William Türler
Zoom. Deux élus proposent de doter la ville d’un réseau public basé sur le li-fi. Ce système permet de capter des données en utilisant l’éclairage d’une lampe LED. Explications.
Les ondes des réseaux wi-fi représentent-elles un danger pour la santé? Une question sur laquelle médecins et scientifiques continuent de s’écharper. Deux élus de la ville de Neuchâtel n’ont toutefois pas attendu une conclusion à ce débat pour développer d’autres solutions.
Jean Dessoulavy (PLR) et Julien Binggeli (PopVertsSol) proposent de miser sur une technologie de communication moins invasive: le li-fi, pour light fidelity, également appelé internet par la lumière. Et ils ont déposé en mars dernier une motion qui demande de doter la ville d’un système public de transmission des données fondé sur cette méthode, ce qui serait une première en Suisse.
De quoi parle-t-on? Contrairement au wi-fi, qui utilise des ondes radio, le li-fi capte un signal optique ne traversant ni les murs ni le corps humain. Il permet de se servir de l’éclairage LED d’une pièce ou d’un lieu public pour connecter à l’internet un ordinateur ou un smartphone équipés du dispositif nécessaire et de s’affranchir ainsi des troubles que le wi-fi peut occasionner chez les individus électrosensibles.
Ondes wi-fi indésirables
L’idée du projet est venue à Jean Dessoulavy lorsqu’il a pris connaissance d’une étude menée en Argentine sur une trentaine d’hommes concluant que le wi-fi avait une influence sur la vigueur des spermatozoïdes et probablement sur l’ADN. «Cela m’a rendu plus attentif aux problèmes de santé liés aux ondes, dit-il.
J’ai pu constater que de nombreuses personnes travaillant dans des lieux où elles sont exposées aux ondes électromagnétiques, et en particulier au wi-fi, ressentent des douleurs diverses ou des troubles de la mémoire sans pouvoir en expliquer la raison. Elles prennent souvent des antidépresseurs ou des antidouleurs, qui apportent une réponse satisfaisante à court terme mais ne résolvent rien à moyen ou long terme.»
Plusieurs projets fondés sur le li-fi ont déjà été lancés en Chine, aux Etats-Unis ou en Hollande, notamment dans des musées, des supermarchés ou des stades. Par ailleurs, des groupes comme Philips se profilent dans ce segment et affirment que cette technologie permet des débits potentiellement plus élevés que le wi-fi.
Parmi ses défenseurs, Harald Haas. Ce professeur en communications mobiles à l’Université d’Edimbourg a expliqué, notamment lors d’une conférence TED en juillet 2011, qu’il était désormais possible de concevoir un réseau sans fil à partir de lampes LED.
Autre point important mis en avant par les partisans de cette technologie: la protection des données. Au vu de sa faible portée et du fait qu’il ne traverse pas les obstacles, le li-fi permet de transmettre des éléments sans risque qu’ils soient interceptés par des personnes non autorisées.
Scepticisme
Cependant, le li-fi souffre d’inconvénients qu’il sera difficile de contourner. «Une transmission par ondes lumineuses suppose qu’émetteur et récepteur soient parfaitement alignés, sans obstacle susceptible de gêner le faisceau lumineux», note Jean Dessoulavy. Par ailleurs, la lumière du soleil peut, elle aussi, générer des perturbations, à la manière des interférences radio actuelles.
Cette technologie pourra-t-elle un jour se généraliser et supplanter le wi-fi? Pour Benoît Deveaud, physicien à l’EPFL, en raison de ses conditions d’utilisation très contraignantes, cela reste peu probable: il faut impérativement se trouver sous une lampe de bonne intensité pour que le système fonctionne.
L’éclairage public devrait en outre être enclenché jour et nuit. De plus, le débit d’information n’est pas supérieur au wi-fi, selon le scientifique. Qui rappelle qu’il n’existe à ce jour aucune preuve scientifique crédible en ce qui concerne les dangers supposés du wi-fi sur la santé: «Les bornes sont de faible puissance, contrairement aux émetteurs téléphoniques.»
«Le seul avantage du li-fi se situe au niveau de la confidentialité, relève-t-il. Cela dit, si l’on souhaite rester confidentiel, on n’utilise pas un réseau public mais une ligne sécurisée.»