Historique. En 1978, la première édition de la Course de l’Escalade réunit quelques centaines de coureurs. Trente-six ans plus tard, on recense près de 37 000 inscrits.
Il s’agit tout simplement, en nombre de participants, de la plus grande compétition de Suisse. A l’heure où toutes les manifestations de ce type ou presque ne cessent de voir leurs pelotons de populaires grandir, la Course de l’Escalade caracole en tête, devant le Grand Prix de Berne et les 20 km de Lausanne. Cette année, les inscrits sont au nombre de 36 694. Un nouveau record! Comme son nom l’indique, la manifestation évoque les événements de 1602, lorsque 2000 soldats savoyards, sur ordre du conquérant et belliqueux Charles-Emmanuel Ier, partent dans la nuit du 11 au 12 décembre à l’assaut des murailles de la ville de Genève.
Il faudra tout le courage des citoyens pour repousser l’attaque avec, en guise de symbole éternel, une marmite de soupe bouillante renversée sur les assaillants par la Mère Royaume. Depuis, les Genevois célèbrent chaque année cette victoire, d’abord discrètement afin de ne pas froisser les susceptibilités savoyardes, puis de manière plus festive dès l’entrée du canton, en 1815, dans la Confédération.
Un peu par hasard
La Course de l’Escalade, un rendez-vous tout aussi incontournable que le grand cortège historique, verra quant à elle le jour à la fin des années 70. Un peu par hasard. Le Stade Genève, club d’athlétisme fondé en 1916, est alors moribond. Lors d’une assemblée générale extraordinaire qui aurait pu le voir mourir, quelques jeunes membres décident heureusement de prendre les choses en main et forment un nouveau comité. Parmi eux, Jean-Louis Bottani, alors spécialiste du 800 et du 1500 mètres, qui se retrouve pour avoir levé la main sans trop réfléchir au sein d’un groupe ayant pour mission de redorer le blason du club et de recruter de nouveaux membres. Mais que faire? C’est alors qu’une idée jaillit: organiser une course. La discussion s’anime, tout le monde y va de son idée et, de fil en aiguille, l’envie de créer une course urbaine, au cœur de la vieille ville, voit le jour.
Après plusieurs séances de brainstorming, décision est prise de faire coïncider la compétition avec la Fête de l’Escalade, afin de créer une sorte de déclinaison sportive du cortège. Ayant eu vent de ce dessein, la Compagnie de 1602, société historique qui organise chaque année les commémorations de la victoire des Genevois sur les troupes du duc de Savoie, écrit alors au Stade Genève pour lui signaler l’impossibilité logistique de mettre sur pied un événement sportif en marge des festivités officielles.
A trois semaines de la date prévue, la course est finalement déplacée. Elle attire néanmoins 800 coureurs, dont 710 seront classés. Le jogging n’est pas encore devenu un phénomène de mode, on court pour l’amour de la compétition et non dans une seule optique de bien-être; seuls des sportifs aguerris, dont à peine plus de 10% de femmes, prennent le départ.
Une classique
Depuis cette première édition, mise sur pied à une époque où il n’existe que peu de petites courses, et encore moins dans des villes, le succès de la manifestation sera exponentiel. Tout en devenant au fil des ans un événement incontournable de la vie genevoise, celle-ci accompagnera le formidable essor de la course à pied, qui voit de plus en plus d’amateurs prendre le départ de compétitions jusque-là réservées à l’élite. Président de la Course de l’Escalade depuis 1984, après avoir déjà dirigé l’édition 1981, Jean-Louis Bottani explique que cette expansion est devenue plus vertigineuse encore depuis 1997 et un vingtième anniversaire qui poussera beaucoup de néophytes à venir se tester sur le bitume et les pavés genevois.
En 2002, à l’occasion du 400e anniversaire de la bataille de l’Escalade, la Compagnie de 1602 lui propose, en guise de clin d’œil, d’organiser une course sur le parcours jadis emprunté par les Savoyards lors de leur marche sur Genève. Longue de 17,5 km, pour un départ en France et une arrivée aux Bastions, la Course du duc réunit 4000 coureurs. Alors qu’elle aurait dû rester unique, elle devient quinquennale, et sera même nocturne en 2012.
De 1978 à 2013, ce sont près de 492 000 personnes qui auront pris le départ de la Course de l’Escalade, organisée par un comité de 25 passionnés et pouvant compter sur un millier de bénévoles qui sont pour beaucoup dans son succès. «Chez nous, c’est la notion de plaisir qui l’emporte», relève non sans fierté Jean-Louis Bottani.