice générale de la Gübelin Academy. Gemmologue de formation, l’Anglaise maîtrise son sujet sur le bout des doigts. Normal, elle est dans le domaine depuis une quinzaine d’années. Accent britannique, silhouette parfaite dans son pantalon crème et son gilet en maille assorti, elle évoque Eduard Jakob Gübelin, le fondateur de la maison homonyme. C’est son fils qui créera à Lucerne, en 1923, un laboratoire destiné à l’analyse des pierres précieuses. Un lieu unique en son genre, grâce à la riche collection familiale.
En ouverture, Helen Molesworth cite les «big four», soit les diamants, les émeraudes, les rubis et les saphirs. Mais, aujourd’hui, elle ne parlera que des «big three», les pierres de couleur. Ce qui fait leur valeur? Elles sont rares, belles et durables. Sur l’échelle de Mohs – qui mesure la dureté des minéraux – rubis et saphirs occupent la 2e place, derrière le diamant, premier de classe avec un score de 10. Plus fragile, l’émeraude obtient un score de 7,5. De fil en aiguille, Helen Molesworth distille son savoir sur les gemmes. Pas question de somnoler: la dynamique enseignante veille au grain et questionne son public. Et chic, les réponses figurent dans le support de cours, il suffit de lire les textes. Après l’étude du tableau périodique des éléments chimiques – douloureuse réminiscence des leçons de chimie – qui permet de comprendre quel rôle le titane, le chrome ou le fer jouent dans les couleurs des pierres précieuses, il est temps de passer aux inclusions. Si ces impuretés constituent des défauts dans un diamant, elles ont leur importance dans les pierres précieuses de couleur, donnant la possibilité de déterminer, par exemple, leur authenticité, leur origine ou leur traitement.
Le prince des «big three»
Suivent encore des explications sur les formes des gemmes et la façon de les tailler, ainsi que sur la manière de les traiter, en les chauffant, pour améliorer leur couleur et leur clarté.
La deuxième partie de la journée est consacrée aux rubis, prince des «big three». En 2004, un rubis de 6,04 carats (1 carat =0,2 gramme) provenant de Birmanie, pays producteur des plus beaux spécimens, s’est vendu 544 000 dollars… le carat. Helen Molesworth raconte que le rubis fut roi, voici longtemps. Avant les années 30, c’est en effet cette pierre rouge que l’on offrait à sa belle pour officialiser ses fiançailles. Mais, comme il était rare, de petits génies du marketing ont changé la donne, et c’est le diamant, plus courant sur le marché, qui l’a supplanté. «C’est une des campagnes mondiales les plus réussies», commente la gemmologue. Arrive enfin le moment le plus attendu: la présentation de seize pierres rouges. Certaines sont des saphirs, d’autres des tourmalines ou des spinelles. Mais les rubis ont cet éclat en plus. La décision est vite prise. «Chéri, pour moi ce sera un rubis…»