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Beau comme une hypercar

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:50

Voitures.Notre journaliste Luc Debraine publie «Hypercars», livre grand format sur des voitures hors normes, fleurons technologiques et laboratoires du futur.

 

Après un ouvrage consacré, il y a quatre ans, aux voitures électriques, Luc Debraine aurait-il fait marche arrière? Le voilà qui publie un beau livre dédié aux bolides hyperboliques, pour certains produits à quelques exemplaires par des marques mythiques comme Ferrari, et dont les prix peuvent se compter en millions… Batmobiles? Navettes spatiales? Joyaux bling-bling? A côté de l’ostentation, il y a aussi l’élégance, l’innovation, l’invention. Le rêve. Dans Hypercars, notre journaliste ouvre le capot de 27 monstres fuselés et s’entretient avec des acteurs clés (Stephen Bayley, créateur du Design Museum de Londres, farouche détracteur des hypercars, ou Paul McKenzie, chef du projet de la McLaren P1). Il revient pour nous sur sa passion de vitesse et d’innovation.

 

Pour vous qui êtes à l’écoute des tendances, consacrer un ouvrage à des voitures hyperchères et polluantes n’est-il pas un peu anachronique? Le politiquement correct semble avoir raison, aujourd’hui, de ces supervoitures…
Elles ne sont pas raisonnables, et c’est pour cela qu’elles me plaisent! J’ai choisi de privilégier ces objets hors normes dans un monde trop normé. Pas par goût de la provocation, mais par résistance, parce qu’on a encore le droit de rêver sur ces objets automobiles. Même si nous vivons un climat de culpabilité, d’indifférence même, pour ce qui est des jeunes générations. D’ailleurs, ce livre est aussi fait pour elles. Pour leur transmettre ce rêve.

 

A côté de l’ostentatoire Lamborghini Egoista, on trouve aussi, dans votre sélection, des modèles «sobres». La BMW i8 paraît, à côté, presque discrète… Qu’est-ce qui fait l’hypercar, pour vous?
La rareté, la sophistication technologique, la vitesse, la puissance, le design… la liberté. Il ne faut pas oublier le principe de plaisir non plus. Et, bien sûr, les propositions d’avenir. Les principales innovations automobiles sont souvent venues de la compétition et de la recherche de vitesse. Prenez les freins à disque, le turbo, le système d’injection… Aujourd’hui, les concepteurs développent des moteurs hybrides, à la fois électriques et à essence. Certains modèles peuvent rouler en ville sur un mode entièrement électrique, en silence.

 

En vous lisant, on découvre un monde très diversifié. On conçoit aussi bien des hypercars à Dubaï qu’au Kazakhstan…
C’est une passion universelle. A côté des grandes marques, de la longue tradition des Porsche, il y a des nouveaux venus, comme McLaren, qui a commencé il y a peu à produire des voitures pour la route. Des ressuscités, comme Bugatti, symbole de l’entre-deux-guerres. Ou des marques rares comme Pagani ou Koenigsegg, qui ne produisent que quelques voitures par année. Certains le font par passion et arrivent à peine à survivre. Gumpert a fermé cet été…

 

Et la Suisse?
C’est l’un des pays où il s’achète, proportionnellement, le plus d’hypercars. Même si on les voit peu. Du côté de la fabrication, on peut faire des parallèles entre la haute horlogerie et ces voitures de pointe. La marque Hublot a conçu une montre spécialement pour le modèle LaFerrari. Il y a des échanges technologiques entre Ferrari et Hublot, notamment sur de nouveaux alliages.

 

Quel avenir pour les hypercars?
La recherche effrénée de vitesse arrive à son terme. Le prototype Bloodhound SSC atteindra une puissance de 135 000 chevaux… C’est le modèle ultime, qui dépassera de loin le mur du son, avec ses 1610 km/h… Après lui, on ne pourra pas aller plus vite. Il n’est, évidemment, pas destiné à la conduite sur route. Je l’ai choisi comme un symbole. Les défis technologiques se déplaceront: les hypercars de demain seront probablement 100% électriques, ou fonctionneront à l’hydrogène.

 

Quel modèle rêveriez-vous parqué dans votre garage?
La Porsche 918 Spyder. Elle est silencieuse et consomme trois litres aux cent, comme un scooter. Elle fait à la fois appel au passé (à la Porsche 911, modèle créé il y a cinquante ans) et à la technologie de pointe. C’est sans doute l’automobile la plus complexe jamais commercialisée… Un objet paradoxal, qui avance masqué. Mais c’est un rêve, car je possède la voiture la plus banale qui existe: un break familial de marque japonaise. Et c’est très bien comme cela.

 

Vous êtes journaliste culturel et historien de l’art, quelle place la passion des voitures occupe-t-elle dans votre vie?
Mon père, le photographe Yves Debraine, a travaillé notamment sur les circuits de formule 1. Il m’emmenait avec lui. J’ai baigné dans cette ambiance. C’est devenu une passion. Mon jardin secret. Au fond, ce qui me fascine, c’est l’alliage de l’intelligence et de la technologie. Dans mon travail, lorsque je parle d’automobiles, j’essaie toujours de le faire de manière décalée. Qui sait, mon prochain livre sera peut-être consacré aux hypercars électriques du futur!

«Hypercars». De Luc Debraine. Favre, 133 p.

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«Quand il est temps de trahir»

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:51

John le carré.Jusqu’où doit aller la loyauté envers un Etat? Durant toute sa carrière, l’écrivain s’est penché sur des questions de morale et de droiture. «Une vérité si délicate», le nouvel opus de l’ex-agent secret ressemble à un roman à clés sur l’affaire Snowden.

 

Propos recueillis par Erich Follath

Pour vous, qui est Edward Snowden, un héros ou un traître? Un homme qui rend notre vie plus sûre ou qui fait le jeu d’al-Qaida comme l’affirme le chef des services secrets britanniques?
Snowden a pris une décision difficile qui sera décisive pour la suite de son existence. Il a enfreint des lois et trahi ses employeurs pour dévoiler une infraction autrement plus grave de la NSA. Je voudrais qu’il soit décoré pour ça et qu’on le laisse libre.

 

John Kornblum, l’ancien ambassadeur américain en Allemagne, prétend qu’il ne serait rien arrivé à Snowden s’il s’en était tenu à la loi américaine sur les lanceurs d’alerte et en avait référé à ses supérieurs.
Bêtises. Par définition, un service secret ne peut laisser impuni un lanceur d’alerte. Ne vous faites pas d’illusion, Snowden! On vous pourchasse et, un jour ou l’autre, on vous rattrapera, car vous avez commis un péché mortel: vous avez fait passer l’Amérique et son gouvernement pour des bourriques et, pour ce crime, la peine de mort est encore trop douce.

 

Avez-vous été étonné par l’étendue du programme de surveillance de la NSA?
Je savais que les Américains récoltent tout à la façon d’un aspirateur. Mais je ne vois pas à quoi cela mène, car l’effort d’évaluation des données est très supérieur aux résultats. Et c’est, bien sûr, illégal. Les Américains semblent prêts à brader toutes leurs libertés. On vit une époque extraordinaire: ce qui m’étonne le plus, c’est avec quelle sérénité tout le monde accepte ces monstruosités. Dans mon pays, la Grande-Bretagne, l’émoi suscité a été très limité. A l’exception du Guardian, toute la presse, y compris la BBC, est restée coite. Il n’y a pas de débat public sur les excès des services secrets.

 

En revanche, des menaces non voilées du premier ministre contre les journalistes. Pourquoi?
D’une part, à cause du caractère quasi mythique des services secrets chez nous: il y a une alliance morganatique entre le MI6 et l’opinion publique. D’autre part, en raison des liens historiques étroits avec les Etats-Unis. Nous avons souvent fait le sale boulot pour les Américains, par exemple en livrant à la CIA les informations pour faire tomber le premier ministre iranien Mossadegh en 1953. Un épisode que nous refoulons mais qu’aucun Iranien n’oubliera jamais. Nous étions les maîtres d’apprentissage de la CIA et de la NSA.

 

«Celui qui dit la vérité ne commet pas un crime», a récemment écrit Snowden. Dans votre livre, vous mettez en exergue la phrase d’Oscar Wilde: «Quand on dit la vérité, on est sûr d’être découvert tôt ou tard.»
Cela se complète. J’aime mon pays mais sa société de classes, la structure sociale qui s’est développée au fil de ces dernières dé-cennies, me répugne. C’est un univers élitaire dont le cœur est le secret. Nulle part ailleurs, sauf peut-être en Israël, l’establishment et les services secrets sont semblablement intriqués.

 

Votre livre, le vingt-troisième, est intitulé «Une vérité si délicate». Il décrit un peu tous les problèmes actuels en Grande-Bretagne, les violations du droit, les écoutes illégales, la sous-traitance d’opérations militaires à des agences de sécurité privées. Il y est question d’un «whistleblower», d’un lanceur d’alerte, de loyauté et de trahison, cette dernière pouvant être une forme supérieure de la loyauté. On dirait un compte rendu de l’actualité.
Je respecte entièrement mes collègues qui s’inspirent de l’histoire mais, chez moi, l’actualité prime. Et, dans mes romans, je brosse souvent le portrait de gens que je connais. De moi, en particulier, dans ce livre.

 

Comment ça?
Cette fois, j’ai presque inconsciemment peint un double portrait de moi-même à des périodes différentes. Il y a là Toby Bell, la trentaine, un gars qui bouge au Ministère des affaires étrangères. Le type ambitieux comme je l’étais à cet âge-là, jusqu’à ce que je bousille ma carrière avec L’espion qui venait du froid. Toby exécute des tâches louches parce qu’il pense que quelqu’un doit bien s’y coller. Jusqu’à ce qu’il remarque qu’il a franchi sa limite de tolérance et que le bon petit soldat est devenu un homme de l’ombre.
Et l’autre est sir Christopher Probyn, un diplomate qui a l’expérience des services secrets.
Probyn avait été nommé ambassadeur dans les Caraïbes, loin de la Centrale et de ses scandales. Il jouit de sa retraite sur les landes des Cornouailles. Un jour, il constate que les démons du passé le rattrapent. J’aime ses doutes, sa prise de conscience des erreurs, le pacte qu’il passe avec le diable et qu’il finit par devoir annuler. Je peux me reconnaître en lui. Il y a un temps pour la loyauté, un temps pour la trahison.

 

Pourquoi montrez-vous une telle inclination pour l’Allemagne?
Le moteur de tout travail d’écrivain est fait de trois éléments: l’enfance, l’éducation, l’expérience. Or, sur ces trois éléments, il est écrit «made in Germany». Pendant mes années d’internat, j’ai trouvé refuge dans la littérature allemande qui était pour moi une muse. Puis j’ai étudié l’allemand à Oxford. Quand je suis devenu diplomate, j’ai fait mes expériences les plus prégnantes à Bonn, Hambourg et Berlin-Ouest. J’ai étudié l’allemand et le français deux ans durant à Eton. Du coup, j’ai trouvé plus attrayante mon activité de diplomate britannique avec mission d’espionnage pour le MI6.

 

Le service secret était-il devenu pour vous une sorte de famille?
C’était un refuge, un bouclier derrière lequel je pouvais me cacher et une protection contre la réalité. Avec le temps, j’ai su trouver mon propre compas moral. Je me suis mis à versifier sur la guerre froide et l’ambiguïté morale des services secrets, dont le travail ne se différenciait plus en noir et blanc, entre bons et méchants. Puis, en l’espace de cinq semaines, j’ai écrit L’espion qui venait du froid. J’ai dû en référer à ma hiérarchie. Après de longues hésitations, mes employeurs ont autorisé la publication mais je devais trouver un pseudonyme. J’ai choisi John le Carré, ça sonnait bien.

 

Dans bien des romans ultérieurs, vous êtes resté fidèle à George Smiley, votre patron fictif, et à Karla, sa grande adversaire à Moscou. Ils sont devenus les symboles de la guerre froide.
Je voulais faire de ce monde secret un théâtre, une scène à l’intention du monde non secret. Le fait que je n’ai pas pu constater de vraies différences entre ces deux mondes rendait le défi encore plus séduisant. Mais mes protagonistes ont fait leur temps avec la fin de la guerre froide. Quand j’ai fait prononcer à Smiley son discours d’adieu face à de jeunes recrues, il a dit: «Comme nous avons maintenant vaincu le communisme, les excès du capitalisme doivent être notre but.»

 

Dans vos livres, vous cachez à peine votre désamour pour Tony Blair.
J’ai été ravi quand Blair est devenu chef du gouvernement après toutes ces années de règne conservateur. Ma déception fut d’autant plus grande. Il nous a entraînés dans cette fichue guerre d’Irak à coups de mensonges auxquels il croyait peut-être; il est devenu le ménestrel de George W. Bush, un scandale pour notre pays. De facto, ma patrie devenait une colonie américaine. Comme une esclave, elle a arrimé sa politique étrangère à celle des Etats-Unis.

 

Vous avez toujours tenu à connaître les lieux dont vous parliez. Vous êtes allé en Palestine aux confins orientaux du Congo, parfois au péril de votre vie.
Sans impressions personnelles, ça ne marche pas. J’ai passé dix jours à Beyrouth avec Yasser Arafat; à Goma, j’ai rencontré des rebelles congolais; dans le désert de Néguev, les Israéliens m’ont montré une terroriste allemande surveillée par des survivants d’Auschwitz. Mais la plus impressionnante de mes rencontres fut celle avec Andreï Sakharov à Moscou, un homme que je n’ai cessé d’admirer.

 

Vous avez refusé une rencontre avec Markus Wolf, le patron des services secrets est-allemands, qui ressemblait à bien des égards à votre Karla, la patronne romanesque des services soviétiques. Pourquoi?
Il avait tant de sang sur les mains. On a beau être dans l’ambiguïté, pour moi il y a toujours une différence entre espionner un Etat démocratique ou un Etat totalitaire.

Depuis cinquante ans que vous écrivez des romans, le monde a-t-il fait des progrès?
Au fond, nous affrontons toujours les mêmes problèmes: jusqu’où pouvons-nous aller avec la protection de nos droits humains occidentaux sans les mettre en danger? La prétendue guerre contre le terrorisme a aggravé bien des choses et je ne dirai pas que nous avons appris de nos erreurs passées. Je crois parfois que ce sont les mêmes personnes, juste mieux coiffées et plus élégamment habillées, qui nous expliquent pourquoi les méthodes de torture moyenâgeuses sont nécessaires; pourquoi tuer depuis le ciel est d’une précision chirurgicale et sans risque, bien qu’il y ait sans cesse des dégâts collatéraux; pourquoi les médicaments doivent être testés dans le tiers-monde puisque, là-bas, la vie ne compte pas tout à fait autant. Et je suis très fâché quand notre ministre des Affaires étrangères William Hague affirme qu’il n’y a pas de raison d’avoir peur si on n’a rien fait de mal. Une phrase dont Joseph Goebbels se serait rengorgé!

©Der Spiegel Traduction et adaptation Gian Pozzy

 

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La belle et les déchets

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:52

Recycling-paradies.Faire d’une déchetterie un lieu convivial et accueillant, tel était le pari de Karin Bertschi. Zoom sur un concept inédit.

 

Sou’al Hemma

Au bout de la Mattenstrasse, dans le petit village argovien qu’est Reinach, se dresse, depuis bientôt trois ans, une halle spacieuse et aérée. Une halle qui, griffée du nom Recycling-Paradies, accueille plus de 30 matériaux différents, allant des vêtements aux capsules de café, en passant par les briques de lait. Jusque-là, rien de bien nouveau pour un centre de collecte. A quelques détails près.

Tout d’abord, le décor de cet espace de 900 m2, qui, sous ses airs de hangar, ne ressemble en rien aux déchetteries classiques. Loin d’être un dépotoir malodorant, le Recycling-Paradies est en effet beau, moderne et propre. «Je voulais un lieu dans lequel les gens se sentent bien et trouvent du plaisir à venir», sourit la fondatrice des lieux, Karin Bertschi, assise dans son petit bureau surplombant la vaste halle verte. Un vert qui détonne et fait du bien en ce jour d’automne pluvieux. Tout comme la benne et le petit chariot disposés à l’entrée, tous deux décorés et débordants de fleurs.

Plus que du recyclage. Au-delà de son atmosphère agréable, l’infrastructure regorge d’éléments surprenants, probablement clés de son succès. Dissimulée au fond à gauche, une bibliothèque, agrémentée d’un tapis moelleux et d’une petite table en fer forgé, est ainsi mise à disposition. Derrière les conteneurs destinés aux emballages plastiques, briques de lait et textiles se cache par ailleurs une place de jeux pour enfants.

Spécialement aménagé avec des conteneurs miniatures, des figurines de bandes dessinées et des instruments de musique, cet espace accueille régulièrement des élèves venus de toute la Suisse, le temps d’une visite guidée organisée afin de les sensibiliser au thème du recyclage. Les jouets, quant à eux, se succèdent et sont ainsi envoyés de manière régulière à des ONG en Haïti ou en Roumanie.
Pour compléter ce tableau original, Karin Bertschi a décidé de ne s’entourer que de femmes. «Vous imaginez des hommes ici, se préoccuper des fleurs et de la décoration, rit-elle. La présence uniquement féminine apporte au lieu une autre sensibilité, primordiale au concept.»

 

Démarrage couronné de succès. Un concept dont le but principal est de faire du passage à la déchetterie un plaisir et non plus une corvée, afin d’inciter les gens à trier au maximum.

Et ils sont nombreux à répondre à l’appel. Depuis sa création en mars 2010, la déchetterie a vu sa fréquentation quintupler. De 500 à l’époque où seul l’ancien centre de tri adjacent existait, la moyenne hebdomadaire de personnes se rendant au Recycling-Paradies est passée aujourd’hui à 2500, dans un bassin de population de seulement 20 000 habitants.

Cette institution privée, dont les origines se trouvent dans l’entreprise de la famille Bertschi, spécialisée dans le transport de bennes et de conteneurs, est ainsi devenue le centre de collecte officiel des communes de Reinach et de Leimbach. A tout juste 23 ans, Karin Bertschi a réussi à développer un concept de recyclage inédit, assurant la pérennité de l’entreprise familiale.

Au printemps prochain, un deuxième centre ouvrira ses portes à quelques kilomètres d’Aarau, dans la petite commune de Hunzenschwil. Puis, sur les dix prochaines années, un nouveau centre devrait voir le jour tous les deux ou trois ans.

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Mieux que le last minute: le early booking

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:53

Bon plan.Réservées plusieurs mois à l’avance, les vacances «première minute» coûtent moins cher et profitent aux professionnels de la branche.

Barbara Santos

A peine les vacances d’été terminées que l’on trouve déjà des promotions pour l’hiver et le printemps prochains. Réductions de 15% sur les forfaits de ski, de 10% sur la location d’un chalet et même de 20% sur une semaine balnéaire en Tunisie… Baptisées early booking ou première minute, ces réductions connaissent un succès grandissant.

«Pour cet hiver, nous en avons déjà enregistré 436, contre 126 l’année dernière», se réjouit Thomas Kirchhofer, directeur d’Interhome Suisse, site spécialisé dans la réservation d’appartements et maisons de vacances. Une tendance également constatée chez Hotelplan: «Les offres early booking séduisent la clientèle car, contrairement au last minute, elles permettent d’avoir le choix au niveau des destinations, des dates ou des hôtels», indique la porte-parole Prisca Huguenin-dit-Lenoir.

La grande majorité des agences de voyages proposent de telles offres. Si elles peuvent le faire, c’est que les hôtels et autres prestataires sont de plus en plus nombreux à accepter de sacrifier une partie de leurs marges, principalement dans le but de planifier les taux d’occupation. «Même si ces rabais nous font perdre une part de nos profits, le early booking nous permet de bénéficier d’une image claire des ventes à réaliser pour la saison à venir. Ainsi, nous pouvons revoir les prix à la hausse ou à la baisse selon la demande pour les disponibilités restantes», déclare Philip Florian, directeur assistant de l’hôtel Saanewald Lodge à Gstaad (BE).

Les professionnels ne proposent pas ces réservations précoces dans le seul but d’appliquer une tarification dynamique. Ils entendent surtout remplir les caisses et sécuriser le chiffre d’affaires. «Chez nous, ces offres constituent un gage de liquidités avant les premières neiges, explique Pierre Moerch, comptable chez Télémorgins. Une garantie d’autant plus importante en cas de précipitations tardives.»

Un concept qui séduit. Pour les agences de voyages, ces ventes de première minute ne représentent pas plus de 10 à 20% des revenus annuels. Mais elles ont l’avantage de limiter les offres last minute. «Il est préférable de proposer une réduction raisonnable en early booking pour s’assurer des réservations plutôt que de casser les prix à la dernière minute faute de clientèle», commente Walter Kunz, directeur de la Fédération suisse des agences de voyages.


Trois conseils

  • Les promotions de early booking sont accessibles toute l’année, mais elles se multiplient lorsque les agences de voyages sortent leurs nouveaux catalogues, à la fin des hautes saisons. Il est donc conseillé de faire ses recherches aux mois de septembre et d’octobre, ainsi qu’en janvier et février.
  • Les agences de voyages en ligne, hôtels et autres prestataires envoient souvent leurs promotions par newsletter. Il est recommandé de s’y abonner.
  • Ne pas hésiter à parcourir les offres dès que l’on connaît ses dates de vacances. Sur les sites qui pratiquent la tarification dynamique, plus on réserve tôt plus on économise.
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Appareils à selfies

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:54

Technologie.2013, année narcissique. Grâce à des minicaméras qui permettent de retourner un objectif contre soi et de partager dans l’instant le résultat avec les autres.

«Une photographie qu’une personne prend d’elle-même, typiquement avec un smartphone ou une webcam et téléchargée sur le site internet d’un média social.» Telle est la définition du mot selfie dans l’Oxford Dictionary, maître-étalon de la langue anglaise, qui en a fait son mot de l’année  2013.

Au-delà de la signification du phénomène (fonction narcissique décuplée par le monde numérique? Simple activité ludique?), le selfie résulte de nouvelles possibilités photographiques. Jusqu’à récemment, les appareils n’avaient pas d’écrans aptes à juger dans l’instant d’un autoportrait. Surtout, les mécaniques n’autorisaient pas la prise de vue rapprochée, instantanée, l’optique tenue à bout de bras et retournée contre soi. Avec la généralisation de minicaméras à focale courte, autofocus, flash, mais aussi les filtres et retouches incorporés, l’exercice est devenu beaucoup plus facile.

C’est ainsi: les pratiques photographiques découlent de techniques, et leurs utilisateurs sont toujours plus imaginatifs que les inventeurs de ces mêmes technologies. Les ingénieurs de la marque Sharp, qui a la première intégré un appareil photo à un téléphone portable (c’était en 2000), n’avaient bien sûr pas anticipé l’utilisation massive de cette fonction par la «Me me me Generation» une bonne décennie plus tard. Pas plus que Canon, il y a dix ans, et même deux ans, n’aurait pensé à commercialiser une caméra qui ne sert qu’à se filmer soi-même.


Des nouveautés pour encore mieux se mettre soi-même en scène

LEGRIA MINI la vidéo-photo nombril
Se filmer en train de danser, voyager, cuisiner, chanter, jouer de la musique, parler, se maquiller, s’habiller, saluer le soleil, aimer? Avec une caméra vidéo qui sert exclusivement à cela: mieux se voir si beau en ce miroir numérique? C’est le principe du caméscope Legria Mini de Canon, quelques centaines de grammes de technologies égocentrées.

L’écran tactile à angle variable est conçu pour être tourné face au sujet, lequel se voit ainsi en direct, full HD et grand angle (jusqu’à 160°). Le support intégré permet de poser facilement l’appareil par terre ou sur un meuble, dans une multitude d’angles jusqu’à 60°. Il est aussi possible de se photographier avec une résolution de 12,8 MP, voire d’allier image animée et image fixe dans une même séquence. L’enregistrement peut être accéléré, avec des intervalles de cinq secondes à dix minutes pour créer des stop-motions (comment j’ai repeint toute ma chambre dans une vidéo de trente secondes). Ou au contraire ralenti pour mieux voir un mouvement. Le Legria se commande à distance, par exemple via un smartphone. Et, pourvu du wifi, il transfère et partage ses images sans passer par un ordinateur.

IPHONE 5S plus à l’aise sous un mauvais jour
Quoi qu’en disent les fabricants, les photos prises avec des téléphones portables restent mauvaises. L’optique a des limites qui sont exacerbées dans des caméras aussi minuscules et dotées de lentilles en plastique. Mais la qualité photographique n’est plus un critère prioritaire, surtout lorsque l’image se transforme en message dans la grande conversation qu’est l’internet.

Qui voudrait d’un selfie en haute définition? Pour autant, la fonction photo sur les smartphones s’améliore peu à peu. La résolution de 8 MP de la caméra du nouvel iPhone 5S n’augmente pas par rapport au modèle précédent. Apple la juge suffisante pour l’usage, sans compter que les fichiers seraient plus lourds avec une plus grande résolution. Mais l’ouverture de l’objectif (f/2.2) est plus grande, le capteur est lui aussi plus généreux, ce qui a pour effet d’augmenter la taille des pixels et de capter davantage de lumière. Comme le stabilisateur est lui aussi plus puissant, l’appareil est plus à l’aise dans les mauvaises conditions d’éclairage. Enfin, le double flash aux 1000 combinaisons différentes permet de mieux respecter les couleurs de peau, là aussi un gain lorsqu’il s’agit prendre des portraits, en particulier le sien.

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Le pire des années 60-75 réhabilité

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:55

Architecture.A travers un guide édité par Patrimoine Suisse, les «verrues urbaines» construites pendant cette période se muent en «joyaux architecturaux».

Après avoir recensé les plus beaux cafés et tea-rooms du pays, la plus importante organisation de défense du patrimoine architectural national, Patrimoine Suisse, met en vitrine les constructions souvent décriées des années 1960 à 1975. Un nouveau guide grand public offre «un bouquet de 50 œuvres magistrales et peu connues de toute la Suisse» de cette période. De nombreuses «perles» se situent en Suisse romande, Lausanne en tête (même si le siège de Nestlé à Vevey signé par Jean Tschumi, achevé en 1960, manque à l’appel). Jusqu’à il y a peu, la cité du Lignon à Vernier (GE), les immeubles de la place Chauderon à Lausanne ou les viaducs de l’A9 au-dessus du château de Chillon ne récoltaient, esthétiquement, que critiques.

Reprenant les préceptes synthétisés par l’avant-garde de l’entre-deux-guerres, cette architecture fonctionnaliste répondait à un besoin urgent: la montée démographique. Elle représentait un modèle prétendument transposable partout. Et elle était perçue comme le sommet de la modernité. «A sa création, le Lignon était une révélation, rappelle l’historien de l’architecture Bruno Corthésy. L’accès à la modernité pour une population qui connaissait encore les quasi-taudis du XIXe siècle.»

Les néo-modernes. Mais, pour la génération qui y a grandi, ces constructions deviennent, au contraire, le symbole des dérives de la société de consommation. «Les post-soixante-huitards s’opposeront aux modernistes, privilégiant par exemple une architecture en bois, d’inspiration rurale.» Après 1975, le post-modernisme fait son entrée, avec ses chantres comme Botta et Galfetti. «Pour les fonctionnalistes des années 60-75, la beauté d’un bâtiment découlait de sa fonction. Au contraire, pour les post-modernistes, il fallait lui superposer la beauté.»

Ironie du sort, des organes comme Patrimoine Suisse se sont créés pour protéger le passé. Un patrimoine menacé par l’architecture moderne, cette architecture des années 1960 à 1975 par exemple, qui s’étendait sans souci d’intégration urbaine. Si les bâtiments fonctionnalistes redeviennent à la mode, c’est qu’ils correspondent à notre goût actuel et à l’architecture qui domine aujourd’hui. Pas de doute, les néo-modernes occupent désormais le terrain.

«Les plus beaux bâtiments 1960-75». Patrimoine Suisse, 120 p.

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Sebastien Heeb / Patrimoine Suisse
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«Ici la maîtresse a du temps pour moi»

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:56

Reportage.Comme dans «Tableau noir», le film d’Yves Yersin actuellement sur les écrans, il existe encore des classes à multiples degrés en Suisse romande. Visite au milieu des champs.

C’est la magie du film de Yersin, l’un des événements du festival de Locarno l’été dernier: l’énergie singulière, entre profs et élèves, des classes à multiples niveaux. Ce lundi de novembre, l’école Jean-Gui résonne du rire des enfants. Le soleil se lève lentement sur La Tanne, hameau discret du Jura bernois, à flanc de montagne, près de Tavannes, au milieu de champs bordés de forêts.

Il est 7 h 30 et la sonnerie retentit, actionnée par la maîtresse d’école, Christine Marti. Cela fait vingt-quatre ans qu’elle enseigne dans cet endroit idyllique. «Lorsque j’entends mes collègues de la ville, je n’aimerais pas travailler ailleurs. Ici, il n’y a pas de souci de discipline et j’ai un supercontact avec les parents.»

Comme dans Tableau noir, de Yersin, il existe encore des classes à degrés (ou niveaux) multiples – 3 et plus – en Suisse romande. Si le canton du Jura y a renoncé, celui de Fribourg en dénombre une. Ceux de Neuchâtel et de Vaud en comptent actuellement 6, Genève 2. Le canton du Valais compte 10 classes à 3 degrés, mais uniquement 2 classes à 4 degrés et plus (Trient et Binn). Quant au Jura bernois, il comptabilise 12 classes à 3 degrés et plus, et 7 écoles d’une seule classe qui regroupe 5 ou 6 années scolaires, soit des élèves de la 3e à la 8e HarmoS.

Il est 7 h 40, les élèves de l’école Jean-Gui prennent place à des tables regroupées par degrés. Anicia, Jowinder et Sami sont en 8e (HarmoS), Léonie et Melinda en 7e, Jonathan en 6e, Alain, Zoé et Simea en 4e. Il manque Reto qui est en 3e. Il commence une heure plus tard. Tous sont de langue maternelle allemande – descendants d’anabaptistes chassés de Berne et de l’Emmental qui avaient trouvé refuge dans les montagnes de la région – mais vont à l’école en français.

Préparation. Premières tâches de la journée: contrôler la signature parentale dans le carnet de devoirs pour les évaluations et le plan de travail de la semaine écoulée. Ce dernier est l’élément clé de l’enseignement à multiples degrés: chaque enfant sait ce qu’il doit faire durant la semaine. Tous sont d’ailleurs en train de mettre de l’ordre dans les fiches qu’ils vont remplir les prochains jours. Ils se mettent au travail d’eux-mêmes: les petits dessinent un bonhomme de neige aux dimensions précises, les «moyens» recopient leur dernière expression écrite. Et les grands écoutent leur enseignante leur parler des objectifs pour les prochaines évaluations communes faites dans plusieurs écoles.

Elle les envoie répéter dans une autre salle de classe. Ce qui permet un enseignement différencié pour les petits, pris alors en charge par Nathalie Bühlmann, enseignante et directrice de l’école. Christine Marti s’approche du groupe des 3e et 4e pour contrôler la symétrie des deux parties des bonshommes de neige à l’aide d’un miroir. Un truc qu’ils connaissent déjà. «Ce sont les grands qui vous ont donné l’idée du miroir?» Mines concentrées et silence. Pratique d’avoir des copains de classe qui ont une longueur d’avance.

Reine du «multitasking». La classe continue. L’enseignante passe au groupe des 6e et 7e pour expliquer les homonymes. Puis la maîtresse passe à l’îlot des 3e et 4e, demande de lire les consignes des fiches, complète par quelques explications. «Maintenant vous pouvez vous débrouiller tout seuls. Quand Reto arrivera, j’aurai besoin de temps pour lui.» Les activités s’enchaînent très naturellement. Les grands reviennent dans la classe, font des divisions au tableau noir.

Avantages et désavantages.«C’est riche d’enseigner à plusieurs degrés. Il nous arrive d’en avoir 6 différents. Evidemment, c’est un défi pour l’organisation et la préparation des leçons et des évaluations, mais une fois que le programme est lancé, tout va bien», explique Christine Marti. Sa collègue Nathalie Bühlmann y voit beaucoup d’avantages: «Les enfants peuvent avancer à leur rythme. L’enseignant peut prendre en compte la spécificité et les difficultés de chacun. Ils développent également une grande autonomie.»

Evidemment, l’émulation n’est pas grande entre les élèves qui sont peu nombreux à être du même âge. «Pour certains c’est bien, pour d’autres pas», constate Nathalie Bühlmann, qui explique que l’école organise un camp de ski, une sortie culturelle et participe à une journée sportive avec d’autres écoles à degrés multiples. Entraînement de la concentration – l’élève doit s’appliquer à une tâche alors que la maîtresse parle d’un autre sujet –, apprentissage par la reformulation – les grands transmettent des connaissances aux petits – sont des points positifs évoqués par le milieu enseignant.

Les désavantages? Risque pour le prof de se concentrer sur le groupe d’âge le plus nombreux, manque de sécurité en cas d’accidents ou de problèmes avec les parents. Mais à La Tanne, il n’y a jamais eu de souci. Et comme le constate Sami, qui fréquentait une classe «normale» et a déménagé récemment: «Ici c’est mieux. La maîtresse a plus de temps pour moi et on peut mieux travailler.»

Un enseignement à «hauteur de table» comme dit Yersin en parlant de son film. De table d’enfants, évidemment, et qui interroge utilement sur la manière la plus efficace d’apprendre et de partager ce que l’on apprend.

 

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Possible remboursement des primes pour 2015

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:57

Lamal.La solution politique proposée par le Conseil fédéral n’efface pas les dommages subis par les cantons à tarifs élevés. L’agenda d’entrée en vigueur reste incertain.

Patricia Meunier

Une hausse de primes de l’assurance maladie pour 2014 et toujours pas de remboursement en vue pour les assurés des cantons trop tarifés par le passé! La méthode étonne, lorsque l’on sait que le surplus déboursé en Suisse entre 1996 et 2011 s’élève à près de 2 milliards de francs.

Pour le canton de Genève par exemple, les primes versées en trop pendant la période incriminée se montent à 262 millions de francs selon les derniers chiffres de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). Le montant de remboursement estimé pour un Genevois varie entre 240, dans le pire des cas, et 450 francs, dans le meilleur des cas.

Une solution critiquée. La requête de compensation des primes, pour rééquilibrer la situation entre les cantons, acceptée par le Conseil des Etats, n’a en fait pas encore abouti. En revanche, la solution à 800 millions de francs (la moitié de ce qui était prévu initialement), financés à parts égales par les assurés, les assureurs et la Confédération, pourrait s’imposer au National. C’est le message lancé par la commission préparatoire le 25 octobre.

L’agenda reste cependant ouvert. Le plénum du Conseil national ne traitera pas cet objet avant la session de mars 2014. En cas d’accord à ce moment-là entre les deux Chambres, le Conseil fédéral pourra fixer une date d’entrée en vigueur. Pour les plus optimistes, le remboursement pourrait être effectif en 2015, au mieux.

Dans ce contexte, de nombreux acteurs critiquent les différences tarifaires entre les caisses maladie. «On a volé 400 millions de francs aux assurés genevois et seulement le tiers de cette somme serait remboursé. Il a fallu dix-sept ans pour reconnaître qu’on avait pris trop d’argent à certains cantons», s’indigne Mauro Poggia, parlementaire genevois récemment élu au Conseil d’Etat.

Ainsi, la solution esquissée avec difficulté ne plaît toujours pas. D’autant plus qu’elle comporte encore de nombreuses interrogations. «Tant que le projet n’a pas passé devant les deux Chambres, il reste une incertitude sur le montant à reverser et les clés de son remboursement, explique Liliane Maury Pasquier, conseillère aux Etats. La version proposée est loin d’être idéale, mais nous sommes au moins arrivés à quelque chose, à défaut d’avoir obtenu réparation.»

Pour l’instant, la Commission de la santé ne s’est prononcée que sur la participation des assurés des cantons n’ayant pas assez payé de primes. Ces derniers devront payer le tiers du total, soit 266 millions.

L’OFSP, qui doit étudier les tarifs des assureurs, a reconnu s’être trompé en approuvant des prix trop élevés dans certains cantons. En bref, il n’a pas bien joué son rôle. «Quand l’autorité accepte un tarif et revient dessus des années plus tard, cela n’est pas crédible. Elle doit mieux assumer sa fonction de surveillance», relève Anne Durrer, porte-parole de Santésuisse.

Des arguments pour la caisse unique. Actuellement, l’OFSP n’a pas plus de moyens à disposition pour effectuer une analyse correcte de ce foisonnement de tarifs proposés par les caisses. «Il faut qu’on arrive enfin à ce que les primes payées par un canton correspondent à ses coûts, précise Liliane Maury Pasquier. En plus de corriger le passé, il faut faire en sorte que ce genre d’erreur ne se reproduise pas.»

Le projet de loi sur la surveillance de l’assurance maladie, actuellement bloqué par le lobby des caisses, pourrait renforcer le contrôle du système. Seulement, ce document est encore loin de son étape finale, la Commission de la santé prévoyant de le renvoyer au Conseil fédéral. Le mauvais fonctionnement du système de la LAMal renforce les partisans de la caisse unique. «La solution à ces inégalités passe par les urnes», conclut Mauro Poggia.

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Le chantage de Poutine à l’Ukraine

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:58

Alliance.En mêlant menaces et promesses d’aide, Vladimir Poutine a remporté les faveurs de l’Ukraine et évincé le rival européen. L’échec de l’accord d’association avec Bruxelles met en danger l’ensemble du «partenariat oriental».

Christoph Pauly, Jan Puhl, Matthias Schepp, Gregor Peter Schmitz, Christoph Schult

Après des mois de promesses et de menaces, Vladimir Poutine a fait une démarche décisive le 9 novembre: il a invité le président ukrainien Viktor Ianoukovitch à un entretien sur un aérodrome militaire près de Moscou. Une rencontre tellement secrète que les Russes ont commencé par démentir qu’elle ait eu lieu. Ce jour-là, Poutine scellait une alliance avec l’Ukraine et évinçait ses rivaux de Bruxelles. Il était pourtant prévu que ce vendredi, à Vilnius (Lituanie), Ianoukovitch signe un accord d’association de 900 pa­ges, une sorte de contrat de fiançailles avec l’Union européenne (UE). La cérémonie a été repoussée. Après l’accueil du lanceur d’alerte Edward Snowden et le contrôle des armes chimiques syriennes, c’est là une troisième victoire pour le président russe sur l’Occident.

Certes, le oui de Ianoukovitch n’inaugure qu’un mariage de raison, pas une union amoureuse. L’échange des anneaux a été précédé d’une bagarre de plusieurs mois entre Moscou et Bruxelles, à la manière de la guerre froide. Au bout du compte, Poutine aurait promis à son homologue de Kiev des milliards d’euros sous forme de subventions, d’abandon de créances et d’importations détaxées. L’UE, elle, proposait en guise de dot un crédit de 610 millions d’euros, encore augmenté au dernier moment, et la vague perspective d’un crédit de plusieurs milliards du FMI. Ianoukovitch a préféré les promesses de Poutine. Il faut dire qu’aucun des poids lourds de l’UE ne s’est précipité à Kiev pour tenter de convaincre un président ukrainien hésitant.

«Je pense que la pression inouïe exercée par Poutine a été décisive, déclare le médiateur polonais Aleksander Kwasniewski. Les Russes ont déployé tout leur arsenal.» Elmar Brok, président de la Commission des affaires étrangères du Parlement européen, confirme: «Viktor Ianoukovitch a gardé toutes les options ouvertes jusqu’au dernier moment pour en tirer un maximum.» L’UE, pour sa part, misait sur son rayonnement, sa prospérité, la liberté et la démocratie.

Le berceau de l’Empire russe. Il y a quatre ans, l’Union européenne avait proposé à l’Ukraine, mais aussi à l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldavie et la Biélorussie, un «partenariat oriental». Elle offrait une collaboration, le libre-échange et des aides financières en échange de réformes démocratiques. Les voyages sans visa deviendraient possibles, les droits de douane diminueraient et les normes européennes seraient introduites. Seule la qualité de membre de l’UE restait exclue. Mais pour la Russie, l’Ukraine ne joue pas seulement un rôle géopolitique, elle reste la région qui fut, il y a mille ans, le berceau de l’Empire russe. Depuis lors, le régime musclé qui règne sur la Biélorussie s’est disqualifié et l’Arménie a battu en retraite. Et voilà que l’Ukraine, au cœur du «partenariat oriental», fait défection. Pour l’UE, cette défaite affecte non seulement ses frontières orientales mais aussi les fondements de sa politique étrangère.

Officiellement, l’accord échoue à cause de Ioulia Timochenko, l’opposante en prison depuis deux ans. L’UE avait fait de sa libération une condition mais Viktor Ianoukovitch n’a rien voulu savoir. Les arguments rationnels de Bruxelles étaient censés s’imposer face au chantage de Moscou: l’union eurasiatique promue par la Russie limiterait fortement la souveraineté ukrainienne; Kiev ne pourrait conclure d’accords de libre-échange sans l’aval de Moscou; un accord avec la Russie aurait le caractère contraint d’un mariage, tandis qu’avec l’UE il s’agirait d’une amitié fidèle laissant à l’Ukraine la liberté de conclure d’autres accords.

En tout cas, l’UE a continué de croire qu’elle pourrait attirer l’Ukraine à l’Ouest, oubliant que deux mondes aux modes de pensée fondamentalement différents se font face. La moitié ou presque de la population n’est-elle pas en faveur d’un rapprochement avec l’UE? N’y a-t-il pas davantage de travailleurs ukrainiens à l’Ouest qu’en Russie? En outre, Bruxelles pensait pouvoir séduire Viktor Ianoukovitch avec l’assurance de taux de croissance durables de 6%.

Mais le président ukrainien est un joueur de poker. Son objectif premier est d’assurer son pouvoir dans l’optique des élections de 2015. Pour ce faire, il a besoin d’une amélioration urgente de la situation économique. Car l’Ukraine est en récession et bientôt en cessation de paiements, elle dépend du gaz russe et Moscou a déjà fermé le robinet par trois fois en plein hiver.

Des pressions concrètes. Ces derniers mois, Poutine a fait comprendre très clairement à Ianoukovitch pourquoi un contrat d’association avec l’UE serait fâcheux pour l’Ukraine. En août, les poids lourds ukrainiens ont été victimes du zèle douanier russe; l’oligarque ukrainien Viktor Pintchouk n’a plus pu importer des tuyaux, un ancien ministre s’est vu interdire ses exportations de chocolat, la menace de l’introduction de visas a été brandie. Les exportations ont ainsi dégringolé d’un quart depuis 2011. L’Ukraine vend un tiers de ses produits à la Russie et aux pays de l’ex-URSS, un quart à l’UE. C’est pourquoi, quelques jours après le rendez-vous secret de Moscou, des oligarques ukrainiens auraient supplié Ianoukovitch de surseoir pendant un an à une association avec l’UE.

Le Kremlin n’a pas caché que les chicanes pourraient perdurer et a promis à l’Ukraine «une catastrophe économique». Ianoukovitch a vite compris: sa seule chance de survie politique est dans le sillage de la Russie. D’autant que Poutine lui promet des crédits, du gaz à prix raboté et la remise des dettes contractées à hauteur de 1,3 milliard de dollars chez Gazprom. Vladimir Poutine a tout simplement perçu plus vite que Bruxelles les priorités du président ukrainien.

Un autre accord qui devait être signé pourrait connaître le même sort: celui qui concerne le gaz. Au dernier moment, «de petits détails techniques» devaient encore être réglés, alors que la négociation est en cours depuis plus d’un an. Pourtant, un tel accord avec l’UE aurait permis à l’Ukraine, en se raccordant au gazoduc traversant la Slovaquie, de se libérer du chantage de Moscou pour son approvisionnement. Mais les livraisons n’auraient commencé qu’en septembre prochain. Or, en attendant, l’hiver s’est installé et Poutine a revu ses prix à la baisse.

D’autres échéances devraient retarder toute reprise des négociations entre Bruxelles et Kiev: 2014 est l’année des élections européennes, puis il y aura des changements au sein de la Commission européenne, enfin ce sera le tour de l’élection présidentielle en Ukraine en 2015.

©DeR Spiegel
Traduction et adaptation Gian Pozzy

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Reuters
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Grâce et disgrâce: Pourquoi nous sommes tous devenus des «Neinsager»

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:59

Le triple verdict de ce dimanche de votations est plein de paradoxes. Pour une fois, nous sommes tous des Neinsager. Sauf quelques Neinsager traditionnels (Schwytz, Unterwald et Appenzell Rhodes-Intérieures) qui ont dit oui à une proposition très conservatrice (l’initiative de l’UDC). Les sensibilités que l’on présumait divergentes entre Alémaniques et Latins sur la fiscalité des familles ou sur la vignette n’ont pas clapoté au-dessus de la Sarine.

En termes régionaux, la surprise est venue du Tessin qui a dit oui à 1:12 à 49%. L’outre-Gothard n’est pas devenu un nid de gauchistes ou d’idéalistes; simplement, l’exaspération face au dumping salarial dû au taux le plus élevé du pays de main-d’œuvre frontalière est à son comble. Celle-ci promet d’être encore très présente lorsque l’on votera sur l’initiative «contre l’immigration de masse» le 9 février prochain.
Les Suisses ont dit non, non et non, mais le taux de participation de 53% est plus élevé que d’habitude: le ras-le-bol s’exprime plus ouvertement, la majorité abstentionniste recule de quelques points. C’est un signe de vitalité, alors que tant d’autres démocraties redoutent la confrontation dans les urnes avec leurs citoyens.

«Pourquoi doit-on voter sur autant de sujets complexes, les politiciens ne peuvent-ils pas faire leur boulot?» m’interpellait toutefois l’autre jour un lecteur. Son observation est légitime. Toujours plus d’initiatives marketing encombrent notre pipeline législatif. Les partis utilisent cet outil de démocratie directe pour mobiliser leurs militants, attirer l’attention ou, plus vulgairement dit, «tâter le terrain». Ces sondages échelle 1:1 génèrent un surcroît de travail du Parlement et la perplexité de la population.

Notre démocratie directe vit au-dessus de ses moyens. Faute de ressources financières pour mener toutes les campagnes, partis, autorités et lobbys choisissent leurs combats, certains sujets disparaissent alors dans une sorte d’angle mort. On se focalise sur une proposition apparemment cruciale et l’on ne voit plus ce qui se prépare juste à côté. Ainsi sont tombées dans un trou noir la votation cantonale sur la naturalisation à Berne et la votation communale sur la rade de Genève. Avec les conséquences regrettables que l’on découvre a posteriori.

L’overdose guette. D’autant que – faut-il le rappeler? – la presse écrite dispose de toujours moins de moyens pour exercer sa mission première, animer le débat démocratique, sans que le service public subventionné se sente le devoir d’en faire plus et mieux en la matière.
Malgré la précarité financière des divers acteurs du jeu citoyen, ce dimanche confirme qu’en démocratie aucun combat n’est perdu d’avance, à condition de s’engager dans le débat avec détermination. En témoigne la remontée spectaculaire du non à l’initiative de l’UDC sur les familles. Il y a eu une offensive de communication d’envergure atomique contre une proposition méconnue, dont l’impact avait été sous-estimé.

Il n’est toutefois pas certain que la mobilisation générale marche à tous les coups, et surtout le 9 février prochain pour faire barrage à l’initiative «contre l’immigration de masse». Les opinions sur la libre circulation et ses effets sont bien plus mûres.

Car, autre leçon du week-end, certains arguments simplistes, à force d’être ressassés, sont de véritables rouleaux compresseurs. On l’a constaté avec la hausse de la vignette, l’argument «automobilistes vaches à lait» est ravageur. Il saccage tout sur son passage, surtout les trop subtiles tentatives de compromis ou de paquets ficelés au Palais fédéral. Et y compris la plus populaire de nos ministres, Doris Leuthard.

Cette bérézina cruelle nous indique peut-être également qu’à force de nous féliciter d’avoir su utiliser des mécanismes de frein à l’endettement, nous ne savons plus embrayer avec les investissements.

Le frein à l’endettement fête ses 12 ans. Cette grande œuvre de Kaspar Villiger avait été plébiscitée le 2 décembre 2001 par 84,7% des Suisses. Elle nous vaut assurément de ne pas avoir sombré dans les affres du surendettement public comme tant de pays occidentaux. Le terrible défaut de ce corset contraignant est que nous ne savons plus investir. Le préjugé accréditant la thèse qu’il y a encore et toujours du gras à tailler dans quelques recoins de l’administration est tenace. Vouloir dépenser et prélever de nouvelles taxes est devenu le pire péché, alors qu’une société a besoin d’investir dans ses infrastructures pour continuer à se développer et accroître le bien-être de ses administrés. A notre ancestrale mentalité d’écureuils prévoyants s’est substituée une obsession d’anorexique.

Pour obtenir l’assentiment des citoyens, la classe politique est plus que jamais priée de sortir de sa bulle bernoise, de renoncer au jargon fédéral et aux montages technocratiques trop complexes, bref d’inventer une pédagogie plus efficace.

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Ivan Pictet: La donation vise en premier lieu à atteindre un résultat

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 05:59

Philanthropie.L’ancien banquier privé genevois explique les raisons d’un engagement qu’il voit comme une seconde carrière.

Quelles raisons, quelles valeurs sous-tendent votre engagement dans la philanthropie?
Je n’ai pas une idée précise des contours exacts de la philan-thropie. Les grandes fondations, Rockefeller, Gates, etc., viennent tout de suite à l’esprit, mais un oligarque russe qui rachète un club de foot anglais en est-il un? Entre ces deux extrêmes il y a mille autres formes. Est-ce que mes engagements à la présidence de la Chambre de commerce et d’industrie de Genève dans les années 90, ou plus récemment à la Fondation pour Genève ou à la Fondation Pictet pour le développement sont de nature philanthropique? Cela n’a en fait aucune importance.

M’engager bénévolement répond au besoin de faire quelque chose que je juge utile et surtout d’obtenir un résultat. Que les moyens mis à disposition viennent de moi ou de tiers ne change rien à ma motivation. Il s’agit de valoriser les atouts de Genève et, pourquoi pas, d’en tirer une satisfaction personnelle.

Le faites-vous par devoir ou par plaisir?
C’est certainement plus par plaisir que par devoir. Ce sont les projets eux-mêmes qui me motivent et m’enthousiasment. Les encouragements sont très importants. Seul le résultat a de l’importance. Je ne parle évidemment pas dans ce cas de profits financiers; nous sommes dans le cadre d’actions à but non lucratif.

Qu’est-ce qui incite une personne fortunée à donner?
Chacun a ses motifs. Le don n’est qu’un moyen de parvenir au but. Ce n’est pas un acte en soi. Dans le cadre institutionnel d’une entreprise ou d’une fondation de grande envergure, un système de distribution est mis en place, un comité impose une discipline, une allocation méthodique.

Je préfère donner des moyens à des projets dans lesquels je peux m’impliquer directement, et qui permettent à d’autres personnes de s’engager davantage en acquérant des connaissances. C’est ce qui m’a motivé à créer la Fondation Pictet pour le développement qui soutient financièrement, mais avec une implication forte du conseil de fondation, un centre de formation à l’Institut des hautes études internationales (HEID). Doté de plusieurs chaires, ce centre a pour mission de former de futurs cadres provenant en partie de pays en voie de développement.

Pour certains, les philan-thropes cherchent d’abord à racheter leur âme. Que pensez-vous de cette critique?
Il est certain que, derrière toute action philanthropique, il y a un souci de bien faire, un souci de rachat. De redonner. Derrière moi, il y a sans doute un petit calviniste repentant qui se cache! Mais je crois sincèrement que ce n’est qu’une infime partie de ma motivation. La philanthropie est souvent très différente selon la culture, la religion ou la provenance géographique. La fiscalité du pays de résidence joue aussi un grand rôle. Finalement, c’est aussi une affaire de sa relation personnelle avec l’argent, et bien entendu du montant dont on dispose.

La plupart des grandes fortunes dans le monde proviennent aujourd’hui de personnes qui les ont faites au cours des vingt ou trente dernières années. Les fondations en découlant ont souvent un rôle d’afficher une réussite, en plus de leurs activités purement philanthropiques. Pour les plus modestes ou celles qui existent depuis plus longtemps, il s’est créé une culture de la philanthropie avec un caractère de plus en plus professionnel.

Quelle est l’importance de la dimension fiscale?
De nombreuses fondations ont vu le jour dans le premier but de transmettre un patrimoine à la génération suivante. Par exemple, les pays scandinaves ont connu dans l’après-guerre des taux d’imposition quasi confiscatoires. Autre exemple: aux Etats-Unis, les philan-thropes évitent des droits de succession pouvant dépasser les 40%. Mais il est aussi vrai que les Anglo-Saxons sont plus versés dans la philanthropie que les Européens ou les Asiatiques. Dans les pays latins, qui sont lourdement taxés comme la France, on estime que c’est le rôle de l’Etat d’intervenir pour aider les moins favorisés.

Et en Suisse?
Au contraire, les impôts sont plus raisonnables et la philanthropie est très largement répandue. Mis à part les très grosses fondations de bienfaisance bien connues (Wilsdorf, Sandoz, Hoffmann, Bertarelli, Wyss, Schmidheiny, etc.), les Suisses sont très généreux. Chaque résident offre en moyenne plus de dix fois plus qu’aux Etats-Unis, quatre fois plus qu’en France ou en Allemagne. Il suffit d’observer le succès des collectes de fonds de la Chaîne du bonheur chaque fois qu’une catastrophe se produit.

Quel est l’avenir de la tradition philanthropique des banquiers privés genevois?
Je pense que les banquiers privés sont généreux, en premier lieu envers les institutions genevoises bien établies comme l’Eglise, les grandes institutions culturelles, les institutions pour les handicapés ou les plus démunis. Il en va du rôle de Genève de «petite capitale mondiale». Mais ces actions philanthropiques sont avant tout individuelles, et répondent aux centres d’intérêts propres à chacun. Lombard Odier, notamment, a depuis longtemps une approche très sophistiquée avec sa Fondation 1796, et a publié une étude intéressante sur la philanthropie.

Quel est votre engagement?
Très modeste malheureusement. Et aussi principalement orienté sur Genève et son rayonnement international. J’avais décidé, il y a longtemps déjà, de consacrer les revenus de mes dernières années professionnelles à des activités à but non lucratif. Cela m’a permis de me construire en quelque sorte une seconde carrière, tout aussi passionnante que la première.

Pourquoi cet accent mis sur Genève dans votre action?
Genève est non seulement ma terre natale mais aussi un lieu unique de compétences dans tous les domaines qui touchent à l’avenir de notre planète. Ce sont des atouts, une masse critique, qu’il faut à tout prix conserver. L’un de ces atouts est une place financière importante qui, grâce à de multiples organisations regroupées sous le nom de Sustainable Finance Geneva, peut se ressourcer et maintenir sa place parmi les dix plus importantes du monde.

En effet, Genève est la capitale mondiale pour la fixation de normes (ISO, etc.). Il est donc possible grâce à la présence d’agences de notation, d’organisations internationales et d’ONG liées au commerce, au développement, à l’environnement, de développer une industrie financière ultracompétitive. Il y a autour de la place une quantité de professionnels dans des domaines annexes tels que la philanthropie.


Ivan Pictet
L’ancien banquier privé préside la Fondation pour Genève et la Fondation Finance et Développement. Il siège au comité d’investissement du Fonds de pensions des Nations Unies ainsi qu’aux conseils d’administration de Lukoil, PSA International (Peugeot) et de la société de microfinance Symbiotics. Il a quitté Pictet & Cie en 2010. 


DONS
Toujours plus professionnels
Les principaux acteurs européens se sont réunis à Genève.

«Un philanthrope cherchant à exercer son action doit se donner les moyens de savoir qui il a en face de lui. C’est grâce à cela qu’il peut négocier une collaboration dans laquelle chacun peut apporter ses idées afin que l’argent soit bien utilisé.» Fort de ce principe, Etienne Eichenberger a fondé en 2004 la société Wise avec Maurice Machenbaum. Leur but: assister les philanthropes dans leurs choix et assurer un suivi des actions entreprises. La société a fait sa place dans le paysage européen.

La même année naissait l’European Venture Philanthropy Association (EVPA), regroupant les professionnels européens de la philanthropie. Plus de 150 fondations, associations à but non lucratif, études d’avocats, banques et autres organisations spécialisées provenant de 19 pays se réunissent aujourd’hui dans cette association. Celle-ci tient ses assises une fois l’an. Après Londres, Paris, Madrid et d’autres grandes villes, c’est à Genève que la conférence s’est tenue en début de semaine sous le patronage de plusieurs personnalités du canton, notamment d’Ivan Pictet.

La Suisse est l’un des pays européens les plus actifs en matière de professionnalisation de la philanthropie avec les Pays-Bas, l’Allemagne et, surtout, le Royaume-Uni.

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Thierry Parel
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Renseignement suisse: des espions au service de qui?

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Jeudi, 28 Novembre, 2013 - 06:00

Pouvoir.Alors qu’une nouvelle loi doit accorder plus d’autonomie aux services secrets helvétiques, ceux-ci paraissent totalement à la botte des Etats-Unis. Enquête sur des causes qui viennent de loin.

«Je ne suis pas sûr que notre service de renseignement soit capable de considérer les Etats-Unis comme des prédateurs.» Elevé dans le culte de la reconnaissance éternelle vis-à-vis de l’Amérique, pour avoir visité enfant les plages du débarquement avec ses parents, le conseiller aux Etats vaudois Luc Recordon refuse cependant de passer l’éponge sur les agissements de la NSA après les révélations fracassantes d’Edward Snowden, ex-collaborateur de l’agence américaine aujourd’hui exilé en Russie.

Le sénateur écologiste va d’ailleurs déposer un postulat priant le Conseil fédéral de réévaluer «les relations de la Suisse avec les Etats-Unis d’Amérique». L’auteur du postulat s’inquiète, en substance, d’une dérive de type totalitaire de l’administration américaine, s’agissant du respect des droits de l’homme ou du traitement de maître à vassal infligé, selon lui, aux pays prétendument amis, Suisse comprise, en matière économique.

Le ministre de la Défense (DDPS) Ueli Maurer sera peut-être amené à répondre aux préoccupations de l’élu vaudois. Fin octobre, le conseiller fédéral UDC a démenti toute collaboration entre la Suisse et la NSA, ce qu’un document officiel américain publié dans le quotidien espagnol El Mundo semblait pourtant démontrer. Un document dans lequel la Confédération apparaît comme Etat «coopérant». Mais coopérant en quoi?

«Sous-traitants» de la NSA sous contrat suisse. Les inquiétudes ne portent pas sur le travail en commun contre le terrorisme, un domaine de coopération perçu comme légitime par le grand public. Ce partenariat a priori vertueux est l’apanage, côté helvétique, du Service de renseignement de la Confédération (SRC).

Les soupçons et les craintes portent, en réalité, sur la capacité des services secrets suisses à faire face aux périls. A fortiori quand ces menaces sont le fait de pays «amis». Or, de gros nuages s’amoncellent: antennes de la NSA et de la CIA abritées par la mission américaine auprès de l’ONU à Genève; deux sociétés partenaires du renseignement américain, CSC (Computer Sciences Corporation) et Unisys, sous contrat avec des entreprises publiques ou privées suisses, comme l’ont révélé ces derniers jours le quotidien Tages-Anzeiger et l’hebdomadaire Schweiz am Sonntag.

Ces «sous-traitants» de la NSA interviennent notamment, pour l’un, dans le fonctionnement informatique des services secrets helvétiques. Et pour l’autre dans l’élaboration d’un système d’identification par empreintes digitales destiné au corps des gardes-frontière. Autant donner les clés du Palais fédéral à la Maison-Blanche, se dit-on. Les clients suisses de CSC et d’Unisys assurent que toutes les garanties contractuelles ont été prises pour éviter un grand siphonnage. On est prié de les croire sur parole.

Une chance et un handicap. Dans quel monde pensez-vous vivre? s’étonnent les spécialistes des services secrets, rejoints par les réalistes. «Il y a un tel écart entre les Etats-Unis, qui investissent des sommes astronomiques dans les renseignements, et la Suisse, qui ne leur consacre que quelques dizaines de millions de francs. Nous n’avons pas d’autre choix que de trouver une place dans cette configuration, dominée par les Américains», estime Alexandre Vautravers, chercheur associé au Centre de politique de sécurité de Genève et professeur à la Webster University.

Même circonspection, cette fois-ci agacée, chez le conseiller national genevois Hugues Hiltpold (PLR), membre de la Commission de politique de sécurité. L’élu ne partage pas l’indignation suscitée par la révélation de la présence d’«antennes» de la NSA et de la CIA dans le périmètre de la mission américaine à Genève: «C’est le principe même d’une ambassade qu’on est en train de remettre en cause. Une ambassade représente un Etat et cet Etat y est souverain. Cela dit, je trouverais grave que les services américains écoutent un conseiller fédéral.»

Toutes ces interrogations installent le doute au moment où le Conseil fédéral s’apprête à transmettre aux Chambres le message relatif à la nouvelle loi sur le renseignement. Les parlementaires devraient en prendre connaissance avant la fin de l’année. Le nouveau texte prévoit de renforcer les moyens d’enquête du Service de renseignement de la Confédération en lui permettant, notamment, avec l’aval des autorités judiciaires et politiques, de s’introduire dans les systèmes informatiques (lire l’encadré p. 20).
Les révélations de Snowden sont à la fois une chance et un handicap. Une chance, si l’on considère qu’un renforcement de ses «pouvoirs» devrait rendre le SRC plus indépendant vis-à-vis de ses «partenaires» étrangers. Mais un handicap, si l’on place ce débat dans l’histoire du renseignement helvétique, frappé d’infamie à la fin des années 80 quand éclatèrent l’affaire des fiches, puis le scandale de la P-26, qui révéla l’existence d’une organisation armée secrète.

Progrès ou dangers? Les sceptiques comme Luc Recordon se demandent si la nouvelle législation ne comporte pas plus de dangers que d’avancées pour l’intégrité du citoyen. Par ailleurs, ne risque-t-elle pas, paradoxalement, d’ouvrir toutes grandes les vannes de l’information en direction des Etats-Unis?

Le Service de renseignement de la Confédération ne répond en principe qu’à un chef: le Conseil fédéral. Sa mission est d’aider l’exécutif à la prise de décisions en l’éclairant sur l’état du monde et de la Suisse.

Le SRC est né en 2010 de la fusion du Service de renseignement stratégique (SRS, renseignement extérieur) et du Service d’analyse et de prévention (SAP, renseignement intérieur). Cette mise en commun des forces et des compétences obéissait et obéit toujours au souci de mieux répondre aux menaces.

Autrefois, les dangers externes étaient en quelque sorte circonscrits à certains pays, en gros l’ex-URSS et ses satellites. On savait ces Etats potentiellement agressifs mais au moins la situation géopolitique était-elle claire. Le renseignement intérieur, lui, remplissait des tâches de surveillance, de nature policière.

La chute de l’Union soviétique et la montée subséquente du terrorisme, principalement islamiste, ont donné le jour à une criminalité organisée transfrontalière, opérant en réseaux. Avec la fusion de 2010, les services secrets suisses ont pris une orientation plus policière, la priorité étant désormais accordée au recueil d’informations ou d’«indices». Les outils technologiques ont gagné une place prépondérante dans le dispositif de surveillance. Le numérique et l’écoute du réseau GSM ont remplacé les coupures de journaux et l’attention portée aux ondes radio.

A la tête de ces services fusionnés, on trouve Markus Seiler, totalement muet depuis les révélations d’Edward Snowden. C’est Ueli Maurer qui l’a nommé à ce poste. Diplômé de l’Université de Saint-Gall, membre du Parti libéral-radical, Seiler était précédemment secrétaire général du Département de la défense sous l’autorité de Samuel Schmid et, plus tôt encore, collaborateur personnel du conseiller fédéral Kaspar Villiger. Il n’est donc pas issu des services secrets. «Ce n’est pas un François Vidocq», un fin limier-né, dit de lui un spécialiste du renseignement avec une pointe d’ironie.

Le basculement. D’un point de vue plus psychologique, la fusion des services est le fruit d’une prise de conscience, pour ainsi dire générale, à droite comme à gauche, de ce qu’il fallait sortir les renseignements helvétiques du purgatoire dans lequel ils avaient été enfermés après l’affaire des fiches. Cette époque aujourd’hui ancienne a coïncidé avec la chute du mur de Berlin, laquelle a plongé les renseignements d’alors dans une forme de neurasthénie. «Les services secrets suisses ont beaucoup pâti de la chute du mur, explique un connaisseur de ce temps-là. L’URSS était un peu leur raison d’être. Moscou accaparait l’essentiel de leurs analyses. Les collaborateurs du renseignement stratégique ne savaient plus vraiment sur quoi travailler. Ils avaient le sentiment de ne plus servir à rien. Il y a eu des problèmes internes considérables.

» Certains membres du service sont venus sur leur lieu de travail avec leur arme, ont menacé leur chef ou l’ont retournée contre eux. Il y a eu des suicides.» Cette information n’a jamais filtré jusqu’ici. Notre interlocuteur nous assure de sa véracité. L’Hebdo aurait souhaité pouvoir interroger le directeur du SRC, Markus Seiler, sur ce point et d’autres. Notre demande d’interview a été rejetée.

«Avec les attentats du 11 septembre 2001, les renseignements suisses ont repris du poil de la bête», ajoute notre source. Un nouvel ennemi se présentait à eux: l’intégriste musulman.

D’autres ennemis qu’on n’attendait pas sont apparus: les collaborateurs indélicats. Il y eut à la fin des années 90 le cas du comptable Bellasi qui avait «piqué dans la caisse», l’affaire entraînant la mise à la retraite anticipée de Peter Regli, patron du renseignement stratégique à l’époque. Et plus proche de nous, en 2012, le vol de données secrètes par un informaticien des services secrets, qui espérait sûrement les vendre à d’autres services. La police l’a appréhendé à temps. Il est alors apparu que le point à la fois faible et sensible du SRC était, outre les forfaits d’éventuels collaborateurs indélicats, sa technologie informatique.

Et l’on en revient aux Etats-Unis. Auxquels, pour faire bonne mesure, il faut ajouter la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne, insiste le conseiller national Hugues Hiltpold, irrité par l’intérêt porté aux Etats-Unis qui tourne selon lui à l’obsession. La Suisse, en termes de quête et de gestion des renseignements, serait pieds et poings liés. Où que la Confédération se tourne, la technologie est soit américaine, soit chinoise. Parviendrait-elle à installer toutes les parades possibles qu’elle ne serait pas à l’abri d’une trahison ou d’un bug à la faveur duquel une «puissance» étrangère parviendrait à s’immiscer dans le système déficient, relève un informaticien.

Dans ce cas, pourquoi ne pas «consommer» suisse? Le groupe Kudelski, établi à Cheseaux-sur-Lausanne, dans le canton de Vaud, qui dispose depuis un an d’une division cybersécurité, est sur les rangs. «La question de la maîtrise de l’information est un élément stratégique», affirme André Kudelski, son président. Bien sûr, il y a les coûts: acheter «suisse et sur mesure» serait plus cher que d’acheter standard sur le marché global, pense-t-on. «Mais il n’y a pas que les coûts visibles, plaide l’industriel. Il faut savoir regarder le problème dans son ensemble. A l’instar d’un iceberg dont seuls 10% sont visibles mais où il est risqué d’ignorer les 90 autres pour cent.»

Sauf qu’une solution entièrement suisse n’élimine jamais tout risque: quid des échanges de technologies entre services secrets, partage de «clés» d’accès et de «chiffrement» des messages? Si un pays est «en rade», il faut bien qu’un pays «ami» le sorte du mauvais pas…

Cette dimension «ami-ennemi», en matière informatique, est au cœur du projet de «cyberarmée» qui trotte depuis longtemps dans la tête d’une poignée de militaires réformateurs et qui devrait se voir doter d’un budget spécifique dans les années à venir. Ce projet sera abordé au cours des discussions sur les nouvelles missions de l’armée.

On ignore quels seraient les liens entre la future «cyberdéfense» et les services secrets. Ceux-ci, par ailleurs, devraient-ils protéger les entreprises privées suisses contre les pirates et les virus informatiques? Ueli Maurer a répondu qu’une telle option n’entrait pas dans les attributions du SRC. Le conseiller national schaffhousois Thomas Hurter (UDC), nouveau président de la Commission de politique de sécurité, souhaiterait au contraire que cela soit possible, indique-t-il à L’Hebdo. L’expert en stratégie Alexandre Vautravers précise qu’une coopération public-privé existe déjà en la matière, par le bais de MELANI. Un programme qui prévoit que des sociétés privées puissent faire appel à des compétences fédérales pour protéger leurs données sensibles.

Critiques contre Markus Seiler et Ueli Maurer. La demande de surveillance et de protection est grande. Et n’épargne personne. Contrôler le fonctionnement et les orientations stratégiques du Service de renseignement de la Confédération, tel est le rôle de la Délégation des commissions de gestion du Parlement, dont le conseiller national vaudois Pierre-François Veillon (UDC) est le président. Dans un rapport contenant une dizaine de recommandations adressé en août au Conseil fédéral après la tentative de vol de données survenue en 2012 au SRC, il admoneste Markus Seiler, le directeur du service, pour sa gestion non judicieuse de cette crise. Il ne ménage pas non plus le ministre de tutelle, Ueli Maurer. Fin octobre, le gouvernement a fait savoir à la délégation qu’il avait pris connaissance du rapport et qu’il donnerait suite à tout ou partie des recommandations, sans en dire plus, publiquement en tout cas.

Mais avec la polémique autour des agissements de la NSA en Suisse, c’est la délégation elle-même qui risque de se retrouver sous le feu des critiques: faut-il qu’elle soit aveugle, ou complice d’un secret «illégitime», pour n’avoir pas su ou alerté à ce sujet? Dans une réponse écrite à L’Hebdo, Pierre-François Veillon affirme que la délégation tiendra une conférence de presse durant «la première quinzaine de décembre», lors de la session d’hiver du Parlement.

«Si l’activité du SRC doit rester secrète aux yeux du public, son fonctionnement doit être transparent pour les membres des commissions parlementaires de sécurité», estime un ex-cadre du renseignement.

«On pourrait auditionner le directeur du SRC Markus Seiler durant la session d’hiver», remarque le conseiller national Thomas Hurter. «Mais, ajoute-t-il de façon un peu surprenante, on a tellement de dossiers à traiter qu’on n’arrivera pas à dégager du temps. On va essayer de réserver deux heures en janvier.»

La nouvelle loi sur le renseignement devrait être discutée au Parlement à partir de mai 2014. Les événements les plus récents pourraient placer ce débat important sous une lumière nouvelle.

Lire aussi l’interview de John le Carré en page 36.


RENFORCEMENT
Renseignement: les points clés du projet de loi

Le projet de nouvelle loi sur le renseignement prévoit d’accorder plus de moyens d’enquête au Service de renseignement de la Confédération (SRC). La mise en œuvre de ces moyens devra avoir obtenu un double «feu vert», celui de l’autorité judiciaire et celui du pouvoir politique. Le SRC pourra:

Créer des postes d’attachés de renseignement dans les ambassades suisses.

Récolter des informations en s’introduisant dans des systèmes informatiques sous des noms d’emprunt.

Participer à des systèmes d’informations automatisés en commun avec d’autres Etats.

Avoir la possibilité d’intercepter les données circulant par fibre optique.


En chiffres

Budget du SRC 69 millions de francs, prélevés sur les 5 milliards alloués à la Défense nationale.
Collaborateurs Le nombre est tenu secret. Ils seraient quelques centaines.


Lexique

NSA National Security Agency (organisme gouvernemental américain récoltant des informations circulant sur les réseaux électroniques).
SRC Service de renseignement de la Confédération (les «services secrets» chargés d’informer le Conseil fédéral sur les dangers menaçant la Suisse et de déjouer les entreprises terroristes).
SRS Service de renseignement stratégique (ex-Service de renseignement extérieur de la Confédération).
SAP Service d’analyse et de prévention (ex-Service de renseignement intérieur de la Confédération).
DDPS Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports.

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Béatrice Devènes
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Hebdo.ch » revue de blogs de la semaine

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:40

Blogs» Politique»
Une Suisse en mouvement

Bons baisers de Pékin: lettre ouverte aux Conseillers nationaux

Le peuple helvétique doit débattre de l’accord de libre-échange conclu entre la Suisse et la Chine.
Johan Rochel

Le 9 décembre, vous avez la possibilité de soumettre l’accord au référendum facultatif. (…) La question à laquelle vous devez répondre est la suivante: l’accord obtenu par nos négociateurs avec la Chine est-il cohérent avec nos principes fondamentaux et nos engagements en matière de droits de l’homme?

Cette question possède deux dimensions cruciales pour ce débat. La première concerne une possible «ligne rouge» que la Suisse ne souhaiterait pas franchir. Si le Parlement suisse devait décider de ratifier un accord de libre-échange avec la Corée du Nord, je parie que la majorité des citoyens reconnaîtrait l’existence d’une ligne rouge vis-à-vis du régime de Pyongyang. Non pas que les contacts diplomatiques ou autres doivent être stoppés! Mais, à défaut d’un «service minimum», on renoncera à des relations économiques, politiques et sociales poussées.

La deuxième dimension a trait à l’exigence de cohérence entre nos accords de libre-échange. Tous reflètent plus ou moins nos principes fondamentaux et les engagements qui font l’identité de la Suisse. Il est légitime d’avoir des fluctuations dans nos standards selon que nous négocions avec la Chine, Hong Kong, la Bosnie-Herzégovine ou l’Algérie. Mais, pour de nombreux commentateurs, l’accord avec la Chine marque un abaissement de nos standards. (…) L’accord de libre-échange avec la Chine nous offre une occasion politique unique de discuter ces deux dimensions en profondeur. (…) Il ne s’agit pas d’imposer à ce pays un standard suisse ou européen, mais de s’interroger sur les valeurs et principes que nous estimons fondamentaux. La question symbolique, politique et identitaire que nous pose l’accord avec la Chine mérite un large débat populaire.


Blogs» Economie & Finance»
L’économie pour tout le monde

1 défaite, 12 victoires?

Douze propositions pour continuer après l’échec de l’initiative 1:12 devant le peuple.
Samuel Bendahan

Le peuple a dit non à 1:12. Les arguments contre l’initiative étaient notamment:

a) Les bas salaires ne changeraient pas.
b) Les hauts salaires ne changeraient pas, car on peut contourner la loi et, en plus, cela coûterait cher à l’Etat et aux assurances sociales.
c) Cela ferait du mal à l’économie.
d) Si le peuple accepte l’initiative, des entreprises menacent de partir.

Voici douze propositions qui répondent à ces arguments, et qui peuvent donner un peu d’espoir à celles et ceux qui, comme les initiants de 1:12, aspirent à une société plus juste.

1) L’instauration d’un salaire minimum est fondamentale, car elle touche aux personnes précarisées qui travaillent. (…)
2) Il existe beaucoup de potentiel dans l’économie sociale et solidaire, qui n’est pas encore exploité. (…) Aussi, il faut soutenir l’économie réelle, particulièrement lorsqu’elle aide à l’insertion.
3) La spéculation sur les biens alimentaires permet à certaines personnes de gagner beaucoup d’argent au détriment de personnes très défavorisées, ayant parfois des conséquences désastreuses comme des crises alimentaires. Les activités financières doivent être encadrées.
4) Instaurer des cotisations sociales sur les dividendes. (…)
5) Supprimer les forfaits fiscaux et autres privilèges injustes pour les riches. (…)
6) Taxer les transactions financières. (…)
7) Soutenir les entreprises avec un véritable ancrage local. (…)
8) Innover le financement des entreprises. (…)
9) Soutenir les familles. (…)
10) Transparence du financement des partis. (…)
11) Démocratiser les entreprises. (…)
12) Arrêter le dumping fiscal et la concurrence fiscale abusive. (…)


Blogs» Politique»
L’avocat du Diable

Berlusconi parti, la comédie continue…

L’exclusion du Cavaliere par le Sénat italien comporte des risques tragiques.
Charles Poncet

Voici d’abord qu’aucun des trois principaux leaders politiques italiens n’est au Parlement. Imaginez qu’en Suisse ni Toni Brunner (UDC), ni Christophe Darbellay (PDC), ni Christian Levrat (PS) ne soient députés! En démocratie, la politique est essentiellement parlementaire; or, ni Berlusconi (Forza Italia), ni Beppe Grillo (M5*), ni Matteo Renzi (Parti démocrate) ne sont députés. Deux d’entre eux s’y refusent, le troisième en est exclu, et le résultat est d’affaiblir encore plus une institution dont le nom même ne suscite plus que sarcasmes et haussements d’épaules chez les Italiens.

Voici ensuite que le gouvernement dit «de large entente» est condamné à l’impuissance. Contrairement à son équivalent allemand, basé sur une négociation rude au résultat assez clair, celui-ci n’existe que parce qu’une partie de ses membres a «trahi» Berlusconi au nom de la stabilité gouvernementale. Mais la stabilité pour faire quoi? Rien ou à peu près, car, par définition, ce qui convient à la gauche du gouvernement est inacceptable pour sa droite et réciproquement.

Le résultat est désastreux: une impuissance évidente, des velléités sans lendemain, un peu moins d’impôts ici, un peu plus de dépenses là et des finances qui continuent à foncer dans le rouge, sous le regard peu amène de Bruxelles, pendant que le peuple italien se désespère d’avoir du travail et des retraites décentes. (…)


Blogs» Politique»
La Suisse à 10 millions d’habitants

La glaciation jurassienne

Résultat fossilisé après le nouveau vote sur la création d’un canton du Jura.
Pierre Dessemontet

Deux générations ou presque peuvent bien avoir passé depuis le 23 juin 1974, le canton du Jura peut être entré en souveraineté depuis trente-cinq ans et démontrer qu’il était viable sans être franchement plus cher, pour ses habitants, que Berne ne l’est pour ceux du sud, il a bien pu obtenir la transjurane et donc désenclavé l’ensemble de la région, les passions et les haines d’antan ont bien pu progressivement s’assoupir et disparaître, vingt ans après la mort tragique de Christophe Bader, absolument rien n’a changé. On a abouti, à quelques points près, au même résultat qu’alors. En soi et vu de l’extérieur, un résultat extrêmement surprenant. (…) L’expérience des trente-cinq dernières années permet pourtant de «fact checker» les slogans d’antan. La fiscalité n’est pas plus lourde au nord qu’au sud – ce serait même plutôt le contraire. Le principal développement infrastructurel des dernières décennies, la transjurane, est une conséquence directe de l’entrée en souveraineté du Jura, même si elle profite au moins autant au sud qu’au nord. Le sud ne voulait pas lier son sort à un canton petit, périphérique et pauvre, et arguait de la position centrale de Berne dans la Confédération. Mais si Berne est grand, ce géant aux pieds d’argile est aussi le premier récipiendaire de la péréquation intercantonale: il est à peu près aussi pauvre, faible économiquement et à l’écart des métropoles que le Jura. (…)


Blogs» Société»
Law Dr@gon

Welcome and thank you

Notre nouveau blogueur exposera les problématiques du droit des technologies avancées.
Sébastien Fanti

En Suisse, il n’existe pas, à ma connaissance, de site internet qui constituerait un référent de confiance des droits de chacun en ces matières, contrairement à ce qui se passe notamment au Canada. C’est à vrai dire inattendu pour un pays qui aspire à demeurer un moteur d’innovation et à atteindre perpétuellement l’excellence. Les savoirs sont dispersés, éclatés, malaisés à atteindre pour le néophyte. Un si petit pays peut-il s’offrir le luxe d’éluder l’encyclopédisme? Je tiens déjà à remercier ceux qui s’interrogeront, réfléchiront, polémiqueront, et qui constitueront donc les vecteurs de débats que j’espère passionnés, respectueux et constructifs. (…)

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Genève: le Conseil se dessine

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:46

Sou'al Hemma

▼Les faits

Le 27 novembre dernier, le Conseil d’Etat genevois a défini son gouvernement, opté pour un département présidentiel et maintenu sa chancelière actuelle, Anja Wyden. En tant que futur président, le PLR François Longchamp s’est vu attribuer les relations extérieures de l’Etat. Le Vert Antonio Hodgers dirigera l’Urbanisme et l’Energie. Le Département de l’instruction publique, seul dicastère inchangé, restera en mains socialistes avec à sa tête Anne Emery-Torracinta. Le PLR Pierre Maudet gardera la Sécurité, affublée de l’Economie. Luc Barthassat, PDC, s’occupera de l’Environnement, tandis que son collègue Serge Dal Busco dirigera les Finances. Enfin, la Santé, agrémentée de l’Emploi et du Social, reviendra au MCG Mauro Poggia.

▼Les commentaires

Outre «quelques regroupements (…) incongrus, le redécoupage des départements paraît assez équilibré», note la Tribune de Genève. «L’importance d’un département présidentiel fort aux tâches transversales n’a, quant à lui, pas fait l’ombre d’un doute», rapporte Le Courrier. Selon le futur président du gouvernement genevois, interrogé par Le Temps, la préférence donnée au «modèle bâlois» se justifie pour deux raisons. «Il faut d’une part assurer une gouvernance solide dans des années qui s’annoncent difficiles du point de vue des finances publiques, de l’emploi ou de la cohésion sociale.» D’autre part, «une présidence à plein temps se justifie du fait que le prochain gouvernement genevois compte pas moins de cinq nouveaux, le seul autre sortant, Pierre Maudet, étant ministre depuis un an et demi».

▼A suivre

Le nouveau gouvernement prêtera serment à la cathédrale Saint-Pierre le 10 décembre prochain. La répartition doit toutefois encore être acceptée par le Parlement.

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Ukraine: pouvoir contesté

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:47

▼Les faits
Le 1er décembre, après une répression musclée des forces de l’ordre, quelque 100 000 manifestants se sont rassemblés à Kiev pour protester contre le refus du président Viktor Ianoukovitch de signer un accord d’association avec l’UE, en préparation depuis des mois. A la suite des énormes pressions exercées par Moscou, Kiev assure devoir développer ses relations économiques avec la Russie et la Communauté des Etats indépendants.

▼Les commentaires
«Moscou a déjà vu trois de ses anciennes possessions en Europe – la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie – rejoindre l’Union européenne. Elle voit le futur des six restants – l’Ukraine, la Biélorussie, la Moldavie, la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan – comme un jeu à somme nulle entre la Russie et l’Union européenne, et elle joue de façon agressive», estime le KievPost. Pour l’Union européenne, c’est la gifle. «Il n’y avait pas photo: 610 millions d’euros mis sur la table par Bruxelles; 10 milliards d’euros “proposés” et finalement imposés par la Russie. Quel épicier averti n’aurait pas vu l’intérêt à s’abandonner dans les bras de Moscou? Il est vrai que l’UE, toujours trop sûre de son pouvoir d’attraction et de séduction, a sans doute sous-estimé l’étranglement financier et économique que subit aujourd’hui Kiev», peut-on lire sur le site de la chaîne France 24. De leur côté, les médias russes raillent la naïveté européenne. «Seule une poignée de politiciens européens a compris que tout cela n’était qu’une partie de poker politique dans laquelle tous les joueurs bluffent», écrit The Moscow Times.

▼A suivre
Si la crise en Ukraine dégénérait, cela représenterait un défi bien plus urgent pour l’Europe et sa sécurité.

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Gleb Garanich / Reuters
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Quand recyclé rime avec beauté

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:50

Récup.Transformer les objets au lieu de les jeter, c’est bien. Les embellir pour qu’ils deviennent design et élégants, c’est encore mieux. Notre sélection.

 

Elle est bien révolue l’époque où artisanat recyclé ne rimait qu’avec sac ou portemonnaie fabriqué à partir de berlingots Tetra Pak. De nos jours, les artistes-créateurs voient toujours plus loin, toujours plus beau. Vintage oblige, l’ingrédient clé reste le même: un produit usé et ayant du vécu. Le principe, donner aux rebuts une seconde vie, n’a pas changé non plus. A l’inverse du but qui, lui, est de créer quelque chose d’esthétique et de contemporain.

«Au-delà du recyclage, j’aime surtout le fait de pouvoir proposer quelque chose d’unique», explique ainsi Julie Bouldoires, bijoutière installée à Bienne. Même son de cloche du côté de Felix Mosimann, créateur biennois d’objets lumineux, composés de verre usagé. «Je ne dis pas forcément que c’est du recyclé. Je parle d’éléments datant du siècle passé, ça sonne bien plus design.»

Du Burkina Faso à la Suisse. Tandis que ces derniers créent eux-mêmes, d’autres écument les quatre coins de la planète d’où ils ramènent des pièces tout aussi recyclées que colorées. Passionnée de textiles, Inge Sjollema a créé il y a trois ans une boutique de distribution appelée Label-Etoffes. Installée dans sa magnifique demeure, à Genève, son échoppe foisonne de pièces venues d’Inde, du Burkina Faso ou encore du Japon. «Ce qu’il y a de beau avec les produits recyclés, c’est que chaque objet a sa propre histoire», raconte-t-elle.

A l’instar d’Inge Sjollema, Romain de Diesbach importe des produits artisanaux, du continent africain principalement. Son but? Faire découvrir et persister des savoir-faire peu connus dans nos contrées. «Pour que vivent les artisans du Sud», tel est ainsi le credo du jeune homme de 32 ans, gérant indépendant du Comptoir des artisans d’ailleurs (CADA), fondé à Fribourg en 2007.

Le constat est clair, ils sont nombreux à se côtoyer dans le monde de l’artisanat recyclé. De Ouagadougou à Bienne, en passant par Genève et Fribourg, quatre d’entre eux ont toutefois retenu notre attention. Leur point commun? Offrir des produits qui, par la qualité de leur fabrication, leur mise en valeur et leur vécu, obtiennent le titre de perles rares, éthiques et esthétiques.

 

Bienne, vivier de talents. Des perles, on en trouve tout d’abord chez Julie Bouldoires à Bienne et ce depuis pas moins de huit ans. Petite fille, elle aimait jouer avec les bijoux de sa grand-mère. Devenue grande, la créatrice de 35 ans a fait de son jeu son métier. Elle flâne dans les brocantes, plonge dans les collections de ses grands-tantes, à la recherche d’anciens modèles des années 30 à 90 qu’elle adapte ensuite à ce qui se fait aujourd’hui. Selon les époques, la matière des articles choisis change, allant du plastique à la pierre, en passant par le verre.

«Je ne retiens que les pièces pour lesquelles j’ai un réel coup de cœur», précise-t-elle. Une quête de longue haleine qui lui permet de façonner des bijoux vintage et inégalables dans leur genre. Sous ses doigts, les anciens modèles deviennent alors boucles d’oreilles légères et délicates. Assemblés au moyen d’un fil d’argent ou de vermeil (argent 925 plaqué or), les chapelets, chaînes et broches forment quant à eux des colliers uniques et branchés.

Bien que différent, le travail de Felix Mosimann s’apparente quelque part aussi à la bijouterie, tant il est fin et distingué. Menuisier de métier, ce designer de 53 ans crée des corps lumineux depuis plus de vingt ans. Des coupes et des bols, en verre ou cristal du siècle passé, tels sont ses outils principaux. Il les lave et les perce. Un processus complexe qui nécessite bien souvent plus d’une journée de travail par pièce. Puis vient l’étape qu’il préfère: l’assemblage.

«Cette phase, c’est mon dessert, illustre-t-il. C’est le cadeau après le travail.» Une, deux, trois, l’artiste biennois utilise jusqu’à sept pièces par lampe, selon son humeur et ses envies. Résultat: des lustres élégants et uniques, qu’il dote ensuite d’ampoules halogènes ou de LED.

L’art des contrées lointaines. Des lumières, on en trouve également au Comptoir des artisans d’ailleurs. Moins raffinées peut-être, elles s’adressent avant tout à quiconque court après plus d’exotisme. «En ce moment, nous travaillons principalement avec des artisans du Burkina Faso», explique Romain de Diesbach. Les critères de sélection résident dans la qualité du produit, l’imagination de l’auteur ainsi que les matières utilisées. Lampe, table basse et étagère sont taillées dans des barriques de pétrole et du verre. Plateau et figurine proviennent pour leur part de métal recyclé, chaîne de vélo et pièces détachées de moto.

Une fois passés sous les mains des artisans partenaires du Comptoir, ces objets nous font oublier qu’ils étaient à la base simples déchets.
Fortes d’une habileté tout aussi exceptionnelle, les personnes représentées par Inge Sjollema relèvent également le défi de donner à d’anciens détritus les apparats d’accessoires de valeur.

Ainsi, lorsque l’on entre chez cette belle femme de 57 ans, on trouve sur notre gauche des sacs et pochettes noirs, soulignés d’un ou plusieurs traits de couleur. Mieux connues sous le nom de produits de Gafreh (Groupe d’action des femmes pour la relance économique du Houet, l’une des 45 provinces du Burkina Faso), ces pièces sont confectionnées à partir de sachets en plastique, récoltés dans les rues de Bobo-Dioulasso, deuxième ville du Burkina Faso.

Lavés et séchés, ils sont ensuite découpés en lamelles, avant d’être tissés avec du coton pour devenir ces sacs à main et trousses, sobres et fonctionnels, dont on ne soupçonnerait jamais l’origine.

Moins connus, mais tout aussi intéressants, viennent ensuite les «sacs en maïs» du Japon. Déposés sur la droite de leurs concurrents burkinabés, ces sacs, originaires de la province de Fukui, sont réalisés en fibres d’acide polylactique, obtenu à partir d’amidon de maïs. Résistants et imperméables, ils sont avant tout biodégradables: enterrés, ils se dégradent entièrement. Portés à l’épaule, ils peuvent contenir jusqu’à 15 kilos. Magiques, beaux et pratiques.

Last but not least arrivent alors les kanthas. De couleurs vives et variées, on ne peut les rater. Ce d’autant plus qu’ils trônent au milieu de la pièce. Très utilisé au Bengale (Etat de l’est de l’Inde), au Bangladesh et au Bihar (Etat du nord-est de l’Inde), kantha se dit d’un travail de broderie réalisé à partir de restes d’étoffes. Originaires du village de Kajoli, dans le sud-ouest du Bangladesh, ceux de LabelEtoffes sont réalisés à partir de saris recyclés. Ils se conjuguent en plaids, housses de coussins, écharpes et colliers, uniques et raffinés.

 

Julie Bouldoires, Boutique CAYOU, Bienne, www.cayoubijoux.com
Felix Mosimann, www.kando.ch
Comptoir des artisans d’ailleurs, exposition temporaire du 23 novembre au 22 décembre 2013, à la galerie d’art L’Aurore, à Sorens (FR). Exposition permanente à l’ancienne Tuilerie du Mouret (Praroman, FR), www.lecada.ch
LabelEtoffes, Genève, www.labeletoffes.ch

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A l’aise comme une voiture électrique en hiver

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:51

Mobilité.Le froid et les routes glissantes pourraient handicaper les véhicules propulsés par de gros accumulateurs lithium-ion. C’est tout le contraire. Enfin presque.

ll ne s’écoule pas encore beaucoup de voitures électriques, en particulier en Suisse. Mais l’une de leurs caractéristiques étonnantes est leur succès dans les contrées nordiques. La Nissan Leaf et la luxueuse berline Tesla S, toutes deux 100% électriques, dominent les ventes automobiles en Norvège, pays qui encourage ce type de mobilité. Le plébiscite suggère que le grand froid hivernal n’a que peu de prise sur les performances électrochimiques des batteries, a priori vulnérables aux températures négatives. Sans compter que le chauffage de l’habitacle ou le dégivrage sollicitent eux aussi les accumulateurs d’énergie.

Cet a priori est en partie fondé. «L’autonomie réelle de la Renault Zoé est comprise entre 100 et 150 km en conditions atmosphériques normales, note Laurent Burgat, porte-parole de Renault Suisse. Mais en hiver, ce rayon d’action est franchement plus proche des 100 km. Dans des conditions très dures, la batterie perd environ 50% de ses performances.» Le bloc d’accumulateurs au lithium-ion de la Zoé n’est toutefois pas chauffé. Au contraire de la plupart des autres modèles électriques qui sont ou arrivent sur le marché, comme la BMW i3, dont la batterie garde toujours une température idéale de fonctionnement.

Habitacle douillet. Reste que la Zoé, comme ses concurrentes, a une fonction de préconditionnement de la voiture. Autrement dit, le chauffage peut être programmé à l’avance, par exemple via un smartphone, lorsque le véhicule est branché à une borne de recharge, typiquement la nuit. L’énergie nécessaire au réchauffement est puisée à la borne, non sur la batterie elle-même. Le fait d’entrer le matin en hiver dans une voiture où il fait 20 degrés est l’une des multiples raisons de l’intérêt des pays nordiques pour les véhicules électriques.

Par conditions froides, le temps de recharge des blocs lithium-ion peut lui aussi être affecté. «Selon nos propres tests, cette durée augmente de 5 à 15%, relève Krispin Romang de l’Académie de la mobilité, plateforme consacrée aux propulsions du futur en Suisse. Mais tout dépend de l’âge de la batterie, de la sévérité du froid ou de la puissance de la borne de recharge.»

Force motrice. Plus méconnu est le bon comportement général des voitures électriques sur routes glissantes, surtout sur la neige. «Elles proposent une répartition des masses qui est idéale dans ces situations, argumente Oliver Peter, responsable de la communication de BMW Suisse. Grâce au positionnement de ses batteries, le centre de gravité de la BMW i3 est placé très bas, ce qui est un atout de stabilité. Chaque roue reçoit une charge équitable, notamment grâce au moteur électrique de 50 kg qui est placé sur l’axe arrière. Le grand diamètre des roues de 19 pouces et l’étroitesse des pneumatiques sont eux aussi avantageux sur la neige.»

Le couple linéaire, sans à-coups, d’un moteur électrique est également appréciable sur une surface piégeuse. Chez Tesla, on souligne que, par rapport à un véhicule traditionnel, la puissance d’un moteur électrique arrive plus rapidement sur les roues. Cette technologie fait en effet l’impasse sur la boîte de vitesse, l’axe de transmission, l’embrayage, etc. La force motrice est transmise très directement aux roues, lesquelles accélèrent ou ralentissent presque dans l’instant. Couplée aux habituelles assistances à la traction et à des pneus neige, cette caractéristique technique facilite la conduite hivernale. Et la rend plus sûre. Tesla vend d’ailleurs plus de la moitié de ses modèles S dans les régions septentrionales.

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Graham Greene, notre agent à Corseaux

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:52

Témoignage.Un auteur veveysan revient dans un livre sur les dernières années de l’écrivain-reporter-agent secret en Suisse. Avec maints documents inédits.

 

C’est une réponse dite «Glomar», du nom d’un bateau de la CIA, dont l’agence américaine n’a jamais confirmé ni infirmé l’existence. Interrogeant la CIA sur l’existence d’un dossier secret sur Graham Greene, l’auteur veveysan Pierre Smolik a reçu un «ni oui ni non» en guise de réponse.

Le document est publié dans le récent ouvrage Graham Green à l’ombre de la Suisse (Ed. Call Me Edouard) de Pierre Smolik. Cet intrigant livre bilingue détaille les dernières années de la vie du grand romancier britannique. L’auteur de Notre agent à La Havane venait régulièrement dans la région de Vevey voir sa fille et ses petits-enfants, avant de s’établir à Corseaux, quelques mois avant sa mort, en 1991, à l’âge de 86 ans.

Pierre Smolik trace les présences de la Suisse dans l’œuvre littéraire de Greene, en particulier Le Dr Fischer de Genève (et le film méconnu inspiré du roman). Il relate l’aide apportée par l’écrivain à son voisin Charlie Chaplin lors de la rédaction de l’autobiographie du cinéaste. Pierre Smolik rappelle également le rôle du thème du double dans l’œuvre de Greene, lui-même agent secret pour la Couronne, voire agent double prosoviétique, et homme de l’ombre jusqu’à son dernier souffle.

Le livre comporte une abondance de documents inédits, des photos de famille à des hommages de la reine Elisabeth ou de Vaclav Havel.

«Graham Green à l’ombre de la Suisse». De Pierre Smolik. Ed. Call Me Edouard.

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Vierge et enceinte: Marie n’est pas une exception!

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:53

Maternité.Les célébrations autour de la naissance de Jésus, fils de la Vierge Marie, approchent. Au fait, cette dernière compte beaucoup d’émules. Enquête un brin iconoclaste.

Marie la sainte, celle qui, «aussi vrai que vit le Seigneur Dieu, est pure devant sa face et ne connaît pas d’homme», sera de nouveau à l’honneur à la fin du mois. Evidemment, le premier rôle sera tenu par le petit Jésus. N’empêche: depuis plus de 2000 ans, Marie jouit d’un statut aussi édifiant qu’intrigant: elle est vierge et mère. D’innombrables textes ont été écrits sur elle, expliquant le caractère symbolique de ce qui paraît être une contradiction aux yeux des humains. Contradiction, vraiment? Pas sûr, justement. Car des vierges enceintes, il en existe beaucoup sur terre. Toutes visitées par le Saint-Esprit, alors? Eh bien… non, justement.

Les gynécologues sont bien placés pour le savoir. A l’instar du Français Sylvain Mimoun, également auteur de nombreux ouvrages sur la sexualité. «Tous les gynécologues, une fois dans leur vie, ont rencontré une vierge enceinte. Il suffit que la femme soit en période d’ovulation et plutôt jeune. Si la glaire arrive jusqu’à la vulve et que l’homme a éjaculé à cet endroit, pour les spermatozoïdes, c’est comme les Champs-Elysées: une voie royale.» Sa consœur lausannoise, Dorothea Wunder, médecin-chef au département de gynécologie, obstétrique et génétique médicale du CHUV, confirme: «Oui, j’ai rencontré des vierges qui étaient enceintes. Mais leur nombre est difficile à estimer. Je me suis occupée de grossesses non désirées survenues juste avec du petting (caresses préliminaires).» De là à penser que le Saint-Esprit y a mis un peu du sien…

L’hymen, c’est quoi? Mais au fait, docteur, comment les spermatozoïdes peuvent-ils traverser tout seuls la barrière de l’hymen? La gynécologue ne s’étonne pas d’une telle question. «Ce qui me surprend encore, c’est le manque de connaissances que les femmes ont de leur anatomie. Beaucoup pensent que l’hymen, cette fine membrane extensible située à l’entrée du vagin, est complètement fermé. Ce n’est pas le cas: son ouverture est plus ou moins grande suivant la personne. Si l’hymen est complètement fermé, c’est un cas pathologique car, par exemple, il ne laisserait même pas passer le sang des règles.»

L’hymen, le mot est lâché. Que d’enjeux autour de ce petit bout de peau. Lorenza Bettoli, sage-femme et conseillère en santé sexuelle au planning familial de Genève, explique: «Lors du premier rapport sexuel, l’hymen peut se déchirer et entraîner parfois de légers saignements pour 50% des femmes.» Elle aussi a déjà rencontré des vierges enceintes. «Certaines, qui souffrent de vaginisme – soit une impossibilité d’être pénétrée à cause de la contraction des muscles vaginaux – peuvent se retrouver enceintes à la suite d’une éjaculation sur la vulve.»

L’évangile et le toucher vaginal. Alors, Marie souffrait-elle également de vaginisme, elle qui n’a pas connu d’homme? Ou aurait-elle pratiqué le petting? Evidemment, comme l’explique le père Jean-Blaise Fellay, historien de l’Eglise et des religions, sa virginité est symbolique. «Elle signifie qu’aucun homme ne peut engendrer un Dieu. Elle dit également l’origine divine de Jésus-Christ. Dans les évangiles apocryphes, il est question de la virginité de Marie avant, pendant et après la naissance de Jésus. Il y aurait à discuter sur le terme de virginité, mais nous entrerions dans un débat physiologico-médical qui n’intéresse pas l’Eglise. C’est le secret du monde des femmes.»

Et gare à celle qui tenterait de jouer les indiscrètes, à l’instar de Salomé, citée dans l’Evangile apocryphe de Jacques. La malheureuse a voulu contrôler le fait après l’accouchement. «Lorsqu’elle s’est approchée pour faire un toucher vaginal, ses doigts se sont détachés immédiatement de sa main. Le message: on ne s’approche pas du secret divin avec un moyen humain.»

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L’accord avec l’Iran a aussi ses perdants

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Jeudi, 5 Décembre, 2013 - 05:54

Analyse.L’accord de Genève sur le nucléaire iranien change la face du monde et paraît offrir des possibilités nouvelles à l’Occident. Les perdants sont manifestement Israël et l’Arabie saoudite. Mais le Guide suprême iranien tiendra- t-il les engagements pris?

Ronen Bergman, Erich Follath, Julia Amalia Heyer, Christopher Schult

Vague d’enthousiasme d’un côté, cris d’indignation de l’autre: rarement un accord aura déclenché des réactions aussi contrastées que celui de Genève avec l’Iran, alors qu’il ne s’agit que d’un accord transitoire signé pour six mois. Le président Vladimir Poutine y voit une «percée». Barack Obama déclare que, pour la première fois depuis dix ans, il y a été possible de «stopper l’avancement du programme nucléaire iranien». Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, parle d’un «tournant».

Le négociateur en chef iranien, Mohammed Sharif, interlocuteur des cinq membres permanents du Conseil de sécurité plus l’Allemagne, a été accueilli par une foule enthousiaste à son retour à Téhéran. Pour le quotidien iranien Arman Daily, la paix mondiale a avancé d’un grand pas «sans que l’Iran ne dût abdiquer ses principes».

Réactions opposées en Arabie saoudite et en Israël. Abdullah al-Askar, membre influent du Conseil de la Choura, évoque lugubrement un «agenda fâcheux», tandis que le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou dénonce une erreur historique: «Le régime le plus dangereux du monde a fait un pas décisif vers la possession de l’arme la plus dangereuse du monde.» Et son ministre de l’Economie, Naftali Bennett, précise que les effets de cet accord intérimaire se vérifieront au plus tard dans cinq ans, «quand une valise-bombe atomique explosera à New York ou à Madrid». L’évocation des accords de Munich de 1938 fait partie de la harangue: l’Iran, c’est l’Allemagne de Hitler, et l’Occident lui parle de paix.

Mais l’accord de Genève est-il l’œuvre de Dieu ou du diable? Ses faiblesses profiteront-elles aux fauteurs de troubles de tout bord? Avec un peu de recul, on voit mieux quelles pourraient en être les conséquences pour la guerre et la paix au Moyen-Orient, et pour une redistribution des rôles entre sunnites et chiites.

D’Etat paria à partenaire. On peut parler d’un choc tectonique au Moyen-Orient comme on en a rarement vu. L’accord de Genève signe le retour sur la scène mondiale de l’Iran, naguère Etat paria, désormais potentiel partenaire des Etats-Unis et de l’Europe. Et du même coup la probable perte d’influence de deux puissances régionales, de maniement compliqué mais qui passaient pour indispensables, l’Arabie saoudite et Israël.

La dynastie des al-Saoud s’est toujours vue dans le rôle de protectrice des Lieux saints de l’islam, La Mecque et Médine. Elle en tire sa légitimité de chef de file de l’islam sunnite. Le chiisme, dans son optique, est une hérésie. Depuis la fondation de l’Etat saoudien, en 1932, ses dirigeants n’ont cessé de se méfier de leur grand voisin de l’est. Et ils se sont en revanche toujours merveilleusement arrangés avec cette superpuissance lointaine à laquelle ils livraient l’indispensable or noir en échange d’armements sophistiqués: l’Amérique.

Le prince Bandar Bin Sultan incarne ce mariage de raison: vingt-deux ans durant, il a été l’ambassadeur de Riyad aux Etats-Unis, à coup sûr le diplomate le plus influent de Washington avec son collègue israélien. Il a eu ses entrées auprès de tous les présidents depuis Ronald Reagan. Même les attentats du 11 septembre n’ont pas mis en péril les relations entre les deux pays, en dépit du fait que 15 des 19 terroristes impliqués étaient saoudiens. Les al-Saoud restaient un facteur de stabilité au Moyen-Orient, avec le blanc-seing de la Maison-Blanche.

Le Moyen-Orient n’est plus une priorité. Les choses ont commencé à changer quand le printemps arabe a redistribué les cartes. L’Arabie saoudite a été fâchée quand Washington a refusé d’empêcher la chute de Hosni Moubarak. Et le royaume veut la chute du régime alaouite de Bachar al-Assad, allié chiite de l’Iran, ainsi que l’éradication du Hezbollah au Liban. Riyad a sévèrement critiqué le fait qu’Obama renonce à des frappes militaires contre Damas.

Mais, pour une Amérique lasse de ses guerres lointaines, le Moyen-Orient n’est plus la priorité: l’extraction de carburants fossiles par fracking lui a permis de se libérer provisoirement de sa dépendance de l’or noir arabe.

Elle pourrait devenir autarcique dans dix ans, et la péninsule arabique perd, du coup, de son importance. Devenu patron des services secrets de son pays, le prince Bandar, 64 ans, annonce que l’Arabie saoudite va se distancier des Etats-Unis. Ces derniers temps, Washington et Riyad ne s’accordaient guère que sur un point: l’Iran, avec son supposé programme d’armement nucléaire et son agressif président Mahmoud Ahmadinejad, constituait le plus grand danger pour le Moyen-Orient. Puis, en juin dernier, le modéré Hassan Rohani, 65 ans, était élu à la présidence. Et nommait Mohammed Sharif, 53 ans, ex-étudiant à Denver, aux Affaires étrangères.

Il y a quelques semaines, après trente-quatre ans de brouille sévère, Washington a vu dans un rapprochement avec Téhéran diverses options d’ouverture au Moyen-Orient. Un accord favorable à toutes les parties: à l’Iran par la suspension de sanctions ruineuses; à l’Occident par le gel du programme nucléaire iranien. Un délai de six mois pour les deux parties, dans l’espoir d’atteindre un objectif beaucoup plus éloigné: un accord définitif de nature à atomiser le spectre nucléaire et permettre à Téhéran de reprendre un rôle de puissance régionale constructive.

Les Saoudiens sont les perdants de l’affaire. D’autant que des voix critiques pourraient s’élever en Occident contre leur régime. Jusqu’ici, ils ont été les fers de lance d’une doctrine wahhabite rigide; contrairement à ce qui se passe en Iran, tout autre lieu de culte est interdit en Arabie saoudite; et si la famille al-Saoud a combattu al-Qaida à l’intérieur de ses frontières, elle n’a jamais condamné la violence à l’extérieur et passe pour un centre décisif du financement du terrorisme. Dans la guerre civile syrienne, Riyad finance les anti-Assad, mais soutient surtout les islamistes qui veulent faire de la Syrie un califat. La peur de l’isolement conduirait le royaume à une démarche aventureuse: selon des rapports secrets, il tenterait de se procurer rapidement l’arme atomique avec l’aide du Pakistan, dont il avait généreusement financé le programme nucléaire dans les années 90.

Intérêts communs avec Israël. Et c’est ainsi que l’accord de Genève dévoile qu’une monarchie absolue comme l’Arabie saoudite et un Etat démocratique comme Israël ont des intérêts communs. Tellement communs qu’il existerait des plans pour que les bombardiers israéliens puissent non seulement survoler l’espace aérien saoudien pour attaquer les sites nucléaires iraniens, mais aussi compter sur l’appui logistique du royaume.

Accord ou non, l’Iran reste considéré comme une menace. Si l’on a pris note des propos modérés du président Rohani, on n’a pas moins enregistré les considérations du seul homme qui commande vraiment en Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, qui continue de dénier à Israël le droit d’exister.

Le scénario de cauchemar des contempteurs de l’accord de Genève se déroulerait comme suit: l’accord, qui libère 7 milliards de dollars jusqu’ici gelés, soulage la pression sur Téhéran, qui a été contraint de négocier en raison de la situation économique désespérée du pays.

Psychologiquement, il serait difficile d’appliquer un nouveau régime de sanctions sévères, même si les Iraniens n’étaient pas disposés à d’autres concessions ou ne respectaient pas leurs engagements: les groupes pétroliers américains et les constructeurs de voitures français trépignent déjà d’impatience à l’idée de conclure de juteux contrats. L’accord de Genève interdit à l’Occident de placer de nouvelles personnes ou organisations sur liste rouge pendant au moins six mois.

Les observateurs optimistes, eux, pensent que Khamenei rappellera à l’ordre les Gardiens de la Révolution au moins ces prochains mois. Il a d’ailleurs expressément salué l’accord de Genève, et aucun trublion ne s’oppose ces jours aux modérés du régime, incarnés par le président Rohani. Mais l’Iran est loin d’être un Etat monolithique: il comprend plusieurs centres de pouvoir qui convergent tous vers le Guide suprême.

© Der Spiegel
Traduction et adaption Gian Pozzy

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Maryam Rahmanian / REDUX / LAIF
D igitalglobe / Handout
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