Céline brichet
Zoom. Une start-up lausannoise propose une application pour lutter contre le gaspillage alimentaire en créant un lien entre particuliers.
A l’heure de passer à table, Merve Kirci ressent souvent de la frustration. «J’aime manger des plats sains et découvrir des saveurs de différents pays en restant près de chez moi.» Mais, entre ses cours et son emploi de doctorante à l’EPFL, la jeune femme n’a pas le temps de cuisiner elle-même, et les restaurants, en plus d’être trop chers, ne lui offrent pas l’authenticité qu’elle recherche.
Particulièrement amatrice de sushis, ses tentatives d’en confectionner elle-même l’ont en outre laissée sur sa faim. Une situation d’autant plus décevante que, deux maisons plus loin, une famille se retrouve peut-être avec une portion en trop du repas qu’elle vient de cuisiner.
Réduire le gaspillage
Il y a quelques mois, Merve s’est ainsi mise à rêver d’une plateforme qui lui offre la possibilité d’acheter des plats authentiques à des particuliers vivant près de chez elle. Une solution qui, en plus de la dépanner, permettrait de réduire le gaspillage alimentaire.
«Un tiers de la nourriture que nous produisons passe à la poubelle, déplore-t-elle. Et, dans les pays industrialisés, les pertes viennent surtout des consommateurs.»
Soutenue par son ami Nicolas, elle présente son idée au Startup Weekend de l’EPFL sous le nom de Tasti, qui rappelle l’anglais tasty (savoureux). Dans l’assistance, Mathieu, Damien et Mathias sont séduits.
Tous trois étudiants en informatique, ils viennent compléter l’équipe et passent les deux jours suivants à perfectionner l’idée initiale, à mettre en ligne un site internet et à créer une application mobile.
A la fin du week-end, ils présentent leurs progrès à un jury de professionnels qui leur décerne la première place sur une quarantaine de projets initiaux. A la clé, pas de médaille, mais les précieux conseils des coachs, sur les aspects légaux notamment.
Ce premier succès leur permet aussi de recueillir des échos enthousiastes, dont beaucoup viennent de personnes soumises à des restrictions alimentaires. Pas toujours facile de faire comprendre son allergie ou son régime spécial à un hôte, encore moins d’aller manger dehors de manière spontanée.
«En revanche, dit Damien, nous avons eu plusieurs témoignages de personnes qui seraient prêtes à cuisiner une portion de plus si celle-ci bénéficiait à quelqu’un qui suit une alimentation similaire.»
Échange et spontanéité
Pour relier les uns aux autres, Tasti propose une application mobile téléchargeable gratuitement sur tous les smartphones. L’utilisateur peut y rechercher, sur une carte, des plats disponibles près de chez lui, ou alors choisir la recette qu’il préfère dans une liste avec photo et description.
Il peut aussi partager le plat qu’il vient de réaliser et le prix auquel il souhaite le vendre, ou encore demander à la communauté de lui préparer le menu dont il rêve. Une fois son bonheur trouvé, un espace de conversation permet de définir le lieu et l’heure de l’échange.
Pas besoin d’être un chef étoilé pour participer, les plats les plus simples peuvent être intégrés à la plateforme. Quant à la qualité de ceux-ci, les entrepreneurs comptent surtout sur la communauté pour l’assurer.
«Les utilisateurs seront notés d’après un système similaire à celui d’Airbnb ou de TripAdvisor. Les prestations de mauvaise qualité y sont immédiatement repérées et dénoncées dans les commentaires.»
L’équipe travaille actuellement au peaufinage des derniers détails techniques de son projet pour le lancement, prévu dans le courant du mois d’avril. «Si le public cible reste les étudiants, le concept est ouvert à tous, explique Merve.
Une mère au foyer qui doit de toute façon cuisiner mais se retrouve avec une portion en trop dont elle ne sait que faire pourra ainsi dépanner un employé qui n’a pas le temps de cuisiner à midi.»