Claude Hêche préside le Conseil des Etats cette année, une consécration méritée. Mais jamais le canton n’a été si faible au Conseil national.
Bien sûr, il y a Claude Hêche, qui préside cette année le Conseil des Etats, honneur qui revient pour la première fois à un citoyen du nouveau canton. Mais, au-delà du symbole, pour le Jura, l’enjeu essentiel sous la Coupole fédérale n’est pas là. C’est la nouvelle péréquation financière qui inquiète le grand argentier Charles Juillard, elle qui couvre près d’un quart du budget cantonal de 900 millions de francs. Selon le projet du Conseil fédéral mis sous pression par les cantons contributeurs, le Jura y perdrait 7 millions par an.
Les députés jurassiens auront-ils les reins suffisamment solides pour convaincre leurs pairs d’écarter la menace? Au Conseil des Etats, leurs deux représentants, le socialiste Claude Hêche et la démocrate-chrétienne Anne Seydoux-Christe, ont fait leur boulot. En décembre dernier, le Sénat a rejeté le projet du Conseil fédéral par 26 voix contre 16. Mais à la Chambre basse, la décision sera à coup sûr beaucoup plus serrée.
Ici, les avocats jurassiens sont le démocrate-chrétien Jean-Paul Gschwind et le socialiste Pierre-Alain Fridez, qui figurent tous deux dans le peloton de queue du classement de L’Hebdo. Paraissant perdu au Palais fédéral, le vétérinaire de Courchavon fait partie de la Commission des finances, mais il n’y pèse pas. Quant au médecin de Fontenais, qui a dû se contenter de la Commission de sécurité alors qu’il serait beaucoup plus à l’aise à la Commission de la santé de par ses compétences, on ne l’entend guère davantage.
Au risque de se répéter, le Jura a toujours aussi mal à sa relève. Les François Lachat, Jean-François Roth, Pierre Kohler ou encore Jean-Claude Rennwald, avec des profils très différents, ne laissaient personne indifférent à Berne. Ce n’est plus le cas de leurs successeurs, beaucoup plus effacés.
Certes, la discrétion peut parfois aboutir à de bons résultats. En novembre 2014, le Jura a décroché l’implantation de la division alcool et tabac de l’Administration fédérale des douanes, avec à la clé une cinquantaine d’emplois pour Delémont dès 2017. Dans le même registre, Claude Hêche a remarquablement mené le dossier ferroviaire FAIF, où menaçait d’éclater une guerre des régions entre l’arc lémanique et la Suisse alémanique au-delà de la Reuss. Ce redoutable réseauteur a réussi à l’éviter, permettant à la Suisse occidentale de rattraper un gros retard d’infrastructures.
Kohler en embuscade
En l’occurrence, pourtant, le Jura n’en profitera pas directement, lui qui a un tout autre problème: celui de la ligne du pied du Jura Genève-Bienne-Delémont-Bâle, que les CFF pourraient dégrader au statut de ligne régionale. Même si la loi FAIF, qui oblige les CFF à maintenir leurs prestations sur les grandes lignes, devrait permettre d’écarter ce danger.
Elle aussi discrète, Anne Seydoux-Christe recueille cependant beaucoup d’éloges sous la Coupole. La fibre sociale de cette démocrate-chrétienne fait d’elle un bon relais qui permet de tisser des compromis au Conseil des Etats. La Delémontaine, ancienne présidente de la Commission des affaires juridiques, a pourtant tendance à fuir les médias. De plus, elle s’est attiré les foudres de son président, Christophe Darbellay, le désavouant aussi bien à propos de l’initiative pour la famille de l’UDC que sur l’initiative de la Marche blanche pour protéger la société contre les pédophiles.
Après l’épisode de l’élection de l’UDC Dominique Baettig en 2007, la députation jurassienne a retrouvé sa cohésion. Mais, de l’avis unanime des observateurs, elle est très faible au Conseil national. La probable candidature de Pierre Kohler pour le Conseil des Etats promet de pimenter la campagne électorale dans le Jura. Le maire sortant de Delémont avait prouvé qu’il savait bâtir des compromis outre-Sarine lors de son passage au Conseil national entre 2003 et 2007. Mais il risque d’évincer une sénatrice qui est loin de démériter.
MÉTHODOLOGIE
Comment les parlementaires sont-ils notés? L’Hebdo a évalué l’influence des parlementaires selon les critères suivants: les commissions auxquelles ils appartiennent, leurs responsabilités, leur efficacité en commission, leur faculté à trouver des compromis, leur réseau en Suisse alémanique et leur cote dans le parti. Toutes les commissions ne se valent pas: la plus importante est la Commission de l’économie et des redevances (CER), créditée de 5 points. Suivent: les Commissions de la santé (CSSS) et de l’aménagement du territoire (CEATE), 4 points; les Commissions des transports (CTT), des finances (CdF) et des institutions politiques (CIP), 3 points; les Commissions de la science (CSEC), de la politique extérieure (CPE), de la sécurité (CPS) et de gestion (CdG), 2 points; enfin, les Commissions des affaires juridiques, de rédaction et judiciaire, 1 point. Les autres critères sont crédités de 1 à 10 points.
La présidence d’un parti, d’une grande association, d’une chambre et d’une commission donne droit à 2 points supplémentaires; la vice-présidence à 1 point. La présence dans les médias se base sur les données suisses des médias de presse écrite (SMD) durant la présente législature. La présence sur les réseaux sociaux (Twitter) et le taux d’absentéisme (voir politnetz.ch) n’ont pas été notés.
CLASSEMENT COMPLET DES PARLEMENTAIRES ROMANDS
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CLASSEMENT PAR CANTONS ET PAR PARTIS
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