Quantcast
Channel: L'Hebdo - Cadrages
Viewing all 2205 articles
Browse latest View live

Anibis, le petit romand devenu leader suisse

$
0
0
Vendredi, 3 Janvier, 2014 - 05:57

Web.Lancé en 2001, le site de petites annonces Anibis fait partie des rares entreprises numériques romandes à avoir acquis une portée nationale. Après avoir décliné le concept en Suisse alémanique, il a lancé une version en italien.

Serge Maillard et Céline Bilardo

Immobilier, automobile, emploi, animaux de compagnie… Sans oublier l’érotisme! Qui n’a jamais consulté les petites annonces en ligne du site internet Anibis? En dix ans, ce marché a largement quitté le papier pour migrer vers le Net. Et la société établie à Flamatt (FR), qui emploie dix personnes, sait profiter de cette tendance: entre 2009 et 2013, le nombre moyen d’annonces présentes sur la plateforme est passé de 160 000 à 500 000 et les visites par mois de 2,7 à 5,7 millions. Ce qui en a fait le plus grand portail suisse du genre, en nombre de petites annonces publiées.

Forte de sa domination du marché romand, qui constitue toujours les trois quarts de son chiffre d’affaires (non communiqué), Anibis s’attaque à présent au pays entier. Après avoir lancé une version en allemand en 2011, l’entreprise a inauguré sa déclinaison italienne en mai dernier. «Nous investissons beaucoup dans la publicité pour nous faire mieux connaître outre-Sarine, où nous avons enregistré une croissance continue du trafic, souligne son directeur, Patrik Hagi. Quant au marché italophone, il est réduit mais très prometteur. Une expansion à l’étranger n’est pas prévue pour le moment.»

Fondée par l’informaticien Laurent Boatto à l’EPFL en 2001, rachetée en 2009 à son créateur par le groupe Ringier (propriétaire de L’Hebdo), pour qui cette activité est aujourd’hui devenue un pilier stratégique, Anibis a conservé les ingrédients initiaux qui ont fait sa réputation: un site à l’architecture simple, peu de publicités, des annonces de base gratuites. La société tire ses revenus à la fois des annonces payantes, qui garantissent une durée de parution plus longue ainsi qu’une meilleure visibilité, et des encarts publicitaires.

Face à Ricardo. Sur son créneau, Anibis affronte directement des sites comme petitesannonces.ch, le précurseur américain craigslist.org ou encore tutti.ch, fruit d’un partenariat entre le groupe suisse Tamedia et la société norvégienne Schibsted. Mais aussi, dans un registre un peu différent, Ricardo, une filiale du groupe sud-africain Naspers, qui propose un système d’enchères. Autre modèle d’achat en ligne ayant connu un certain succès récemment en Suisse, quoique plus éloigné des petites annonces: celui des ventes groupées, avec Groupon ou Qoqa par exemple.

Patrik Hagi concède que cette multiplication des possibilités d’achat et de vente en ligne a grignoté une part du marché des petites annonces. Mais il se dit confiant de la viabilité du modèle de la vente directe, sans rabais: «Nous mettons en avant la simplicité. C’est notre avantage compétitif. Les consommateurs en ligne n’ont pas forcément le temps ni la volonté de participer à des ventes aux enchères. D’ailleurs, un site comme Ricardo place de plus en plus d’annonces à prix fixe.»

La concurrence est aussi interne, puisque Ringier Digital détient 49,9% du capital de la plateforme Scout24 (le reste appartient à Deutsche Telekom), qui se compose de sites spécialisés dans la vente dans l’immobilier et l’automobile, ainsi que dans la recherche d’emploi. Un doublon? «Non, c’est volontaire, répond Thomas Kaiser, qui dirige la division numérique du groupe zurichois. Les clients en profitent, car leur annonce, contre paiement, est publiée sur les deux canaux et peut être vue par un maximum de personnes, augmentant ainsi les chances de vente.»

En plus de son extension au niveau national, le site investit aussi beaucoup dans le mobile, avec une application qui draine aujourd’hui 35% du trafic total. «D’ici à quelques semaines, nous proposerons une nouvelle application pour chercher et trouver les annonces plus rapidement et plus facilement», annonce Patrik Hagi.

Le fléau des arnaques. L’un des plus gros défis pour la crédibilité du site de petites annonces restera néanmoins sa capacité à garantir l’authenticité des produits vendus et à éviter les «arnaques internet», comme les fausses annonces immobilières, particulièrement nombreuses en période de pénurie de logement.

«C’est le revers de la médaille, vu le succès du site et le nombre d’annonces et de pages consultées: en Suisse romande, la plupart des cas d’escroqueries en ligne par petite annonce sont véhiculés à travers cette plateforme», explique Valérie Muster, à la Fédération romande des consommateurs (FRC). La responsable note toutefois qu’Anibis a rédigé une mise en garde à l’intention des internautes. «Nous lui signalons par ailleurs des fausses annonces, en demandant que la société les retire dans un délai court.»

Patrik Hagi se veut rassurant: «Toutes les annonces sont soumises à un contrôle automatique et à une vérification manuelle. Nous avons été le premier site de petites annonces à introduire, l’an passé, une vérification par SMS. Ce principe nous aide à conserver un site propre, même si nous ne pouvons pas offrir une garantie à 100%.

Au final, les internautes sont toujours invités à respecter des règles élémentaires de prudence.»

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Rubrique Une: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Familles, voici vos avocats spécialisés

$
0
0
Vendredi, 3 Janvier, 2014 - 05:58

Perfectionnement.Une nouvelle formation permet aux avocats de se spécialiser dans le droit de la famille, des compétences qui sont de plus en plus demandées. Diane Broto vient d’obtenir ce titre.

«Pourquoi vas-tu te mettre en danger?» Voilà la question que des amis confrères ont posée à Diane Broto, avocate genevoise, le jour où elle leur a parlé de son projet. Avait-elle l’intention de gravir le Cervin? De descendre le fleuve Amazone, seule, sur une pirogue? Pas vraiment. Son objectif était plus raisonnable: obtenir le titre d’avocat spécialiste FSA en droit de la famille.

Cette formation est mise sur pied par la FSA (Fédération suisse des avocats) en partenariat avec les universités suisses; elle est sanctionnée par deux examens.

Le droit de la famille concerne beaucoup de situations de la vie: séparations, divorces, problèmes relatifs aux enfants (adoption, regroupement familial), mais aussi toutes les questions touchant à la fiscalité du couple, aux assurances sociales, à la prévoyance professionnelle, à la planification patrimoniale, aux cas compliqués de validité de mariage.

Riche parcours.«Lorsque je me suis engagée dans cette formation, je n’avais pas conscience de tout le travail que cela représentait, confie Diane Broto. J’ai mon étude, je suis juge assesseur à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice à Genève et mère de deux enfants.»

Née au Liban, d’une mère suisse et d’un père gréco-libanais, elle a déménagé en Suisse à l’âge de 4 ans, guerre oblige. Par la suite, elle fait son stage d’avocate à l’étude Pestalozzi, Gmuer & Patry où elle s’occupe surtout de droit commercial. «C’était intéressant, mais il me manquait le côté humain.» Son stage achevé, elle se met à son compte.

Si elle traite de nombreux dossiers d’accidentés de la route – elle devient vice-présidente d’Adara, association de défense des accidentés de la route –, petit à petit, elle s’occupe de séparations et de divorces. «J’ai un bon feeling avec les gens. Lorsque l’on traverse des épreuves dans la vie, cela aide à comprendre ceux qui ont des difficultés.» Le bouche à oreille fait le reste. Aujourd’hui, le droit de la famille représente 60 à 70% de son activité. Normal que la Genevoise ait voulu se perfectionner.

Conseils de qualité. Mais avant d’entamer une telle formation, elle a dû montrer patte blanche: avoir une expérience pratique d’au moins cinq ans en tant qu’avocate, et disposer de connaissances particulièrement développées dans cette spécialisation. «J’ai dû présenter un solide dossier avec des cas “anonymisés”, comprenant les faits, le droit, les parties et les aspects juridiques complexes examinés, pour poser ma candidature.» Ne restait alors plus qu’à verser 15 000 francs – sans compter le manque à gagner induit par les absences – et suivre les 120 heures de cours, réparties sur neuf mois. «Désormais, les clients romands ont une certaine garantie d’obtenir des conseils juridiques qui tiennent la route, car le but de la FSA est d’assurer une vraie qualité de la formation», précise encore l’avocate genevoise, qui désormais communique avec ses «camarades» de certificat. «Lorsque nous avons une question épineuse ou une hésitation sur un point précis de droit, nous envoyons un e-mail aux autres. Le premier qui sait répond.»


Nouveauté
Formation en droit de la famille

Mise sur pied par la FSA (Fédération suisse des avocats), en partenariat avec les universités suisses, cette formation est sanctionnée par deux examens. D’autres spécialisations existent déjà: dans le droit du travail, des successions, des assurances et de l’immobilier. Professeur à l’Université de Neuchâtel et impliqué dans cette nouvelle formation, Olivier Guillod explique: «Il y a cinq ans, nous n’avons pas trouvé assez d’avocats intéressés. Le droit de la famille n’est pas très attractif car moins rémunérateur, au contraire du droit commercial, fiscal et immobilier. Et les avocats pensent à tort que c’est un domaine facile. Mais s’il est moins technique, il n’est pas plus simple pour autant, car il demande des compétences autres que juridiques, notamment en psychologie.» Cette spécialisation existe déjà en Suisse alémanique depuis cinq ans, car les professionnels du barreau y sont plus nombreux. Au total, 24 avocats romands ont fait partie de la première volée. La prochaine formation commencera en 2015.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Eddy Mottaz
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Allemagne: Sigmar le téméraire

$
0
0
Vendredi, 3 Janvier, 2014 - 05:59

Sigmar Gabriel.Il redonne de la dignité à son parti, force le respect de ses adversaires. Longtemps sous-estimé, le président du Parti social-démocrate et vice-chancelier se rend incontournable pour la succession d’Angela Merkel. Portrait d’un Allemand qui surprend.

C’est sa maman qui doit être surprise. Il y a quatorze ans, elle n’en revenait déjà pas de découvrir à quel point son fils autrefois mauvais élève avait réussi. Il était alors devenu le plus jeune ministre-président d’Allemagne, à la tête du land de Basse-Saxe. Vous imaginez aujourd’hui? Elle doit se frotter les yeux en lisant la presse de son pays, longtemps railleuse mais qui, tout soudain, se livre à des enchères dithyrambiques: «le superministre», «Mister Universe», «l’homme d’Etat». Son Sigmar? Oui. Lui. Sigmar Gabriel, 54 ans, président du Parti social-démocrate (SPD), est désormais vice-chancelier d’Allemagne, numéro 2 du gouvernement, à la tête d’un ministère englobant l’économie et l’énergie, responsable désigné de la sortie du nucléaire. Rien de moins.

Le retour de l’ardeur. Comme une balle magique, tout en rondeurs et en accélération, il se révèle virtuose dans l’art de rebondir. Il a transformé une défaite en victoire; réussi à faire oublier que c’est lui qui avait poussé le malheureux candidat Peer Steinbrück sur le devant de la scène. Surtout, il a relevé la tête pendante de son SPD, sorti piteux des élections du 22 septembre avec seulement 25,7% des voix contre 41,5% pour Angela Merkel, un des plus mauvais résultats de son histoire; et puis il a donné envie à 4500 nouveaux adhérents de s’engager dans son parti. Alors si ce n’est pas le bonheur, ça y ressemble.

Mais quel sort a donc jeté Sigmar l’enchanteur à son parti pour qu’il retrouve cette dignité, ces yeux brillants et cette ardeur à la tâche politique? Et, mis à part sa corpulence et ce petit espace vide entre les incisives qu’on appelle précisément les dents du bonheur, en quoi Gabriel se distingue-t-il de ses pairs?

«Nous devons oser davantage de démocratie», disait Willy Brandt en 1969. «Mehr Demokratie wagen», Sigmar Gabriel a pris au mot l’ancien chancelier allemand, Prix Nobel de la paix dont on vient de fêter le centenaire. Après le désastre du 22 septembre, il a osé. Il a promis aux membres de son parti, plus que sceptiques, qu’il n’y aurait pas de coalition sans leur accord.

Armé de cette épée de Damoclès, il s’est alors lancé en négociation avec le camp d’Angela Merkel. Au bout de longues semaines de discussions menées dans la plus grande discrétion, le contrat de coalition ressemble davantage à un programme de gauche que de droite avec un salaire minimum à 8,5 euros par heure et la possibilité de prendre sa retraite à 63 ans pour les salariés qui ont travaillé quarante-cinq ans.

Miracles de Noël. Dès lors, les stars du parti se sont déployées aux quatre coins de l’Allemagne pour convaincre. En première ligne, c’est lui, Gabriel qui a mouillé sa chemise, intervenant dans pas moins de dix endroits, avec des exemples concrets: «Nous décidons si une fleuriste gagne 5 euros de l’heure ou, enfin, 8,5 euros.»

Et, miracle, alors que les questions de personnes, les honoraires du candidat Steinbrück avaient dominé la campagne électorale, ce coup-ci les camarades n’ont parlé que contenus politiques, retraites, salaires, égalité, énergie. Grâce à Gabriel qui s’était mis d’accord avec Angela Merkel de ne rien dévoiler sur les futurs ministres. Eh oui, ce Gabriel à la langue bien pendue, qui a souvent pesté «off the record» contre le candidat Steinbrück et ses pannes de communication, a fait preuve d’une grande discipline tout au long des négociations et même au-delà.

Politiciens et observateurs n’en reviennent pas. Car chacun a son anecdote à raconter sur les idées spontanées envoyées par le chef du SPD par SMS, les programmes en huit points qu’il faut commenter sur-le-champ, son hyperactivité, ses rendez-vous annulés. Or, là, comme le souligne un parlementaire d’ordinaire critique à son égard, «il s’est transformé, prouvant qu’il avait des nerfs très solides et des qualités de conduite bien supérieures à ce qu’on pensait».

Miracle encore, juste avant Noël, le chef du SPD et ses 400 aides bénévoles ont ouvert leur cadeau, des tonnes d’enveloppes amenées par camion: 78% des 470 000 membres du parti ont répondu à la consultation, plus des trois quarts ont dit «ja». S’ils avaient répondu «nein», Gabriel serait «weg», loin, démissionné comme Steinbrück.

L’art de rebondir.«Ce n’est pas la première fois que l’homme rebondit», relève son camarade de parti Hubertus Heil, vice-chef du groupe parlementaire au Bundestag, qui vient aussi de Basse-Saxe. Dans ce land, le jeune ministre-président Gabriel avait en effet subi une terrible défaite électorale en 2003, qui le laissa d’abord terrassé, humilié de n’être plus que «délégué du SPD à la musique pop». Après une vraie traversée du désert, l’homme reçoit une deuxième chance en 2005: le Ministère de l’environnement dans la première grande coalition avec Angela Merkel. Il la saisit, se plonge dans le travail avec sérieux et ardeur, suivant dès le petit matin des coachings en art de la négociation et en anglais. En très peu de temps, il s’imposera comme un acteur important à l’intérieur et reconnu à l’étranger. C’est le temps où le réchauffement climatique figure tout en haut des préoccupations politiques. Et lui se bat comme un lion pour les énergies renouvelables et les nouvelles technologies. Rebond réussi.

Et de survivre. Bien avant cette épreuve, dans la petite ville médiévale de Goslar, là d’où il vient, là où il vit, Sigmar Gabriel en subit une autre, durable, profonde. Il l’a racontée à Bernd Ulrich, chef de la rubrique politique à l’hebdomadaire Die Zeit, qui publia ses confessions début 2013. Sigmar Gabriel, après la séparation de ses parents quand il avait 3 ans, fut arraché à sa mère, contraint de vivre avec un père qui le battait, le privait de jouets et tenta de l’obliger à appeler sa nouvelle compagne «Mutti». La tyrannie dura sept ans. Quand sa mère finit par obtenir sa garde, le garçon fit les quatre cents coups et causa, paradoxe, bien des soucis à cette maman si désirée. Plus tard, l’aversion pour le père prit une tout autre dimension: à 18 ans, il le revoit et découvre un nazi convaincu, collectionneur de livres et de pamphlets révisionnistes, obsédé par de vieux démons, toujours hargneux envers son ex-épouse. Sigmar Gabriel, confronté brutalement à son destin d’Allemand, ne cessera de réfléchir à l’histoire de son pays. Il voyagera régulièrement en Israël où il a dernièrement emmené sa fille aînée.

L’antithèse d’Angela. Mais revenons à Berlin. Si on dit que l’homme se révèle dans l’épreuve, rien n’est plus vrai pour Sigmar Gabriel. Il a pris un risque en consultant sa base, il a mis son destin politique entre les mains des siens. Plus que du courage, Horand Knaup, journaliste au Spiegel et spécialiste du SPD, y voit l’intelligence, l’instinct de l’animal politique. «S’il n’avait pas consulté la base, l’atmosphère se serait profondément détériorée au sein du parti», estime-t-il. Quoi qu’il en soit, il s’est désormais positionné comme le socialiste qui pourra prétendre à la succession d’Angela Merkel en 2017.

Dès lors on s’interroge: Sigmar Gabriel serait-il aussi fin calculateur qu’Angela Merkel? On se souvient de l’habileté de celle qui laissait le Bavarois Edmund Stoiber partir au combat et perdre, en 2002, contre Gerhard Schröder. On sait tous les hommes écartés sur son chemin, à commencer par son mentor Helmut Kohl. Alors: Gabriel aurait-il lui aussi laissé le candidat Steinbrück courir à sa perte, partir en campagne avec la conviction intime qu’il allait perdre? Sachant que l’homme de Hambourg n’avait jamais gagné d’élections auparavant et que l’Allemagne n’avait guère envie de se séparer de sa chancelière? A-t-il voulu se préserver, conscient que lui-même n’avait encore aucune chance, passant pour peu sérieux, peu fiable? Peut-être.

Les parallèles s’arrêtent là. Si, à l’image d’Angela Merkel, Gabriel a appris les leçons de Machiavel pour gagner le pouvoir, et s’il a comme elle dirigé le Ministère de l’environnement, pour le reste, le chef du SPD incarne l’antithèse de la chancelière.

D’abord il sait parler à une foule, sentir un auditoire, amuser son public. Et il s’expose, il arrive même qu’il explose. «Arrêtons donc ces conneries!» a-t-il lancé dernièrement à une journaliste très connue de la chaîne publique ZDF qui remettait en cause l’aspect démocratique de la consultation du SPD. Cet échange qu’on peut suivre sur YouTube lui a finalement valu des sympathies de tout bord, mais jamais Angela Merkel ne perdrait ainsi la maîtrise de soi. Elle préférera toujours endormir l’assistance que la provoquer.

Le goût du risque. Car la plus grande différence qui distingue la chancelière et son vice-chancelier reste la prise de risque. Alors qu’Angela Merkel s’allège du lourd dossier du tournant énergétique, Sigmar Gabriel le hisse sur ses épaules. Avec ce grand ministère qui réunit l’économie et l’énergie, il endosse une responsabilité énorme, celle de réussir la sortie du nucléaire. Une prise de risque qui peut déboucher sur le meilleur – le ministre impose son pays comme le leader mondial de la 3e révolution industrielle – comme sur le pire – il échoue et peut oublier la chancellerie. Bien sûr, il débute avec des atouts, il connaît le domaine du temps où il était ministre de l’Environnement, il connaît les acteurs et sa motivation a de profondes racines: l’homme vient de Basse-Saxe où la branche de l’acier et de l’automobile pourvoit encore de nombreux emplois, où la gauche a toujours tenu à conserver une industrie forte. Le mariage de l’économie et de l’écologie est au cœur des débats, il aura d’ailleurs l’occasion d’en parler avec son homologue Doris Leuthard. Mais au bout du compte, l’action du ministre sera mesurée aux prix de l’énergie: s’ils sont trop élevés, il risque l’opprobre de la population et de l’économie.

Une ambition fluctuante. Dans les années à venir, Gabriel aura encore l’occasion de faire ses preuves. Il aura aussi à côtoyer une autre hyperactive productrice d’idées créatives en série: Ursula von der Leyen, la nouvelle ministre de la Défense, première femme dans cette fonction. Médecin et mère de sept enfants, la charismatique démocrate-chrétienne est aussi une surdouée de la communication. Une redoutable concurrente pour Sigmar Gabriel. D’autant plus que son ambition semble plus dévorante que celle du social-démocrate. Son ambition à lui a quelque chose de fluctuant, qui balance selon l’humeur et l’atmosphère. Comme le souligne Bernd Ulrich, qui travaille à un livre d’entretien avec Sigmar Gabriel et passe donc de longues heures avec lui: «Sous ses airs parfois provocateurs, il est un homme en proie au doute, un Allemand qui rumine, comme nous le sommes presque tous. Une remise en question à mettre en relation avec notre histoire.»

Alors, si Sigmar Gabriel devient un jour chancelier, sa maman ne sera pas la seule surprise. Il le sera aussi.


Sigmar Gabriel

1959 Naissance à Goslar, où il vit toujours.
1999 Ministre-président du land de Basse-Saxe. Il perdra contre Christian Wulff, le futur président du pays, en 2003.
2005 Ministre de l’Environnement dans la grande coalition CDU-SPD, déjà sous la chancelière Angela Merkel.
2009 Elu président du SPD après la débâcle électorale du parti (23%).
2012 Naissance de sa fille Marie. Il prend une «Baby-pause» de plusieurs semaines.
2013 Vice-chancelier et ministre de l’Economie et de l’Energie dans le nouveau gouvernement de coalition de la chancelière Merkel.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Dominik Butzmann / Keysone / LAIF
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Santé: ces étrangers qui nous soignent

$
0
0
Vendredi, 3 Janvier, 2014 - 06:00

Votation.Comment l’initiative de l’UDC sur l’immigration toucherait-elle le secteur de la santé, très dépendant de la main-d’œuvre étrangère? Enquête et reportage au cœur de l’Hôpital Riviera Chablais.

Il rayonne, Carlos Costa: sa femme, infirmière comme lui, est enceinte. Ce Portugais de 31 ans travaille depuis trois ans et demi sur le site de réadaptation et de soins palliatifs de l’Hôpital Riviera Chablais Vaud-Valais (HRC), à Blonay. Ils ont désormais tout l’avenir devant eux. Depuis leur arrivée en Suisse en 2010, ils ont déniché un emploi grâce à la libre circulation des personnes. Ils en sont les premiers bénéficiaires, mais pas seulement. «La Suisse, son économie et ses hôpitaux profitent aussi de l’ouverture du marché du travail. C’est une situation gagnant-gagnant», relève Carlos Costa.

Jusqu’à quand? L’initiative de l’UDC «contre l’immigration de masse» fait planer une lourde menace sur le secteur de la santé en Suisse, où les étrangers occupent 32% des emplois, contre 22% pour le reste de l’économie. C’est la raison pour laquelle la Fédération des hôpitaux vaudois (FHV) s’inquiète des conséquences de l’initiative si le peuple devait l’accepter le 9 février prochain, au point de s’impliquer dans la campagne pour la combattre. «Sans cette main-d’œuvre étrangère, nos hôpitaux ne fonctionneraient plus», souligne la secrétaire générale de la FHV, Patricia Albisetti.

Casse-tête. Le directeur des ressources humaines de l’Hôpital Riviera Chablais, Emmanuel Masson, connaît ce dossier par cœur. Avant de reprendre cette fonction dans le Chablais, il l’a occupée au CHUV durant vingt ans. Pour rien au monde, il ne voudrait revivre l’époque des contingents, lors de laquelle le recrutement de personnel qualifié était un vrai casse-tête.

C’était certes le régime de la préférence nationale si chère à l’UDC, mais en fait un système aussi lourd qu’inefficace. Chaque employeur devait faire la preuve d’avoir cherché la perle rare sur le marché local avant de se tourner vers l’étranger. Les hôpitaux disposaient bien sûr de tous les dossiers des soignants au chômage dans le canton de Vaud. En vain. Impossible de les engager, presque toujours en raison de problèmes personnels. A la fin, le résultat était toujours le même: une perte de temps de trois mois et beaucoup de paperasserie échangée avec le Service cantonal de l’emploi et le SECO à Berne, deux instances étatiques appelées à se prononcer sur chaque cas individuel!

Avec ses 1900 collaborateurs, dont 740 étrangers (soit 39%, y compris 150 frontaliers), le HRC affiche un fort taux de main-d’œuvre venue de l’extérieur. A-t-il dès lors choisi la solution de facilité sous le régime de la libre circulation des personnes? «Pas du tout, se justifie Emmanuel Masson. Ces dernières décennies, la Suisse n’a pas formé suffisamment de médecins et d’infirmiers, de sorte qu’elle souffre d’une situation de pénurie qui nous oblige à recruter à l’étranger.»

Pour le directeur des ressources humaines de l’hôpital, engager du personnel à l’extérieur de la Suisse est à la fois un risque et une chance. Un risque, car le soignant venu d’Europe voire d’outre-Atlantique sera souvent moins longtemps fidèle à l’entreprise. Une chance aussi, car un étranger apporte avec lui sa propre philosophie en matière de pratique des soins. «Cette confrontation des cultures constitue un enrichissement pour notre établissement», note Emmanuel Masson.

Plus que le salaire, de deux à trois fois supérieur en Suisse par rapport à la France voisine ou au Portugal, c’est souvent ce point que soulignent en premier lieu les infirmiers étrangers. «J’ai trouvé ici des conditions de travail qui correspondaient à mes valeurs en termes d’écoute et de respect du patient», témoigne Stéphanie Colombey, infirmière cheffe du centre de traitement et de réadaptation (CTR) de l’Hôpital Riviera.

Domiciliée à Evian, cette mère de deux enfants de 15 et 20 ans brave depuis vingt-cinq ans les contraintes du statut de frontalière. Elle ne regrette rien, même si elle a dû longtemps se lever à 5 h 30 du matin et jongler avec les nounous pouponnant, puis encadrant ses deux fistons. Le salaire est important: il a permis de financer les mamans de jour, vacances et autres études des enfants. Mais les conditions de travail aussi: «En termes de personnel, les hôpitaux suisses sont mieux dotés. En France, les moyens sont plus restreints, ce qui engendre des tensions dans les équipes et de l’insatisfaction au travail, malgré la semaine de trente-cinq heures seulement.»

Même son de cloche chez Emilie André. Agée de 32 ans, cette Haut-Savoyarde a terminé sa formation d’infirmière en 2009 à Thonon-les-Bains avant d’être engagée elle aussi dans l’hôpital chablaisien. «A l’école, on nous a enseigné la philosophie de la pionnière des soins infirmiers, Virginia Henderson, insistant sur l’importance de la relation au patient, mais on n’a plus guère le temps de la mettre en pratique en France», regrette-t-elle. Son poste à l’Hôpital Riviera lui permet de s’épanouir sur le plan professionnel en Suisse, tout en gardant sa vie privée en France, où elle a acheté une maison avec son ami. Elle avoue être «privilégiée» d’avoir trouvé ce travail, d’autant plus que dans le canton de Vaud, son statut de frontalière n’a rien de pestiféré.

Le retour de la paperasse. Stéphanie Colombey, Carlos Costa et Emilie André: trois soignants qui ont trouvé leur bonheur dans un hôpital quant à lui tout heureux de recourir à leurs services alors que la Suisse n’a pas suffisamment investi dans la formation.

«Sans eux, on devrait fermer de nombreux lits et réduire sensiblement l’offre des soins», résume Emmanuel Masson.

Pourquoi l’UDC veut-elle dès lors remettre en question un système qui fonctionne bien? «Notre initiative ne vise pas à empêcher de recruter une main-d’œuvre nécessaire, comme dans la santé, mais à limiter l’immigration dont nous n’avons pas besoin, celle qui ne travaille pas ou plus et qui pourrait peser demain sur nos œuvres sociales lorsque surviendra la prochaine crise économique», répond le conseiller national UDC Yves Nidegger.

Il n’empêche qu’elle fait peur aux milieux de la santé. «Son acceptation signifierait un recul de quinze ans dans le temps en donnant un très mauvais signal: celui du retour d’une coûteuse et lourde paperasserie administrative à l’heure où tous les hôpitaux sont sous la pression économique des assureurs», avertit Patricia Albisetti. La réintroduction des contingents rigidifierait le système et les retards pris dans les engagements péjoreraient la qualité des soins au détriment des patients», ajoute-t-elle.

En fait, pour le secteur de la santé, l’initiative de l’UDC ne résout aucun problème. C’est bien là le piquant de l’histoire: sous prétexte de préférence nationale, en l’occurrence impossible à appliquer tant le marché du travail est asséché, elle ne fait que réintroduire une bureaucratie étatique qu’elle abhorre par ailleurs!


En savoir plus
Soirée débat avec Simonetta Sommaruga

Ce mardi 7 janvier, Economiesuisse et la Fédération des hôpitaux vaudois (FHV), en partenariat avec L’Hebdo, organisent une soirée-débat sur l’initiative de l’UDC «contre l’immigration de masse». Celle-ci sera marquée par les interventions de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga et du conseiller d’Etat vaudois Pascal Broulis, qui la combattent. Un débat contradictoire opposera enfin les deux conseillers nationaux Adèle Thorens (Verts/VD) et Yves Nidegger (UDC/GE).
Hôtel Mont-Blanc au Lac, Morges, de 18 h à 19 h 30.
D’autres séances d’information: www.bilaterales.ch/events

 

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
 Darrin Vanselow
Darrin Vanselow
Darrin Vanselow
Darrin Vanselow
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Hebdo.ch » revue de blogs de la semaine

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:47

Blogs» Politique»
Le futur, c’est tout de suite

2014, le grand retour des États-Unis

La croissance serait inscrite dans l’ADN de la première puissance économique du monde.
Guy Sorman

En 2013, l’économie américaine a digéré la crise financière de 2008, qu’elle avait elle-même suscitée (…). En 2014, les Etats-Unis devraient logiquement s’imposer de nouveau comme le moteur mondial de la croissance, du commerce et de l’innovation. Le Fonds monétaire international comme tous les instituts de prévision économique envisagent une progression du PIB américain de l’ordre de 4,3%, en dollars courants, soit 2,5% environ, inflation déduite: la suprématie américaine, vacillante après 2008, est ainsi restaurée. De manière symbolique, l’écart avec la Chine, qui se réduisait depuis cinq ans, va se creuser de nouveau, au bénéfice des Etats-Unis. L’économie américaine pèsera cette année qui vient environ 16 000 milliards de dollars, contre 9000 milliards de dollars pour la Chine. (…) L’absence de contrainte extérieure sur le dollar, au rebours de celle qui pèse sur la zone euro, a certainement contribué à la reprise mais il convient de ne pas inverser les causes: c’est parce que l’économie américaine est dominante et le dollar une valeur relativement sûre qu’il est une monnaie de réserve et pas l’inverse. Toutes les circonstances périphériques, le dollar, le budget, les taux d’intérêt n’auraient été d’aucun effet sur la croissance si celle-ci n’était pas inscrite dans l’ADN des Etats-Unis. C’est parce que chaque Américain, ou presque, se rêve en John Rockefeller, en Steve Jobs ou en Thomas Edison que, statistiquement, émergent sans cesse les Rockefeller, les Steve Jobs et les Edison de demain. (…) Enfin, le chiffre le plus significatif de l’économie mondiale est certainement celui des brevets déposés aux Etats-Unis, en Europe et au Japon (brevets dits triadiques): 80 000 par an en moyenne pour les Etats-Unis, 70 000 pour le Japon et à peu près autant pour l’Union européenne. (…) On ne saurait évidemment pas recopier une civilisation mais on en retiendra que la stabilité des institutions légales, financières, économiques est plus décisive que toutes les manipulations budgétaires, monétaires, réglementaires de court terme. Devra-t-on se réjouir ou craindre ce regain «impérial» des Etats-Unis? Quitte à être «dominé» par un empire, mieux vaut l’être par une puissance libérale.


Blogs» Politique»
Ombres et lumières sur Palais fédéral

2014, qui stoppera qui?

Les populistes font du droit d’initiative un instrument de marketing au service de la conquête du pouvoir.
François Cherix

Immigration, Ecopop, Croatie, trois fois cette année les citoyens raisonnables et tolérants devront tenter de sauver la Confédération des fantasmes nationalistes, xénophobes ou malthusianistes. Gagneront-ils ces trois batailles? Rien n’est moins sûr. Or, effarante perspective, ils sont condamnés à renouveler sans cesse leurs combats. Quels que soient les verdicts du peuple dont ils se réclament, les populistes relancent leurs attaques au lendemain de chaque votation. Dans leurs mains, le droit d’initiative n’est plus qu’un instrument de marketing au service de la conquête du pouvoir, sans le moindre égard pour l’intérêt du pays et de ses habitants. Ainsi, le gouvernement, l’économie, les partis, les associations et les militants dépensent des dizaines de millions et une énergie folle pour éviter que les saboteurs de la barque suisse ne finissent un jour par réussir à percer sa coque. La Suisse entière, des médias saturés aux élus épuisés, passe son temps à traiter l’avalanche d’initiatives qui ne s’arrête jamais. Du coup, la vie politique se concentre sur des chimères. Plus personne n’a la possibilité d’analyser en profondeur le destin du pays ou de réfléchir sereinement au monde qui vient. Qui dira stop? Un jour, le Conseil fédéral osera-t-il ouvrir un débat sans tabou sur les droits populaires? Courageux, un ministre expliquera-t-il sans langue de bois aux citoyens que la mise en danger récurrente du bien commun par les populistes n’est plus supportable? 2014 nous renseignera. Des voix fortes et lucides crieront-elles assez? Ou bien les nationalistes parviendront-ils à stopper la Suisse?


Blogs» Politique»
La Suisse à 10 millions d’habitants

Une «Économie accessoire» profitant aux villes

Selon une enquête sur les entreprises, les villes-centres restent économiquement plus fortes que prévu.
Pierre Dessemontet

Mi-novembre, l’Office fédéral de la statistique a publié dans l’indifférence générale les résultats de la statistique structurelle des entreprises 2011. Pourtant, cette enquête désormais annuelle dévoile des faits cruciaux concernant la santé et la forme que prend notre économie (…). [Elle] calcule le nombre d’emplois sur la base des registres AVS, (…) qui assimilent à un emploi toute activité rémunérée au moins 2300 francs annuellement: l’équivalent d’un 5%. (…) On découvre ainsi que ces micro-emplois constituent une part appréciable de l’emploi total, environ 270 000 équivalents plein-temps: 7,5% du total, l’équivalent des deux Bâles. (…) Deux choses frappent à l’examen des chiffres. D’abord, l’ampleur insoupçonnée du phénomène: 270 000 équivalents plein-temps à moins de 15% chacun, cela signifie qu’un à deux millions de personnes en Suisse remplissent, en plus de leur emploi principal, ou comme à-côté, des tâches «d’intérêt public», mais qui sont défrayées. Seconde surprise, cette économie accessoire est très majoritairement le fait des villes, et même des villes-centres: par rapport à 2008, Zurich compte ainsi 50 000 équivalents plein-temps de plus, Berne 17 000, Bâle et Genève 16 000, Lausanne 15 000, et le même effet est visible dans les centres moyens et locaux. Dans tous ces cas, ces emplois accessoires représentent bien plus des 7,5% du total de la moyenne nationale. (…) Comme si une division spatiale du travail continuait à s’opérer entre centres et banlieues: aux secondes les activités productives et les emplois principaux, aux premières les services s’adressant aux personnes – services personnels, loisirs, culture, en sus des services administratifs qui les ont toujours définies. Mais une statistique qui montre également que par ce biais les villes-centres restent économiquement plus fortes que ce que le développement des banlieues d’emploi ne laissait présager.


Blogs» Culture»
Notes sur l’inspiration et le talent

Le Loup de Wall Street

Le dernier Scorsese ressemblerait à un «gros saint-honoré triple crème dégoulinant de clichés cassatas». Mais bien dosé et rarement ennuyeux.
François Schaller

(…) La controverse était programmée, venant de la critique gauche bigote surtout. DiCaprio et Scorsese ont l’air plus benêts qu’hypocrites en faisant semblant de s’en étonner: pourquoi tant de cynisme, de bêtise, d’égotisme, d’arrogance pendant près de trois heures? Quel est au juste l’intérêt du sujet? Réponse: ça finit mal pour Belfort et ses odieux copains. La morale est sauve, fût-ce au second degré. En fait, il s’agit d’un vrai drame moral à l’américaine sur le thème de l’amitié et de la solidarité dans la déchéance. Avec un inspecteur du FBI en retrait, incarnant le bien très tôt dans le synopsis. Sa supériorité est aussitôt décelable, préfigurant ce qui sera un happy end: ne semble-t-il pas tellement plus humain, plus astucieux que ses interlocuteurs?… Sans avoir besoin de forcer une seconde. Pour le reste, c’est bien l’énormité dans la richesse et la débauche institutionnalisée qui feront le spectacle et le succès du film. Le vrai châtiment de ce loser de Belfort ne sera pas ses vingt mois de détention, mais son recyclage forcé dans le coaching personnel (…). Peut-on croire que Le loup de Wall Street est une critique du système financier classé inique, destructeur et ostentatoire des années 90 et suivantes? Peut-être, à condition de relativiser la singularité et la valeur emblématique de la cible. Personne n’a le monopole du mauvais goût. Les plus grandes machines à cash contemporaines ne sont pas le trading financier ou la banque, mais l’industrie, les technologies grand public, l’entertainment, d’où sont issues la quasi-totalité des nouvelles fortunes privées
à neuf ou dix chiffres dans le monde. La flambe au carré ne les a pas toujours épargnées non plus.


Blogs » Société »
Bonjour le code (social)!

On étrenne l’année

Donner une petite enveloppe est la meilleure façon de montrer notre reconnaissance à ceux qui nous rendent service.
Sylviane Roche

Ouf, ça y est, c’est passé! J’espère que vous avez bien traversé cette période des «Fêtes», si dangereuse pour notre santé digestive, affective et financière. (…) il nous reste encore une dernière porte à franchir dans le slalom délicat des rites de début d’année. Je veux parler des étrennes, ces billets qu’on glisse en janvier aux personnes qui nous rendent divers services tout au long de l’année. (…)  Oui, je crois que l’année nouvelle, même si on trouve tout ça idiot, ringard, politiquement pas correct, est l’occasion de montrer aux gens qui nous rendent service qu’on apprécie leur travail et leur aide. Et la meilleure façon de témoigner notre reconnaissance, (…) je pense que c’est, en effet, une petite enveloppe. On glissera les billets dans une jolie carte avec un mot manuscrit exprimant notre reconnaissance. Combien? (…) Pas moins de 50 francs, rien n’est plus humiliant qu’une aumône ridicule. On peut bien sûr ajouter quelques chocolats, une bouteille ou une bise pour personnaliser le cadeau. Et n’oubliez pas de dire merci en donnant. Cela paraît paradoxal, mais c’est la façon d’adoucir implicitement la relation de subordination qui se crée immédiatement entre celui qui donne et celui qui reçoit. (…)

Facebook. Vous aimez «L’Hebdo»? Alors gratifiez notre page de «Like» et prenez connaissance en temps réel des contributions de nos blogueurs.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Football: la légende d’Eusebio

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:48

▼Les faits
Premier noir Ballon d’or, en 1965, vainqueur de la Ligue des champions, meilleur buteur de la Coupe du monde 1966, Eusebio Ferreira da Silva, l’un des plus merveilleux joueurs de tous les temps, était surnommé la Panthère noire. L’ancienne star du Benfica Lisbonne s’est éteinte à 71 ans d’un arrêt cardiorespiratoire. Lundi, lors de ses funérailles après trois jours de deuil national au Portugal, son cercueil a fait une dernière fois le tour de son stade fétiche, devant des milliers de supporters.

▼Les commentaires
L’Equipe lui rend hommage en soulignant qu’«au stade de la Luz où, plus que sa statue au milieu de la place des Héros, un panneau, au premier sous-sol, décrivait mieux que tout sa dimension. Dans le parking officiel, au côté des places réservées aux VIP en fonction de leur titre (“président”, “administrateur”…), il y avait celle dévolue au Ballon d’or 1965 avec cette inscription: “Eusebio”. Tout simplement.» Pour Libération: «Les manifestations populaires rappellent l’enterrement, en 1999, de l’autre grande légende portugaise, Amália Rodrigues, la “Reine du fado”, accompagnée au cimetière de Prazeres (ouest de la capitale) par des centaines de milliers de personnes. Du reste, de nombreuses voix réclament déjà que Eusebio rejoigne la Reine du fado au Panthéon national.»

▼à suivre
Au milieu des hommages de toute la planète football, celui de Cristiano Ronaldo, dédiant quelques heures plus tard ses buts à son compatriote, a été remarqué, ce d’autant que Ronaldo pourrait devenir dans quelques jours le premier Portugais à obtenir un deuxième Ballon d’or.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Hugo Correia / Reuters
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Fiat avale Chrysler: viva marchionne!

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:49

▼Les faits
Les marchés et l’Italie ont applaudi l’accord de rachat à 100% par le groupe automobile Fiat de son partenaire américain Chrysler. Au terme d’un jeu de poker menteur de plusieurs mois, Sergio Marchionne, patron de Fiat et ex-directeur général de la SGS à Genève, accepte de payer 4,35 milliards de dollars à VEBA, le fonds de pension du syndicat américain de l’automobile UAW, qui détenait 41,46% de Chrysler; 1,75 milliard est versé immédiatement, le reste sous forme de dividendes et de contributions ultérieures.

▼Les commentaires
«Il aura fallu quatre ans et demi mais le septième plus grand groupe automobile au monde est né et l’Italie demeure protagoniste d’une partie mondiale», relève, enthousiaste, Il Sole 24 Ore. Contactés par le Financial Times, les analystes estiment que cette opération est un «tournant décisif dans la réanimation de Sergio Marchionne parmi les constructeurs automobiles. Elle donne naissance à un acteur mondial capable de rivaliser avec des concurrents tels General Motors, Toyota ou Volkswagen.» Et Le Monde de souligner que «la persévérance de Sergio Marchionne a fini par payer. Il s’agit d’un excellent retour sur investissement pour le constructeur italien, qui a eu le courage de faire le pari du redressement de Chrysler alors en pleine crise. Fin 2008, quand il s’engage à reprendre l’américain, qui émerge tout juste de la faillite, celui-ci perd 100 millions de dollars par jour. Aujourd’hui, c’est Fiat mal en point qui rachète à bon prix Chrysler en pleine forme.»

▼à suivre
Reste encore à fixer le siège de la compagnie, à Turin ou à Auburn Hills, dans le Michigan. Quant aux sites italiens de production avec leurs 27 000 employés, ils devraient être maintenus.

Mots clés: 
Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Rebecca Cook / Reuters
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Etats-Unis: le Colorado ouvre son premier coffee shop

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:50

▼Les faits
Depuis le 1er janvier, la marijuana est en vente libre dans l’Etat du Colorado. Une dépénalisation qui a provoqué une ruée de consommateurs dans les premiers coffee shops où, à condition d’avoir au moins 21 ans, ils peuvent acheter légalement jusqu’à 28 grammes de marijuana par visite. Ils pourront faire pareil dès le printemps prochain dans l’Etat de Washington. Mais pas de légalisation en vue au niveau fédéral, contrairement à l’Uruguay, où le Sénat vient d’approuver une loi légalisant la production et la vente de cannabis sous autorité de l’Etat.

▼Les commentaires
The Denver Post assure que le lancement de «l’herbe récréative» s’est fait «paisiblement» grâce à la bonne organisation des autorités. Et de souligner que le changement rapide des lois relatives au cannabis dans le Colorado a poussé les sceptiques à «réévaluer leur relation» à la substance. The New York Times prédit, lui, que le trafic interétatique de cannabis pourrait augmenter, bien que les touristes ne puissent acheter au Colorado qu‘un quart de la dose autorisée aux locaux. Plus conservateur, un contributeur du Washington Post dénonce la «honte et la tristesse du Colorado (…). Cette substance devrait être séquestrée. Elle mène les enfants à des comportements regrettables (…). Nous devons ramener les lois où elles étaient.» Dans Le Monde, l’économiste Pierre Kopp retient plutôt que la légalisation du cannabis au Colorado ou en Uruguay baissera les coûts des politiques répressives et augmentera les recettes provenant de la taxation de la marijuana.

▼A suivre
D’autres Etats pourraient lancer des initiatives en faveur de la dépénalisation du cannabis d’ici à 2016: l’Oregon, la Californie, l’Arizona, le Maine, le Massachusetts, le Montana et le Nevada.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Rick Wilking / Reuters
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Nouveaux trains: les CFF s’inquiètent

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:51

▼Les faits
Deux ans de retard au moins pour une commande de près de 1,9 milliard de francs: les trains à deux étages commandés par les CFF à Bombardier rencontrent de nouveaux problèmes. C’est ce qu’a affirmé le patron de l’ancienne régie fédérale, Andreas Meyer, au SonntagsBlick. Le fabricant canadien connaîtrait de sérieuses difficultés dans la conception et la construction des nouvelles rames, dont la première aurait dû être livrée en 2013 déjà. Lors de l’appel d’offres,  Bombardier avait été préféré à ses concurrents Siemens et Stadler Rail en raison de prix plus avantageux.

▼Les commentaires
Sur les ondes de RTS La Première, Stéphane Wettstein, directeur de Bombardier Transport Suisse, entend se montrer rassurant à l’égard des CFF: «Nous pensons livrer les trains avant fin 2015. Aujourd’hui, nous avons pris toutes les mesures pour rattraper notre retard. Dix-huit voitures sont déjà soudées, peintes et prêtes à l’assemblage. Les premiers tests de ces nouveaux wagons interviendront cette année.» La Basler Zeitung  remarque que la firme canadienne n’est pas l’unique responsable de ce retard: «Alors que Bombardier tente d’adapter les voitures à des vitesses supérieures à 200 km/h, le Tribunal administratif fédéral a exigé une amélioration de l’accessibilité aux personnes handicapées.»

▼A suivre
Les CFF réclament depuis longtemps un plan de livraison ferme et clair de la part de Bombardier. Une demande restée lettre morte jusqu’ici. Pas question pour Andreas Meyer de dénoncer le contrat pour autant. Les voyageurs devront se contenter, pendant quelque temps encore, de wagons parfois archaïques.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Peter Klaunzer / Keystone
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Les nouveaux troubles du sommeil

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:54

Repos insuffisant, insomnies, apnées.En organisant l’une des plus vastes études jamais menées sur le sommeil, le CHUV a pu brosser un portrait inattendu du dormeur romand. Des résultats à ne pas fermer l’œil de la nuit…

 

Serge Maillard et Sophie Gaitzsch

C’est l’une des enquêtes les plus importantes jamais réalisées sur le sommeil, qui s’est déroulée dans la région lausannoise entre 2009 et 2013: plus de 5000 personnes âgées de 40 à 85 ans ont répondu au questionnaire du Centre d’investigation et de recherche sur le sommeil (CIRS) du CHUV. Près de la moitié d’entre elles ont en outre bénéficié d’un enregistrement complet de leur sommeil, à domicile.

Les premiers résultats de cette investigation – baptisée HypnoLaus, en référence à la ville de Lausanne – viennent de tomber (voir chiffres). Raphaël Heinzer, médecin responsable du CIRS, a accepté d’en dévoiler les enseignements les plus importants. L’étude montre notamment que les apnées du sommeil, qui provoquent des obstructions répétées des voies respiratoires, parfois lourdes de conséquences (lire encadré en p. 29), sont beaucoup plus répandues que prévu: «Plus de la moitié des hommes et environ un tiers des femmes de plus de 40 ans sont concernés.»

Outre les apnées, les insomnies figurent en tête des troubles du sommeil qui affectent les Romands. Là aussi, les conclusions de la recherche sont supérieures aux suppositions initiales: «On retrouve cette affection chez plus d’un tiers des femmes et un quart des hommes. C’est-à-dire qu’ils prennent plus de trente minutes pour s’endormir ou font face à au moins trois réveils par nuit, au moins trois à quatre fois par semaine.» On estime généralement que la moitié de la population présentera un jour un trouble du sommeil, précise le spécialiste.

Le temps nécessaire à l’endormissement augmente progressivement avec l’âge et la quantité de sommeil profond diminue, surtout au-delà de 60 ans. Les médicaments prennent souvent le relais. C’est un troisième constat tiré de cette vaste enquête: environ une femme sur quatre et un homme sur huit prend un médicament pour s’endormir au moins une fois par mois.

«Il y a besoin d’études de grande ampleur de ce type pour appuyer, auprès de nos décideurs politiques, le fait qu’on se trouve face à un vrai sujet de santé publique», commente Christophe Petiau, neurologue et secrétaire adjoint de la Société française de recherche et médecine du sommeil. Pour Raphaël Heinzer, l’investigation a aussi le mérite de fixer de véritables normes concernant le sommeil: «Par exemple, mettre vingt minutes pour s’endormir peut aujourd’hui être considéré comme une moyenne.»

1. Inégalités entre sexes et couches sociales

La recherche soulève plusieurs questions de taille. L’une des plus frappantes concerne la différence entre hommes et femmes: les secondes font davantage état d’insomnies et consomment deux fois plus de produits somnifères. Pourquoi? Pas de certitude absolue, mais plusieurs hypothèses pour l’expliquer, répond Raphaël Heinzer. Parmi elles, on trouve l’instinct maternel qui «suppose une vigilance accrue la nuit, et entraîne donc un sommeil plus léger, plus sensible aux perturbations».

Spécialiste en neurosciences à l’Université de Bâle, Christian Cajochen énonce aussi un biais possible en fonction du genre: «Dans les questionnaires, les femmes se plaignent davantage de leur mauvaise qualité de sommeil, car elles font plus attention à leur santé que les hommes. Mais lorsque nous les mettons dans un laboratoire, nous voyons souvent ces différences s’amoindrir considérablement.» Par ailleurs, les femmes sont plus concernées par la dépression, «et 95% des personnes dépressives ont des troubles du sommeil».

L’étude indique aussi que «pauvres» et «riches» ne sont pas non plus sur un pied d’égalité face aux troubles du sommeil. Chercheuse à l’Institut universitaire de médecine sociale et préventive à Lausanne, Silvia Stringhini a comparé les dysfonctionnements nocturnes selon le niveau d’éducation et la profession des participants à l’étude HypnoLaus. Et là aussi, les résultats sont éloquents: par rapport à la catégorie sociale la plus élevée, les hommes de la tranche de population la moins aisée présentent 60% de risques en plus d’avoir une mauvaise qualité de sommeil – ce chiffre descend à 30% chez les femmes.

Pourquoi une différence si marquée? Aucun des facteurs étudiés – liés au statut migratoire, à l’état civil, à la consommation d’alcool, de tabac et de café, à l’exercice physique, à l’obésité ou encore à la présence de dépression et de troubles psychiques – ne fournit de réponse satisfaisante. «Pris ensemble, tous ces facteurs constituent au mieux un cinquième de l’explication, indique Silvia Stringhini. Malheureusement, le questionnaire n’incluait pas des thèmes comme les difficultés financières, l’instabilité familiale, l’alimentation, le stress au travail et en général.» Ces éléments pourraient jouer un rôle important dans les dysfonctionnements du sommeil, «notamment le stress au travail, de plus en plus marqué».

2. Un sommeil en constante diminution

Le monde du travail n’est sans doute pas étranger à la forte prévalence de troubles du sommeil. Ni, de manière générale, à l’insuffisance de repos, qui cause aujourd’hui bien des maux: ainsi, le fait de rogner sur ses nuits pour travailler davantage est une pratique à risques, souligne Raphaël Heinzer. «Les managers ou politiciens qui prétendent travailler vingt heures et dormir quatre heures ne sont pas tout à fait honnêtes et rendent un mauvais service à la population en glorifiant ce type de comportement.»

Il y a deux ans, Christian Cajochen a établi un profil du dormeur suisse: son sommeil dure en moyenne sept heures et demie par nuit, entre 23 heures et 6 h 30, sans différence marquée entre Alémaniques et Romands. «L’élément positif, c’est que nous dormons encore plus de sept heures, soit plus que les Britanniques ou les Américains. Mais il y a trente ans, nous dormions une demi-heure de plus par nuit: cela veut dire que nous avons perdu une minute de sommeil chaque année!» Une problématique qui concerne en particulier les plus jeunes (lire l’interview en page 31).

Silvia Stringhini met en avant une pollution lumineuse et sonore de plus en plus présente – et en permanence – en milieu urbain, particulièrement dans les quartiers moins favorisés. Et au-delà, c’est le statut du sommeil lui-même qui a changé, dans une société en accélération: «Le fait d’être connecté activement et en permanence est un problème. Si on lit un livre, on a tout de suite sommeil. Si on écrit un e-mail ou regarde des vidéos sur YouTube, cela n’aide pas forcément.» Ces trente dernières années, notre temps d’activité au bureau comme à la maison s’est allongé, ajoute Christian Cajochen: ainsi, les programmes télévisés finissent toujours plus tard.

3. Des risques pour la santé

Pour Raphaël Heinzer, nul doute que les perturbations du sommeil deviendront prochainement un sujet de santé publique. Mais, pour l’heure, le poste de Monsieur Sommeil à la Confédération reste à créer. En France, la prise de conscience est un peu plus avancée, avec des initiatives comme le Plan sommeil de 2007 au Ministère de la santé. «La difficulté, c’est que la médecine du sommeil n’est pas considérée comme une discipline à part entière et rassemble toutes sortes de profils, relève Christophe Petiau. Du coup, nous n’avons pas de représentant unique pour faire du lobbying auprès des décideurs politiques.»

Si l’on ne sait toujours pas avec certitude à quoi sert le sommeil chez l’être humain, une chose est sûre, rappelle Raphaël Heinzer: dormir mal ou insuffisamment nuit à la santé. «Le manque de sommeil a des effets désastreux sur notre fonctionnement cognitif. Il altère la mémoire et peut conduire à des troubles dépressifs.» La somnolence diurne est aussi une cause d’accidents.

Au gré de nouvelles études, on constate que les risques sanitaires d’un sommeil insuffisant ou de mauvaise qualité affectent de plus en plus de domaines, ajoute Christophe Petiau. Citons de possibles conséquences cardiovasculaires et métaboliques: «Cela augmente l’appétit et modifie la résistance à l’insuline, créant un risque accru d’obésité et de diabète.» Mais aussi un lien de plus en plus étroit entre mauvais sommeil et cancer. «Des études ont démontré une fréquence plus importante de cancer du sein chez les hôtesses de l’air, dont l’horloge biologique est décalée du fait de leur emploi. On le voit aussi chez les infirmières.»

Sans compter qu’une étude américaine récente de la Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, à Baltimore, laisse supposer un lien entre le fait de peu ou mal dormir et une accumulation de protéines bêta-amyloïdes que l’on retrouve dans la maladie d’Alzheimer…

4. Des applications pour mieux dormir

Alors, pour les préserver de ces maux, comment aider les Romands à plonger plus facilement dans les bras de Morphée? «Le plus important est de bien se connaître: savoir de combien d’heures de sommeil on a besoin, si l’on est plutôt du soir ou du matin et surtout garder des horaires de sommeil réguliers», conseille Raphaël Heinzer.

Outre des mesures d’hygiène du sommeil de base à respecter (lire en page 29), des méthodes comme la thérapie cognitivo-comportementale de l’insomnie peuvent s’avérer utiles, en rectifiant par exemple des attentes excessives. «Comme certaines personnes âgées qui souhaiteraient dormir comme à 20 ans, alors que le sommeil se fragmente et devient naturellement moins profond avec l’âge…»

Les technologies peuvent aussi se transformer en alliées, via de nouvelles applications pour smartphone qui ont pour objectif de favoriser le sommeil. Illustration de la préoccupation croissante de la population à ce propos, Réveil intelligent est l’une des applications payantes les plus téléchargées de nos jours sur iPhone et iPad. Le principe: suivre les cycles du sommeil afin de se réveiller au moment approprié, en évitant d’interrompre une phase de sommeil profond. L’application analyse pour cela les ronflements, tandis que d’autres modules, comme Smart Alarm Clock sur Android, sont carrément placés dans le lit afin de suivre tous les mouvements du dormeur. Cela toujours dans le but d’établir un profil de sommeil personnalisé.

Raphaël Heinzer voit surtout un intérêt de ces technologies pour les patients souffrant de parasomnie, par exemple ceux qui s’agitent ou crient la nuit. «Certaines applications qui enregistrent dès qu’il y a un bruit peuvent nous aider à évaluer la fréquence et le type de ces épisodes.» La preuve que les smartphones ne nuisent pas toujours au sommeil. A condition, évidemment, de penser à les mettre en mode silence…


Apnée
Des risques qui augmentent avec l’âge

Attestée par l’étude HypnoLaus, la fréquence des apnées après 40 ans a de quoi surprendre, tant chez les hommes (plus de la moitié des participants) que chez les femmes (environ un tiers). Les risques liés à ces très brèves interruptions de la respiration pendant le sommeil, jusqu’à cinquante par heure dans les cas les plus graves, sont notamment cardiovasculaires, du fait du stress nocturne provoqué par les multiples petits réveils, mais peuvent aussi inclure l’hypertension, des attaques cérébrales, du diabète ou de l’insuffisance cardiaque. La présence d’apnée augmente avec l’âge, la surcharge pondérale et en fonction de l’anatomie: les personnes ayant une grosse langue ou un pharynx étroit sont plus exposées.

 

Raphaël Heinzer livre plusieurs explications aux constatations de l’étude: «Il est possible que des problèmes d’obésité accrus dans la population en soient à l’origine. Mais ce sont surtout les appareils de détection des troubles respiratoires nocturnes qui sont de plus en plus perfectionnés. C’est comme si on avait un nouveau microscope: on voit plus de détails.»

L’investigation a pris en compte les troubles respiratoires dès cinq apnées par heure. Faudrait-il élever ce seuil? «Nous avons à présent besoin d’un suivi pour savoir si les personnes dans la tranche la plus basse développent des pathologies, et lesquelles.»

Beaucoup de patients ne gardent aucun souvenir de leurs apnées, et peuvent avoir paradoxalement l’impression d’avoir bien dormi. «C’est seulement au bout d’un moment qu’on se sentira très fatigué.»

Le traitement repose sur le port d’un masque nasal, qui exerce une pression aérienne pour maintenir la gorge ouverte durant le sommeil.


 

Entretien
«Les écrans brouillent l’horloge biologique des jeunes»
Les nouvelles technologies ont un effet négatif sur le sommeil des adolescents. Le point avec Sophie Schwartz, directrice du Laboratoire de neuro-imagerie du sommeil de la faculté de médecine de l’Université de Genève.

 

Comment dorment les ados romands?
De moins en moins, et de moins en moins bien! Les jeunes de 15 ans dorment en moyenne une heure et demie de moins que ceux de 11 ans, alors que leurs besoins, neuf heures par nuit, sont identiques. Nous assistons à une réduction et à une détérioration de leur sommeil avec l’essor des réseaux sociaux et des messageries. L’arrivée des smartphones a encore renforcé le problème.

En quoi les nouvelles technologies sont-elles nocives pour le sommeil?
Nous menons actuellement une grande étude sur le sujet auprès de 900 jeunes de 13 à 19 ans dans le canton de Genève. Les résultats préliminaires montrent que l’usage d’écrans le soir repousse l’heure du coucher: les ados qui discutent via les réseaux sociaux ne sentent pas la fatigue. Ils ont des interactions stimulantes avec leurs amis, ce qui excite le cerveau à un moment de transition entre éveil et sommeil, où il faudrait se détacher des sollicitations du monde extérieur. Les réseaux sociaux constituent une manière d’exister et ceux qui ne sont pas disponibles se voient rapidement exclus. Il y a clairement un phénomène d’addiction qui entre en jeu.

 

Certains ados dorment même avec leur smartphone allumé…
Oui. Il s’agit vraiment d’un comportement à bannir. La personne qui s’attend à recevoir un message reste vigilante aux signaux de l’appareil et s’installe dans un sommeil fragile. Un état que l’on pourrait comparer à celui d’une mère ou d’un père qui, pendant son sommeil, est attentif en permanence aux bruits de son bébé.

Quel rôle joue la lumière des écrans?
Elle brouille l’horloge biologique, alors que celle-ci est déjà décalée chez les ados. Leur organisme produit la mélatonine, l’hormone du sommeil, près de deux heures plus tard que chez les adultes, raison pour laquelle ils ont de la peine à se lever le matin. Les spécialistes s’accordent d’ailleurs à dire qu’il serait très bénéfique de repousser le début des cours à l’école d’au moins une heure! La lumière des écrans tard le soir accentue encore ce retard de phases naturelles.

 

Quels sont les autres facteurs perturbants?
Le niveau de stress est plus élevé que par le passé. Mais il est lié à toutes sortes d’autres éléments, donc plus difficile à évaluer. L’essor du multitasking – par exemple chatter, manger, faire ses devoirs et écouter de la musique en même temps – entre aussi en jeu. L’augmentation de la consommation de boissons énergisantes a également un impact.

Quelles sont les conséquences du manque de sommeil chez les jeunes?
Le sommeil joue un rôle très important dans leur développement cérébral. Nous ne connaissons pas encore les conséquences à long terme du manque de sommeil dans l’enfance ou l’adolescence. En revanche, nous savons que les effets immédiats sont désastreux. Ne pas dormir suffisamment altère la concentration, l’humeur et favorise la dépression. Le sommeil joue aussi un rôle primordial dans la mémorisation: il consolide dans le cerveau les informations recueillies durant la journée et participe à leur tri. C’est le cas pour toutes les tranches d’âge mais, contrairement aux adultes, les jeunes sont en permanence testés sur leurs performances de mémoire et leur avenir professionnel en dépend. L’enjeu est donc bien supérieur.


Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
David Prêtre / Strates
DR
Rubrique Une: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Les molosses du Kremlin

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:56

JO de Sotchi.Après les attentats terroristes de Volgograd, Vladimir Poutine s’inquiète pour la sécurité des Jeux. Il compte sur ses forces spéciales, les Speznas, pour combattre les islamistes venus des républiques instables du Caucase.

Matthias Schepp

Alexander Mikhaïlov porte des bottes de cow-boy, un jean et un blouson de cuir. Le tout en noir, comme son uniforme et la cagoule qu’il avait revêtus cette nuit d’automne 2002, lorsqu’il dirigeait des forces d’assaut censées libérer les 850 spectateurs du théâtre de la Doubrovka, pris en otages par un commando tchétchène. En raison d’erreurs logistiques, l’opération tourna au désastre, plus de 130 otages perdirent la vie. «Nous aurions pu être des héros et, au lieu de ça, nous apparaissions aux yeux du monde entier comme des idiots, des minables», se désole Mikhaïlov.

Un tel événement ne doit pas se reproduire et surtout pas à Sotchi où les Jeux olympiques d’hiver commencent dans un mois. Mais Mikhaïlov craint que Sotchi ne soit le véritable objectif des islamistes: «Volgograd n’était que le début.» Dans les deux attentats, 34 personnes sont mortes, 62 ont été blessées. Vladimir Poutine a annoncé «la lutte contre les terroristes jusqu’à leur anéantissement total». A Sotchi, s’il en va de la sécurité de sportifs et de spectateurs venus du monde entier, il en va aussi du projet chéri de Poutine, les JO d’hiver les plus coûteux de l’histoire et, avec eux, la considération due à la nouvelle dimension qu’entend afficher la Russie.

Attirer les JO à Sotchi fut, dès le début, une entreprise risquée. La région de la mer Noire bout depuis longtemps. Russes et Caucasiens s’y bagarrent en permanence.

Les provinces, de Tchétchénie, du Daghestan et de Kabardino-Balkarie, distantes de 300 kilomètres seulement, sont le théâtre d’opérations des terroristes islamiques. En 2013, le Nord-Caucase a subi 33 attentats et, depuis octobre seulement, 139 personnes y ont succombé.

Cauchemar sécuritaire. Pour les Jeux, le Kremlin a mobilisé 50 000 policiers, agents secrets et soldats. Des sous-marins patrouillent le long du littoral, des drones surveillent le ciel, des batteries de défense antiaérienne et antimissiles modernes S-400 sont déployées. Des détachements de troupes du Ministère de l’intérieur – 170 000 hommes au total – sont chargés de protéger les voies d’accès et de veiller, en cas de besoin, à ce que les commandos des forces spéciales puissent intervenir en quelques minutes dans la zone des JO. Une tâche démesurée: avec ses 400 000 habitants, Sotchi s’étend sur une centaine de kilomètres le long de la mer Noire; le stade olympique, le centre de presse et les stades de hockey, de patinage de vitesse et de patinage artistique sont au bord de l’eau. De là, un nouveau chemin de fer de 71 kilomètres conduit à travers la montagne jusqu’à l’un des deux villages olympiques, aux hôtels de luxe et aux pistes de ski. Du point de vue de la sécurité, c’est un cauchemar.

Pour surveiller ce territoire, les Speznas, les unités d’élite légendaires de l’armée, des services secrets et du Ministère de l’intérieur, jouent un rôle décisif. Leurs membres sont à la hauteur du SAS britannique et des Navy Seals américains qui avaient exécuté Oussama Ben Laden en 2011 au Pakistan. L’unité la plus titrée des Speznas, le groupe Alpha d’Alexander Mikhaïlov, est sur place depuis six mois. A la recherche de caches d’explosifs, ces spécialistes de l’antiterrorisme passent au peigne fin la ville de Sotchi, les villages olympiques et les sites sportifs. Ils se préparent à des opérations éclair, à des libérations d’otages. «Nous appliquons ici les précautions en usage lors des sommets du G8, quand nous devons protéger Poutine, Obama, Merkel & Cie», explique un officier.

Une guerre d’indépendance. Les ennemis jurés sont les islamistes de provinces du Caucase qui, sous l’égide de leur guide Dokou Oumarov, exigent de Moscou leur indépendance. L’objectif d’Oumarov est d’instaurer au Nord-Caucase un émirat islamique sous l’empire de la charia. En juillet, il avait appelé ses frères de foi à empêcher par des actes de terreur les JO de Sotchi, «cette danse diabolique sur les dépouilles de nos ancêtres».

A Moscou, le Ministère de l’intérieur estime à 600, organisés en 40 cellules, ces combattants de l’ombre dans la région du Nord-Caucase. En septembre, le FSB, service secret chargé des affaires intérieures, annonçait que quelque 400 autres extrémistes du Caucase avaient rallié des groupes islamistes en Syrie. Du coup, les agents secrets surveillent toutes les arrivées pour éviter que ces extrémistes ne reviennent vers Sotchi ces prochaines semaines.

La préparation des membres des troupes spéciales en vue des Jeux est un secret d’Etat, ils n’ont pas le droit d’en parler. Mais nous avons quand même pu tirer quelques informations de certains d’entre eux. «Viktor» ne veut pas voir son vrai nom publié. Il est affecté à Sotchi depuis plusieurs semaines. Avec ses camarades, il est chargé d’empêcher que des terroristes venus du Caucase ne s’infiltrent par les cols montagneux vers la cité olympique. Viktor, le tireur d’élite, incarne le moral d’acier des Speznas: il a perdu son œil droit lors d’une escarmouche en septembre 2000 à Grozny, la capitale tchétchène; il a alors imploré son commandant de le maintenir en service, ce qui lui fut accordé. Depuis lors, Viktor s’est entraîné jour après jour au stand de tir pour recouvrer la précision de son tir. Certains jours, il tirait mille cartouches: «Quand il s’agit de régler leur compte à des terroristes, tu ne peux jamais renoncer.» Une phrase qui évoque celle de Poutine, en septembre 1999, qui jurait de pourchasser, en cas de nécessité, «les terroristes jusque dans les chiottes».

Tirer pour tuer. Reste qu’en dépit de quelques succès la Russie n’a de loin pas remporté sa guerre contre le terrorisme. Depuis qu’en 1995 des séparatistes tchétchènes ont pris 1500 personnes en otages dans un hôpital à Boudionnovsk, dans le sud de la Russie (129 morts, 415 blessés), ils ont fait 2240 victimes supplémentaires et 5880 blessés. Peu avant la fin de l’année, le patron du FSB, Alexander Bortnikov, a annoncé le palmarès de son service: en 2013, «plus de 260 bandits ont été neutralisés», dont 42 dirigeants. «Lors de telles opérations, nous ne faisons pas de prisonniers, nous tirons pour tuer», commente un officier des Speznas.

Malgré ces ordres de marche impitoyables, la plupart des hommes des Speznas n’apprécient pas Poutine. Il leur semble trop libéral, trop mou. «Il nous faut un type comme Staline», estime Alexander Mikhaïlov, commandant de l’unité Alpha des Speznas. Dans leur majorité, les membres de ces troupes d’élite n’ont pas fait leur deuil de l’Empire soviétique. Ils haïssent l’Amérique et l’OTAN et se fichent de la démocratie comme de colin-tampon. En d’autres termes, ceux qui ont pour tâche de protéger la Russie contre les terroristes et les insurgés se trouvent en opposition avec leur Etat. De son côté, le gouvernement ne fait pas grand-chose pour s’assurer de la loyauté de sa garde prétorienne: les salaires de ces hommes s’étagent de 1000 à 2500 euros, les vétérans doivent se faire embaucher comme gardes de sécurité car leurs retraites minuscules ne leur permettent pas de vivre.

L’ombre du président. Bon nombre de vétérans sombrent dans l’alcool et/ou la dépression. «Nous sommes les molosses du Kremlin, mais quand nous ne fonctionnons plus, on nous jette comme une capote usagée», illustre l’un d’eux. Ancien capitaine d’une unité de Speznas, Andreï Pelitchev ressent aussi les choses ainsi. Il a été décoré de l’Ordre du courage par Vladimir Poutine pour avoir sauté sur une mine en 2006, y avoir perdu un pied, s’être fait lui-même une injection analgésique et un bandage et avoir commandé en personne la retraite de son unité et l’engagement d’une escouade de démineurs. (Il s’est avéré ensuite que la mine avait été déposée par un hélicoptère russe.) Mais, au terme de sa convalescence, on ne l’a gratifié que d’une chambre de 6 mètres carrés dans une caserne délabrée, pour lui, sa femme et son fils.

Pelitchev avait perdu un pied pour la patrie et voilà que la patrie l’humiliait. Pour remédier à des couacs si fâcheux, Vladimir Poutine a confié en juillet la sécurité des JO d’hiver à un homme qu’à Moscou ils sont nombreux à appeler avec respect «l’ombre du président»: chef de ses gardes du corps, Viktor Solotov connaît Poutine mieux que quiconque. Il a commencé par réorganiser les unités des Speznas sur un mode plus discipliné, puis il a augmenté leurs salaires.

Reste que cette intervention tardive ne résout pas les vieux problèmes et n’atténue pas les vieilles haines entre Russes et non-Russes dans la région de Sotchi. Nul n’en parle mieux que l’officier des Speznas Sergueï Illarionov, 38 ans, qui vit dans une minuscule bicoque de briques en banlieue de la ville de Novotcherkassk, dans le sud du pays. Il y a cinq ans encore, il combattait les extrémistes dans le Caucase. Aujourd’hui, il touche une retraite de 5500 roubles (150 francs). Il entretient son épouse et son enfant de 2 ans en travaillant comme garde du corps. Il est toujours bâti comme un bodybuilder.

«Cochons de Russes.» Illarionov était major de l’unité d’élite Rossitch. En mars 2000, il s’est illustré dans la bataille autour de la localité tchétchène de Komsomolskoïe, où s’étaient réfugiés un chef rebelle avec 100 combattants. En deux minutes, 22 soldats d’une unité d’assaut avaient déjà péri. Illarionov s’est alors porté volontaire pour négocier la restitution des corps. Un Tchétchène furieux lui enfonça le canon de son pistolet dans la bouche. Mais comme il ne montra aucune crainte, il eut la vie sauve et put faire enterrer ses camarades.

Les tensions entre les rebelles du Caucase et les Russes tourmentent le vétéran. A 30 kilomètres seulement de sa maisonnette, au village d’Axaï, il y a eu récemment une bagarre générale entre les Russes et des gens venus du Daghestan. «Cochons de Russes», hurlaient les seconds, tandis que les premiers juraient de les renvoyer manu militari dans leur pays. «Ça aussi, ça pèse sur les Jeux de Sotchi. La haine est une terre nourricière pour de nouveaux terroristes.»

©DER SPIEGEL
TRADUCTION ET ADAPTATION GIAN POZZY

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Dimitry Beliakov
Alexei Nikolskiy / Reuters
Rubrique Une: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

La renaissance numérique de Bolex

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:57

Légende. La mythique caméra vaudoise, utilisée par les plus grands cinéastes, a disparu dans les années 70. Elle est relancée grâce à des passionnés californiens.

Elle était la caméra la plus célèbre du monde, un outil parfait utilisé autant par les amateurs que par les professionnels. Enfant, Steven Spielberg était fasciné par la Bolex H16 de son père, avant de s’en emparer à l’âge de 12 ans, amorçant la pellicule d’un sacré destin. Les cinéastes de la Nouvelle Vague, dans les années 60, avaient la même dévotion pour la caméra 16 mm, ainsi que des artistes comme Andy Warhol.

Son fabricant de l’époque, Paillard-Bolex, envoyait plusieurs milliers de caméras par année dans le monde entier. La société, qui proposait aussi des machines à écrire, radios ou tourne-disques, était la plus grande entreprise romande. Elle employait 8000 personnes. Dont 4500 entre Sainte-Croix, Yverdon et Orbe.

L’arrivée du super-8 de Kodak et de l’électronique nippone ont porté un rude coup à Bolex. La fabrication des caméras 16 mm a cessé dans les années 70. Elle se poursuit toutefois à Yverdon, chez Bolex International SA, à raison d’une quinzaine d’unités par année, tirant parti du stock de pièces restantes.

Une jeune génération de cinéastes, en particulier pour les documentaires, savent que cette caméra mécanique à film est irremplaçable dans les plus dures conditions climatiques. Ou lorsqu’il n’y pas de prise électrique pour recharger des batteries, comme en plein désert. La texture granuleuse, les teintes chaudes et le rendu des détails de la pellicule 16 mm sont eux aussi sans équivalents.

Du marché de niche à la production en série. Il s’agit cependant d’un marché de niche, presque résiduel, qui n’a rien à voir avec une production en série. Celle-ci pourrait bien être assurée par une joint-venture entre Bolex International et Cinemeridian, jeune société de Los Angeles menée par Joe Rubinstein, un cinéaste également spécialisé dans le lancement de start-up. Dans les faits, après avoir examiné en détail le dossier proposé par Rubinstein, la société d’Yverdon a accordé une licence à Cinemeridian pour la fabrication de Bolex numériques, baptisées D16. Cinemeridian a proposé en 2012 le projet sur Kickstarter, la plateforme de financement participatif. La start-up américaine espérait 100 000 dollars pour concevoir et réaliser la caméra. Elle en a reçu trois fois plus, tant l’idée a séduit des passionnés, mais aussi des investisseurs californiens.

En décembre dernier, après plusieurs retards, la vente du modèle a commencé sur le site digitalbolex.com. Un premier lot de 100 pièces préréservées est parti rapidement. Cinemeridian s’active aujourd’hui pour répondre à la demande suscitée par le buzz qui, surtout aux Etats-Unis, entoure la réincarnation numérique de la Bolex.

En magnésium et plastique dur, la D16 reprend habilement le design des caméras 16 et 8 mm des années 60, celles de Bolex comme les appareils de la concurrence. Sa poignée est l’imitation exacte de l’accessoire proposé à l’époque par la société vaudoise. Si le rétrodesign se porte au mieux, encore fallait-il penser à adapter la Rolls, ou plutôt le Range Rover des caméras analogiques d’il y a un demi-siècle.

Image organique. La D16, vendue 3300 dollars dans sa version 256 GB, s’adresse non seulement à des débutants, passionnés de vintage techno ou étudiants en cinéma, mais aussi à des connaisseurs et professionnels à la recherche d’un rendu qui imite l’image organique du 16 mm. Grâce à un grand capteur identique au format super-16 et à des optiques maison, les concepteurs de la caméra ont réussi à harmoniser le design rétro avec un résultat lui aussi délicieusement passéiste.

La manivelle de la D16 ne sert plus à remonter la bobine mais, de manière astucieuse, à accélérer ou ralentir le rythme de l’image numérique. Pourvue d’une monture C comme les anciennes Bolex, la caméra accueille des objectifs interchangeables, dont ceux proposés par Cinemeridian. Elle enregistre en 2K et en format RAW non compressé, susceptible d’être travaillé à la postproduction. La D16 dispose d’un écran de contrôle orientable, ainsi que de multiples prises et supports pour le son stéréo, un viseur ou le HDMI.

La Bolex numérique s’adresse pour l’heure en priorité au marché nord-américain. La maison mère d’Yverdon espère pouvoir la distribuer en Europe d’ici à quelques mois.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
DR
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Gymnases vaudois: la galère des premières

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 05:58

Maturité.Un élève sur sept ne passe pas en deuxième année. Résultat: soit un échec, soit un départ précipité. La transition entre le collège et le gymnase, avec moins de prise en charge, reste compliquée.

MATHIEU SIGNORELL

Mais où sont-ils passés? Dans certains gymnases vaudois, entre la première et la deuxième année de maturité, 20% des élèves disparaissent des statistiques. Dérangeant et inquiétant pour des enseignants, mais aussi pour certains directeurs, qui regrettent de voir autant de leurs gymnasiens échouer. Mais peu s’expriment, car le sujet de l’échec scolaire reste délicat.

D’abord quelques exemples, fondés sur les chiffres de l’Etat de Vaud: le gymnase de Beaulieu, à Lausanne, accueillait 284 étudiants de première année en 2011, dont une partie de redoublants. En 2012, il n’en comptait que 224 en deuxième. Soit une différence de 60 élèves, c’est-à-dire 21% (voir tableau). Dans le même temps, Auguste-Piccard, aussi à Lausanne, n’en «perdait» que 9 sur 228 (3,9%).

Parmi les établissements aux différences les plus élevées de 2005 à 2012, on trouve le gymnase intercantonal de la Broye avec une moyenne de 20,65% et le gymnase de Beaulieu avec 15,46%. A l’inverse, Auguste-Piccard (4,83%) et Chamblandes (7,9%) connaissent les meilleurs taux. Ces résultats peuvent être variables pris d’année en année. Le gymnase du Bugnon, encore à Lausanne, joue au yoyo entre 10,77 et 23,16%. Idem à Burier, dans l’est vaudois: 20 étudiants partis entre 2009 et 2010, contre 65 une année auparavant.

Avec une moyenne de près de 12%, stable d’année en année, le canton de Vaud s’en sort bien. Comme celui de Fribourg. Ce dernier enregistre en 2013 une moyenne de 10,01%, contre 10,52% entre 2011 et 2012, selon le Service de l’enseignement secondaire du deuxième degré.

Les deux régions sont loin derrière Genève. Parmi les 2708 gymnasiens de première année en 2012, 491 ont quitté le gymnase, soit 18%. «Parmi ceux-ci, 391 se sont réorientés vers une autre filière au sein de l’école publique genevoise, 24 ont rejoint une école privée du canton et 76 ne sont plus scolarisés à Genève, certains ayant donc déménagé», explique Pascal Edwards, directeur du Service de la scolarité de l’enseignement secondaire II postobligatoire.

Changements dans les règlements. En étudiant le parcours des gymnasiens vaudois de 1996 à 2008, Eugen Stocker, responsable de recherche à l’Unité de recherche pour le pilotage des systèmes pédagogiques, qui dépend du Département de la formation, de la jeunesse et de la culture, est parvenu à dessiner une carte des mouvements d’élèves dans le canton. Ainsi, sur cette période de douze ans, entre 7,5 et 11,1% redoublent leur première année de maturité. Parmi les autres, de 1,5 à 3% se réorientent vers la première année de l’école de culture générale et de commerce, souvent appelée «voie diplôme». Le reste (entre 4,1 et 9,6%) quitte simplement le gymnase.

«Nous ne savons pas véritablement où vont ces derniers, précise Eugen Stocker. Certains partent en apprentissage, d’autres quittent le canton. Nous les perdons des statistiques.»

Pour lui, les chiffres globaux sont stables depuis quinze ans, «même si nous observons des fluctuations». Celles-ci s’expliquent souvent par des changements dans les règlements: «La double compensation des points négatifs, à la fin des années 90, a ainsi fait augmenter les statistiques.»

Certains estiment que les différences entre gymnases seraient dues à l’origine sociale des étudiants: enfants de parents immigrés dans l’ouest lausannois et classes aisées à Pully, à l’est. Les statistiques cantonales ne permettent pas de relier les résultats des élèves et leur origine, souligne  Eugen Stocker. Et personne ne se risque à faire le lien.

En revanche, selon des professeurs et la direction générale de l’enseignement postobligatoire, les branches enseignées ont un impact. Il y a d’un côté le regroupement des classes particulières dans seulement quelques gymnases, comme pour le grec, et de l’autre des élèves au parcours hors de l’ordinaire. C’est le cas des artistes et sportifs d’élite du gymnase Auguste-Piccard.

Une nouvelle vie à appréhender. Alors comment se justifie ces difficultés à passer? Tant au collège qu’au gymnase et au sein de l’administration cantonale, tout le monde pointe du doigt avant tout le changement radical entre le niveau du collège et celui du gymnase: nouvelle vie, nouveaux amis, nouveaux trajets, nouvelle façon de manger à midi, sans les parents, nouvelles méthodes d’apprentissage et, surtout, une certaine liberté accordée à des élèves considérés comme de jeunes adultes.

Pour prévenir l’échec, le gymnase de Nyon organise par exemple des forums pour les classes de première année. «Les élèves peuvent parler des idées qu’ils se faisaient du gymnase et de la réalité qu’il rencontre, explique le directeur, Yves Deluz. Ce qui ressort, c’est notamment l’importance du changement de vie sociale, qu’ils doivent parfois reconstruire, et du bouleversement qu’ils subissent. Cela leur prend une énergie considérable. Jusqu’ici, leur vie sociale était liée à leur environnement très proche, comme le village.»

Dans l’idée de préparer les futurs gymnasiens à ces changements, Jacques Daniélou, président de la Société pédagogique vaudoise, estime que les enseignants du collège ont les moyens de les aider. Mais il milite pour la mise en place de périodes spécifiques. «Certaines classes en secondaire ont des périodes d’approche du monde professionnel. Il en faut du même type pour ceux qui se destinent au gymnase et à des études supérieures. Il n’y aura jamais trop de monde qui en fera. Notre société, de plus en plus tertiaire, en a besoin.»

«Appauvrissement clair et net.» Gros souci pour ces jeunes étudiants: la gestion du temps et du travail à accomplir. Directeur général de l’enseignement obligatoire, Alain Bouquet cite un exemple concret: le carnet journalier. Au collège, les maîtres dictent les devoirs et les parents doivent le signer. «Au gymnase, le travail y est moins mâché. Il appartient à l’élève d’anticiper sur les révisions et le travail personnel, même si les enseignants lui donnent des indications précises. C’est à l’élève de trouver son outil. Le saut est ainsi plus rude.»

Présidente de l’Association vaudoise des maîtres de gymnase, Françoise-Emmanuelle Nicolet est enseignante depuis vingt-cinq ans. Tout en s’étonnant qu’il n’y ait pas davantage de psychologues dans les gymnases pour soutenir les jeunes en difficulté, elle note un «appauvrissement clair et net» du bagage des étudiants. «Ce n’est pas parce qu’ils ont les points pour venir au gymnase qu’ils ont le bagage. Il y a vingt-cinq ans, on comptait deux fois plus d’heures de français en secondaire I qu’aujourd’hui. On le ressent fortement.»

Alain Bouquet se veut rassurant. Si, jusqu’ici, certains points négatifs étaient autorisés pour passer au gymnase, «cela peut donner un sentiment de minimalisme». Il insiste alors sur le fait que la nouvelle loi sur l’enseignement obligatoire (LEO) modifiera justement ces règles.

Le vrai problème: un échec en troisième année.«On ne peut pas aborder la question sous le seul angle de l’insuffisance vraie ou fantasmée des élèves», nuance Gilles Pierrehumbert, président de la Société vaudoise des maîtres secondaires. Pour lui, l’un des problèmes est que «les jeunes de 15 ans ont parfois de la peine à se forger un projet d’études structuré. S’ils pouvaient s’interroger sur leurs aspirations, ils pourraient mieux choisir une voie ou une autre.» Conséquence: le gymnase n’est plus seulement une école qui prépare à l’université, «il est aussi une école de transition».

En cas de difficulté d’adaptation, faut-il alors tout faire pour que ces jeunes restent au gymnase? Non, répond Séverin Bez, directeur général de l’enseignement postobligatoire. «Nous n’y mettons pas toute notre énergie, car l’important est avant tout qu’ils restent dans le système scolaire en général.» Un départ en première année signifie le début d’une nouvelle voie de formation, souvent en apprentissage. Pour lui, «on ne peut pas considérer cela comme un échec, pour autant qu’ils aient un projet de formation». «En revanche, les échecs les plus douloureux et pour lesquels nous devons nous inquiéter sont ceux de la fin du gymnase, définitifs, après trois ou quatre ans d’étude. Ça, c’est un échec du système, car le jeune se trouve alors sans rien et a mis trop de temps à trouver sa vraie voie de formation.» Un domaine pour lequel le canton ne publie pas de chiffres dans le détail.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Dominic Favre / Keystone
Rubrique Une: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Genève internationale: le coeur féminin de l'ONU

$
0
0
Jeudi, 9 Janvier, 2014 - 06:00

Diplomatie.Le nombre de femmes exerçant la fonction d'ambassadeure auprès des Nations Unies ne cesse de croître. Rencontre avec cinq d'entre elles.

Photos Eddy Mottaz

Pas de costume-cravate à l’horizon. Ces réunions informelles n’ont lieu qu’entre femmes, tous les deux mois environ. Elles bossent dur, mais autour d’un thé ou d’un repas. Elles se soutiennent et se conseillent aussi, sans oublier de rigoler. Cela pourrait être un afterwork entre copines, mais c’est bien plus. Il s’agit de l’un des cercles les plus fermés de la Genève internationale, dont font partie toutes les ambassadrices auprès des Nations Unies (protocole diplomatique et féminisation des noms de métiers obligent, certaines d’entre elles insistent pour l’utilisation du terme «ambassadeure»). Le nom de leur groupe sonne comme un défi aux clichés sexistes: Lipstick Club (Club du rouge à lèvres). Mais, à ce niveau d’expérience et de compétences, ces diplomates peuvent bien se le permettre.

Depuis sa création, en 2010, le Lipstick ne cesse de s’agrandir, et pour cause: entre 2008 et 2013, le nombre d’ambassadeures à Genève a presque doublé, passant de 21 à 39 sur 187 représentations. Une évolution à l’image de l’esprit du club, qui refuse de «cantonner les femmes dans le rôle de victimes de violences et d’inégalités». En février dernier, le Lipstick a célébré la réussite féminine à travers le monde en organisant une grande conférence: «The Power of Empowered Women».

Equité. La présence accrue des représentantes permanentes à Genève reflète la relative ascension sociale et économique des femmes à travers le monde. Quitte à en donner une image un brin optimiste: dans d’autres univers professionnels, comme celui de l’entreprise, cette ascension est nettement plus lente. Mais de nombreux pays semblent l’avoir compris: nommer des ambassadeures est une manière convaincante d’afficher sa volonté de mener une politique de développement et de paix.

Certains dirigeants ont ainsi déployé des mesures d’encouragement pour attirer des femmes qualifiées dans les Ministères des affaires étrangères. Exemple emblématique: Catherine Ashton. Dès son arrivée à la tête des Affaires étrangères et de la Politique de sécurité de l’Union européenne, en 2009, la Britannique s’est battue pour une meilleure représentation des femmes au sein du Service d’action extérieure de l’UE. La «disposition spécifique genre» vise ainsi à empêcher les discriminations à l’encontre des femmes au moment du recrutement. Résultat, le nombre de cheffes de délégation européennes a plus que doublé en quatre ans, passant de 11 à 28 sur 140.

Et s’il y en avait plus? Et si, derrière la meilleure représentation des femmes dans les négociations onusiennes se cachaient des aptitudes particulièrement adaptées au job? «Complètement stéréotypé! s’insurge Elissa Golberg, ambassadeure du Canada. Ce n’est pas une question de genre mais de compétences, de connaissances et d’engagement.» Pourtant, nombre de ses collègues jugent le tempérament féminin – empathique, patient, pragmatique – particulièrement adapté à la diplomatie multilatérale, où la dynamique de groupe joue un rôle important. «Les hommes ont tendance à laisser parler leur ego, à jouer au coq, tandis que nous nous concentrons sur l’objectif à atteindre. Nous maîtrisons bien l’art du compromis», illustre Mariangela Zappia, à la tête de la Délégation européenne.

Ne nous méprenons pas: le monde de la diplomatie n’est pas pour autant un paradis égalitaire. Et les bonnes vieilles remarques machistes vont bon train. «Certains collègues masculins disent à nos invités: “Regardez, elle est compétente et en plus elle est belle!”» se moque une cheffe de mission. Pire que le machisme, le paternalisme. «Un jour, un chef a cessé de m’envoyer en mission à l’étranger. Il disait me faciliter la vie, car j’avais un bébé. Mais je n’avais rien demandé!» se rappelle Mariangela Zappia. La cheffe de la délégation européenne note aussi la moins forte présence des femmes dans les endroits jugés «plus importants». A New York, centre politique hébergeant les six organes principaux de l’ONU, le nombre de représentantes permanentes n’atteint que 14%, soit 7% de moins qu’au Palais des Nations. Genève serait-elle donc un centre diplomatique de seconde zone? «Absolument pas! C’est le cœur humain et humanitaire de l’ONU. Nous prenons davantage de décisions qu’à New York et elles ont un impact réel sur la vie des gens», insiste Karen Pierce, ambassadeure britannique.
Et Genève possède l’indispensable: le Lipstick Club. Car, comme disait Madeleine Albright, ex-secrétaire d’Etat américaine, «il existe une place spéciale en enfer pour les femmes qui n’aident pas les autres femmes».


Elissa Golberg
40 ans, ambassadeure de la Mission du Canada auprès des Nations Unies

Ne demandez pas à Elissa Golberg si les femmes ont des dispositions naturelles à la diplomatie. Ce genre de «cliché» l’agace au plus haut point. «Nous ne sommes pas toutes empathiques, douces et patientes, et les hommes n’ont pas tous des ego surdimensionnés.» Avec son agenda de ministre, Son Excellence nous reçoit par téléphone. La voix est souriante – elle rit beaucoup –, mais ferme et un peu pressée. Sûre d’elle, convaincante, on comprend aisément qu’Elissa Golberg ait été nommée représentante permanente du Canada en 2011, à seulement 38 ans.

En intégrant le corps diplomatique canadien, en 1996, cette native de Montréal a encore en tête d’aller travailler dans une ONG. Mais elle se rend vite compte de l’impact «décisif» des diplomates sur la scène internationale. Alors elle reste, se chargeant de dossiers relatifs à la paix et à la sécurité, incluant la gestion de la réponse canadienne à plusieurs crises humanitaires. En 2008, elle devient la première représentante du Canada à Kandahar, Afghanistan, à côté des militaires. Et être une femme l’a parfois aidée. «J’étais en contact direct avec la population, on me laissait entrer dans les espaces non accessibles aux hommes.»

Et que dit son mari de ses activités risquées? «Il me soutient beaucoup», même depuis le Canada. «Skype aide.» Elissa Golberg fait aussi la fierté de ses parents, une Française réfugiée au Canada après la Seconde Guerre mondiale, et un Américain. «C’est fou qu’une immigrée de deuxième génération puisse devenir ambassadeure. Le Canada est vraiment un pays de diversité.» Et, à voir la longue liste de ses récompenses, dont le titre de Jeune Leader mondial décerné par le Forum économique mondial, on se dit que, vraiment, Elissa Golberg devait devenir diplomate.


Wafaa Bassim
58 ans, ambassadeure de la Mission d’Egypte auprès des Nations Unies

Elle était à Genève ce 30 juin 2013. Le jour où des millions de manifestants à travers l'Egypte demandaient la démission du président Mohamed Morsi, élu un an plus tôt. «Mon métier me prive parfois de moments importants.» Il y a chez Wafaa Bassim une sincérité touchante, qui vient des tripes. Sur son bureau, des piles de dossiers et un téléphone qui sonne souvent. Elle parle français, arabe et anglais. La moquette est couleur sable et elle, tout de noir vêtue, ressemble à une reine du désert.

Chez les parents de cette Cairote, un militaire et une femme au foyer, on parlait beaucoup de politique. Alors, à 23 ans, son diplôme de sciences politiques en poche, elle intègre le Ministère des affaires étrangères. «J'ai eu la joie de découvrir le monde», s'émerveille-t-elle encore. En 2001, elle devient ambassadeure d'Egypte en Roumanie, où le président la décorera pour ses services «exceptionnels». Heureusement, la distance et les heures de travail n'affectent pas la relation entre Wafaa Bassim et son mari, un ingénieur égyptien. En ce moment, il est au Caire avec leurs deux fils, alors que la benjamine est à Genève.

Une famille moderne donc, venant d'une Egypte que l'ambassadeure qualifie de «progressiste». Et quid des discriminations notoires envers les femmes? «Certains migrants des pays du Golfe véhiculent des valeurs traditionalistes qui ne sont pas les nôtres», rétorque-t-elle. Sans compter les courants conservateurs qui «instrumentalisent» l'islam à des fins politiques. «Aujourd'hui, nous voulons un gouvernement civil, démocratique et d'unité nationale, qui représente la société et la culture égyptiennes.»


Karen Pierce
54 ans, ambassadeur de la Mission du Royaume-Uni auprès des Nations Unies

English tea. Il fallait s'y attendre: une diplomate anglaise n'allait pas nous offrir du thé vert. Elle n'en boira pas. Assise dans le lobby feutré de l'Intercontinental, à Genève, Karen Pierce se concentre sur ses propos. D'entrée de jeu, la dame intimide. Rien à voir avec sa taille, moyenne, ni sa tenue, classique. Plutôt quelque chose dans l'intensité du regard, dans ces grands yeux bleus qui vous dévorent. Dans une autre vie, Karen Pierce a dû être une lionne.

Passionnée d'avions, cette fille unique scelle son destin à 11 ans, lorsqu'un magazine publie la photo d'une diplomate américaine sur un porte-avions. «En lisant l'article, je me suis dit que son job était le plus fantastique au monde», se souvient-elle. Alors Karen Pierce fonce, direction la prestigieuse Université de Cambridge, devenant la première universitaire de sa famille. Suit son entrée, à 21 ans, au Ministère des affaires étrangères, «un employeur très sévère» qui, jusqu'en 1972, force les femmes diplomates à démissionner en cas d'union. Plutôt rétrograde au pays des suffragettes. «Une femme devait rester loyale à son époux et ne pas voyager tout le temps.»

Pas de ça avec son mari, ex-consultant chez McKinsey désormais au service du Ministère britannique des finances. «Je couche avec l'ennemi!», plaisante-t-elle. Pendant sa carrière, Karen Pierce navigue entre les cinq continents et se spécialise dans la résolution des conflits et les affaires militaires. Cerise sur le cake, l'ambassadeure a trouvé le temps d'élever deux fils. «Avec beaucoup d'organisation, mon mari et moi avons construit une famille unie, même s'il y a eu des erreurs. C'est la vie.»


Mariangela Zappia
54 ans, ambassadeure de la Délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies

Elle parle avec les mains et sourit avec les yeux. Pas de doute: cette gracieuse blonde est de la race des expressives. De celles qui vous mettent immédiatement à l’aise, même dans ce bureau aux airs de (élégant) salon d’aéroport. Et lorsqu’elle écorche le français, on se rappelle qu’elle vient de la botte, italienne bien sûr. C’est d’ailleurs pour servir la Mission permanente de l’Italie auprès de l’ONU que Mariangela Zappia avait d’abord été télescopée à Genève.

Elle est nommée à la tête de la Délégation européenne le 8 mars 2011, journée internationale de la femme. A voir son regard azur s’évader vers le ciel, on devine que la diplomate se serait bien passée de la lourdeur de ce symbole, même si elle reste persuadée qu’il faut «encourager l’engagement des femmes».

C’est que, quand elle passe le concours diplomatique à Rome, en 1983, Mariangela Zappia est la seule femme. «J’étais la mascotte de ma promotion. Et maintenant, mes anciens camarades disent que je suis la reine!» rigole-t-elle. Pour accéder au trône, elle a travaillé «comme un homme»: de douze à quatorze heures par jour, en alternant les postes à Rome, Dakar et New York. Sauf qu’à côté il fallait aussi faire la cuisine ou emmener ses deux enfants, aujourd’hui majeurs, chez le pédiatre. «Contrairement à mes collègues masculins, j’avais un conjoint qui travaillait aussi.» Pendant plus de vingt-cinq ans, son mari sert l’UNICEF et a été pendant plusieurs années secrétaire général de CARE International. «C’était très difficile d’être postés au même endroit en même temps. Mais il comprenait ce mode de vie.» Aujourd’hui, ce retraité dirige Article 15, une fondation qui s’occupe des enfants travailleurs en Afrique de l’Ouest. A Genève.


Laura Dupuy Lasserre
46 ans, ambassadeure de la Mission de l'Uruguay auprès des Nations Unies

Elle a préféré cette salle de conférence un peu austère à son bureau. Assise à une table en bois massif, Laura Dupuy Lasserre semble sur la réserve. Elle ne manque pourtant pas d'humour, mais le manifeste par de petits sourires en coin. Dans quelques jours, elle sera en vacances à la mer, en Uruguay, et son visage s'illumine quand elle en parle. Sous les pavés, la plage.

Née à Montevideo, Laura Dupuy Lasserre a toujours voulu être diplomate. Il faut dire que sa famille compte deux ambassadeurs. Surtout, son père a été fait prisonnier sous la dictature uruguayenne, de 1973 à 1985. «Voir des injustices vous donne une impulsion pour la politique.» Ses parents auraient pourtant préféré qu'elle soit avocate, un métier qui ne «chamboule pas la vie de famille». Elle ne les écoutera pas et, quand elle parle de son divorce, elle assure que c'est «fréquent chez les femmes diplomates. C'est très difficile si l'homme ne travaille pas.» Son nouveau mari, lui, est ambassadeur d'Uruguay à Berne et, ensemble, ils élèvent leur fils de 9 ans.

Depuis le début de sa carrière, Laura Dupuy Lasserre s'intéresse aux questions sociales et économiques, un domaine où l'on a «plus de chances d'amener du changement». Ne pas répliquer les discriminations, notamment envers les femmes, un sujet qui lui est cher. En 2011 et 2012, elle est la première présidente du Conseil des droits de l'homme à Genève. Elle se démarque aussi en tant que plus jeune ambassadeure de son pays. Trop jeune pour certains. «Dès que vous faites du bon travail, on peut vous voir comme un problème, explique-t-elle, résignée. Une fois, l'un de mes chefs a même cru que mon mari m'aidait à faire mon travail.» Vivement le soleil.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Eddy Mottaz
Eddy Mottaz
Eddy Mottaz
Eddy Mottaz
Eddy Mottaz
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Accidents de ski: à qui la faute?

$
0
0
Samedi, 11 Janvier, 2014 - 10:00

Responsabilité.Schumacher en France, avalanches en Suisse, accidents de ski, de snowboard: les remontées mécaniques sentent monter la pression des usagers et... de leurs assurances.

Un million de francs. C’est le montant qu’a exigé une skieuse à Jean-Marie Fournier, patron des remontées mécaniques de Veysonnaz. Maladroite, cette touriste américaine était tombée en empruntant un téléski. Jean-Marie Fournier précise: «Tout ça pour un bleu à la fesse. Heureusement, nous n’avons pas été condamnés.» Autre cas auquel il a dû faire face, celui, tragique, d’une adolescente romande qui a skié sur une piste fermée. «Elle était verglacée. La jeune fille a chuté, sa tête a heurté un arbre, elle est morte sur le coup. Cet événement s’est passé il y a deux ou trois ans. Poussée par les assurances, la famille a porté plainte, tentant de trouver une faille dans la sécurisation. Un filet barrait complètement le début de la piste. Il y a eu un non-lieu.»

Pas de doute: diriger une société de remontées mécaniques – également responsable de la sécurité des pistes en Suisse – n’est pas une sinécure. L’accident de ski de Michael Schumacher met en lumière les risques du métier. En France, la préparation des pistes est sous la responsabilité du maire de la commune. A lui de désigner des organismes, par exemple les exploitants des remontées mécaniques, pour exécuter les tâches.

Règles précises. Chef de la division droit et ressources aux Remontées mécaniques suisses, qui comptent 370 membres, le juriste Alexander Stüssi explique que les exploitants sont de plus en plus sous pression. «En Suisse, il n’y a pas de lois concernant la sécurité des domaines skiables. Ce sont nos règlements très détaillés qui font foi. Le Tribunal fédéral et les autres tribunaux se réfèrent à nos directives élaborées dans les années 70 et régulièrement mises à jour par des experts.» Des directives que l’on peut découvrir dans un document de 54 pages. Par exemple, en Suisse, skier à 3 mètres des piquets est considéré comme «hors piste». «Nous assistons à tout le développement de la jurisprudence. La conséquence? En matière de sécurité, chaque jour, nous devons faire face à un nouveau défi.»

Directeur général de Téléverbier, Eric Balet raconte les efforts de sa trentaine de patrouilleurs pour optimiser la sécurité des pistes. Leurs tâches vont de la protection des obstacles au déclenchement d’avalanches en passant par le contrôle de l’enneigement. «En Suisse, nous avons un blessé pour 18 000 à 20 000 montées. En France, ils ont un blessé pour 8000 montées. Beaucoup de Français ne skient qu’une semaine par année.»

Ce juriste de formation remarque que la notion de responsabilité a tendance à s’américaniser. Téléverbier a d’ailleurs dû indemniser un Belge qui, au moment d’emprunter un télésiège à trois places, s’est assis sur les bâtons de la seule autre passagère. «A 180 mètres du départ, pour se dégager, il a soulevé la barre de sécurité et il est tombé de 18 mètres. Nous avons dû lui verser un million de francs.» Désormais, tous les départs sont équipés de caméras de surveillance, pour éviter ce genre d’histoire belge.

Des risques non calculés. Outre la maladresse de certains usagers des pistes, l’attitude des skieurs a bien changé ces dernières années avec le développement du matériel. «Aujourd’hui, presque n’importe qui peut descendre n’importe quelle piste sur des carving achetés à moins de 200 francs, analyse Alexander Stüssi. Ce matériel autorise une plus grande prise de risques.» Des skieurs qui vont d’autant plus vite que les champs de bosses se sont transformés en boulevards où les uns et les autres se croisent, se frôlent et se télescopent.

Autre changement technique: un ski plus large permet d’évoluer plus facilement dans une neige profonde et difficile, donc sur des pentes vierges – hors piste –, tant vantées par la communication des stations et des fabricants de matériel. Jean-Marie Fournier: «Avec les conditions actuelles, sortir des pistes équivaut à prendre autant de risques que de traverser une autoroute. C’est tellement bête de mourir sous une avalanche!»

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Keystone
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Hebdo.ch » revue de blogs de la semaine

$
0
0
Jeudi, 16 Janvier, 2014 - 05:40

Blogs» Politique»
Une Suisse en mouvement

libre circulation: Pourquoi le système à points n’est pas la bonne réponse

L’économie n’a pas uniquement besoin des migrants hautement qualifiés

Johan Rochel
Les chiffres de la libre circulation sont disséqués, les effets soupesés, les avis disputés. Dans ce débat, on tendrait presque à oublier que nous ne voterons pas sur une critique de la libre circulation, mais sur la réintroduction de contingents. L’idée fondamentale est claire: l’Etat fixe au début de chaque année un certain nombre de permis qui seront ensuite attribués aux différents «immigrants». (…)

Un régime de contingents souffre d’un problème fondamental bien connu: l’Etat n’est pas en mesure de savoir d’avance combien et de quelle sorte de main-d’œuvre les entreprises auront besoin. Les fonctionnaires fédéraux avancent donc à l’aveugle. (…) Face à cette critique, l’ultime joker semble s’appeler système à points. Arguant à l’exemple du Canada ou de l’Australie, les promoteurs de l’initiative promettent un nouveau système de contingents, loin des absurdités bureaucratiques et des errements planificateurs.

L’idée paraît claire: seuls ceux qui accumuleront suffisamment de points (en fonction des compétences professionnelles, du niveau de formation, des connaissances linguistiques) pourront entrer en Helvétie. (…) Les points ne sont pas là pour déterminer le nombre de permis disponibles, mais pour les distribuer. (…) Ils ne résolvent donc pas le problème fondamental du régime de contingents: l’inadéquation entre les demandes de l’économie et le nombre et le genre de main-d’œuvre disponible. (…)

De plus, ce système souffre d’une difficulté propre en tendant à favoriser les personnes hautement qualifiées. C’est le syndrome du «chauffeur de taxi avec deux doctorats». Imaginons: les immigrants sont sélectionnés en fonction de leurs compétences. Plus ils sont formés, plus ils reçoivent de points (les deux doctorats). Mais comme le montrent les chiffres du travail au gris et au noir, l’économie a également besoin de main-d’œuvre moins qualifiée (un chauffeur de taxi). L’inadéquation est programmée! (…) Le système du contrat de travail actuellement en vigueur entre l’UE et la Suisse (une place de travail égale un permis) permet de répondre plus efficacement aux besoins de l’économie.


Blogs» Economie & Finance»
Les non-dits de l’économie

Haro sur la marchandisation des travailleurs

Si l’initiative «Contre l’immigration de masse» est acceptée le 9 février, la Suisse devra repenser son régime de croissance économique

Sergio Rossi
(…) L’initiative «Contre l’immigration de masse» a le mérite de mettre en lumière un élément souvent ignoré dans le débat politique. Comme l’a fait remarquer l’ancien conseiller national socialiste Rudolf Strahm lors d’une interview dans la Schweiz am Sonntag, la mobilité géographique des travailleurs est considérée de la même manière que celle des marchandises: leur déplacement obéit à la «loi» de l’offre et de la demande (…).

Cette «marchandisation des travailleurs» est le résultat du paradigme dominant en «sciences économiques». Ce qui autrefois était la gestion du personnel (censée s’occuper de personnes) est devenu la gestion des ressources humaines (des ressources parmi d’autres, à exploiter pour la maximisation des profits des entreprises de tout genre). Au nom de la «compétitivité» de l’économie suisse, le «coût du travail» (entendez le salaire, mis à part celui des «top managers») doit dès lors être «minimisé», oubliant que, ce faisant, une partie non négligeable de travailleurs est amenée à restreindre ses dépenses et à faire appel à l’aide sociale pour arriver à la fin des mois.

L’économiste Michal Kalecki affirmait que «les travailleurs dépensent ce qu’ils gagnent et que les entreprises gagnent ce qu’elles dépensent». Il suffirait de le comprendre pour saisir le problème «systémique» que le paradigme dominant comporte pour l’ensemble de l’économie nationale.

Si l’initiative populaire «Contre l’immigration de masse» est acceptée le 9 février prochain, il faudra songer à élaborer un nouveau régime de croissance économique, intégrant les soucis de durabilité et de cohésion sociale pour l’ensemble des parties prenantes, y compris les travailleurs étrangers.


Blogs» Politique»
Le blog de Jacques Neirynck

La Suisse est une terre d’immigration

Faute de vraie politique familiale, notre pays doit compter sur les travailleurs étrangers

Jacques Neirynck
La Suisse est avec l’Australie le pays qui compte le plus d’immigrants, soit 25% de la population résidante. Compte tenu des obstacles faits à la naturalisation, 1 870 000 habitants gardent un passeport étranger, soit 22% de la population, sans compter 300 000 frontaliers qui ne résident pas dans le pays mais viennent y travailler (…). La différence entre l’Australie et la Suisse est la perception politique de cette caractéristique commune. Dans le premier pays, il suffit de quatre ans de résidence pour être naturalisé, en Suisse il en faut douze. Et encore! (…)

Il naît 80 000 enfants en Suisse par an, alors qu’il en faudrait 120 000. Cela signifie que le solde migratoire minimum doit se situer à 40 000 immigrants par an, pour maintenir la population, c’est-à-dire pour assurer le versement des pensions AVS (…). Il n’y a pas de choix: l’immigration dite de masse est une nécessité, sauf si une politique familiale dynamique augmentait le taux de fécondité. Or les jeunes femmes sont davantage formées qu’auparavant, elles désirent travailler et ne procréent que plus tard, lorsque leur carrière est bien lancée. (…) Et les places de crèche sont insuffisantes. Et les allocations familiales sont minimales. Et la fiscalité des couples mariés les désavantage par rapport aux concubins.

Et… on pourrait continuer à l’infini. Il n’y a pas de politique d’ensemble: l’immigration résulte de l’absence d’une politique familiale. (…) Alors le peuple prend le pouvoir et décide de la politique d’immigration par une initiative. Le hasard des urnes décidera.


Blogs» Politique»
Blog dans le coin

Un enfant n’est pas un problème social

Il est temps de proposer des mesures concrètes pour soutenir et encadrer les jeunes parents

Vincent pellissier
L’initiative populaire «Financer l’avortement est une affaire privée» est encore un de ces textes dont l’intitulé frappe les esprits. Mais il rate sa cible sur le fond. Il s’agit là encore d’une initiative qui ne résout aucun des problèmes liés à l’avortement et empêche tout débat serein. Comme défenseur inconditionnel de la vie, je refuse la banalisation de l’avortement. Cependant, je ne souhaite pas le retour par la bande à une pénalisation déguisée. (…)

Aucune réponse à l’initiative n’est satisfaisante. Un refus donnerait un message catastrophique à la jeunesse. La culture du «tout gratuit» détruit les repères éthiques et le sens de la responsabilité. Une acceptation ne résoudrait pas non plus les situations de détresse. (…) Je reste convaincu que la proposition faite par le PDC lors de l’introduction du régime des délais en 2002, à savoir une consultation obligatoire chaque fois qu’un avortement est demandé, est une piste intéressante. (…)

De nombreuses institutions étatiques ou associations privées qui soutiennent les personnes confrontées au problème de l’avortement méritent également une aide plus appuyée du monde politique. De telles actions doivent permettre de soutenir les plus vulnérables, en particulier les jeunes (…).


Blogs» Politique»
Blog de Pierre Chiffelle

Initiative populaire: gesticulations inopportunes

L’initiative populaire permet de thématiser de manière approfondie des sujets qui touchent de grands enjeux de société

Pierre Chiffelle
Ainsi, une quarantaine de parlementaires n’ont rien trouvé de mieux que cette période chargée en émotions politiques (…) pour dénoncer le recours excessif à l’initiative populaire en proposant de restreindre ce droit. (…)Beaucoup de thèmes traités dans le cénacle des responsables politiques sont complexes et tortueux, de telle sorte que la population a souvent tendance à baisser les bras. On ne saurait dès lors faire le reproche que l’on a entendu à l’égard de partis politiques de se servir de l’institution de l’initiative populaire comme levier politique. Au contraire, elle permet de thématiser d’une manière approfondie – certes pas toujours objective de la part des protagonistes – des sujets qui touchent souvent de grands enjeux de société (…).

Néanmoins, certains aménagements sont probablement souhaitables. S’il faut résolument jeter aux orties l’idée d’augmenter une nouvelle fois le nombre de signatures nécessaires pour ne pas risquer de favoriser uniquement les grandes organisations, un système de filtrage évitant des hiatus institutionnels, notamment en cas de contradictions entre le contenu d’une initiative et le droit supraconstitutionnel, est par contre envisageable.

Ainsi, si une censure préalable à la récolte de signatures ne peut permettre d’atteindre cet objectif sans provoquer des frustrations indésirables, on pourrait imaginer que le Conseil fédéral propose dans son message concernant une initiative problématique (…) qu’elle soit soumise préalablement à l’avis du Tribunal fédéral quant à sa compatibilité avec les exigences minimales du droit supranational. (…) Cela aurait le mérite d’éviter bien des désillusions et des frustrations qui n’ont pour seules conséquences que de faire le lit de populismes (…).

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Nic
Rubrique Une: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Swiss Awards 2013: Stan, vainqueur controversé

$
0
0
Jeudi, 16 Janvier, 2014 - 05:46

▼Les faits
Dix ans après Roger Federer, Stanislas Wawrinka a été élu Suisse de l’année, titre récompensant la personnalité la plus marquante de 2013. Comble de l’ironie: alors que les télé-spectateurs helvétiques sacraient un Romand, la cérémonie n’était pas diffusée en direct sur la RTS. Le tennisman vaudois succède au fondeur Dario Cologna et confirme la mainmise du monde du sport sur cette récompense. Depuis sa création en 2002, celle-ci n’a échappé que cinq fois à un athlète.

▼Les commentaires
«Le sport gouverne la Suisse», titre le Blick. Pour le quotidien alémanique, «le sport a perdu depuis longtemps son innocence. Là aussi, on y retrouve corruption, triche et racisme. Cela dit, par rapport à d’autres domaines, le sport demeure indéfectible. Les exploits sportifs sont mesurables et compréhensibles de tous. La vérité se trouve dans la compétition, au contraire de la politique, où la tactique a toute son importance.» Stanislas Wawrinka n’en demeure pas moins un Suisse de l’année au rabais pour Joël Robert, sur les ondes de RTS-La Première: «Une année 2013 certes intéressante sportivement, mais franchement pas exceptionnelle. Aucun titre majeur, une défaite en Coupe Davis et aucun coup flamboyant. (…) Pas de quoi honnêtement être élu Suisse de l’année. (…) A l’heure actuelle, Wawrinka ne porte pas encore l’habit du Suisse qui gagne. C’est un fait!»

▼A suivre
Longtemps dans l’ombre de l’omnipotent Roger Federer, le Vaudois a gagné en confiance l’an dernier, en devenant huitième joueur mondial. Parviendra-t-il à passer la vitesse supérieure afin de confirmer ce plébiscite populaire?√

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Rick Rycroft / Keystone
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Grandes banques: règles assouplies

$
0
0
Jeudi, 16 Janvier, 2014 - 05:48

▼Les faits
Les grandes banques internationales se plaignaient depuis plusieurs années de la dureté des règles de Bâle III, instaurées par le Comité de Bâle, qui réunit les gouverneurs des principales banques centrales, et qui les contraignent de constituer d’importants fonds propres d’ici à 2019. Le conflit est particulièrement dur en Suisse, où Berne impose des exigences encore plus sévères à UBS, Credit Suisse et la Banque cantonale de Zurich. Or, lors de sa réunion de janvier, le Comité de Bâle a décidé d’un certain nombre d’allégements à ses règles et a harmonisé la définition du ratio de levier, l’un des indicateurs clés de la détermination des fonds propres minimaux devant être détenus par les banques.

▼Les commentaires
«Certains éléments de pondération des risques viennent d’être introduits dans les normes relatives à un ratio de levier qui ne devrait n’en comporter aucun», constate L’Agefi. Mais le problème le plus important qu’a eu à régler le Comité de Bâle a été l’harmonisation des approches européennes et américaines, à commencer par le mariage de normes comptables (respectivement IFRS et US GAAP) différentes. Or, la NZZ estime que «le Comité de Bâle a choisi la voie la plus facile, politiquement, en optant pour la philosophie des normes américaines». Néanmoins, les banques sont déjà passées au stade suivant: certaines d’entre elles ajustent les bonus de leurs dirigeants selon la rentabilité des actifs pondérés du risque. «Mais cela n’aide pas les observateurs à mesurer le degré de prudence avec laquelle les banques sont conduites», critique le Financial Times.

▼A suivre
Même allégées, les normes obligent les banques à continuer d’élever leurs réserves obligatoires.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Bob Strong / Reuters
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Israël: obsèques d’Ariel Sharon

$
0
0
Jeudi, 16 Janvier, 2014 - 05:49

▼Les faits
Ariel Sharon est décédé le 11 janvier après un coma de huit ans, à l’âge de 85 ans. L’ex-premier ministre israélien a été enterré dans le sud d’Israël. Si de nombreuses personnalités israéliennes et étrangères lui ont rendu hommage, les dirigeants palestiniens ont déclaré regretter de voir un «criminel» échapper définitivement à la justice internationale.

▼Les commentaires
Si la presse israélienne rend unanimement hommage à Ariel Sharon, elle souligne aussi ses faiblesses. «Il n’a formulé aucune théorie politique, n’a articulé aucune idéologie, et la seule institution politique qu’il ait établie – le parti Kadima – lui a à peine survécu», écrit The Jerusalem Post. Car, comme le souligne Ynetnews, Ariel Sharon était un personnage dual, à la fois «glorieux commandant» et «homme qui a entraîné Israël dans des guerres inutiles»; «homme de guerre pendant presque toute sa vie» et «homme qui a lutté en faveur de la paix à la fin de sa vie». «C’est peut-être le secret de son charme. Il était un homme complexe, un homme que les gens admiraient et haïssaient avec la même intensité», conclut le site.

«S’il n’avait pas eu d’attaque en 2006, il serait sûrement parvenu à un accord de paix avec les Palestiniens. (…) Et aurait utilisé l’affection populaire dont il bénéficiait pour forcer la droite à l’accepter», imagine The New York Times. Au lieu de cela, «les Palestiniens et Israéliens de gauche se rappelleront de lui comme le champion du projet de colonisation israélienne», écrit The Guardian, qui ajoute que «beaucoup ne lui pardonneront pas son implication dans les massacres de Sabra et Chatila».

▼A suivre
L’histoire dira quelle empreinte laissera Ariel Sharon dans la mémoire collective.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Ronen Zvulun / Reuters
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 

Revenus accessoires: ministres honteux

$
0
0
Jeudi, 16 Janvier, 2014 - 05:50

▼Les faits
Le conseiller d’Etat de Bâle-Ville et président de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé Carlo Conti a démissionné à la suite de l’affaire de ses revenus accessoires. Des «erreurs comptables» lui auraient rapporté, en quatorze ans, 111 000 francs en honoraires pour des conférences ou d’autres mandats. Somme qu’il a remboursée. Le politicien a examiné ses comptes après qu’une plainte a été déposée dans le canton de Bâle-Ville où ministres et hauts fonctionnaires sont soupçonnés de ne pas avoir reversé à l’Etat des honoraires d’au moins 320 000 francs payés pour des mandats au sein de conseils d’administration.

▼Les commentaires
Carlo Conti a pourtant récolté des louanges. Il est rare qu’un politicien tire les conséquences d’une erreur et démissionne, relève la Neue Zürcher Zeitung: «En règle générale, les fautifs s’accrochent à leur fonction.» Parce qu’il a «remboursé, assumé ses responsabilités et présenté ses excuses», la Schweizer Illustrierte lui accorde sa rose hebdomadaire. Plus critique, à Bâle, la TagesWoche note que les services du personnel du canton adressent chaque année un document aux ministres, les priant de déclarer leurs revenus accessoires. Carlo Conti aurait eu maintes occasions de découvrir ce qu’il appelle ses «oublis».

▼A suivre
L’affaire éclaire les pratiques diverses pour tous les conseillers d’Etat du pays. Les Bernoises Barbara Egger (PS) et Beatrice Simon (PBD) annoncent qu’elles renoncent à leurs revenus accessoires, respectivement 50 000 et 21 000 francs. Les élections cantonales de mars éveillent la sensibilité de ces politiciennes dans un canton en grande difficulté budgétaire.

Edition: 
Rubrique Print: 
Image: 
Lucian Hunziker / RDB
Rubrique Une: 
Auteur: 
Pagination: 
Pagination visible
Gratuit: 
Viewing all 2205 articles
Browse latest View live